Inadaptable. Qu’y-a-t-il de compliqué dans ce mot qui pousse les décideurs de l’audiovisuel à ne pas souvent en tenir compte. L’œuvre de Douglas Adams en fait partie. Des pages du maître on perçoit un humour qui fonctionne avant tout par le texte, par la façon géniale de l’auteur de dire les choses, de les expliquer.
A la décharge d’Howard Overman on peut lui reconnaître une qualité : son parti-pris est le bon. Plutôt que d’essayer d’adapter l’inadaptable (lisez les bouquins, vous comprendrez) et échouer lamentablement, Overman a prit l’univers, les personnages, le ton, et quelques portions d’histoires. Pas plus. Est-ce réussi pour autant ?
Le grand défaut de « Dirk Gently », c’est de n’être ni réussi ni raté. La série n’est en aucun point mémorable. Elle est amusante, facile à regarder, déclenche parfois un bon éclat de rire. Mais en aucun cas elle ne laisse une impression durable dans la mémoire. Et le souci, c’est qu’elle est gentiment anecdotique au pire des moments et dans la plus mauvaise des formes.
A l’heure actuelle, sur cette chaîne incroyable qu’est la BBC, deux inspecteurs-détectives marquent les esprits avec force. D’un côté, le sombre, le lugubre, « Luther ». Elle est un événement, sa popularité a franchi les frontières et se place aujourd’hui quasiment en valeur-étalon du polar noir à la télé. De l’autre côté, plus lumineux, virtuose, « Sherlock » la magnifique, qui tout comme « Luther » a franchi les frontières, et comme elle se pose en tête de gondole qualitative pour la télévision britannique.
Et sur le bas-côté, pas tout à fait sur le ring mais pas assez mauvaise pour qu’on détourne notre regard d’elle, « Dirk Gently » fait pâle figure.
Pas assez marquante.
La stratégie de la BBC, sur ce coup, est à revoir. En travaillant avec Howard Overman, il est évidemment impossible de lui demander de fournir 13 scripts à l’année pour « Gently », alors qu’il s’acharne déjà à en écrire de moins en moins bons pour « Misfits » [1] (Même deal qu’avec Moffat : Overman n’a écrit qu’un épisode de la saison mais supervise le tout). Du coup cette saison 1 de « Dirk Gently » fait 3 épisodes, quand son ton, sa structure et sa nonchalance réclame un volume plus grand, qu’on s’attarde moins à analyser chaque recoin de tous les épisodes.
Aujourd’hui, la série est annulée, et la question ne se reposera pas pour ce personnage, pourtant très agréable à suivre, et surtout pour ce casting sans faute, au sommet duquel le duo Stephen Mangan-Darren Boyd trône.
Leurs confrontations, leurs débats sont charmants au pire, drôlissimes au mieux. Il n’y a qu’à voir le destin que réserve Dirk à la chaise fraichement achetée de MacDuff pour comprendre.
Étrange de se dire qu’une série au final correcte méritait de posséder plus d’épisodes par saison, mais c’est le cas pour « Dirk Gently ». Son l’exemple prouve que la notion d’"événement" ne va décidément pas à tout le monde.
« Dirk Gently »
2010-2012 | 4 épisodes.
Une production ITV Studios pour BBC 4
Créé par Howard Overman.
Ecrit par Howard Overman, Matt Jones et Jamie Mathison.
Avec Stephen Mangan (Dirk Gently), Darren Boyd (Richard MacDuff), Helen Baxendale (Susan Harmison)
Dernière mise à jour
le 1er août 2012 à 06h38
[1] Je fais partie de ceux qui pense qu’écrire bien, ou écrire mal, demande à peu près le même temps de travail