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Doctor Who - Retour sur les premiers épisodes du nouveau Docteur (moins bon qu’avant)

Listen: Rendez-nous Matt Smith !

Par Ju, le 16 septembre 2014
Par Ju
Publié le
16 septembre 2014
Saison 8
Episode 4
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Rendez-nous Karen Gillan, pendant que vous y êtes ! Avec ses vrais cheveux ! Et rendez-nous Arthur Darvill ! Le cœur de la série, ça a toujours été Amy, Rory, et le onzième Docteur, rien d’autre ! ... Autant de demandes que je pourrais tout à fait lancer, assis devant la saison 8 de Doctor Who, si j’étais un bel hypocrite.

Car oui, quelque part, je suis très conscient d’avoir été bien peu tendre, depuis quatre saisons que je regarde la série, envers les gens qui se lamentaient de l’absence de David Tennant, Billie Piper, ou Catherine Tate au détour d’un commentaire.

Très gentiment, il a pu m’arriver d’en inviter quelques-uns à « passer à autre chose, bordel ». Pour moi le contrat implicite de Doctor Who était que, de temps en temps, un nouveau Docteur allait remplacer l’ancien. Le concept de la régénération n’étant pas nouveau, et tellement ancré dans la série, qu’il me semblait un peu stupide de se plaindre du départ de tel ou tel personnage.

Ça, c’était avant le départ de Matt Smith. C’était avant que je vive ma première régénération et que je me rende compte qu’il est vraiment bizarre de voir l’acteur principal d’une série disparaitre au profit d’un autre, moins bon, pas tout à fait comme il faut, pas à sa place, bref... pas comme mon Docteur.
Toute la préparation du monde n’y change rien, il a fallu que je regarde Listen pour enfin réaliser à quel le concept de la série est étrange. Cette révélation m’est apparue dans la scène où Clara et le Docteur arrivent aux portes d’un orphelinat en pleine nuit. La dernière fois qu’une scène quasiment identique s’était produite, c’était dans Day of the Moon, le premier épisode de la saison 6, avec... Amy, Rory et le Docteur. Et là, deux saisons plus tard, j’ai réalisé : je regardais une série qui n’avait plus rien à voir avec celle que je connaissais, et dont la distribution avait été totalement remplacée.

Et pire que ça, je suis sensé l’accepter. Je suis sensé passer à autre chose, bordel.

J’avoue que ma période d’adaptation au nouveau Docteur n’est pas encore terminée, et même si j’arrive à apprécier Peter Capaldi dans certains moments, j’ai encore du mal à me faire à sa présence. Ce n’est pas la même série, et Matt Smith me manque...

... mais il me manque moins, c’est certain, quand je me retrouve devant un épisode aussi réussi que Listen.

Steven Moffat : The Very Best Of

Pour la première fois cette semaine, j’ai réussi à apprécier le nouveau Docteur pour ce qu’il apportait, sans me demander en permanence ce que son prédécesseur aurait fait dans la même situation. J’ai commencé à saisir le nouveau style et le nouveau rythme que la série pourrait suivre (si elle était écrite aussi efficacement chaque semaine...).

Pour moi, Listen est une réussite totale, et un des tous meilleurs épisodes de Doctor Who depuis très longtemps. (J’ai beaucoup apprécié le cinquantième anniversaire, mais avant ça... même s’il y a eu une paire de très bons épisodes en saison 6... il faut que je remonte à la cinquième saison pour trouver un épisode qui m’ait autant plu.)

Merci, donc, Steven Moffat, d’avoir combattu tes pires instincts le temps d’un épisode pour nous offrir un très, très bon script, à la fois engageant, effrayant, et rempli de séquences mémorables. Il s’agit sans aucun doute d’une compilation d’idées qu’il a utilisées plus tôt, mais quand le résultat est aussi réussi il devient difficile de s’en plaindre.

