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Breaking Bad - Critique de l'épisode 1 de la saison 3

No Mas: Dr White & Mr Heisenberg

Par Blackie, le 30 mars 2010
Publié le
30 mars 2010
Saison 3
Episode 1
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Le final de la saison 2 m’avait laissée sur une image quelque peu ternie de la série. Que la mort de Jane ait affecté son père au point qu’il y ait des conséquences dramatiques, je veux bien. Mais que certaines de ces victimes tombent pile dans la piscine de Walt était une coïncidence un peu trop digne d’un soap opéra à mon goût. La haute symbolique des cadavres jusque chez lui et du nounours pour accentuer l’horreur de la situation (le concours de la métaphore du nounours rose est sans fin), non merci. L’effet boule de neige, je veux bien, mais la boucle minuscule qui ramène tout à Walt, cela rendait trop conscient d’être devant la plume d’un scénariste. Résultat, j’étais un peu fâchée avec BB. Pendant un an.

Un an que j’attends que cette boulette soit rattrapée et que je puisse enfin pardonner ce faux pas ! Eh bien je peux dire que cet épisode de reprise m’a rappelé dès les premières minutes pourquoi j’aime cette série : elle ne va jamais là où je l’attends. Muchas gracias.

Ciclo tres

Cette scène d’introduction (qui n’est ni un flashforward ni un flashautrechose, youpi) est pour le moins étrange. Au Mexique, des gens rampent jusqu’à un autel dédié à Santa Muerte. Parmi eux, deux sosies bronzés de Yul Brenner qui aimeraient bien trouver celui qui se fait appeler Heisenberg. Cela va être dur, il manque le bouc sur leur beau dessin au crayon.

Ces types sont visiblement très dangereux parce qu’ils sont friqués, armés, ont des têtes de mort sur les orteils, et ne disent pas un mot en prenant des airs très mystérieux devant des chèvres. Ils n’aiment pas non plus qu’on les saoule ni qu’on reconnaisse leurs godasses de la mort, alors ils font exploser une camionnette remplie d’immigrés une fois qu’ils franchissent la frontière américaine. Le regard à la caméra et l’air nonchalant. Manquait plus que le ralenti.

D’entrée de jeux, je n’ai pas très envie de prendre ces mecs très au sérieux, mais en plus le site d’AMC les appelle « Les Cousins »... Vraiment Mr Gilligan, vous cherchez la vanne à ce point ? Ils ne pouvaient pas être frangins non ? Los Hermanos, cela ne me fait penser à r… ouais, nan, il va falloir qu’ils plantent des bombes dans des têtes posées sur des tortues pour que je tremble dans mes chaussettes. Mais si les personnages ne me font aucune impression, l’idée générale que le Cartel veut la peau de Walt plus que jamais est inquiétante. Je les vois déjà arriver sur le pas de sa porte et trouver Skyler, le bébé dans les bras.

Kumbaya, my lord

Tout le reste de l’épisode est passé très vite, j’ai sincèrement eu l’impression de n’avoir été devant que dix minutes. Si je devais le résumer, cela paraîtrait aussi court : Walter vit dans le déni. Skyler demande le divorce. Jesse sort de désintox. Et les Cousins Dangereux arrivent aux USA. Il ne passe pas grand-chose en termes d’action, tout passe plutôt par l’information sur la situation actuelle, une semaine après le crash. On établit les choses pour mieux cerner vers où on va repartir.

Jesse sort d’environ un mois de désintoxication, et heureusement on a droit à la version abrégée du séjour. Les maisons en forme d’ognon, les vêtements fluos et les histoires au coin du feu testent ma limite de tolérance.

S’il n’est plus dépressif, il n’en sort pas dans un état tellement mieux. Les leçons sur l’acceptation de soi et de ses erreurs étaient louables, mais il a une opinion si négative de lui-même qu’il a tout pris de travers et croit devoir embrasser son statut de vilain. C’est toujours aussi triste de le voir s’enfoncer encore plus, d’autant que physiquement il semble avoir rajeuni. Jesse n’a jamais autant eu l’air d’un pauvre gamin paumé, et il se rejette droit dans les bras de la pire des influences parce qu’il n’a que cette personne là sur qui compter.

Alors lorsqu’il se décrit comme un type mauvais devant un Walter qui refuse toujours d’admettre qu’il en est un, cela me dégoûte profondément. Ces deux-là ont des visions complètement fausses d’eux-mêmes. Walt est le vrai criminel, et de la pire trempe, parce qu’il est méthodique, tenace, croit chacune de ses actions justes, et n’hésite pas à aller jusqu’au meurtre pour servir ses intérêts. Jesse a juste été assez stupide pour se laisser entraîner.

