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Lost - Critique du dernier épisode de la série

The End: Guys, where are we ?

Par Ju, le 1er juin 2010
Par Ju
Publié le
1er juin 2010
Saison 6
Episode 18
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Nous y voilà. Le moment que nous anticipions tous avec un petit pincement au cœur est finalement arrivé. C’est triste, mais c’est comme ça, on ne peut rien y faire. C’est l’heure de ma dernière critique de Lost...

Oh, et c’est aussi la fin de la série.

Bon, je vous préviens, c’est un peu long. Et c’est écrit dans ma syntaxe un peu personnelle, celle à base de virgules placées au milieu des phrases (en guise de parenthèses), qui fait le bonheur de mes lecteurs depuis maintenant 25 ans que j’écris sur Lost.
En dehors de ça, je vous rappelle que puisqu’on est sur Internet, tout ce que vous vous apprêtez à lire relève de la vérité absolue, doit être pris avec le plus grand sérieux possible, et n’est pas du tout sujet à discussion.

Allez, avant de nous lancer dans une analyse profonde et personnelle qui nous amènera à réaliser que « la science c’est bien, mais la foi c’est super trop bien », un petit résumé s’impose.

Résumé Rapide (de l’intégralité de Lost)

Lost, c’est l’histoire des rescapés d’un crash d’avion qui s’échouent sur une île au milieu du Pacifique.

Ces gens très beaux et torturés y découvrent des ours polaires, un bateau au milieu d’une clairière, un pied de statue avec quatre orteils, des stations scientifiques, une roue gelée qui fait voyager dans le Temps, un monstre de fumée qui déracine des arbres, une cabane qui bouge toute seule, un phare invisible, des psychopathes qui font des listes et kidnappent des enfants, des fantômes, un immortel qui porte de l’eyeliner, des ruines égyptiennes, une baignoire qui ressuscite les gens, un bouton sur lequel il faut appuyer régulièrement pour sauver le Monde, une bombe nucléaire, un écossais qui voit l’avenir, des cadavres de prêtres trafiquants de drogue, une grotte bouchonnée avec de la lumière magique, et un cheval.

À la fin, ils meurent tous et vont au Paradis.

Hearts and Minds

Je ne vais pas tourner autour du pot cent-huit ans, je préfère donner mon avis tout de suite avant d’oublier, ou qu’il se retrouve noyé au milieu des remarques plus ou moins intéressantes qui vont suivre. Ce dernier épisode de Lost m’a beaucoup plu, pendant presque une heure et demie.

Il était peut-être très prévisible dans son exécution, mais ça s’enchainait bien, c’était extrêmement émouvant, parfaitement réalisé, les acteurs étaient très en forme (sauf un), et globalement c’était un vrai plaisir à regarder. En deux mots, même si l’épisode était loin d’être « parfaitement parfait » (copyright Dr. Juliet), c’était un final réussi.

Tout ça, c’était vrai. Jusqu’au dernier quart d’heure.

J’ai lu beaucoup d’avis et de critiques sur ce dernier épisode depuis sa diffusion, et une grosse partie d’entre eux m’a semblé excessive, aussi bien du côté de ceux qui ont décidé de renier toute la série à cause de sa fin que des ravis de la crèche qui l’ont trouvé parfaite. Mon complexe de supériorité aurait tendance à me faire penser que mon avis est un peu plus nuancé.
En ce qui me concerne, et comme je le disais, j’ai trouvé ce final vraiment bon, avec cependant deux très gros bémols. Le premier concerne les flashternatifs, l’autre l’île. Et puisqu’en définitive on nous apprend que ces deux points n’ont strictement aucun lien l’un avec l’autre, je vais les développer séparément dans la suite.

En attendant, ce final fonctionnait au moins sur le plan émotionnel. Rien de ce que je pourrais écrire ne changera ça, mais ce que je peux faire par contre, c’est tenter d’expliquer pourquoi l’épisode et la fin de la série n’avaient absolument rien de stimulant sur un plan purement narratif.

