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Lost - Les Voyages dans le Temps, c’est fait pour tuer Hitler

He’s Our You: Temps, taupe, torture, et méchant mulsulman

Par Ju, le 28 mars 2009
Par Ju
Publié le
28 mars 2009
Saison 5
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Cette semaine, une critique un peu particulière d’un épisode pas forcément facile à analyser. He’s Our You, c’est avant tout une scène de fin très forte, mais ce n’est pas une raison pour s’arrêter à ça. Non, cet épisode c’est aussi une gestion pas crédible du Temps, de la torture, un méchant mulsulman, et une taupe potentielle ! Toute ressemblance avec une série républicaine puante serait bien entendu fortuite.

Avant d’ennuyer la moitié des lecteurs avec mes états d’âmes, puis d’ennuyer l’autre moitié avec des théories fumeuses, un petit résumé s’impose. Histoire d’ennuyer tout le monde en même temps.

Résumé rapide, à 30 ans de la fin ?

Sur Lildelost version 70, Sayid et sa fabuleuse chemise mauve font plus ample connaissance avec le petit Benjamin Linus, et décident que le meilleur moyen de s’occuper pendant un voyage dans le Temps involontaire, c’est de tirer sur un gamin de douze ans.

C’est pas un rigolo, le Sayid. Tout petit déjà, il étranglait des poules.

Back to the Flashbacks

Je crois l’avoir déjà dit à plusieurs reprises, ce serait con de faire marche arrière maintenant, mais selon moi les flashbacks de Lost fonctionnent mieux lorsqu’ils illustrent une même histoire sur plusieurs époques. C’est sur ce schéma qu’étaient construits Walkabout ou Greatest Hits, deux des épisodes à flashbacks les plus réussis selon moi.

Evidemment, He’s Our You est l’exception qui confirme la règle. Ici, très nettement, les retours en arrière ne fonctionnent pas : la première scène avec Sayid enfant est écrite avec la subtilité d’un van Volkswagen en flamme au milieu d’une maison, les rappels sur sa période de tueur à gage sont catastrophiques (j’y reviens plus bas), et les trois pauvres explications sur sa présence dans le vol 316 auraient vraiment dû être présentées il y a quelques épisodes.

Plus que jamais, je reste très dubitatif sur la nécessité d’avoir autant éclaté la narration depuis quelques semaines. Non seulement ça pue le gadget superflu, mais en plus ça empêche les gens un peu con (à travers Le Monde) de comprendre quoi que ce soit à la série.

On en a gros !

Dans la suite, je ne vais pas trop parler de l’épisode en lui-même, car à part une paire de scènes sympathiques, on se faisait un peu chier. Ce que je vais faire, par contre, c’est utiliser He’s Our You pour aborder les quelques problèmes que me pose cette cinquième saison. Car oui, je commence clairement à avoir un problème avec la saison dans son ensemble, et même si aucun épisode n’a été vraiment catastrophique et que la série est loin de ronronner, j’ai quand même des raisons concrètes d’être mécontent.

J’en ai déjà un peu parlé la semaine dernière (la répétition est à la base de la pédagogie), mais depuis le cinquième épisode et la fin des voyages dans le Temps intempestifs je trouve que la pression est trop retombée. Seul LaFleur a réussi l’exploit d’être un épisode intéressant depuis la fin des flashs temporels qui donnaient du rythme au récit et entrainaient une incertitude réelle sur ce qui allait se passer. A force, les saignements de nez devenaient certes un peu ridicules, mais en contrepartie les épisodes étaient passionnants.

Depuis, j’ai un peu l’impression d’attendre désespérément qu’il se passe quelque chose. Les cinq derniers épisodes n’étaient pas désagréables, non, juste un peu dépourvus de tension.

