Il y avait la blonde et la brune en justaucorps rouge, les voix électroniques, les têtes de lézard, le gobage de souris, le boulet aux super-pouvoirs, une naissance horrifiante m’ayant dégoûtée de tomber enceinte, Freddy Krueger, les résistants planqués dans des sous-sols, et le couple à leur tête pas très banal où les yeux persants de Marc Singer apportaient le côté sexy et la petite blonde était le cerveau.
Je ne pourrais pas raconter tous les tenants et aboutissants de l’intrigue, devenus trop vagues dans ma tête avec le temps, mais je me souviens que c’était un rendez-vous télévisuel immanquable qui a marqué mon enfance. Un vrai classique.
Donc ce que j’attendais de ce remake, c’était à la fois une grosse fidélité qui joue avec ma nostalgie et une véritable remise à neuf qui me propose autre chose que le copié/collé. Le résultat n’est pas tombé trop loin puisque je n’ai pas été déçue un seul instant.
CH-CH-CH-CHANGES
Rien n’a changé dans le principe de base. Des vaisseaux débarquent un jour sur tous les coins de la planète, avec à leur bords des aliens au visage humain qui abordent un message de paix. Contre nos ressources naturelles, dont ils ont besoin pour survivre, ils sont prêts à partager leurs connaissances avant de repartir tranquillement sur leur planète. Evidemment ce serait bien plus simple pour eux d’installer leurs fesses ici en permanence, donc la résistance humaine va devoir s’organiser contre les envahisseurs.
On a également le même type de protagonistes, avec des changements mineurs. Les femmes gardent le pouvoir, que ce soit les représentantes des visiteurs Anna et Lisa, ou la meneuse des résistants Erica. Il y aussi l’adolescent boulet voulant coucher avec une alien, le black de service faisant aussi office de nouveau Willie, la petite-amie inutile de celui-ci, et le journaliste en première ligne. Là où cela diffère est que ce dernier n’est pas l’héritier de Donovan, puisqu’il laisse la place à un prêtre dans le rôle du couple phare formé avec Erica. Cela donne ainsi le sentiment qu’ils ne prennent pas ce rôle par hasard, que la résistance ne sera pas menée par des campagnards tombés là par hasard. Le médecin et le caméraman étaient des choix pas trop mal, mais une agent du FBI fait office de loi et d‘autorité et a accès à plus d’informations que le commun des mortels. Un prêtre possède une grande influence dans ce genre de circonstance où les gens se tournent vers ceux qu’ils pensent posséder toutes les réponses. Le journaliste conduisant des interviews a plus de pouvoir sur son audience grâce à ses mots que le type qui ne fait que filmer. Et le visiteur allié… apparemment c’est un lézard-ninja, donc déjà plus utile que ce neuneu de Willie.
Seul Tyler est aussi chiant que l’était Robin, mais il faut bien qu’on nous rabâche encore que les adolescents hormonaux sont le point faible de l’humanité.
Ce qui est très bien, c’est que les visiteurs soient toujours des reptiles cachés sous une enveloppe humaine, dorénavant bien plus épaisse. Morena Baccarin donne parfaitement l’impression de porter un masque tant elle est figée, au détail près d’un regard clignotant parfois frénétiquement. Son attitude zen, dont elle a l’habitude, est idéale pour un personnage voulant projeter une image faussement bienveillante, ce qui n’était jamais le cas de la toujours menaçante Diana. Quand Anna se montrera plus cruelle, cela aura plus d’impact.
En tout cas sa première apparition est parfaite, le vaisseau donnant à son visage un aspect rappelant une ruche, tandis que sa voix déformée nous fait penser que les voix électroniques sont aussi de retour. Or, on se rend vite compte que cet élément de l’ancienne série est abandonné, ce qui permet d’avoir des visiteurs pouvant se fondre sans aucun problème parmi la population humaine. Non seulement cela va permettre plus de choses aux niveaux des intrigues, mais le sentiment de paranoïa sera renforcé.