Special

Ce qu’il n’y aura pas dans cette critique, c’est une liste de questions auxquelles les scénaristes auraient dû répondre. Déjà parce que c’est chiant à lire, et ensuite parce que ce qui constitue une « question » dépend tellement des sensibilités (et de la mémoire) de chacun qu’il serait vain d’essayer d’obtenir une liste un peu décente.
Et puis bon, on s’en fout un peu de savoir pourquoi Claire a abandonné Aaron sans raison au milieu de la jungle en saison 4, non ?

Plus que ça, la vraie raison pour laquelle je ne vais pas établir une telle liste, c’est parce que, à mon sens, le final ne se devait vraiment d’éclaircir que deux choses : la nature des flashternatifs et l’importance de l’île. Pour le premier point, j’en reparle (longuement) plus bas. Pour l’île, j’ai un peu peur que ce soit le plus gros problème de ce dernier épisode.

Sur Lildelost, toute l’intrigue du final repose sur ce qu’il arrive quand Desmond, Jack et Locke se rendent ensemble à la Grotte Magique des Fées, et participent à tout un manège possédant une symbolique sexuelle à peine dissimulée. Et vas-y que je descends dans les recoins sombres et humides de l’île, et vas-y que je m’agite autour de son bouchon. Ça aura au moins eu l’avantage de me faire ricaner bêtement.
Chacun de ces trois personnages a sa propre raison de vouloir démonter Lildelost. Jack pense que déboucher la Baignoire Magique lui permettra de tuer Locke. De son côté, Locke pense que ça fera couler l’île. Desmond, quant à lui, est simplement heureux d’avoir été remplacé par un zombie sans personnalité depuis son exposition à un tore électromagnétique géant.

Très clairement, tout ce pan de l’intrigue n’a pas le moindre sens.

Mais malgré ça, malgré les scènes idiotes, les histoires abracadabrantes ou les petites incohérences (Quitter un voilier en parfait état pour monter dans un avion qui a été réparé avec du scotch, vraiment ?), l’épisode reste divertissant et bien foutu. Ça se regarde, c’est agréable, les petites répliques plus ou moins drôles se succèdent, et ça n’est pas chiant une seule seconde. Bête oui, mais pas chiant.

Par contre, ce qui m’a vraiment dérangé c’est qu’à aucun moment on ne nous donne la moindre petite raison de nous intéresser à toute cette agitation du bouchon. L’ennui, c’est qu’on ne nous explique jamais clairement ce qu’il arriverait si le Monstre réussissait à s’échapper. Sans ça, l’intrigue sur l’île n’a aucun enjeu. Et sans enjeu, il est impossible de s’investir dans une histoire qui peut se résumer à des personnages s’évertuant à réparer un avion pendant que le héros réussit l’exploit de placer un rocher dans un trou, et que d’autres essaient tant bien que mal de nous faire croire qu’ils subissent des tremblements de terre.

Bouh du con, ca bouge !

À l’image des conséquences volontairement floues de l’évasion de Locke, on n’en apprend jamais assez sur l’île pour se soucier de sa destruction. Une explication comme « l’île est la source de la Vie, de la Mort, et du Reste » est bien trop abstraite pour mettre en valeur le conflit qui se joue. Et après avoir passé une saison entière à chercher un successeur au Protecteur de Lildelost, c’est quand même incroyable qu’on n’ait pas pris la peine de nous expliquer clairement pourquoi il était si important de la protéger.
Plus encore que de sa conclusion en forme de Purgatoire, la série dans son ensemble souffre du fait que, même arrivé à la fin, je suis toujours incapable de vous dire ce qu’était exactement cette île. Le mieux que je puisse faire, c’est vous répéter bêtement, et sans grand enthousiasme, ce que cette sixième saison m’a appris : « Lildelost, c’est un Bouchon (métaphorique) qui empêche le Mal de se répandre sur le Monde. Ce Bouchon (métaphorique) renferme un plus petit bouchon (littéral), préservant la Lumière la plus Lumineuse du Monde qu’on retrouve aussi au fond de chacun de nous. Et ça, ça se protège. Grave. ».

