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Iris in Treatment

Session N°15

FXX FFS !

lundi 9 février 2015, par Iris

Quand on pense aux chaînes qui produisent de la qualité, on a toujours tendance à évoquer la sainte trinité HBO - AMC - Showtime. Pourtant, et depuis plusieurs années maintenant, si on veut vraiment tomber sur des séries qui poussent les limites de ce que la fiction télévisée fait, il vaut mieux se tourner vers FX, et plus récemment vers sa chaîne spin-off, FXX.

La chaîne, dont le public cible est constitué d’hommes de 18 à 34 ans [1], nous offre malgré ça des séries qui ne sombrent jamais dans les clichés qu’on pourrait en attendre.

On est effectivement loin des séries de bros qui sentent la testostérone qu’étaient Entourage ou How To Make it in America. A la place, on se tourne vers des shows qui sont très souvent difficiles à pitcher, et ce au-delà même de mon incapacité à pitcher quoique ce soit, tant ils reposent sur des idées de base casse-gueules si elles ne sont pas exécutées à la perfection.

Lancée en 2013, FXX a, en plus de quelques programmes originaux, également bénéficié de transferts depuis FX, comme It’s Always Sunny in Philadelphia et Wilfred – des transferts qui sont des évidences tant ces séries ont leur place sur cette chaîne, qui en moins de deux ans a su se créer une identité forte et unique dans le paysage télévisuel : celle de la chaîne où tout est réellement possible. [2]
On a bien sûr quelques séries isolées sur d’autres chaînes qui osent/osaient aller plus loin que leurs consœurs dans les fantaisies que leurs personnages peuvent se permettre. Des séries comme Scrubs (NBC puis ABC) ou Community (LAntreDeLEnferNeverForget [3] puis … Yahoo). Mais FXX va plus loin, parce qu’elle semble libérée de tout carcan moral.

Voici, dans l’ordre chronologique, quelques perles FX(X)iennes à côté desquelles vous auriez pu passer, et qui empliront à coup sûr vos salons / studios / rames-de-métro-oui-je-parle-de-toi-connard-qui-regarde-une-série-sur-un-écran-de-smartphone-mets-toi-aux-podcasts-plutôt-putain / chambres à coucher de rires, et feront de vous de meilleurs êtres humains : des êtres humains condamnés à remettre en question semaine après semaine ce qu’ils pensaient savoir de leurs principes moraux et de leur humanité. The unexamined life is not worth living [4].

It’s Always Sunny In Philadelphia - 2005-2012 FX ; 2013 - ? FXX

On parle trop rarement d’It’s Always Sunny in Philadelphia sur pErDUSA, et ce pour une raison assez évidente : les deux seuls rédacteurs de ce site à la suivre sont Ju (qui soigne la perte de ses reviews hebdomadaires de Lost en n’écrivant plus que des textes assassins sur des journalistes séries TV qui entraînent soit des menaces de procès soit des blocages massifs sur Twitter [5]) et moi-même (qui soigne… quelque chose ? en n’écrivant pas. Pour des raisons. Si vous voulez tout savoir, je reviens à peine d’un pèlerinage au Tibet qui m’a été très bénéfique. J’y ai appris à me battre et à ne faire qu’une avec les chauves-souris.), les Sid et Nancy de pErDUSA ; des gens sur qui on ne peut pas compter pour faire leur boulot correctement [6].
La dernière fois que je vous ai parlé d’It’s Always Sunny in Philadelphia, c’était il y a plus de 4 ans, et je me concentrai uniquement sur le personnage de Charlie. Il est grand temps de rectifier ça.

It’s Always Sunny in Philadelphia nous raconte le quotidien de cinq amis qui ont un pub, à Philadelphie, et beaucoup d’idées de merde durant l’exécution desquelles ils peuvent nous démontrer l’étendue de leurs innombrables défauts, parce qu’ils sont la lie de l’humanité.
Menteurs, hypocrites, orgueilleux, manipulateurs, cruels, idiots, et je vais le redire, vraiment très cruels, ces personnages pourraient être détestables et rendre la série insupportable, mais celle-ci échappe à ce triste sort pour une raison très simple : même si la série a touché et touche à absolument tous les sujets casse-gueule possible, elle le fait avec justesse.
En dix ans d’existence, It’s Always Sunny In Philadelphia a ri du racisme, de l’avortement, des violences sexuelles, de la religion, de l’homosexualité, de l’addiction, des aides-sociales, and so on, mais ce sans jamais avoir un humour oppressif. On est dans un cynisme monstrueux, mais qui ne perd jamais de vue que rire des victimes n’a aucun intérêt si on se montre exigeants.
En ceci, elle est une réponse parfaite à ces abrutis qui brandissent la liberté d’expression pour justifier leurs vannes médiocres.
It’s Always Sunny in Philadelphia est probablement la seule série qui fasse des blagues tournant autour des violences sexuelles qui soit réellement drôle en le faisant. Parce qu’avec ses personnages immondes, elle a compris le secret d’un humour noir efficace : dénoncer et défoncer les dominants.

