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Mars 2005

mardi 1er mars 2005, par Jeff Gautier

Février, mois de la télé-réalité ?

C’est sans doute beaucoup dire puisque parmi les émissions que l’on classe dans cette catégorie, seules La Nouvelle Star et 1e Compagnie ont débuté. Il serait donc plus juste de dire que la saison démarre, puisque La Ferme 2 et Le Bachelor sont déjà annoncés.
En clair, l’invasion a commencé et rien ne pourra la stopper.

Des émissions basées sur « des concepts toujours novateurs et entièrement originaux », dixit Alexia Laroche-Joubert, alias Miss Endemol France. Prétendre que 1e Compagnie, qui consiste à prendre une bande de guignols payés une fortune pour jouer au petit soldat et rappelle par certains cotés Survivor ou La Ferme, c’est bien entendu être de mauvaise foi. Tout comme si vous osiez dire que La Nouvelle Star est un re-sucé d’American Idol. Endemol recopie ses concepts dans tous les pays où elle sévit mais refuse de le reconnaître, pratiquant une langue de bois assez ahurissante. Discours dont l’intérêt m’échappe assez puisque la nouveauté ou non du programme, de surcroît par rapport à un autre pays, ne changera rien à l’audience de celui-ci. Et pourtant, s’il y a bien un point sur lequel Laroche-Joubert ne cède jamais, c’est l’aspect novateur de ses programmes…

La quotidienne de la première marche plutôt bien. Ce qui semble normal vu le niveau de scénarisation assez important qui donne l’impression de regarder un spectacle vivant où tout est calculé. Et l’audience est aussi au rendez-vous pour celle qui apparaît comme la moins nocive des émissions du genre. Normal aussi puisque les candidats ont mis le paquet pour venir se ridiculiser et que le jury a décidé d’aller encore plus loin de dans l’humiliation des apprentis chanteurs.
Bref, chacun y trouve son compte (chaîne, participants, spectateurs) et il n’y a pas de raison que cela s’arrête.

Alors Télé-réalité, Trash-TV, Télé-Poubelle... Les qualificatifs ne manquent pas et les distinctions non plus. Je préfère mettre tout ça dans un même sac étiqueté Emissions d’Abrutissement de Masses.

En dehors du perceptible effet susmentionné, il n’avait jusqu’alors jamais été réellement prouvé que la Télé-Poubelle puisse être nocive. Et c’est sans doutes par ironie que le Destin a choisi les deux crétins de TF1 pour exercer ses représailles. (Eh oui, en plus ça rime, c’est merveilleux).
Car il y a dorénavant une victime de ces émissions, en la personne d’une femme battue et violée par son ex-compagnon qui n’avait pas apprécié d’être humilié sur le plateau de Bataille & Fontaine.
Et là, les sentiments qui montent chez les détracteurs de ce type d’émissions sont troubles. D’un coté, on s’horrifie de ce qui est arrivé à la jeune femme. Mais de l’autre, on est presque content que cela arrive, que la Real-TV franchisse la ligne jaune, et qu’elle montre sa vraie nature aux yeux de tous. On en redemanderait presque. Mais cela ne montre-t-il pas aussi l’influence qu’exercent ces émissions sur tous, même ceux qui les détestent ?

Aux USA, une enquête est actuellement en cours au sujet du troublant suicide d’un participant à une Nouvelle Star de la Boxe. Il semble que cet homme, dont l’émission était presque la seule raison de vivre, n’ait pas supporté sa nomination.
Mais il sera très difficile de prouver (plus que de réfuter) le rôle de l’émission dans le comportement de cet homme.

En tout cas, on peut espérer que tout ceci débouche enfin sur quelque chose qui freinera l’expansion de ces EAM aux concepts toujours plus débiles et nauséabonds.

Pour en revenir à la première chaîne française, TF1 cartonne un peu moins qu’avant avec ses émissions bas de gamme tandis que ses fictions marchent de mieux en mieux. Il y a eu récemment l’énième adaptation de Dumas, revisitée un petit peu quand même, mais qui a trouvé son public. Public qui continue de baver en masse devant les rediffusions de Julie Lescaut, Véronique Genest attirant à chaque fois aux alentours de 10 millions de téléspectateurs. A ce tarif, on se demande où est l’intérêt de produire de nouvelles fictions. Même Les Experts, série américaine diffusée en vrac, programmée en face de Delarue, permet à la chaîne de retrouver de bons scores le mercredi.
Tout va donc pour le mieux pour Channel Bouygues, qui continue d’être une exception dans le monde occidental avec des scores qui rappellent ceux des chaînes publiques de pays régies par une dictature.

Passons à tout autre chose pour finir.
Avec le FLT, vous apprenez régulièrement de nouveaux mots servant à décrire le monde des séries, tels Spin-off, Cliffhanger ou encore Horaire MillenniMesque, vocabulaire que vous pouvez retrouver dans son intégralité dans Le Dico de la LTE. Aujourd’hui, vous pourrez flambez dans les dîner mondain avec un terme dont tout le monde reconnaîtra la sémantique mais dont bien peu connaîtront son origine. Découvrons ensemble ce mot : ’ Navarisation ’. Qu’est-ce donc que cette chose ? Vous avez très certainement entendu parler des fameuses bibles des séries (si ce n’est pas le cas, parcourez donc le site et instruisez-vous !). Ces documents sont assez peu permissif, pour ne pas dire très restrictifs, ce qui amène à créer des scénarii qui se ressemblent un peu d’un épisode à l’autre. Le scénario n’est même en vérité qu’une adaptation de la bible, un démoulage. Chaque scénario de la série sortant du même moule, ils sont tous plus ou moins les mêmes, à quelques détails près, perdant du coup leur appellation de scénario. D’où le terme, créé pour la série Navarro, qui compte à l’heure actuelle plus d’une centaine de navarisations.
Mais on peut, sans gêne aucune, appliquer ce terme à d’autres productions, telles Julie Lescaut, par exemple.

Car à défaut de pouvoir inventer des histoires originales, on invente des mots originaux. Comme quoi on sait aussi s’amuser à la télé…

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