Allez, un petit bonus pour la route. Voici un entretien avec Martin Winckler pour le site Once and Again Hommage, la référence francophone en ce qui concerne la série (
http://onceandagain.free.fr)
La série
Q : Comment définiriez-vous "Once and Again" en quelques mots?
R : C'est une série réaliste qui raconte comment deux quadragénaires sortant chacun d'un échec conjugal forment un nouveau couple, et quelles conséquences cette deuxième expérience a sur eux, leurs enfants, leur famille et leurs ex.
Q : Quel est votre personnage préféré ?
R : J'aime tous les personnages, c'est un des points forts de la série (c'était le cas aussi de "My So-Called Life") : le soin apporté à chaque personnage. La patience et la constance avec laquelle chaque personnalité est illustrée, par petites touches.
Q : Quel est votre épisode préféré ?
R : Je n'ai pas vraiment d'épisode préféré (j'aime tout) mais j'ai trouvé l'épisode de la première saison où Rick et Lily vont rompre et où Rick dit qu'il ne peut pas la quitter particulièrement émouvant ("Médiation" [1.13] [N.d.W.]) : ma femme et moi, on a pleuré à chaudes larmes, comme eux, en le regardant. Il y avait une tension extraordinaire dans cet épisode. J'ai aussi beaucoup aimé les deux fins de saison. Je pense que j'adorerai le dernier épisode, aussi.
Q : Quelle est votre saison préférée ?
R : Les trois. Je trouve que la série a su grandir et évoluer et apporter à chaque saison son unité. Ca, c'est le signe d'une grande série : se renouveler et avancer à chaque saison.
Q : Parmi toutes les séries que vous avez eu l'occasion de voir jusqu'à maintenant, à quel rang placeriez-vous "Once and Again" ?
R : Au plus haut. Parmi mes dix séries préférées. Avec "My so-called Life", "Profit", "E.R.", "Law & Order", "Oz", "Star Trek : The Next Generation" et " Star Trek : Deep Space Nine "...
Q : Comment interprétez-vous le titre sciemment ambivalent de "Once and Again" (littéralement "Une fois et de nouveau") ?
R : C'est l'idée que lorsqu'on recommence, on ne recommence pas vraiment - on n'est plus le même, et si on a appris quelque chose de sa première expérience, on ne commet plus exactement les mêmes erreurs : on sait ce qu'on ne veut pas, on sait ce qu'on n'acceptera plus. Mais en même temps, on a peur de recommencer, alors on hésite, on commet d'autres erreurs... Et aussi : Rick et Lily ont beau "recommencer", leurs enfants, eux, continuent. Donc, on doit simultanément recommencer sa vie et continuer à aider les enfants à vivre la leur.
Q : Que pensez-vous des "interviews" (séquences en noir et blanc au cours desquelles les personnages se confient directement à la caméra) ? Aviez-vous déjà vu quelque chose de semblable auparavant ?
R : Non. Ce que j'aime, c'est leur caractère naturel et surtout le fait qu'elles ne sont pas systématiques (il n'y en a pas à chaque fois), ce qui montre que ça n'est pas un procédé, mais une manière de ponctuer ce qui se dit quand c'est nécessaire. C'est une "virgule", une "respiration". C'est un effet de style, mais ça fait partie de l'ensemble, ça n'est pas prédominant. Voir l'un des derniers épisodes en date (celui sur le désir d'enfant) où Rick et Lily ne sont vus en apartés qu'au début de l'épisode, puis plus du tout ensuite.
Q : Quel rôle accordez-vous à la musique de "Once and Again", composée par W.G. Snuffy Walden, en tant qu' "indicatrice" d'émotions ? Mérite-t-elle la sortie d'une bande originale, comme cela se fait désormais couramment dans l'univers des séries ? Si vous deviez la noter de 1 à 5 ?
R : 5/5. J'aime beaucoup ce compositeur, qui sait aussi ne pas se faire présent quand ça n'est pas nécessaire. Je trouve la musique de fin d'épisode géniale : enlevée, joyeuse. Elle est à mon avis plus proche de l'esprit de la série que la musique de début.
Q : Qu'est-ce qui, pour vous, représente la plus grande force de "Once and Again" : sa richesse narrative, sa diversité de personnages, ses jeunes acteurs, la justesse de ses seconds rôles, le "miroir" qu'elle reflète sur notre propre existence, ses effets de style très sobres, sa tonalité tragi-comique ?
R : Justement, tout ça. A mes yeux, c'est vraiment ce qui en fait la plus belle série réaliste à ce jour. Tout est juste. Il y a quelque chose de miraculeux dans cet équilibre. Il est possible que Herskovitz et Zwick n'atteignent plus jamais ça de nouveau... Mais ils l'ont fait dans "Once and Again", et c'est formidable.
Q : Qu'est-ce qui vous déplaît en "Once and Again" ? Qu'avez-vous à lui reprocher ?