En plus du fait que la nature exacte de l’île reste vague (ce qui est vraiment problématique pour la série), un des gros reproches que j’ai envie de faire à The End est que cet épisode n’offre jamais à Lildelost toute l’importance qu’elle mérite. Une dispute autour d’un bouchon, c’est trop peu. Qu’elle n’ait pas le moindre rôle dans la résolution des flashternatifs, c’est encore moins que trop peu.

En définitive, l’île n’aura été rien de plus que le lieu où tous les personnages se sont rencontrés. Ils auraient fait connaissance n’importe où, ça n’aurait eu aucune incidence sur le dénouement tel qu’il nous est présenté. Et ça, pour moi, ça restera une décision scénaristique incompréhensible. Ignorer une grosse partie des mystères de la série, ce n’est pas vraiment un problème. Mais ne pas rendre faire honneur à l’île et à sa place primordiale dans la série, c’est d’une connerie monumentale.

Avant d’être une série de reposant sur des mystères (ou centrée sur ses personnages, peu importe), Lost était une série qui se passait sur une île. C’est indiscutable. À partir de là, on peut se demander pourquoi tout le suspense du dernier épisode se joue uniquement au Purgatoire.

Confirmed Dead

Mais avant d’en venir enfin au Purgatoire, et avant d’aborder directement les quinze dernières minutes de la série, j’aimerais parler un peu des flashternatifs indépendamment de leur résolution.

Lors de mon premier visionnage de l’épisode, et sans savoir vers quoi ils nous menaient, j’ai trouvé toutes ces scènes foutrement réussies. Pendant toute la première partie de l’épisode, c’était dans l’univers alternatif, et seulement dans celui-là, que j’avais vraiment l’impression d’assister à une fin de série. Et aussi répétitives soient-elles, les scènes de « révéil » des personnages m’ont paru absolument formidables. Elles relevaient de la manipulation pure et dure, on jouait à la fois sur la nostalgie, la musique, et le fait qu’on ne reverrait plus jamais ces personnages, mais ça marchait, et ça faisait pleurer.

Sauf qu’on pleurait uniquement parce qu’on ne saisissait pas exactement ce à quoi on assistait.

J’aimerais pouvoir juger les flashs séparément de leur explication, mais malheureusement je ne pense pas que ça soit possible. Je ne crois pas que la scène de Jin et Sun (ou celle de Juliet et Sawyer) reste aussi émouvante lorsqu’on sait qu’elle est purement imaginaire. La nature des flashternatifs, qu’on ne nous révèle qu’à la toute fin, pose autant problème pour ce qu’elle est que pour ce qu’elle implique sur le reste de l’épisode. Sans parler de ce qu’elle implique sur la saison.

Résumons rapidement. Dans les quinze dernières minutes, le très serviable Christian Shephard nous apprend que les intrigues qu’on a suivi toute l’année ne se déroulaient pas dans une réalité alternative créée par l’explosion de Jugghead, mais plutôt dans un lieu imaginaire créé par les personnages après leur mort pour qu’ils puissent se retrouver, se souvenir de leur vie, et passer à l’étape suivante... c’est-à-dire être encore plus morts qu’avant ?

Moi aussi je ferais la gueule si j’apprenais que j’etais mort.

Appelez ça comme vous voulez, le Purgatoire, les limbes (moi personnellement j’opte pour « La Fête Magique du Paradis »), la triste vérité est que les flashternatifs n’avaient aucun lien avec l’île ou les mystères de la série. En d’autres termes, il s’agissait d’une piste bonus. Et je ne suis pas sûr d’apprécier d’avoir passé la moitié de la saison sur une intrigue annexe, dont on s’est bien gardé de me dire qu’elle n’avait aucun rapport avec le reste jusqu’à quinze minutes avant la fin.

