Entretien avec une stagiaire de Telfrance
Nous avons rencontré une ancienne stagiaire de Telfrance, la maison de production de PJ, Les Cordiers Juge et Flic, Histoire de la fiction française et de nombreux téléfilms unitaires. Elle nous a accordé un entretien que nous publions anonymement.
En quoi consistait votre travail à Telfrance ?
J'assistais un producteur rattaché à Telfrance. Cela comprenait bien évidemment tout ce qui ressortait du secrétariat (téléphone, rédaction et envoi du courrier), mais aussi des choses plus spécifiques. Par exemple, j'étais chargée de la relecture des scénarios, des corrections à y apporter (corrections orthographiques, typographiques, de mise en page...) et je triais également les candidatures spontanées d'acteurs qui arrivaient, selon qu'ils postulaient pour des rôles ou de la figuration. Bien évidemment, je m'occupais aussi de la « fabrication » des documents que l'on envoyait aux chaînes (reprographie, assemblage, reliure).
Ce que vous nous décrivez là ressemble au prototype du stage café/photocopie. Etait-ce tout ce que vous faisiez ?
Non, bien évidemment. Comme je travaillais seule avec le producteur, il y avait des tâches plus intéressantes que ces travaux que l'on peut globalement qualifier de secrétariat. Je devais aussi faire le premier tri dans les synopsis envoyés au producteur, en rédigeant des fiches de lecture. J'avais également à lire les ouvrages qu'il pensait potentiellement intéressants pour une adaptation à la télévision, afin que nous en discutions et qu'il voie ainsi s'il allait plus loin ou non dans son projet. Concernant les adaptations, je devais aussi relire les scénarios d'adaptation envoyés et donner mon avis sur elle, par rapport à l'œuvre originale. J'ai en effet une formation littéraire et mon regard de « spécialiste » de la littérature l'intéressait. Il m'a même confié un projet d'adaptation : j'ai donc rédigé le synopsis de l'adaptation d'un romancier contemporain, mais, à ce que je sais, le projet n'a jamais abouti.
Aviez-vous déjà une expérience dans l'écriture de scénario ?
Nullement. Je connaissais bien évidemment les conventions de présentation et j'avais quelques notions de « dramaturgie », si l'on peut employer ce terme. Mais je n'avais jamais écrit de scénario de quelque nature que ce soit. L'adaptation est, de plus, un exercice très particulier. Ce fut intéressant à faire, bien que le roman que je devais adapter ne fût pas d'une qualité littéraire incroyable, mais je crois que ça n'a pas été très productif pour le producteur avec lequel je travaillais.
En dehors de ces projets qui concernent l'écriture, avez-vous vu un projet se développer ?
Oui, j'ai pris en cours la production d'un épisode de la série Marie Fransson [ndlr : il s'agit d'une série, qui a été diffusée sur France 2 de 1998 à 2001, à raison d'un épisode par an]. Quand je suis arrivée, le scénario était déjà grandement avancé (la chaîne n'avait plus qu'à accepter la version finale, déjà partiellement réécrite selon leurs remarques). J'ai donc vu avancer ce projet depuis le stade de l'acceptation du scénario jusqu'à la préparation du tournage, puisque je suis partie à ce moment. Quand il a fallu organiser le tournage, une directrice de production est donc arrivée, avec laquelle j'ai aussi travaillé. Elle a donc réuni une équipe (directrice de casting, régisseur...), cherché des locaux pour l'installer, car il était impossible de réunir tout le monde dans les bureaux que nous avions.
Justement, quelles étaient les conditions dans lesquelles vous travailliez ?
Le producteur avait son propre bureau et je travaillais dans une pièce en face, sans fenêtre d'ailleurs, où étaient archivés tous les documents concernant ses productions, les projets qui lui étaient envoyés, les candidatures spontanées... Quand la directrice de production est arrivée, elle s'est installée dans mon bureau et, tant que nous n'avions pas de locaux extérieurs, la directrice de casting travaillait avec nous dans le même bureau. Etant donné le mobilier réduit et spartiate (une table, deux chaises, un ordinateur et une imprimante plus que lunatiques et un seul téléphone), je vous laisse imaginer les difficultés de la cohabitation.
Vous avez donc déménagé, nous comprenons bien pourquoi. Que s'est-il passé ensuite ?
Nous avons continué le travail commencé, c'est-à-dire l'organisation du tournage (surtout sa planification) et le recrutement des acteurs non réguliers. Je n'ai pas, pour ma part, travaillé sur le casting, mais essentiellement sur l'organisation du tournage : vérification des fiches de tournage réalisées par la directrice de production, travaux de secrétariat en relation avec cela... Puis, je suis partie.
Un second stagiaire a donc pris votre place. N'était-ce pas gênant pour la continuité du travail ?
En fait, il s'agissait d'un troisième stagiaire, puisqu'une première stagiaire avait travaillé sur tout le début du projet, de la proposition du synopsis à la rédaction du scénario. Il est vrai que les changements ne doivent pas aider pour mener le projet à bien. Il faut noter que ce producteur travaillait sans cesse avec un stagiaire, il n'y avait pas d'emploi fixe pour ce poste. A ce que j'ai pu voir ici ou là, cet emploi récurrent, fixe de stagiaires pour faire fonctionner les maisons de production, quelle que soit d'ailleurs leur poids économique, est très fréquent.