R : Rien : je suis dans la jouissance et l'émotion absolue quand je la regarde. Jamais insatisfait, jamais déçu. Je n'ai pas assez de recul. Peut-être, dans quelques années, trouverai-je les défauts (ils ressortent plus avec le temps) mais je n'en suis pas sûr : je ne trouve pas beaucoup de défauts à "My so-called Life", six ou sept ans après l'avoir vue ! ! !
Q : Que pensez-vous de l'adaptation française de "Once and Again", que l'on a pu apprécier dernièrement à travers la diffusion sur M6 ?
R : Les voix françaises sont mal choisies : trop juvéniles pour les personnages adultes, et trop bêtassoues pour les jeunes (qui sont doublés par des adultes, au lieu d'être doublés par des jeunes de leur âge, comme s'il n'y avait pas d'acteurs adolescents)... C'est le même reproche que je fais à d'autres séries en demi-teinte, comme "Ally mc Beal". Quand on est franchement dans le drame ("E.R.", "The West Wing"), c'est mieux. A moins que ça ne soit le "profil" de la chaîne (M6, France 2) et le choix des maisons de doublage qui joue... On a l'impression que les séries de M6 (même "The X-Files") sont toutes doublées comme "Buffy The Vampire Slayer" et, il y a quelques années, comme "Loïs & Clark" (qui était bien doublée, mais ça n'était pas une série réaliste).
Q : On a souvent l'impression (à tort ou à raison), en le regardant quelques années plus tard, que le pilote d'une série majeure correspond à son meilleur épisode ("The X-Files", "Ally mc Beal", "My so-called Life"…), parce qu'il représente la découverte d'un univers, un condensé de ce que les créateurs vont s'appliquer à développer dans les segments suivants, la réunion d'une profusion d'idées destinées à convaincre les grands networks. Pensez-vous que ce jugement s'applique à "Once and Again" ?
R : Non, là, justement pas. Je pense que le premier épisode de "Once and Again" donne la tonalité, mais ne dit pas tout ce que sera la série. Je l'ai revu récemment. Lily et Rick sont plus "beaux" (plus léchés) qu'ensuite, plus lisses. Au fil du temps, ils deviennent plus rugueux, plus réalistes, justement. Là, il me semble que la série a pris des risques au fil du temps, et ça renforce encore plus mon admiration.
Q : A quelle autre drama familiale peut-on comparer "Once and Again" ? "Party of Five" vous semble-t-elle un digne prédécesseur (les aînés jouant le rôle des parents et des enfants) ?
R : Non, plutôt " My so-called Life ", dont "Once and Again" est une sorte de double inversé. Je trouve que "Party of Five" n'est pas une série réaliste mais un mélodrame. Ce que "Once and Again" n'est pas du tout. "Party of Five", à la fin, on en avait assez de les voir déguster sans arrêt. Alors qu'il y a des épisodes de "Once and Again" franchement drôles ("Jake et ses femmes" [3.06], par exemple).
Q : Malgré une critique élogieuse, la "petite sœur" "Gilmore Girls" a rapidement fait preuve d'une certaine fragilité, ainsi que de naïveté dans ses rapports humains. N'est-ce pas là le signe évident d'une suprématie indiscutable de " Once and Again " sur les dramas familiales de ces dix dernières années ?
R : Je ne suis pas sûr qu'on puisse comparer : "Gilmore Girls" me semble plus "nonsensique". La force de "Once and Again", c'est vraiment son réalisme. Même sa poésie est réaliste (on peut s'identifier à elle). Mais je ne parlerais pas de "suprématie" parce que le goût est quelque chose de personnel. Je connais moins bien "Gilmore Girls" (qu'on ne connaît qu'en VF en France) mais je la trouve très intéressante et ça me paraît normal qu'elle ait beaucoup d'amateurs. Je pense qu'elle est moins "mûre" que "Once and Again", mais ça n'en est pas moins une bonne série.
Q : Avez-vous entendu parler de l'hommage final rendu par les acteurs au cours du dernier épisode de "Once and Again" ? Si oui, cela vous rappelle-t-il d'autres créations s'étant achevées sur une apothéose émotionnelle ?
R : Oui, il y en a : "M*A*S*H", par exemple, ou les deux séries "Star Trek" dont je parlais plus haut. Mais il faut savoir déjà qu'on va finir pour pouvoir s'y préparer. Un épisode final, c'est aussi dur à faire qu'un pilote. Souvent, les séries sont annulées sans avoir pu mettre un terme à leurs histoires. Et il faut aussi que la série soit fondée sur le partage d'émotions, et pas seulement sur des effets spéciaux...
Q : On parle souvent d'identification aux personnages (Lequel des "Friends" êtes-vous ?). Vous trouvez-vous des similitudes avec l'un ou l'autre des personnages de "Once and Again" ? Ou trouvez-vous echo dans certaines situations qui y sont évoquées ?
R : Oui, avec beaucoup. Je m'identifie d'ailleurs autant à Lily qu'à Rick, mais je suis très sensible à ce que Rick exprime (ou non). J'aime beaucoup Grace, également (je trouve ainsi que Julia Whelan est une actrice encore plus subtile que Claire Danes...). Les situations que rencontrent les adultes avec leurs ex me sont très familières (même si ma femme et moi avons des ex bien moins sympathiques et attachants que Jake et Karen), et celles des enfants entre eux ou avec les adultes, aussi, bien sûr.