Une des scènes qui m’a réveillé dans He’s Our You est celle où Sayid explique à Sawyer qu’il a compris pourquoi il était là, de retour sur l’île, trente ans dans le passé. J’avoue que je m’étais également posé la question. Qu’est ce qu’ils foutent là ? Qu’est ce que je suis censé attendre de leur présence sur l’île ? Pourquoi est-ce que je devrais me sentir impliqué dans ce qui leur arrive ?
Que Sayid se sente investi d’une mission (tuer le jeune Ben pour empêcher les crimes du vieux Ben) c’est un début, mais pendant ce temps Kate, Hurley et le Docteur Ducon font de la figuration, vides de toute motivation, sans aucun but. Ils attendent. Moi aussi. Le « We have to go back ! », si fort à une époque, me parait de plus en plus disproportionné, tant leur présence ne change rien, et tant leur retour était inutile.

Ce n’est d’ailleurs pas le seul reproche de ce genre que j’ai à faire à la série. On avait également eu le droit aux aventures décevantes de Jeremy Bentham il y a quelques semaines, loin d’être aussi formidables que ce que la simple évocation de ce pseudonyme en fin de saison 4 nous l’avait laissé envisager. Le clash entre Sayid et Ben, dont la raison nous a été révélée cette semaine, c’est la même chose. Autrement dit, beaucoup de bruit pour rien. La nouvelle attitude de Sayid pour Ben, son dégoût renouvelé du personnage, c’était pour quoi finalement ? Difficile à dire, tant la dispute parait banale. Sayid a tué tous les gens sur sa liste, Ben l’a remercié et lui a souhaité bonne chance dans ses entreprises futures.

Quel salaud, ce Ben !

Mon problème avec la saison peut donc se résumer ainsi : on voit apparaitre un peu partout du rafistolage pas forcément efficace entre le présent et les trous qui avaient été laissés dans les intrigues pour faire monter artificiellement le suspense, tandis qu’en parallèle on suit une histoire sans enjeux clairs où les personnages patientent gentiment et espèrent qu’on leur expliquera, un jour, ce qu’ils foutent là.
En bref, c’est très décevant.

Tirer sur les enfants, c’est mal !

Mais au moins, c’est surprenant. La partie un peu introspective de la critique est terminée, rassurez-vous, maintenant c’est voyage dans le Temps, théories à la con, et blagues idiotes.

Il en faut pour tout le monde.

La seule chose qu’on retiendra de l’épisode, au final, c’est sa dernière scène, très efficace, qui joue parfaitement son rôle, à savoir faire parler beaucoup de monde, un peu partout, pour dire des trucs pas forcément intelligents. Toute personne un peu réveillée pendant l’épisode avait bien compris que Sayid voulait tuer Ben, pas de surprise là-dessus. Ce qui est surprenant, c’est qu’il arrive effectivement à lui tirer dessus. Après tout, personne n’arrive jamais à atteindre personne dans cette série, dès que le Destin s’en mêle…
Donc c’est étonnant qu’il y arrive. Mais en fait, le plus étonnant, c’est surtout d’avoir vu un gamin se faire descendre dans une série de ABC.

Mais passons. Ben va s’en remettre. Et je suis désolé si certaines ne sont pas d’accord, mais ça ne fait aucun doute. Damon Lindelof et Carlton Cuse ont toujours expliqué que ce qu’ils voulaient éviter à tout prix en introduisant le concept des voyages dans le Temps, c’est de retirer toute conséquence à leur série à grands coups de réalités parallèles et de passé effacé. Je les vois mal faire volte-face comme ça, sans raison, en prétendant que toutes les scènes de Ben depuis le début de la série ne s’étaient jamais déroulées.

A mon avis, l’idée derrière cette tentative assez jouissive d’infanticide est bassement scénaristique : il s’agit de poser les enjeux du récit, et d’illustrer de la façon la plus percutante possible que ce qui doit arriver finira toujours par arriver. En nous montrant Ben survivre à une balle dans le cœur parce qu’il doit être vivant dans le futur, les scénaristes souhaitent nous prouver qu’il est impossible de changer le passé.
Et la seule raison de vouloir le faire aussi clairement, c’est pour rendre les enjeux encore plus grands quand, d’ici la fin de saison, les personnages voudront absolument changer un événement précis. Disons, un massacre. A tout hasard.