Deus Ex Machina

Le concept du « Live Together, Die Together » est assez intéressant, mais complètement à côté de la plaque. Que les gens se retrouvent après leur mort, c’est une idée réconfortante. Mignonne. Pleine de bons sentiments.

Très facile.

Indépendamment des croyances de chacun (et je ne suis clairement pas quelqu’un de très réceptif), je crois qu’on peut tous s’accorder pour dire que, d’un point de vue scénaristique, cette résolution était facile (tout le monde est heureux, dans la Mort !) et hors de propos (car on peut greffer cette fin à n’importe quelle série, livre, ou œuvre de fiction, sans avoir à changer quoi que ce soit).

Et si je suis habituellement plutôt manipulable, encore plus sur les fins de série, toute la dernière scène dans l’église m’a complètement laissé de marbre. Je n’ai pas pu verser ma larme, j’étais bien trop occupé à rire devant ces accolades au ralenti, et cette conclusion (neuneu au possible) où Christian Shephard ouvre littéralement les Portes du Paradis, sur une grande lumière blanche qui enveloppe tous les acteurs qui étaient disponibles le jour du tournage.

Et tout ça, c’est même sans aborder la tentative à la fois transparente, désespérante, et grotesque, de faire dans la neutralité religieuse. Sans doute pour rassurer les pauvres Sayid, Sun, et Jin, on nous fout donc quelques symboles issus de plusieurs religions dans la scène où Jack parle à son père. Mais cette diversion de dernière minute aurait sans doute mieux fonctionné sans la statue géante de Jésus qui apparait régulièrement dans l’épisode, sans Jack qui se prend pour le Christ tout du long, sans les deux anges qui entourent les Portes du Paradis ouvertes par un type qui s’appelle Christian, ou si toute cette séquence ne se déroulait pas DANS UNE ÉGLISE.

Amen !

Surtout que, bon, une fois que M. Night Shyamalan nous avait présenté son rebondissement, les scénaristes n’avaient plus besoin de maintenir la moindre cohérence de lieu. La scène ridicule des embrassades aurait alors pu se dérouler n’importe où. Comme par exemple, et à tout hasard, sur une putain d’île.

The Long Con

Cette année, ce que Cuse et Lindelof ont fait au travers des flashternatifs, c’est concevoir un nouveau mystère de toute pièce. Un mystère qui n’a qu’une cohérence très limitée, mais dont le seul but était de créer une diversion.

Pour les scénaristes, le Purgatoire est une vraie réussite, dans le sens où on nous livre un retournement de situation en lieu et place d’une conclusion satisfaisante (ou ayant le moindre rapport avec le reste de la série). C’est une belle victoire de la paresse.

Pour moi, l’idée était clairement de terminer sur un rebondissement, dans le seul but de nous faire oublier tout le reste. Plus que ça, Cuse et Lindelof voulaient reproduire leur plus gros succès, l’énorme « We have to go back ! ». À l’échelle d’une saison. Le souci c’est qu’il ne faut absolument pas réfléchir à la cohérence des seize épisodes précédents, et il ne faut surtout pas penser aux contradictions, au fils Shephard qui n’a aucune raison d’exister, aux méchants gangsters qui meurent dans la mort, au rôle de Desmond, à l’île engloutie, et j’en passe.

Avoir affaire à une réalité alternative aurait été trop simple ou trop logique.
Lindelof et Cuse voulaient quelque chose d’inattendu. J’imagine que, quelque part, ça a dû bien les amuser de terminer leur série sur le Purgatoire, après avoir passé des années à rejeter l’idée devant la presse et les fans. Mais même en passant outre le fait que les deux rigolos ont décidé d’achever plus de 90 heures de programme en jouant sur les mots, le résultat reste, la série s’achève sur la mort de tous les personnages. Ainsi, leurs réveils, leurs retrouvailles et leurs souvenirs n’ont aucune influence sur l’intrigue de la série. Non seulement tout le suspense et l’émotion du final se sont joués uniquement dans les flashternatifs, mais en plus on apprend au dernier moment qu’il s’agissait seulement d’une illusion.