En particulier, j’ai vraiment aimé la façon dont les quatre principales séquences de l’épisode sont très différentes, et toutes aussi réussies les unes que les autres dans des styles très distincts.
Le rendez-vous entre Clara et Danny, tout en maladresses, n’avait rien à voir avec ce qu’on peut attendre de Doctor Who (ça m’a fait penser à la mini-série anglaise Dates, diffusée l’an dernier, avec Oona Chaplin... qui ferait une excellente future comparse pour le Docteur...). La scène a l’orphelinat était terrifiante, dans l’habituel registre des peurs enfantines cher à Moffat, mais extrêmement bien maitrisée (le moment où Clara et Danny sont sous le lit et que « quelqu’un » s’allonge dessus est particulièrement malin). Les tapements sur la porte de la station spatiale à la Fin du Monde, eux, faisaient penser à l’épisode Midnight. Quant à Clara réconfortant un jeune Docteur dans sa grange, on retrouvait le motif de Moffat de la visite aux personnages encore enfants, pour un résultat que j’ai trouvé très émouvant.

Avec quatre personnages, peu de décors, et personne ne courant dans tous les sens en criant des vannes à toute vitesse, Listen était un épisode à la fois très simple et terriblement efficace.

Les vilains usurpateurs

Comme je l’ai dit plus haut, je trouve que Capaldi est bon dans le rôle, mais j’ai beaucoup de mal à m’y habituer. Heureusement, ça ne m’a pas empêché d’adorer son discours à un jeune Danny sur les bienfaits de la peur. Non seulement le monologue était très bien écrit (Doctor Who est, avant tout, une série qui devrait s’adresser aux enfants, les idées développées ici faisaient donc du bien), mais l’interprétation de Capaldi le rendait encore meilleur.

C’est d’ailleurs avec cette scène que je me suis rendu compte que l’épisode n’aurait jamais pu fonctionner avec Matt Smith dans le rôle. Pour l’avoir vu parler à beaucoup d’enfants au cours de ses trois saisons, il avait un côté bien plus doux qui aurait rendu la scène bien moins intéressante qu’avec le côté franc et sans concession de Capaldi.
J’espère vraiment que des scènes du même genre vont se multiplier pour m’aider à mieux cerner le nouveau personnage, et mieux apprécier son interprète, car ce n’était vraiment pas le cas dans les deux épisodes précédents : n’importe quel autre Docteur aurait pu entrer en rivalité de la même façon avec Robin des Bois (l’épisode aurait été tout autant soporifique), et n’importe quel autre Docteur aurait pu jouer le même rôle dans Into the Dalek (à l’exception de la réplique très drôle, car très méchante, dans la cuve digestive).

Non, pour moi, l’intérêt principal de cette huitième saison n’est pas tant le nouveau Docteur que la nouvelle Clara.

Je l’ai dit sur le forum, et je le répète, Jenna Coleman est absolument formidable depuis le début de la saison, et après l’introduction complètement ratée du personnage l’an dernier, c’était plutôt inespéré.
Ce qui est tout autant surprenant, c’est que sur les quatre épisodes diffusés Clara est presque devenue le personnage principal de la série à la place du Docteur. C’est elle l’héroïne, la protagoniste, la voix de la raison. Elle n’est pas simplement celle qui relie le Docteur à son humanité (même si c’est un rôle important qui définit bien sa place et son importance dans la série), elle est aussi celle qui dispose du meilleur développement, elle a sa propre mini-intrigue amoureuse, et pilote carrément le TARDIS dans cet épisode. La « Fille Impossible » a disparu, fort heureusement. A la place de cette dénomination réductrice, mystérieuse, et un poil misogyne, on a pu découvrir une Clara avec une toute nouvelle personnalité (on pourrait dire avec une personnalité tout court) et une relation au Docteur parfaitement bien définie.

Clara est-elle devenue trop parfaite ? C’est possible. Mais, en compagnie du onzième Docteur, elle souffrait inévitablement la comparaison avec Amy Pond (sans évoquer encore une fois les gros problèmes d’écriture de la saison 7). Alors, du coup, peu importe si Moffat a profité de l’introduction du nouveau Docteur pour en faire des tonnes et la rendre un peu trop parfaite, il fallait au moins ça pour redorer l’image du personnage. C’est un vrai succès, tant au niveau de l’écriture que du jeu de Jenna Coleman, en passant par sa tête trop large et sa garde-robe.

Alors, plutôt que de réclamer vainement les retours de Matt Smith, Karen Gillan et Arthur Darvill, je n’ai qu’un seul souhait pour la suite de la saison : « une Clara habillée pour un rencart à chaque épisode, s’il vous plait ! »

Ju