Q : De même, il n'est plus un analyste qui ne vous racontera pas comment les créateurs d'une série sont allés puiser dans leur propre histoire celle qu'ils racontent au quotidien sur le petit écran (Marta Kauffman, David Crane et Kevin Bright en savent quelque chose !). Ce schéma s'applique-t-il à "Once and Again" ?
R : Oui, d'après ce que dit Marshall Herskovitz dans les interviews que j'ai lues (et faites...). Mais il s'agit plus précisément de transpositions que de véritables anecdotes autobiographiques. Winnie Holtzman transpose aussi beaucoup ses expériences dans les récits concernant les plus jeunes personnages. Ils savent tous puiser dans leur expérience émotionnelle et fantasmatique (plus que biographique, à proprement parler). Et ils ont de la bouteille.
Q : Dans l'épisode "Nourriture Spirituelle" [2.06], le docteur Rosenfeld (interprété par Edward Zwick) déclare à Jessie, 14 ans : "Comprendre le monde est un travail de titan". Nous l'expliquer constitue-t-il la quête des créateurs de "Once and Again" ?
R : Je crois que, plus modestement, "Once and Again" regarde la vie avec humour, tendresse, perplexité, émotion, tristesse, émerveillement, joie... et nous fait partager tout ça. Ils ne cherchent pas à "expliquer", mais à partager. C'est vraiment le maître-mot de la série : partage. Ils se considèrent comme nos égaux, pas comme nos maîtres.
Q : La première caractéristique que relèvent souvent les critiques à propos de "Once and Again" est son aptitude à mettre en scène des quarantenaires (phénomène de plus en plus rare à la télévision, sans parler du cinéma). On aurait pu l'appeler "fortysomething" ?
R : Oui, mais ça parle aussi de tellement d'autres choses... Moi je dirais que "Once and Again", c'est "thirtysomething + My so-called Life + Relativity". On y retrouve des éléments des trois séries, condensés et transcendés. C'est vraiment une somme d'expériences et de créations.
Q : En regardant "Once and Again", on ne peut s'empêcher de penser à "My so-called Life" (des enfants vivant mal leur relation avec leurs parents, une réflexion aigue sur la vie, un contexte littéraire fort…). Pourtant, les deux séries se complètent sans jamais se reproduire. Cela illustre-t-il le fait que l'on peut traîter la même histoire sous deux angles différents, chacune ayant sa propre liberté de penser ?
R : Oui, bien sûr. Mais le contrepoint des parents dans "My so-called Life" me paraissait moins fort, parce que moins conflictuel. Ici, avec le dédoublement (Rick, Lily, leurs ex), c'est plus varié, donc plus subtil, donc plus riche.
Q : Le réalisme, pour vous, c'est plutôt "Once and Again" ou "Loft Story" ?
R : Dans la mesure où on sait que "Loft Story" est également une fiction, écrite et mise en scène, on peut effectivement dire que "Once and Again" est une meilleure fiction réaliste et ceci pour des raisons artistiques bien précises : les scénaristes savent écrire et ont quelque chose à dire, les acteurs savent jouer et ont quelque chose à montrer, tout le monde y fait son métier d'artiste, personne n'oublie qu'on est dans une fiction et personne ne fait semblant de se prendre au sérieux (alors qu'il n'y a aucune auto-ironie dans "Loft Story" qui traite les spectateurs comme des dupes et des voyeurs...)
Q : D'après vous, parlera-t-on dans dix ans de "Once and Again" comme d'une série qui a "changé" les séries, au même titre que "Le Prisonnier" ou "Hill Street Blues" ?
R : Peut-être pas d'une série qui a changé les séries, mais qui a changé la manière de les regarder. Je crois que, pour les spectateurs qui l'ont vue et aimée, les séries réalistes ne seront plus les mêmes. Ce sera très dur de faire aussi bien ou mieux. Il va falloir attendre. Mais d'un autre côté, quelle série réaliste vous a autant touché que "My so-called Life"... jusqu'à que "Once and Again" apparaisse (Aucune! [N.d.W.])? Personnellement, aucune. En fait, il n'y a pas vraiment de concurrence... "Once and Again", c'est une expérience assez unique, difficile à reproduire et à transmettre à ceux et celles qui ne veulent pas la regarder. Comme quand on va voir une représentation unique d'un spectacle qui ne sera jamais rejoué...
Les acteurs
Q : Beaucoup de gens ne connaissent "Once and Again" qu'à travers les traits finement dessinés de Sela Ward (accessoirement de Billy Campbell), nominée à deux reprises aux Emmy Awards et récompensée en 2000. Cet aspect n'a-t-il pas joué en défaveur de "Once and Again" par moments ?