Enfin le rouge communiste a été abandonné au profit de couleurs neutres, qui donnent une image bien plus pacifiste qu’agressive. Ils savent porter autre chose que des uniformes identiques Même chose pour le grand hangar froid servant de vaisseau qui a fait place à une magnifique oasis. L’image projetée est complètement différente et bienvenue.
De façon générale je suis assez satisfaite des éléments gardés et ceux changés. Les têtes de lézards étaient une image essentielle de l’ancienne série et ne pas l’avoir intégrée à ce remake aurait été le meilleur moyen de se mettre tout le public nostalgique à dos. Bien sûr, cela n’a jamais été très subtil d’avoir des visiteurs beaux à l’extérieur mais laids à l’intérieur, ce qui horrifie toujours les humains devant cette découverte. Au moins le gobage de souris, qui nous signifiait que c’était des vrais méchants mangeant de pauvres petites bêtes encore en vie, est absent de ce Pilote.
Au-delà du facteur nostalgie, le fait qu’ils soient des humanoïdes comme nous mais se rapprochent des reptiles peut faire penser que nous avons un passé commun, mais que l’évolution a pris un chemin différent pour eux. Ils seraient une version alternative de nous, et cette idée me plaît. En tout cas bien plus que "il fallait qu’ils aient une tête moche pour notre super métaphore".
WE ARE OF PEACE. ALWAYS
Ce qui est étonnant, c’est que ce Pilote ne fait même pas une heure alors qu’il reprend tous les points principaux qui avaient constitué une mini-série. C’est dense, rapide, capte bien l’attention et pose tous les enjeux de base, mais un téléfilm d’1h30-2h aurait peut-être été préférable. Il y a beaucoup de personnages et on ne prend pas le temps de les connaître avant le débarquement, ni même lorsque la planète apprend à vivre avec ce changement important durant les premières semaines. Ils arrivent, ellipse, on organise la résistance. C’est un peu court pour s’attacher à chacun au-delà de leur fonction et créer un certain climat. Malgré cela, le fait d’avoir des visages familiers du petit écran aide énormément à les apprécier. Le problème majeur reste qu’Alan Tudyk était une guest-star bien trop notable pour ne pas se douter que son personnage va forcément servir à autre chose que se faire bêtement tuer dans trois épisodes. Il y aussi cette réaction incompréhensible qui consiste à applaudir plutôt qu’hurler lorsqu’une grosse tête venue de l’espace vient assombrir le ciel, mais c’est vite oubliable.
Le point le plus important à retenir est que la transition de l’histoire à l’époque actuelle est bien amorcée. L’ancienne série offrait une métaphore sur le plus gros évènement du vingtième siècle : la seconde guerre mondiale. Celle-ci s’axe bien évidemment sur ce qui a marqué l’entrée dans ce nouveau siècle et est encore d’actualité : le terrorisme. L’infiltration, le plan de longue date passé inaperçu, la dévotion, les cellules terroristes, toucheront peut-être au plus près cette nouvelle génération que celle des années 80, qui n’avait pas connu le nazisme.
La religion est un excellent ajout, car avec la politique et les médias, c’est une des plus grosses influences qui existent au monde, et leurs points de vue sont essentiels face à un tel sujet. Il est encore tôt pour dire si ce sera bien exploité, mais pour l’instant cela me fait dire qu’on a droit à un remake malin qui a envie de tirer parti de son sujet au maximum.
Côté effets spéciaux, ce type de maquillage est maîtrisé depuis des années, et les vaisseaux ont de la gueule et de jolis détails, mais leur aspect collé sur des cartes postales et les posters à l’intérieur restent à corriger. Ce n’est peut-être plus kitsch mais ça n’en est pas moins faux. Il en faudra plus pour nous impressionner visuellement. La musique reste quant à elle dans un esprit proche de l’ancienne. Et c’est tout ce que j’ai à dire.
Bref, ce Pilote est globalement très correct et fait penser que ce remake ne sera pas inutile. A vérifier sur la suite.