Au cas où on l’avait oublié, parce qu’avec le temps et la mémoire qui flanche on finit par pardonner et se rappeler que c’était quand même un chic type malchanceux, le petit discours dans le gymnase a bien remis les choses en place. Celui à Jesse a enfoncé le clou : Walter White est un gros connard fini. Plus la peine de se voiler la face, le gentil prof n’existe quasiment plus. En minimisant l’évènement qui a bouleversé la ville et dont il est indirectement responsable, puis en allant blâmer une autorité plus grande et plus forte que lui de façon ridicule, il s’ôte petit à petit toute responsabilité quant à la mort de Jane et le crash qui en a découlé. Je ne suis pas spécialiste, mais je suis prête à parier que c’est un syndrome classique parmi les hautes figures militaires.

Junior (je refuse de l’appeler Flynn) a raison d’être en colère et d’avoir honte de son père face au reste de son école. J’ai hâte de le voir bouillir au fil de la saison et remettre tout le monde à sa place. Sa vie n’était déjà pas facile, entre son handicap, un père mourant, et être tout simplement un ado, mais quand ses parents se séparent sans qu’on ne lui fournisse aucune explication, il y a de quoi péter un câble.

Côté famille, justement, on voit très peu les Schrader. Hank n’a qu’une malheureuse scène où le manque de prise au sérieux de son beau-frère me sidère une fois de plus. Avec ses changements de caractère aussi visibles que ses changements physiques ? Avec les trucs récents qui ont un peu mis en veille le côté beauf de Hank ? Walt le teste à fond pourtant, c’est à se demander s’il évalue son degré de sûreté ou s’il veut être attrapé.

Walter n’aime pas boire des slurpies

Ce qu’on retiendra le plus de cet épisode est bien sûr la scène entre Skyler et Walt. En fin de saison 2, Skyler claquait la porte exaspérée par les mensonges de son mari. La retrouver demander le divorce aussi vite (autant en terme de temps pour eux que d’épisode pour nous) est très radical et rend la situation du couple encore plus mal barrée. Discuter ne fait pas partie de ses intentions, ce qui est compréhensible vu qu’elle n’a jamais eu droit à une once de vérité à chaque fois qu’elle a essayé.

Et c’est justement lorsqu’elle arrête de poser des questions et met Walt au pied du mur qu’elle a droit à un peu d’honnêteté en retour. Ce qui surprend n’est pas qu’elle soit arrivée à une conclusion pas loin du mile grâce à tous les éléments étranges notés auparavant, mais que ce face-à-face arrive aussi tôt dans la saison. Pas de traînage en longueur, la série ne s’arrêtera pas sur « Walt est démasqué par sa famille ». Au contraire, cela va faire progresser l’histoire d’autant plus et faire grimper notre anxiété, parce que les conséquences à partir de là sont encore moins prévisibles.

Walt redevient difficile à cerner dans cette situation. Alors que ses « MOI je suis heureux, t’as pas MA version (tordue) de l’histoire » me faisaient le haïr encore plus, son aveu deux minutes plus tard m’a fait l’effet d’une énorme claque. Enfin, il arrête de se fouttre de sa gueule. Bien sûr, il n’entre pas dans les détails (les bombes, les morts, tout ça, c’est de la fioriture hein) mais clarifier son titre de fabriquant d’amphétamines est déjà un grand pas. Vendeur de marijuana, sérieux… c’est bon pour la voisine débile ça.

Mais est-ce vraiment une façon de tout mettre à plat et dire qu’il va redevenir l’homme qu’il était, ou est-ce qu’il lui file juste un os pour mieux l’amadouer ? Mon problème, c’est que je n’ai pas ressenti de tristesse ou de honte dans ses yeux (et on sait que le Cranston est expressif), quelque chose qui m’aurait rappelé l’ancien père et époux empli de désespoir tellement il veut le bonheur des siens. Là, je voyais juste le businessman refusant de perdre tout contrôle. Pourtant je voulais que Skyler reste l’écouter, comme une petite dose d’espoir.

Que va faire Skyler avec cette information ? Walt est-il capable de prendre des mesures folles pour protéger ses intérêts, maintenant qu’il lui reste plus de temps à vivre grâce à son opération ? Cela donne quoi quand Gus n’est pas content qu’on le largue ? Et bordel, mais qui es-tu Walter White, je ne sais plus du tout quoi penser et je n’ai pas l’habitude d’être aussi larguée !
Attendez, est-ce que c’est ça le rôle caché des Cousins Dangereux, de personnifier le dédoublement de personnalité de Walt ?!

C’est dur, l’analyse…

Blackie
P.S. Au prochain épisode, les Cousins Dangereux mettront le feu à un banana stand et Tom vous expliquera toute la symbolique des chèvres porteuses de clés.