R : Non, et je crois que ça n'est pas très important. La série est homogène. C'est bien aussi que Sela Ward ait attiré l'attention sur le travail collectif. Et elle le mérite, c'est une excellente actrice, même si Susanna Thompson est tout à fait de la même qualité (et ça ne m'étonnerait pas que Susanna Thompson soit nominée aux prochains Emmys).
Q : Après avoir connu la gloire grâce à "Romeo+Juliet" (de Baz Luhrmann), Claire Danes s'apprête à rebondir très fort avec plusieurs projets en finition. Jared Leto attire les plus grands cinéastes (Terrence Mallick, David Fincher), effectue quelques apparitions fulgurantes ("American Psycho", "La ligne rouge", "Fight Club"), puis explose littéralement ("Requiem for a Dream", "Panic Room"). On a pu voir des acteurs de "Relativity" dans "Il faut sauver le soldat Ryan", "The West Wing". Que va devenir Evan Rachel Wood, la petite interprète de Jessie dans "Once and Again" ?
R : Je suis sûr qu'elle a une belle carrière devant elle. Elle est intelligente (je l'ai interviewée...), alors je ne suis pas inquiet.
Q : Susanna Thompson donne sans doute lieu à l'une des plus belles prestations de "Once and Again", et de l'univers des séries de ces trois dernières années en général. Elle interprète également la femme défunte de Kevin Costner dans "Dragonfly", prochainement sur les écrans français. Il y a donc une vie après 40 ans ?
R : Ah ben, je veux ! Oui, c'est une actrice exceptionnelle. Vous l'avez vue dans "Star Trek : Deep Space Nine (Elle y interprétait Lenara Kahn, et est également apparue dans les deux autres spin-offs de Star Trek [N.d.W.]) ?) Et une femme intelligente, aussi.
Q : On compare souvent Evan Rachel Wood à Jodie Foster ou Nicole Kidman, pour sa précocité, son teint de porcelaine, sa palette d'émotions… L'avenir d'une jeune actrice de télévision se joue-t-il nécessairement au cinéma ?
R : Non. Les acteurs américains s'épanouissent aussi très bien au théâtre, par exemple.
Q : Il arrive qu'un(e) comédien(ne) secondaire s'impose dans une série à tel point qu'il (elle) permet à cette dernière d'atteindre un niveau supérieur de qualité (Emma Caulfield dans " Buffy The Vampire Slayer", Allison Smith dans "Buddy Faro"…). Pensez-vous que ce soit le cas avec Marin Hinkle dans "Once and Again" ?
R : Oui et non. Je ne la trouve pas aussi subtile et variée que les deux autres. Et je trouve que parfois, la "petite" Ever Carradine lui est bien supérieure - il faut être très intelligente pour interpréter un personnage comme celui-là (Tiffany, la compagne naïve de Jake [N.d.W.])...
Q : Les tonnes de programmes déferlant chaque jour sur nos écrans démontrent à quel point il devient difficile de réunir un casting homogène. Que dire lorsque celui-ci est constitué d'enfants, constituant pour ainsi dire la "spécialité" des créations Bedford Falls ?
R : Qu'on peut faire un casting homogène si on prend le temps, si on auditionne beaucoup de monde et si on a du goût. C'est vraiment la responsabilité des producteurs...
Q : Shane West est le seul jeune acteur de "Once and Again" à posséder un âge supérieur à celui de son personnage (au début de la série, West a 21 ans, contre 15 pour Eli). De nombreuses séries ("My so-called Life", "Dawson's Creek", "Friends"…) jouent ainsi avec les apparences, pour une plus grande maturité d'interprétation. Quel est votre sentiment à ce sujet ?
R : Peu importe l'âge réel de l'acteur si on y croit. Pour Eli, on y croit parce que beaucoup de garçons de 15 ans sont très grands en taille, aujourd'hui, et il le joue suffisamment "mal dans sa peau" pour que ce soit crédible. J'ai des enfants adolescents, alors je sais de quoi je parle.
Q : De Jennifer Crystal Foley (fille de l'acteur Billy Crystal, interprète de la "tornade" Christie Parker) à Mark Feuerstein (Leo, compagnon décontracté de Karen), en passant par Bonnie Bartlett (remarquable en mère de Rick) et Patrick Dempsey (oncle Aaron, souffrant de troubles de la personnalité), il n'est pas un second rôle de "Once and Again" dont la performance ait souffert un quelconque relâchement par rapport aux autres. Existe-t-il une marque de fabrique "Once and Again" ?
R : Encore une fois, je crois que ce sont les qualités des producteurs qu'il faut louer. Mais ce sont des gens qui travaillent beaucoup, qui ont de la bouteille et qui sont intelligents et humbles. Ca compte énormément...
La production
Q : David Clennon (interprète de l'ineffable Miles Drentell) était déjà de la partie sur "thirtysomething", livrant une performance remarquée. Edward Zwick et Marshall Herskovitz se sont rencontrés à l'Université, et n'ont cessé de travailler ensemble depuis (si ce n'est pour le cinéma). De "thirtysomething" à "Once and Again", Winnie Holtzman tient toujours une place prépondérante dans leurs créations. Plusieurs scénaristes ont emprunté le même chemin. "Once and Again", c'est une histoire de famille(s) ?