Toutes les scènes émotionnelles et cathartiques, qui à elles seules faisaient tout l’intérêt de l’épisode, n’étaient rien d’autre qu’une arnaque monumentale. Un rebondissement. La conclusion de la série n’a pas lieu suite à ces scènes, la vraie conclusion c’est Jack et Locke courant au ralenti sous un faux orage. La fin de Lost se joue à travers un coup de poing sauté digne des Power Rangers.

Aïe.

La chose à ne surtout pas faire avec ce final, c’est s’arrêter pour y réfléchir deux minutes, et laisser de côté les émotions pour prendre vraiment conscience du tour de passe-passe qu’on nous a servi en guise de conclusion.
Car en fait, c’est très simple, Carlton Cuse et Damon Lindelof n’avaient pas la moindre idée de comment finir leur série. Ils ont donc créé un univers tout entier pour apporter à leurs personnages des résolutions émotionnelles, et artificielles. Les deux auteurs n’ont pas eu le courage nécessaire (ou le talent) pour clore leur histoire de façon émotionnellement satisfaisante sur l’île, ils ont donc opté pour la solution de facilité, très agréable sur le coup mais plus du tout a posteriori.

Catch-22

Comment se réjouir de voir Sawyer retrouver Juliet quand son personnage n’atteint aucune résolution satisfaisante sur l’île ? Il vient de tuer une partie de ses amis dans un sous-marin et s’échappe en avion. C’est tout. Bon courage pour la suite ?

C’est parce que les flashternatifs ne se révèlent sans incidence qu’à la dernière minute qu’on ne réalise pas tout de suite le problème. Mais ça ne dure qu’un temps. Il faut bien vite admettre que la véritable conclusion des personnages se joue à la façon dont on les a quittés sur Lildelost. C’est le chemin qu’ils ont parcouru sur l’île pendant le dernier épisode, et nulle par ailleurs, qu’on est forcé d’examiner. Et ce n’est pas franchement brillant.

Dans ce dernier épisode, Ben ne fait que subir les événements (et la chute d’un arbre). Claire fait un peu la tronche avant de changer d’avis (et de personnalité) sans raison pour la énième fois de la saison. Desmond n’est toujours pas un vrai personnage. Miles est très drôle et aime le ruban adhésif. Lapidus est un peu frustré d’avoir passé trois jours dans l’eau, incapable de décider vers quelle île il préférait nager. Le Monstre est vaincu sans imagination (ni fumée), sur un coup de chance, lorsque Kate décide de justifier un peu son existence.

Et avec ça, ce qu’on essaie de nous faire croire, et qui me révolte un peu, c’est que cette absence de développement des personnages (ou de conclusion qui aurait dû leur être apportée) n’a aucune importance. Car ils sont tous super heureux d’être morts. Enfin, tous sauf Lapidus, qui n’apparait jamais au Purgatoire car il a été envoyé directement au Paradis des Hôtesses de l’Air, comme tout pilote qui se respecte.

Comme ce fut le cas toute la saison, Hurley et surtout Jack s’en sortent le mieux.

Le premier a la chance d’être intronisé « Chef de Lildelost » par un rituel qu’on commence à bien connaitre (Jacob boit du vin, Jack de l’eau de source, Hurley un peu de boue). Quant au second, comment dire, ça faisait un peu six ans que j’attendais la mort du Dr. Jack Shephard, et je ne pourrais pas être plus ravi d’y avoir enfin assisté. Peu importe s’il meure pendant vingt minutes et dans trois endroits différents, c’est ce qu’on appelle faire durer le plaisir.

Le voir tituber au milieu des bambous, son rire à l’arrivée de Vincent, et l’ultime plan de la série sur son œil en train de se refermer... les dernières images de la série étaient parfaites. J’ai trouvé toute cette séquence formidable. C’était une idée très prévisible que je n’avais pourtant pas vu venir du tout. Du coup, c’est un peu dommage que les embrassades du Paradis, montrées en parallèle, m’aient empêché de prendre cette très belle scène avec le sérieux qu’elle aurait mérité.