Oh, et dans son dernier épisode en date, elle se paie le luxe d’un plan séquence de plus de sept minutes. Soit plus long que celui de True Detective. Du coup ça peut vouloir dire deux choses : que It’s Always Sunny In Philadelphia, c’est « comme du cinéma » et qu’on peut y appliquer les mêmes superlatifs que son tracking shot avait valus à True Detective, ou qu’il faut vraiment qu’on grandisse, qu’on cesse de se sentir inférieurs parce qu’on fait partie de l’équipe de Lacrosse alors que notre grand-frère fait partie de celle de Football, et qu’on arrête de se toucher collectivement sur cette comparaison arriérée cinéma/séries.

Wilfred – 2011-2013 FX ; 2014 FXX

Ryan va mal. [7]
Ryan essaie de se suicider. [8]
Ryan se fait réveiller par sa voisine qui lui demande s’il peut garder son chien, Wilfred. [9]
Ryan accepte. [10]
Wilfred entre en scène. [11]
Wilfred est un homme barbu dans un costume de chien qui parle avec un accent australien. Mais uniquement aux yeux de Ryan, et en continuant à avoir des comportements typiquement canins [12].

On suit donc la vie de Ryan, qui passe désormais ses journées à s’occuper de Wilfred (ou plutôt « à gérer Wilfred »), ce qui consiste principalement à s’enfermer dans sa cave avec lui pour fumer de la weed, et à écouter les conseils que le canidé lui prodigue pour améliorer sa vie et retrouver le bonheur.

Mais on n’est pas uniquement dans un show de et pour stoners. Au contraire. En cours de série, le pitch évolue, les intrigues se complexifient, et prennent des directions que je n’ai pas toujours appréciées. Mais sur ses deux premières saisons, la série est proche du sans faute, et elle reste dans l’absolu et jusqu’au bout un show qui ose énormément de choses, souvent très absurdes et décalées mais également très drôles. Le concept ne s’essouffle pas, et permet à plusieurs reprises au cours de la série de très belles réflexions détournées sur l’impact qu’une « maladie » mentale peut avoir sur les éléments quotidiens de quelqu’un.

Et puis y a un grand Australien déguisé en chien qui fume des joints, jure, et se frotte à des animaux en peluche géants. Vraiment, il vous faut quoi ?

You’re The Worst – 2014 FX ; 2015 - ? FXX

Non allez, vous ne pouvez pas être passes à côté de celle-ci ? C’était la comédie événement de l’été 2014, Ju en a parlé ici, et je sais que je devrais trouver un troisième truc à ajouter pour des questions de rythme, mais je vais me contenter de vous regarder de haut en bas, avec un regard emprunté à mon père qui ne dit rien d’autre que « Tu m’as déçu ».

You’re The Worst, même si elle n’est techniquement pas encore diffusée sur FXX en remplit parfaitement le cahier des charges. Elle raconte non seulement la relation de deux personnes (Jimmy et Gretchen) pas vraiment faites pour les relations de couples (ou les interactions humaines en général), et qui pourtant cliquent, mais vient s’enrichir de second rôles (les meilleurs amis de nos deux héros) parfaitement conscients de leurs statuts de sidekicks qui malgré cela ont droit à leurs propres storylines, souvent aussi touchantes / hilarantes que celles du couple phare.

Mais encore une fois, l’humour est souvent bien plus osé que celui que la plupart des autres sitcoms nous proposent, le tout accompagné d’une réalisation qui fait de You’re The Worst un bijou visuel à plusieurs reprises pendant la première saison, avec notamment les split screens les plus beaux et touchants vus depuis longtemps. Un épisode s’est d’ailleurs immédiatement glissé dans mon top 50 de mes épisodes de séries TV préférés.