R : Les productions Bedford Falls dans leur ensemble sont un "work in progress". Une suite d'entreprises de longue haleine. Comme celles d'une troupe de théâtre qui monte des spectacles successifs avec des amis de longue date qui ont toujours travaillé ensemble, et avec des nouveaux venus.
Q : Travailler sur ABC (comme sur tout autre grand réseau) revient à accepter deux termes de contrat bien établis : d'une part vous avez droit à une totale liberté de création, disposant de budgets confortables, et d'autre part vous devez vous soumettre à la loi de l'audience, sans remettre en cause ses fondements. Sachant que les créateurs de "Once and Again" se plient à ces conditions depuis des années, pensez-vous qu'ils soient étonnés de l'annulation de leur dernière série ?
R : Non. Je remarque quand même que "Once and Again" a tenu trois ans. Son audience aurait peut-être été meilleure si la case horaire n'avait pas été chamboulée sans arrêt - mais c'est aussi grâce à ça qu'elle a trouvé son public : en " piquant " celle de "NYPD Blue"... Alors, je crois qu'on peut dire qu'il n'y a pas eu vraiment (comme pour "My so-called Life") d'abandon de la part d'ABC, mais "Once and Again" n'est pas la seule série de la chaîne. C'est déjà miraculeux d'être arrivée à plus de 60 épisodes (22+22+19=63 épisodes [N.d.W.]), en les menant à terme comme ils l'ont fait. Il faut vraiment s'incliner. Tout le monde a fait son boulot. N'oubliez pas aussi que beaucoup de bonnes séries souffrent de durer trop longtemps. A mes yeux, trois ou quatre ans c'est parfait. Je ne suis pas sûr qu'ils auraient pu continuer plus longtemps, et n'oubliez pas que Zwick et Herskovitz ont interrompu volontairement thirtysomething au bout de 4 ans. Ils pensaient qu'ils n'avaient plus rien à dire.
Q : Quand on lui demanda s'il était possible que "Once and Again" soit récupérée par une chaîne du câble (comme ce fut le cas pour "Sliders", passant de la Fox à Sci-Fi Channel), Marshall Herskovitz répondit que les frais de production seraient trop importants, obligeant les acteurs à diviser leur salaire par deux. Les producteurs de "Once and Again" sont-ils donc contraints de rester sur ABC éternellement ?
R : Non, mais il faudrait qu'on leur fasse des propositions ailleurs.
Q : Edward Zwick projette de réaliser un film avec Tom Cruise, produit par Marshall Herskovitz ("The Last Samurai"), risque-t-on de ne plus revoir les deux créateurs de sitôt à la télévision ?
R : Si, mais je crois qu'il faut laisser les créateurs s'essayer à différentes choses. On ne peut pas faire des séries magnifiques sans arrêt. C'est une question de rythme personnel. Ca ne me gêne pas qu'ils fassent des films ! Personnellement, je trouve que "Shakespeare in Love", produit par les deux, est un film magnifique. J'ai très envie de voir "I am Sam", même si la critique US et française l'a éreinté (Première a tout de même attribué "2 étoiles" à ce film bénéficiant de "l'approche d'une réalisatrice plus occupée à faire preuve de retenue et de sincérité qu'à imaginer sa cheminée croulant sous les statuettes" [N.d.W.]).
Les fans
Q : Après les habituelles pétitions, quelques actions sortant de l'ordinaire (par exemple l'envoi de bouteilles de Tabasco, boisson préférée des aliens, aux responsables de la chaîne diffusant "Roswell"), les fans semblent marquer une nouvelle étape dans l'adoration d'une série à travers "Once and Again". Ici, il ne s'agit plus de missives bien senties, mais d'achats de publicités dans les journaux ("The Hollywood Reporter", "Variety"), d'envois de bouquets garnis à l'image de la série, de manifestations devant les studios de Disney, de locations de panneaux d'affichage en plein Hollywood… Les fans investissent désormais de leur temps, de leur argent pour la défense d'une série. Faut-il y voir une montée en puissance de cet univers encore mésestimé par les médias ?
R : Oui, et une volonté des spectateurs de s'exprimer. Mais ça n'est pas nouveau. Des séries ont déjà été "sauvées" par leurs fans (en particulier grâce à VQT, "Viewers for Quality Television", dont je parle dans "Les Miroirs de la Vie".) L'Internet accentue les possibilités de communiquer et de s'organiser (créée en 1984 par Dorothy Swanson, l'association VQT revendiquait comme objectif d'"influer sur les réseaux commerciaux pour qu'ils poursuivent la diffusion des séries dont les qualités sont reconnues par la critique , et ne les annulent pas en raison de chiffres d'audience insuffisants", sauvant notamment "Cagney & Lacey" et "China Beach" [N.d.W.]). C'est bien...
Q : De nombreux exemples ("Once and Again", "Felicity"…) ont démontré que le soutien des fans ne suffisait pas à convaincre les grands réseaux, annulant une série faute de rentabilité . A une période où l'argent fait office d'arbitre implacable, pensez-vous que le combat vaille encore la peine d'être mené ?
