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21 Drum Street - Southland, une des meilleures séries dont nous n’avons pas assez parlé

N°35: The Best Show You’re Not Watching

Par Conundrum, le 5 octobre 2013
Publié le
5 octobre 2013
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Il y a quelques années, le magasine TV Guide honorait chaque saison « The best show you’re not watching », « La meilleure série que vous ne regardez pas », en mettant en avant une série de qualité à la faible audience.

A l’époque, les éditions VHS de séries n’étaient principalement que des "best of", et mises à part des séries de science-fiction ou de courtes séries, les intégrales étaient loin d’être aussi aisément disponibles qu’aujourd’hui. En gros, le seul moyen de découvrir une série était de la regarder lors de sa diffusion originale.

Des récompenses prestigieuses ou ce genre de couverture pouvaient prolonger la vie d’une série en difficulté. Cependant, avec la multiplication des plateformes de diffusion, des blogs et webzines sur les séries télés, la tradition n’a plus lieu d’être. En effet, Mad Men a une plus grosse couverture médiatique que The Big Bang Theory alors qu’elle ne fait qu’un dixième de son audience. Il y a un grand nombre d’excellentes séries que le public américain ne regarde pas en masse qui ne sont plus en risque d’être annulées.

De plus, dès qu’une nouvelle série commence, en règle générale, elle arrive à faire parler d’elle. La non-nomination aux Emmy Awards de l’interprète d’une obscure nouvelle série canadienne diffusée après Doctor Who arrive à créer une petite polémique. Peu importe la chaine sur laquelle elle est diffusée, la recherche de la nouveauté fait que l’on parle aisément de n’importe quelle nouvelle série. La nouveauté prime sur la qualité constante. Découvrir une série sur le tard devient rare. Parler d’une série avec laquelle nous sommes tombés en désamour il y a quelques années est encore plus difficile.

Et puis, il y a quelque rares séries que l’on regarde et dont on parle peu. On les suit avec plaisir, mais nous ne trouvons pas nécessairement d’angle d’attaque pour en parler. Cela ne veut pas dire qu’elles ne nous touchent pas. La preuve en est que nous arrivons toujours à les noter dans nos tableaux bilans, mais encore faut-il être à jour dans la diffusion de la série. Ce genre de séries demande au téléspectateur d’être dans un certain état d’esprit. A l’issue du visionnage, on en ressort toujours impressionné ou ému. Mais encore faut il se donner la force d’appuyer sur lecture au lieu de se refaire un bon épisode de 30 Rock. Et lorsque ce genre de série est annulée, il n’y a pas d’outrage, juste une tristesse mêlée à une satisfaction coupable de se dire que nous n’aurons pas à faire l’effort de regarder la série.

Southland a été annulée cette année.
Mis à part le minimum syndical d’épisodes pour pouvoir noter la série, je n’ai pas suivi la diffusion en directe de la série. J’ai gardé le reste de la saison pour l’été quand elle n’a pas à lutter pour mon affection contre les Amis de la Grappe, Olivia Pope, Walter Bishop, les Ewing, Liz Lemon ou les extra-terrestres de The Neighbors. Et puis, je savais pertinemment que, vu le peu de couverture médiatique de la série, le risque de spoilers était faible.

Le problème est que Southland n’est pas une série à découvrir en intégrale. Lorsque la mention « Executive Producers » apparait à l’écran à l’issue de l’épisode, je n’ai pas envie de lancer le suivant tout de suite. Lorsque l’on est pris dedans, c’est une série émotionnellement drainante. Investi dans l’épisode, il me faut du temps pour me remettre et savourer ce que j’ai vu. Southland n’est pas une série pop-corn comme The Walking Dead. Southland est tellement riche que l’émotion prime sur l’envie de découvrir la suite.