Sayid et Shannon ? Vraiment ?
Aaaaargh... *mort*

Whatever Happened, Happened

Voilà, avec ça, je pense avoir plus ou moins fait le tour de tout ce que j’avais à dire de la fin de Lost. Et en me relisant rapidement, j’ai un peu peur de donner l’impression de l’avoir vraiment détestée.

Ce n’est pas vraiment le cas, je pense plutôt que tous les problèmes que j’ai énumérés trouvent leur origine dans deux idées bien distinctes. La première c’est que l’épisode ne fonctionnait que sur le plan émotionnel. La seconde c’est qu’une grosse partie des défauts du final provient directement de la saison 6, et qu’il ne serait donc pas juste de les attribuer uniquement à ce dernier épisode.

C’est pour cette raison que je n’ai pas attaqué cette conclusion une liste de questions sous le bras. Arrivé à ce point, je n’avais plus besoin de réponses, c’était trop tard pour ça.

Regardons les choses en face, ce dernier épisode arrive quand même à la fin d’une sixième saison qui est, à mes yeux, la plus mauvaise de la série. Une saison globalement ratée car peu engageante, manquant d’ambition, et en grande partie plombée par un gadget narratif dont la raison d’être était loin de justifier le temps qu’on y a investi.
Niveau construction, on a eu affaire à une vraie catastrophe, aussi bien pour l’arc du Temple que pour les longs passages à vide où on semblait ne rien faire d’autre qu’attendre la suite. Et les personnages ont, pour la plupart, été complètement desservis par leur incapacité à prendre des décisions cohérentes ou à faire preuve de la moindre personnalité.

Et Sun a posé beaucoup de questions. Avant d’oublier l’anglais.
Et avant de mourir.

À partir de là, oui, il était trop tard pour que le final nous sorte une résolution qui aurait relevé le niveau du reste de la saison. Ce n’était pas au dernier épisode de répondre aux trois mystères qui, selon moi, aurait dû être résolus d’une façon ou d’une autre avant la fin. C’était à la saison de le faire.

Et arrivé au final, c’était déjà trop tard pour ça.

 ?

Bon, je sais, j’ai dit que cette critique ne dégénérerait pas en une avalanche de questions non résolues, mais avouez que vous mourrez d’envie de connaitre les trois mystères très mystérieux auxquels je viens de faire allusion.

Non ?

Tant pis. Les voici quand même.

Mystère n°1 : la Cabane de Jacob
Il ne s’agit pas tant d’un mystère que de la preuve irréfutable que Cuse et Lindelof n’avaient qu’une très légère notion de qui était Jacob avant la fin de la cinquième saison. On a donc une cabane qui se déplace toute seule, entourée de cendres, où vit un mec invisible qui appelle à l’aide. Plus tard, Hurley y aperçoit Christian Shephard (donc le Monstre Fumeux) et l’œil d’un autre type, qui préfère garder l’anonymat. La Cabane est un gros mystère des saisons 3 à 5, sans réponse ni explication.

Mystère n°2 : l’Infection
Au cours de la série, Sayid, Claire, et toute l’équipe de Rousseau, sont victimes d’une terrible maladie qui rend les gens violents (dans leurs actions) et zombiesques (dans leur personnalité). Sayid pète un câble pendant toute la sixième saison, Claire fout un grand coup de hache dans le ventre d’un mec qui la regardait bizarrement, et le mec de Rousseau tente de la tuer avec leur bébé. Un des plus vieux mystères de la série (il date du début de la première saison), très présent dans la saison 6, sans réponse ni explication.

Mystère n°3 : les Problèmes de Fertilité
C’est la raison d’être de Juliet sur l’île, c’est une obsession personnelle de Ben (on ne sait pas pourquoi), c’est une grosse partie de l’arc de Sun et Jin sur les saisons 2 à 4. Et tout le monde s’en fout.