R : Bien sûr. Tous les combats pour la qualité valent d'être menés. Autrement, il n'y a plus qu'à se flinguer. Et ce n'est pas parce qu'on ne gagne pas à tous les coups qu'il faut abandonner. Chaque pouce gagné est gagné pour les combats futurs.
Q : Plus de sept ans après son annulation (la série commença sa production en 1994), les fans de "My so-called Life" ont obtenu, à coups de pétitions acharnées (et avec le soutien de Jason Rosenfeld, ancien employé de la BMG), l'édition de DVD exclusifs de la série, tandis que seuls quelques épisodes avaient jusqu'alors eu droit à un tel traîtement. Peut-on ainsi espérer voir "Once and Again" renaître de ses cendres d'ici quelques années ?
R : Je pense que c'est tout à fait possible, car la série a eu beaucoup plus de public que "My so-called Life". Mais ça ne se fera probablement pas tout de suite. Ils prendront leur temps... Mais ces DVD de "My so-called Life", ils sont déjà sur le marché ? Vous les avez vus ? Dites-m'en plus (distribué par Another Universe, un pack DVD exclusif a été lancé en édition limitée sur le web [N.d.W.] ! ! !
Q : Consultez-vous les sites Internet dédiés aux séries que vous appréciez, "Once and Again" en particulier ? Qu'en pensez-vous ?
R : J'aime bien voir que des amateurs se dépensent pour faire connaître ce qu'ils aiment. Moi, je suis plutôt "sites généralistes", mais je fréquente les sites de "Buffy", du "Caméléon", de "The West Wing", de "Once and Again".
Le succès
Q : Comment expliquer le fait que les noms de Steven Bochco, David E. Kelley, Chris Carter, John Wells, Joss Whedon fassent désormais partie du décor audiovisuel, tandis que ceux d'Edward Zwick, Marshall Herskovitz, Winnie Holtzman demeurent inexorablement méconnus du grand public ?
R : Ils ne sont pas méconnus, mais je pense que leurs thèmes et leurs traitements touchent un public plus restreint. Tous les publics ne regardent pas tout. C'est comme ça. Il y a des écrivains ou des musiciens marquants qui, pendant longtemps, n'ont touché qu'un public restreint et l'ont fidélisé avec les années. Ce qui compte n'est pas la taille du public, mais l'intensité de ce qu'il échange avec les créateurs. Sur ce plan-là, je crois que ceux de "Once and Again" sont très, très gratifiés.
Q : Régulièrement, "Once and Again" fait "tourner son effectif", mettant en avant tel ou tel personnage, avant de le laisser reposer durant plusieurs épisodes. De manière semblable à "Oz" ou "The Soprano", réduisant leur nombre d'épisodes par saison pour une plus grande cohérence scénaristique, n'est-ce pas là le meilleur moyen d'offrir à une série une durée minimum de quatre, cinq, voire six saisons ?
R : Pas forcément. Je ne crois pas qu'il y ait un nombre infini d'histoires à raconter sur un thème donné. Au bout d'un moment, il faut évoluer, changer, passer à autre chose. "Friends" souffre beaucoup du fait que ses créateurs (et son public) n'aient pas voulu qu'elle évolue... ou qu'elle s'arrête.
Q : Pensez-vous, comme de nombreux fans et critiques, que le changement de cases horaires à répétition, opéré par ABC sur "Once and Again", constitue le motif numéro 1 des faibles résultats d'audience de cette dernière ?
R : Oui, c'est sûrement un facteur. On ne peut pas fidéliser si on change sans arrêt la case.
Q : Le système de relevé d'audience Nielsen est-il viable ?
R : Je n'en ai aucune idée. Je sais qu'il n'entre pas seul en compte : la critique, le public, les awards, les goûts personnels des executives comptent aussi. Mais on est dans un système commercial. Ce qui est magnifique, c'est de pouvoir faire "Once and Again" dans ce système-là. A titre de comparaison, TF1 ou France 2 qui ont les taux d'audience les plus forts du monde, sont vraiment inexcusables de ne pas produire des fictions vraiment originales à côté de leurs soupes...
Q : Dans "Les Miroirs de la Vie", vous évoquez le fait que les séries d'aujourd'hui (certaines, du moins) ont une mémoire, se nourrissent d'elles-mêmes. N'est-ce pas un aspect qui a nui à "Once and Again", empêchant le téléspectateur occasionnel de prendre la série en cours de route, comme il le ferait pour "The Pretender" ou "Alias" ? "Once and Again" constitue-t-elle une série trop exigeante ?
R : Non, parce qu'on peut la prendre en route, je le crois vraiment. Le plaisir est maximum pour ceux qui l'ont regardée depuis le début, mais ça n'est pas indispensable. Et puis, dans un autre genre, "Oz", c'est pareil : il y a des histoires qui remontent au pilote ! Mais tout le monde n'a pas vu "Oz" depuis le début. Et il n'y a JAMAIS de résumé...
