La France a, une fois de plus, échappée aux grèves presque attendues du mois de septembre. D'ailleurs, cela fait quelques années que les syndicats se sont rendus compte que ce n'était pas une bonne idée de faire une rentrée en grève puisque la vox populi exprimait de façon de plus en plus tonitruante sa lassitude. Mais lorsqu'aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni, une grève est annoncée, on a de quoi être surpris.
A tort ou à raison, le cliché est qu'ils ne font pas la grève. Et de manière générale, ces deux pays font rarement la grève. C'est pourquoi lorsqu'il est annoncé qu'une corporation voire plusieurs risquent de lancer une grève, on est tout de suite plus en alerte.
Que se passe-t-il en ce moment aux Etats-Unis ? Les contrats de tous les acteurs de l'industrie de l'audiovisuelle (cinéma et télévision) arrivent à échéance dans les mois qui viennent. Le premier est celui des scénaristes, ensuite viendra celui des acteurs et des réalisaeurs et tous les autres. Les négociations ont lieu entre les studios et les syndicats. L'enjeu : les droits résiduels qui n'ont pas pris en compte les nouvelles technologies lors des dernières négociations. Scénaristes, acteurs, réalisateurs et les autres veulent leur part du gâteau quant aux ventes de DVD, à la distribution en ligne de produits et ce à juste titre. Aux Etats-Unis, on a pas des multitudes de syndicats, on a des Guildes, une par corporation qui négocie au noms de tous. Cette situation a un avanatage : elle permet que les Guildes aient la puissance de négocier et le pouvoir d'immobiliser Hollywood en lançant une grève qui sera obligatoirement suivie puisqu'il n'existe pas ou peu de non syndiqués.
Ainsi, le 30 octobre, la Writers Guild of America (WGA), risque de lancer la grève pour tous les scénaristes. Première conséquence : pas de scénaristes, pas d'épisodes écrits, pas de scripts de films écrits, pas de films tournés, pas de séries tournées. Les Studios avaient déjà pris les devants en avançant la reprise de la production de toutes les séries. Les équipes n'ont eu que peu de vacances et étaient de retour aux fourneaux dès début juin, ce qui est assez rare. Et il y a déjà eu des victimes de la grève future, le prochain film de Roman Polanski a été annulé complètement. C'est donc que la menace est prise réellement au sérieux. Surtout que le Canada vient de subir une telle grève avec leur guild des acteurs. l'ACTRA a d'ailleurs réussi un tour de force pour la négociation des droits résiduels, rendant envieux les corporations américaines.
Plusieurs solutions ont déjà été envisagées dont la production de programmes de télé-réalité ou l'acquisition de programmes étrangers. La deuxième solution est celle de la dernière chance mais si les chaînes de télévision américaine en arrivent là, on peut penser légitimement que le grand gagnant seront les productions britanniques.
Quelle conséquence pour le marché international ? Peu, probablement, sauf lorsque les pays diffusent presqu'en simultanée les séries américaines. On peut penser à Premiere en Allemagne qui suit la diffusion américaine pour plusieurs séries ou TF1 qui distribue sur son portail VoD la série
Heroes. Le MIPCOM de Cannes (à partir du 8 octobre 2007) pourrait peut-être en souffrir aussi si les américains ne sont pas là, ce qui semble peu probable.
Pour en savoir plus, comprendre comment dans le pays capitaliste par excellence, des syndicats arrivent à ébranler le système d'une manière si profonde, lisez l'article de
Jérôme Ferec sur PErDUSA, un véritable petit bijou d'explications.