Certains prétendent que l’explosion de Jugghead est à l’origine des problèmes de fertilité. Je veux bien, mais alors il va falloir m’expliquer le rapport entre une bombe et des bébés qui meurent tous après six mois de grossesse. Sinon, moi je peux répondre à tout et n’importe quoi avec une résolution aussi vague. L’infection ? On n’en a jamais entendu parler avant 1977, c’est la faute de l’explosion ! La cabane qui bouge toute seule ? On n’en a jamais entendu parler avant 1977, c’est la faute de l’explosion !

C’est tellement convaincant que je retire ce que j’ai dit. Oubliez ces mystères. C’est d’une logique implacable. Toute la série fait preuve d’une cohérence absolument admirable de son premier à son dernier épisode.

Plus sérieusement, ces questions ne résultent pas d’une quelconque curiosité personnelle. S’il s’agissait de ça je préférerais carrément avoir des réponses à des mystères idiots, comme le coup de la pirogue qui voyage dans le Temps ou celui du lave-vaisselle meurtrier. Ce que je veux simplement montrer à travers ces énigmes, c’est que ça me parait un peu douteux de ne pas avoir répondu clairement (c’est-à-dire sans qu’il y ait 25 explications possibles ou sans retomber sur « c’est magique ! ») à des mystères sur lesquels se reposaient des pans entiers de la série et les motivations de la plupart des personnages.

À partir de là, j’ai un peu de mal à prendre Cuse et Lindelof pour des auteurs talentueux. Les types sont, avant n’importe quoi d’autre, deux bonnes grosses feignasses, et la façon dont ils se cachent derrière des déclarations comme « Lost a toujours était une série centrée sur ses personnages » me semble un peu pathétique.
Lost était une série qui reposait à la fois sur ses personnages et sur ses mystères. Sans l’un ou l’autre, ça n’aurait pas fonctionné. Sans les personnages, on aurait eu FlashForward. Sans les mystères, la série se serait résumée à un bon gros soap à connotations vaguement religieuses. Lindelof et Cuse ont choisi de terminer leur série en ne s’intéressant qu’à leurs personnages, très bien. Ils ont fait dans la guimauve, mais ils l’ont fait à merveille, c’est de la guimauve de compétition, et ça m’a suffit.

De bons scénaristes auraient juste été capables de faire les deux : offrir à la fois une résolution aux personnages et aux intrigues.

Tabula Rasa

Très rapidement en guise de bilan. La fin de Lost, grosse catastrophe ou pas ?

J’ai envie de dire « ou pas ».

Même si en définitive la série aura choisi de répondre à la seule question que personne ne lui avait jamais posée (« Où va-t-on après la mort ? »), je ne peux pas dire que cette résolution paresseuse et gnangnan me fasse réellement changer d’opinion sur Lost dans son ensemble.
La conclusion est bien trop indépendante du reste de la série pour avoir un tel effet.

Ceci étant dit, maintenant que j’ai une vision globale de la série, je ne crois pas que Lost fonctionne en tant qu’histoire complète. À la place, je pense qu’elle peut plutôt se résumer à une collection de moments, parfois parfaitement parfaits, mais sans trop de rapports les uns avec les autres. Lost c’est un beau bordel.
Cuse et Lindelof, loin d’être eux-mêmes des auteurs parfaitement parfaits, sont au moins passés maitres dans l’art des « idées cools ». Et il ne faut rien chercher d’autre dans ces idées cools que de la satisfaction instantanée, la joie de la claque dans la gueule, et le plaisir qu’on peut éprouver à rechercher du sens dans des mystères sans queue ni tête.

Lost était une série dont j’ai toujours adoré parler et me moquer, et qui me rendait toujours impatient d’en découvrir la suite. Après ça, peu importe si la fin est nulle. Et peu importe si je n’ai jamais vraiment compris toute la symbolique philosophique intemporelle qui se dissimulait derrière le Tatouage Magique du Docteur Ducon.

Ju