Q : Vous précisez également que "Once and Again", à ses débuts, connut un succès si phénoménal qu'ABC lui attribua la case horaire de "NYDP Blue", jusque fin 1999. Trois ans (et une ultime saison chèrement acquise) plus tard, le rêve touche à sa fin. Comment ne pas être déçu en imaginant le triomphe qu'aurait pu devenir "Once and Again" ?
R : En réalité, on les a lancés dans cette case, et ça a si bien marché, qu'ils ont décalé le début de saison de "NYPD Blue" à janvier pour permettre à "Once and Again" de s'installer durablement. Cela dit, encore une fois, je ne crois pas que "Once and Again" pouvait être "un triomphe". Je crois qu'elle aurait sans doute pu durer encore un an, mais pas plus, avant que ses auteurs décident de s'arrêter. Et elle n'aurait jamais eu le public de "E.R." ou "NYPD Blue". C'est une série trop intimiste, trop cérébrale pour ça.
Q : "My so-called Life" est ce qu'on peut appeler une "série culte", au sens véritable du terme.
R : Oui, pour "My so-called Life", je pense que le terme s'applique parfaitement...
Q : Après une annulation prématurée (au bout d'une saison, soit 19 épisodes), elle fut diffusée en boucle sur MTV, qui pour la première fois s'attardait à ce genre de programme. Si là n'est pas la seule raison de sa courte carrière, on peut penser que "My so-called Life" faisait preuve de trop de maturité, d'une trop grande avance sur son temps. En est-il de même pour "Once and Again", que certains ont avoué ne pas regarder car renvoyant à trop d'aspects pénibles de leur propre existence ? Le public a-t-il peur de se regarder dans le miroir ?
R : Je crois que ça n'intéresse pas tout le monde de regarder vivre des gens qui leur ressemblent. D'ailleurs, tout le monde ne se "retrouve" pas dans "Once and Again", dont les personnages sont tout de même éminemment positifs ! ! ! Les gens négatifs en permanence doivent trouver très agaçant de voir Rick, Lily et leurs enfants toujours trouver du positif dans tout ! Et je crois qu'il y a plus de gens négatifs que de gens positifs (il n'y'a qu'à voir le nombre de guerres...).
Q : M6 diffuse les deux premiers épisodes de "Once and Again" en prime-time, ce dont peu de séries ont bénéficié sur la chaîne jusqu'à maintenant, puis relègue la suite de la saison 1 en seconde partie de soirée, le tout lors des grands départs en vacances (été 2001). Elle offre ensuite à la série une "deuxième chance" en plaçant la saison 2 en prime-time, fin 2001. Au bout de six épisodes, faute d'audience, elle arrête les frais sans prévenir, promettant aux fans une éventuelle reprogrammation. Celle-ci arrive en mai 2002, à l'une des cases horaire les plus difficiles qui soit (milieu d'après-midi, en semaine). Le public français doit-il rire ou pleurer ?
R : Je crois qu'une diffusion l'après-midi, c'est mieux que pas de diffusion du tout. Une série qu'on ne diffuse pas, c'est une série qui ne peut pas vivre. Il faut encourager tout le monde à la regarder, même en VF, même dans l'après-midi (les magnétoscopes ne sont pas faits pour les chiens).
Q : "Once and Again" (au même titre que "Malcolm in the Middle", "Millennium", "Oz", "Sex and the City", "The Soprano", "The West Wing"…) symbolise la nouvelle donne en France depuis quelques années : d'un côté, des chaînes hertziennes produisant des efforts, mais refusant de s'impliquer dans leurs séries (aucune des oeuvres citées n'a été diffusée dans son intégralité), et d'un autre côté, des chaînes du câble et satellite faisant figure de références (on compare souvent "Série Club" et "Téva" à "HBO"). Aujourd'hui, la qualité a-t-elle un prix ?
R : Je crois que la télévision en France n'a pas encore atteint sa maturité. Les chaînes hertziennes ne voient pas les spectateurs comme des adultes. Il va falloir encore un certain temps pour qu'elles comprennent. Mais elles ne comprendront que si les spectateurs le crient très fort et très longtemps....
Q : Avec "Once and Again", ce sont également de nombreuses autres séries majeures de ces dix dernières années qui nous quittent ("Ally mc Beal", "X-Files", "Friends", "Oz", dans une moindre mesure "Felicity" et "Roswell"…). Ne pensez-vous pas que le petit écran risque d'en souffrir, marquant une période transitoire dans la marche vers l'ultime reconnaissance ?
R : Mais il y aura d'autres belles séries ! Depuis 20 ans, il y en a tout le temps. Pas tous les ans, mais presque. Tout passe, tout se transforme, tout change. Il faut être ouvert aux choses nouvelles. Si les créateurs peuvent finir une création et passer à la suivante, les spectateurs le peuvent aussi.
La presse
Q : "Génération Séries" (auquel vous contribuez régulièrement) constitue LE magazine de référence français dédié aux séries. Après plusieurs appels restés sans réponse, celui-ci n'a toujours pas consacré de dossier à "Once and Again". Envisage-t-il de le faire dans les mois qui viennent ?