A ce moment là, on pourra vraiment commencer à s’amuser avec l’idée de boucle temporelle, en écartant l’hypothèse des futurs alternatifs une bonne fois pour toute. En effet, la série a mis en avant deux théories (assez proches) qu’il reste à tester. D’un côté, le Whatever happened, happened de Farfadet, qui signifie que tout ce à quoi on assiste s’est toujours déroulé de cette façon (Sayid a toujours été présent en 1977 pour tirer sur Ben qui s’en est toujours remis) et que rien ne peut changer. De l’autre, le concept d’autocorrection de l’Univers introduit en saison 3 par Mrs. Hawking, qui assure que si le résultat sera toujours le même, les détails peuvent quand même changer. Charlie était censé mourir, mais les circonstances de sa mort n’étaient pas fixées.
Très clairement, et pour remettre ça dans le contexte de la saison, les personnages arriveront peut-être à empêcher le gazage de la Dharma Initiative, mais quoi qu’il arrive tous ses membres finiront toujours dans une fosse commune perdue dans la jungle.

La Petite Partie Plutôt Pointue

Comme si tout le paragraphe précédent n’était déjà pas assez pointu…

Au détour d’une conversation plutôt animée (« Tuons l’étranger ! », « C’est un espion qui espionne ! », « Il a vu ma maquette ! », « Fais tourner, mec ! »), Radzinski propose à ses potes hippies de régler leur différent en passant un petit coup de fil à leurs responsables, là-bas, à Ann Arbor, dans le Michigan. Pour ceux qui ont la mémoire courte, Karen et Gerald DeGroot ont fondé l’Initiative alors qu’ils bossaient à l’Université du Michigan. Il faut suivre un peu, hein, c’est pas compliqué de retenir des détails évoqués en coup de vent il y a à peine trois ans et demi.

Si j’ai décidé de m’attarder deux secondes dessus, c’est parce que j’ai une théorie. Et je vous préviens, ça vaut vraiment le coup, parce que mes théories se sont toutes révélées fausses cette année, alors je sais de quoi je parle. Pour rappel, j’étais persuadé que Reiko Aylesworth allait jouer Annie (qu’on n’a toujours pas revue, même si j’ai bon espoir pour la semaine prochaine), et que Radzinski allait être Farfadet.

Voici mon raisonnement : on ignore complètement la date de l’extermination de l’Initiative par Les Autres. Tout ce qu’on sait, c’est que Ben était « adulte », et qu’il est difficile d’être plus précis que « adulte ». Il était joué par Michael Emerson, quoi, et c’est tout. L’autre détail connu sur la durée de vie de l’Initiative c’est que Kelvin, le Frère Justin lui-même, bossait pour Dharma… ce qui ne veut pas dire grand-chose non plus. Il est possible qu’il ait été recruté par les Autres se faisant passer pour Dharma, ou alors qu’il ait vraiment été engagé par Dharma, ceux du Michigan, ignorant tout du massacre de leur branche insulaire. Dans un cas comme dans l’autre, Kelvin était enfermé dans une station sans aucune communication avec l’extérieur, il pouvait bosser pour n’importe qui, et la date du gazage reste un mystère.

Ce qui, au final, n’a qu’un lien très limité avec ma théorie. Je pense qu’Amy fait partie de Les Autres. C’est pour cette raison qu’elle vote pour tuer Sayid (elle sait qu’il n’est pas l’un des leurs), et c’est pour ça qu’elle insiste lourdement dès que Ann Arbor est évoqué. Elle ne veut surtout pas qu’ils contactent les responsables de l’Initiative hors de l’île.
Elle veut garder le silence radio aussi longtemps que possible, elle est en position de pouvoir. En bonus, faire d’Amy une hostile donne une toute autre vision de sa première scène (le piquenique qui tourne mal) et explique pourquoi son bébé, Ethan, deviendra un de Les Autres.

C’était un peu laborieux, mais ça valait le coup, ne serait-ce que pour pouvoir écrire ça : Michelle de 24 est une taupe.

Ju
P.S. La semaine prochaine, j’évoquerai ma nouvelle passion : les pigeons dans les séries télé.
Et on parlera un peu de Lost.