Le problème est qu’après avoir été épaté par la dextérité dont les producteurs de la série ont fait preuve sur tous les tableaux (jeu, écriture, réalisation), il ne restait pas grand-chose à Siberia.
C’était plaisant à suivre, surtout l’été, mais le tout sonnait un peu creux. A un moment, il faut bien que les scénaristes dévoilent leurs cartes et donne une idée plus précise de ce qu’ils proposent autre que « c’est comme Survivor, mais avec un petit goût de Blair Witch ».
Après trois ou quatre épisodes, on cesse d’être impressionné par leur connaissance des ficelles de Survivor et ce n’est ni un totem un peu zarb, ni une aurore boréale plus jolie que flippante qui vont donner un second souffle à la série. Il était évidemment que l’aspect Real-TV était un appât pour nous raconter l’histoire de personnes perdues et en danger en pleine Sibérie. Le problème est que la série souffre rapidement des codes du genre qu’il a choisit d’émuler.
Survivor brille par son montage et les stratégies de jeu de ses meilleurs candidats. En revanche, le procédé narratif est des plus simplistes. Même si nous n’atteignons pas le niveau de Koh Lanta qui n’hésite pas à montrer un candidat faire du feu, avec la voix off de Denis Brogniart qui explique que « un candidat fait du feu », Survivor n’a pas la subtilité narrative qu’un bon drama peut avoir ou même celle dont The Office a su faire preuve en utilisant une réalisation similaire.
Tout est dit à l’écran. Toutes les actions des candidats sont instantanément expliquées par des entrevues à la caméra, ses fameuses « talking heads ». Étant donné qu’on ne recherche pas la même satisfaction devant une émission de télé réalité que devant une série dramatique, ce n’est pas un problème pour Survivor. En revanche, c’est un sérieux handicap pour Siberia.
Prenons l’exemple de Johnny. L’homme fort et individualiste de Siberia se cache dans la forêt pour des raisons obscures lors d’un épisode. Et, alors qu’il nous est présenté comme un candidat discret, il explique lors d’une talking head qu’il est intéressé par Carolina. Pour quelqu’un d’assez renfermé, le type parait plutôt ouvert. On nous montre ensuite qu’il était en train de cueillir des fleurs pour lui préparer un bouquet. Cette scène est utile pour la suite de l’épisode lorsque l’on découvre la trahison de Carolina, cependant, on aurait pu nous montrer tout cela de manière plus subtile. Le cameraman aurait pu filmer Johnny à son insu, et on aurait voir l’homme fort et discret tout nier en bloc devant la caméra. Après tout, si les candidats mentent, les images ne mentent pas. Mais non, dans Siberia, on choisit ce qu’on montre au téléspectateur, et en on lui explique tout ce qu’on lui nous montre. Il n’y a pas de subtilité de narration.

Alors que la structure commençait à montrer ses limites et à lasser un peu, l’épisode de la semaine dernière a changé la donne et Siberia a amorcé un virage intéressant. Le jeu est mis de côté et on peut enfin de se concentrer sur le vrai mystère de la série. Et si jusque-là, les événements étranges ne m’avaient pas accroché, la découverte de Sabina d’un squelette avec le même médaillon qu’elle porte autour du cou était la première bonne surprise un peu flippante de la série. Le Marty McFly en moi résiste difficilement aux imbroglios spatio-temporels.
En revanche, ce cinquième épisode de la saison nous a fait des promesses qu’il faut tenir maintenant. Le sixième épisode est donc le moment « nage ou coule » de la saison. La transition entre fausse émission de télé-réalité et vrai drama surnaturel est délicate. Et « Out of the Frying Pan » la gère plutôt bien.
Le jeu est enfin mis de côté et on peut se concentrer sur le mystère central de la série.
Mais en premier lieu, les scénaristes prennent bien soin d’adresser le fait que les cameramen continuent de filmer : les candidats leur demandent afin d’avoir une preuve de ce qui s’est déroulé en Sibérie. C’est une raison un peu simpliste mais logique qui justifie de garder le style documentaire de la série. J’ai aussi apprécié une autre petite touche : on voit Johnny refuser de faire son interview. C’est léger mais je suis content de voir une réaction logique d’un candidat qui rejette le jeu au vu des événements dramatiques qui ont lieu. En gros, une fois que l’on s’éloigne du jeu, les choses sérieuses commencent enfin.
L’autre progression vient de Sabina, elle cesse un peu d’être uniquement ce personnage mystérieux. Elle s’affirme un peu plus et elle devient bien intéressante quand on cesse de la montrer uniquement là où on ne l’attend pas et qu’on lui donne un peu plus de texte. Les candidats prennent les choses en main cette semaine et cessent d’être des joueurs passifs qui subissent l’intrigue, il dirigent dorénavant l’action et la trame narrative de la série. La division du groupe cette semaine est une excellente idée. D’un côté, quatre candidats partent vers la tour que Daniel a remarqué, de l’autre, le reste garde le camp.
La sensation de danger est pour le coup, pour la première fois, vraiment présente. A juste titre, Sabina explique, qu’en plus des producteurs, il faut se méfier de la population locale. En plus de cela, Miljan représente aussi un danger au sein du groupe. Encore une fois, on ne nous montre pas tout, tout comme nous n’avons pas vu le départ de Natalie, on ne sait pas que ce Miljian a fait à Irene. Siberia bénéficie grandement de cette atmosphère de plus en plus oppressante.
Je reste encore sur mes gardes et j’ai toujours quelques réserves mais il faut avouer que Siberia devient une série plutôt agréable à suivre. Il faut maintenant garder le cap et ne pas décevoir par le dénouement. Le chemin est encore long, mais l’épisode de cette semaine était une bonne surprise.