R : Je l'ignore, car Christophe Petit, qui dirige la revue, ne semble pas vouloir que j'y collabore de nouveau depuis le retour de "Génération Séries" dans les kiosques. Il faudrait le lui demander (plusieurs tentatives par e-mail se sont avérées infructueuses [N.d.W.]). Ce n'est pas exclu.
Q : Comment expliquer que la presse s'enflamme soudainement pour des séries, certes de qualité, mais rarement révolutionnaires ("Buffy The Vampire Slayer", "Charmed", "Roswell", "Alias"…), au point d'y consacrer article sur article, sans s'intéresser un tant soit peu aux créations qui devraient logiquement créer l'événement ("My so-called Life", "Once and Again", "Buddy Faro", "Profit"…) ?
R : Toujours pareil : pour parler de "Once and Again", il faut la regarder. Ça demande de l'intelligence, de la patience, de l'humilité. Ça demande de vouloir partager avec le public, et pas seulement celui de faire du spectaculaire... Ce n'est pas le cas de la majorité des critiques professionnels qui sont, en France, extrêmement paresseux et extrêmement ignorants. Et pas seulement dans le domaine des séries (il est tout de même à noter que la presse cinéma n'a rien de comparable avec celle qui traite les séries télévisées [N.d.W.]...
Q : Le magazine américain TV Guide possède une section désormais bien connue du grand public, intitulée "The best show you're not watching" ("La meilleure série que vous ne regardez pas"), parmi laquelle "Once and Again" fait figure de leader. Doit-on le prendre comme un honneur ou une malédiction ?
R : Un honneur, certainement. C'est leur manière de défendre des série de valeur, et ils se trompent rarement (ils l'ont fait pour "My so-called Life" ou "Now & Again" de Glenn Gordon Caron, avant de le faire pour "Once and Again").
Q : Vous avez participé à l'élaboration d'un dictionnaire des séries (Guide Totem "Les séries télé", éd. Larousse), unique en son genre, puis rédigé un essai retraçant l'historique des dramas américaines en tant que reflet de notre propre société ("Les Miroirs de la Vie", éd. Le Passage), qui sera suivi de deux autres volumes (dédiés aux comédies et aux séries "hors-normes"). Pensez-vous que de nouveaux auteurs vont sortir leurs plumes et s'engouffrer dans la brèche, laissée vacante en France ?
R : Je l'espère. Je le souhaite, et je le vois se faire : j'ai envie de lire ce que d'autres (comme vous, sur votre site) écrivent sur ces sujets-là. J'apprends en lisant les autres, et j'ai envie d'en apprendre plus. Christophe Petit, Alain Carrazé, Jacques Baudou, Jean-Jacques Schleret ont beaucoup écrit avant moi et m'ont beaucoup appris. Beaucoup d'autres écriront après nous, et c'est tant mieux. Alors, au boulot ! ! !
L'hommage
Q : Finalement, le plus bel enseignement que nous livre "Once and Again", n'est-ce pas que la vie vaut la peine d'être vécue, que le moindre geste venant du coeur a plus de valeur que toutes les belles promesses, que l'amour de l'autre passe par l'acceptation de soi-même ?
R : Ce que j'y vois, c'est en particulier trois enseignements importants : 1. la vie quotidienne est une source d'histoires passionnantes, 2. les qualités d'une œuvre sont proportionnelles au soin qu'on lui apporte 3. une œuvre de télévision est d'autant plus réussie que c'est une œuvre collective.
Q : Le label Melankolic (Massive Attack, Alpha, Craig Armstrong…), spécialisé dans le trip-hop, possède un dicton : "Glad to be sad" ("Heureux d'être triste"). Les créateurs de "Once and Again" pourraient-ils signer sur ce label ?
R : Je ne sais pas. Je ne trouve pas ça triste. Il y a beaucoup de moments très drôles, dans "Once and Again", et les moments émouvants ne sont pas forcément tristes. L'émotion, par définition, c'est variable.
Q : Puisqu'un film, un roman, un tableau de qualité peuvent procurer de la joie, au moins pendant un temps, vous sentez-vous plus heureux grâce à "Once and Again" ?
R : Ah, oui. On est très heureux quand on la regarde, ma femme et moi. En général, on en regarde deux épisodes d'un coup. On regardera les trois derniers le même soir, on se fera une soirée spéciale rien que pour ça. Et j'envisage sérieusement de tout revoir depuis le début.
Q : Quels mots auriez-vous envie de dire aux créateurs de "Once and Again", si vous les aviez en face de vous ?
R : Je les embrasserais. Et je leur demanderais si je peux bosser avec eux, même si c'est seulement pour balayer ou leur apporter le café.
Q : Finalement, quel souvenir garderez-vous de "Once and Again" ?
R : Un excellent souvenir (qui n'est pas fini, puisque nous n'avons pas encore tout vu). Je me sens plus riche. C'est une belle expérience, bien supérieure à celle que m'ont procurée beaucoup de films de cinéma.