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Person of Interest - La Machine, narratrice omnisciente de la série

Arrêt sur image: Une Histoire de Machine

Par Ju, le 15 mars 2013
Par Ju
Publié le
15 mars 2013
Saison 2
Episode 17
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Cachée derrière des épisodes relativement simples, marque de fabrique des procedurals de CBS, Person of Interest est en réalité une série très ambitieuse. Pour preuve évidente de cette ambition, on n’a pas à aller chercher plus loin que son narrateur. Quoi ? Vous n’aviez pas remarqué que la série était entièrement racontée par « La Machine » ? Je vais m’expliquer.

J’aurais mis un certain temps avant de m’en rendre compte, mais Person of Interest est la seule série possédant (à ma connaissance) un véritable langage visuel, dans le sens où son habillage, la façon dont les épisodes nous sont présentés, participe à en enrichir la narration.

Ce que je veux dire par là c’est que les images façon « caméras de surveillance », qui servent de courtes transitions entre les scènes, n’ont pas comme seul objectif d’illustrer l’Univers ultra contrôlé (et plutôt fasciste) que Reese et Finch exploitent joyeusement chaque semaine (pour la bonne cause).
En plus de ça, ces images font partie des outils à travers lesquels s’exprime la Machine, à la fois intelligence artificielle au cœur des intrigues de la série et sa seule narratrice.

Ça, c’est pour ma thèse. Alors, plutôt que de vous dresser un bilan incomplet de la saison 2 de Person of Interest ou de vous la résumer du point de vue de Bear le Chien, j’avais envie aujourd’hui de souligner un de ses aspects qui m’impressionne le plus : non seulement ce langage visuel existe bel et bien, mais en plus il est suffisamment subtil pour qu’on puisse regarder toute la série sans jamais remarquer qu’elle possède un narrateur.

Une Machine obsédée par les carrés de couleur.

Dans la suite, je vous propose cinq exemples montrant le rapport direct que la Machine entretient avec le récit. Avec des photos et de toutes petites explications. Pas parce que j’ai la flemme d’écrire de longues phrases avec des mots qui vont bien les uns à la suite des autres, mais plutôt dans un souci méta : puisque la Machine ne s’exprime que par les images, je ne vois pas pourquoi il en serait autrement pour moi.

Et parce que j’ai la flemme.

1 La Machine remplit les trous

Person of Interest est une série qui n’a pas peur de multiplier les arcs, les personnages, et les intrigues récurrentes. On pense notamment aux passés respectifs de Reese et Finch, dont on commence à savoir beaucoup de chose... grâce à la Machine.

C’est sa participation la plus visible au procédé narratif : tous les flashbacks nous sont présentés à travers ses yeux, à l’aide d’images d’archives qu’elle semble extraire de ses dossiers, et qu’on atteint toujours de la même façon, en parcourant une espèce de frise chronologique en base de l’écran.

Oui, c’est de l’habillage, et pris seul ça n’irait pas plus loin.
Mais ça ne s’arrête pas là.

2 La Machine résume (synthétiquement) les épisodes précédents

Seul exemple pour l’instant il me semble, mais tout à fait notable, cette courte scène où toute l’intrigue « HR » (l’association de flics pourris de New York) nous a été résumée au moyen d’un chouette organigramme.

Loin d’être un gadget ou juste un bon moyen de visualiser les informations qu’on aurait pu oublier, cet interlude d’une vingtaine de secondes en plein épisode nous a montré, en plus, la façon dont la Machine organise ses données et relie les principaux protagonistes les uns aux autres.

Parce que les « Previously on Person of Interest », c’est ringard.

3 La Machine classe les personnages (avec des carrés)

Preuve irréfutable que la série nous est présentée du point de vue de la Machine, les petits carrés de couleur qui identifient chaque personnage à l’écran, en fonction de leur rapport au narrateur.

C’est un détail très facile à ignorer, puisqu’il m’aura fallu une bonne quinzaine d’épisodes avant de m’en rendre compte leur signification. Un carré blanc pour les personnes sans rapport direct à la Machine, un carré jaune pour Reese et Finch (a priori, ceux qui sont au courant de son existence), un carré rouge pour les menaces (Root, Stanton, et Ingram dans un flashback), et tout récemment un bleu pour Shaw.

Un carré bleu, parce que Sarah Shahi est la plus belle et la plus parfaite. Ou bien parce qu’elle était la première représentante « officielle » de la Machine qu’on découvrait dans la série. Mais sans doute pour la première raison.

4 La Machine raconte ce qu’elle veut

Autant être clair, l’interruption de l’introduction hebdomadaire de Finch par la Machine (qui voulait nous parler d’autre chose) était de toute beauté.

Je n’ose pas imaginer les négociations qu’il a fallu faire avec CBS pour autoriser ce sacrilège et interrompre cette introduction, tellement pratique et tellement indispensable sur la chaine préférée des vieux (et de pErDUSA).

Mais pour marquer le côté exceptionnel de l’épisode, c’était assez fort.

5 La Machine nous dit ce qui va se passer

Il y a quelques semaines, un arc important de la série s’est achevé par l’introduction d’un « Virus Mystérieux » sur « Internet ». On se serait cru dans un thriller technophobe des années 90.
(Mais passons.)

Ce qui est amusant, c’est que depuis cet épisode la Machine déconne. Elle a un bug. Un bug très discret : aucune allusion n’y est faite à l’intérieur des épisodes, puisque les personnages ne voient pas la même chose que nous. Et ça a commencé sous la forme d’images subliminales (une fraction de seconde sur un écran bleu rempli de séries de chiffres et de lettres) pendant les transitions habituelles entre les scènes.

Pour la première fois dans la série, nous étions en avance sur Reese et Finch (qui commencent à peine à se rendre compte qu’il y a un problème), et c’est apparu sans prévenir, d’une façon telle qu’il était tout à fait possible de le louper. A travers le langage visuel de la Machine, en utilisant l’habillage de la série, Person of Interest a fait du feuilleton dans des épisodes indépendant.
Mieux, il s’agissait de faire avancer le fil rouge à l’insu des personnages, et uniquement à destination des téléspectateurs qui voulaient bien y prêter attention.

Tout simplement, Person of Interest a inventé le « feuilleton à la carte ». Elle s’est transformée en une série qui peut satisfaire aussi bien les fans de genre (avides d’intrigues complexes et de mystères) que le public habituel de CBS (avide d’épisodes bouclés, de bastons, et des facéties de Bear).

Et je trouve ça d’une élégance assez remarquable.

Ju