Pour ceux qui ne connaissent pas la série, chaque scène d’ouverture s’achève toujours par une voix-off très efficace et donne le ton de l’épisode. Il enchaine alors des scènes de plus ou moins courtes du quotidien de policiers et de détectives à Los Angeles. Elles peuvent drôles, touchantes, violentes ou tragiques, un peu comme chaque patient du Cook County de la série bien plus connue de John Wells. La série est tournée à Los Angeles, caméra au poing et il n’y a pas de langage édulcoré. Soutland est série à la réalisation brute.

Cette cinquième saison était donc la dernière. Lors de son dernier épisode diffusé, il n’y a pas de rappel émouvant au pilote comme dans Urgences, il n’y a pas eu de raisons d’honorer ses héros comme Sipowitz dans le dernier NYPD Blue. Il n’y a pas de place à la nostalgie. Southland s’est achevée dans une noirceur rare qui sied parfaitement à la série. Ce n’était peut-être pas la fin de série que les scénaristes auraient aimée avoir, mais c’est le genre de fin de saison qui fonctionne bien en fin de série. Tom Everett Scott est revenu pour nous rappeler l’époque de la surpopulation de la première saison quand Southland était préparée pour prendre le relai d’Urgences comme la nouvelle belle série de NBC. Mais ce n’était pas son destin.

La chaîne a très vite perdu confiance en la série, et après l’avoir renouvelée a l’issue d’une très courte première saison, elle a stoppé la production avant même la diffusion du premier épisode de la seconde. Exilée sur le câble pour ses épisodes tournés pour mais non diffusés par NBC, TNT a repris le relai. Avec un budget moindre, sa distribution et son nombre d’épisodes ont été revus à la baisse, la chaîne commande une troisième saison, puis une quatrième et une cinquième. La série est alors devenue bien plus efficace. Je ne pense pas que j’aurais autant aimé la série avec une vingtaine d’épisodes par saison. Les 6 à 10 épisodes par saisons étaient bien plus pertinents. Southland s’est alors moins épanchée sur la vie personnelle de ses héros. Les cas de la semaine étaient assez forts pour porter la série, la vie en dehors de l’uniforme les flics de L.A. était un sous-texte qui mettait en relief leur quotidien.

La voix du dernier épisode était la suivante :

Most cops manage to stay sane despite the chaos all around them, but in their hearts they know everyone has a breaking point.

Vouloir aider son prochain est une noble mission mais découvrir où est la limite de ces hommes et femmes confrontés quotidiennement au pire de ce que l’on peut être un excellent résumé de ce que la série était. Certains ont abandonné leurs missions, d’autres sont morts, et même la retraite peut ne pas être de tout repos comme cette saison l’a montré avec un impressionnant Gerald McRaney. Ce dernier épisode répond à cette question pour les rescapés de la série. Lydia semble avoir trouvé une solution au chaos de sa vie personnelle. Ben et Sammy montrent leurs divergences d’opinion quant aux limites à ne pas dépasser pour protéger son partenaire. Quant au destin de John Cooper, le véritable héros de cette dernière saison, il est lié à l’épilogue de la série. La dernière scène de la série restera une des plus marquantes de mon année télévisuelle.

Elle est aussi la raison principale pour laquelle je suis content d’avoir gardé la série pour une période plus calme. Il y a quelques mois, c’était la fin de saison. Dans quelques jours, la nouvelle commence avec son lot de nouvelles têtes et de visages familiers. J’ai pu accorder l’attention à la série qu’elle méritait. Ce dernier visuel, ces derniers moments, sont parmi les plus forts de la série et j’y repense fréquemment depuis que je l’ai vu.

Southland a eu cinq saisons, et même avec de courtes saisons, cela fait beaucoup d’histoires à raconter. Je vois difficilement comment la série aurait pu mieux finir. Je ne sais pas si c’était la meilleure série que vous n’avez probablement pas vue, mais c’était à coup sur l’une des meilleures séries dont nous avons trop peu parlé. Et si ce n’est pas fait et que vous avez êtes à la recherche d’une bonne série à regarder, ne faites pas comme nous et la plupart des critiques, ne négligez surtout pas Southland.

Conundrum