Si vous voulez découvrir une série douce-amère, hilarante, et surtout diablement honnête sur une relation amoureuse, foncez. En plus, elle ne compte que 10 épisodes. Vous n’avez donc aucune excuse.

Man Seeking Woman – 2015 - ? FXX

Man Seeking Woman, c’est l’occasion de pouvoir être comme un de ces connards de fans de Game of Thrones qui balance continuellement des comparaisons aux bouquins, à ceci près que vous n’aurez pas à vous taper sept objets contondants, dont deux à paraître « prochainement » [13].
Effectivement, Man Seeking Woman est adapté de The Last Girlfriend on Earth, une collection de nouvelles de Simon Rich, qui pour le coup est largement impliqué dans la série puisqu’il endosse les rôles de créateur, producteur exécutif et showrunner.

Petite dernière, seule de cette liste à ne pas avoir bénéficié d’un transfert depuis FX, et raison pour laquelle j’avais tant envie de vous parler de FXX. Man Seeking Woman rejoint les autres ovnis de la chaîne et y apporte une douceur bienvenue.
Elle se concentre sur Josh Greenberg, récemment largué, qui tente de se refaire une place dans le monde des rendez-vous amoureux et des rencontres. Un monde qui, ces dernières années, s’est de plus en plus dénué de sa spontanéité et de son honnêteté, au profit de tactiques – un concept parfaitement illustré par une séquence fantasmée où Saul Tigh de Battlestar Galactica et toute une salle de commande militaire tente d’aider Josh à envoyer le texto idéal pour proposer un rendez-vous à une fille qu’il a rencontré dans le métro.

Parce que oui, l’originalité de Man Seeking Woman est que les délires imaginaires hyperboliques de Josh s’intègrent complètement à sa vie. Que ce soit lorsque son ex petite amie trouve un nouveau compagnon en la personne d’un Adolph Hitler de 126 ans, ou qu’après avoir été largué un nuage de pluie le suit, ne s’abattant que sur lui. Le genre d’hyperboles auxquels on peut très facilement s’identifier. Jusqu’à présent, si les délires de chaque épisode ne sont pas tous aussi bons les uns que les autres, il y en a systématiquement au moins un qui m’a fait me dire "Putain, c’est exactement ça.".

Le seul reproche qui puisse être fait à cette série à ce stade-là est qu’elle contient un ou deux aspects « problématiques » et pourrait facilement sombrer dans des situations sexistes ; un sexisme de « gentil garçon » certes mais tout de même agaçant. Mais ce n’est qu’un détail rare qui ne gâche en rien le plaisir qu’on peut avoir devant ce petit bijou d’inventivité, et qui ne devrait surtout pas vous décourager de vous lancer dedans.


Voilà, si avec tout ça vous ne rejoignez pas notre secte, je ne sais vraiment pas ce qu’il vous faut.

Mais je profiterai quand même de ce post-scriptum pour ajouter que FXX est aussi "connue" pour avoir diffusé le plus long marathon-série continu de l’histoire des chaînes TV, en acquérant les droits des Simpsons (FOX) et démarrant un marathon de 12 jours, durant lequel les 522 épisodes de la série furent diffusés, ainsi que le film.

Drop the mic.


[1à contraster avec NBC, dont le nouveau public cible est constitué d’un type dans le coma depuis 10 ans et du chat à trois pattes et à moitié aveugle qu’il a laissé à sa tante

[2En ce sens, Louie (FX) y aurait largement eu sa place.

[3Aussi connu sous le nom de NBC

[4Oui, je cite Socrate en anglais. Dans un texte en français. Mais je sais déjà que je suis une connasse. Grâce à FXX. Suivez un peu putain.

[5Allez Pierre Langlais, promis, je suis gentille, débloque-moi ! Je suis sincère. Et Pierre Serisier… Pourquoi tu m’as pas encore bloquée putain ? Gaffe à votre community management les gars ! Oh and Serisier, good job tweeting in both French and English ! The only thing your groundbreaking thoughts on TV used to lack ? A large enough audience ! You must conquer the World and REIGN !

[6Pour toute proposition de piges vous pouvez me joindre en appuyant sur le tatouage d’un Mangemort.

[7Ca arrive.

[8Ca arrive.

[9Ca arrive.

[10Ca arrive.

[11Ca arrive.

[12ARE YOU FUCKING KIDDING ME ?

[13HAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHA

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