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Bref - C’est ma série ou c’est pas ma série ?

Bilan de la Série: Pour faire court, j’ai regardé une série française

Par Ju, le 2 août 2012
Par Ju
Publié le
2 août 2012
Saison 1
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Cet été, la rédaction de pErDUSA revient sur les moments marquants de l’année série écoulée à travers une succession de billets estivaux plus courts, plus faciles à digérer, parfaitement adaptés à la saison. Parce que, vraiment, on ne voudrait pas que vous passiez trop de temps devant un écran à cause de nous.

Pour résumer, quand on s’est tous dit qu’on allait parler de séries "pas américaines" vues cette année pour rendre hommage à Le Village, deux sentiments très forts et très contradictoires me sont apparus : d’un côté je trouvais que c’était une bonne idée, de l’autre je tenais absolument à participer pour ne pas me sentir exclu, et encore de l’autre je me suis senti exclu parce que je ne regarde que des séries américaines. Un problème compliqué, en deux sentiments et trois côtés.

Puis j’ai pensé à Bref.

Puis j’ai pensé à ce que j’allais bien pouvoir raconter sur Bref.

Puis j’ai pensé que ça faisait longtemps que j’y pensais et que je n’avais vraiment rien à en dire.

J’étais censé l’aborder comment, moi, cette série française faite de vignettes d’environ deux minutes et de plans d’environ deux secondes, qui ne raconte pas grand-chose, et dont, surtout, tout le monde a déjà parlé en long en large et en travers depuis son lancement, dans de nombreux, nombreux, nombreux articles dont les auteurs s’étaient apparemment tous réunis au préalable pour se répartir les titres pourris à base de jeux de mots foireux sur « Bref » ?

De cette réflexion intense et pleine de virgules sont ressorties deux choses. D’une, si article il devait y avoir, je devrais faire un effort surhumain et ne pas céder à la facilité et aux jeux de mots foireux avec « Bref » dedans. De l’autre, je n’avais pas une seule idée de la façon d’aborder cette série que j’avais pourtant suivi tous les jours (enfin, en oubliant le rythme de diffusion ridiculement amateur de Canal) depuis le mois d’août dernier, avec beaucoup d’assiduité (parce qu’un petit épisode, ça met de bonne humeur le matin au boulot) et de façon répété (parce qu’un petit épisode, ça met de bonne humeur tout court).
Comme beaucoup, j’aurais pu en faire des tonnes et replacer Bref dans la grande tradition de la shortcom française, mais j’avoue que j’aurais été rapidement emmerdé une fois passée ma phrase d’introduction expliquant que j’aime vraiment beaucoup Kaamelott et que j’ai vu trois épisodes de Caméra Café.

Enfin bon.

L’annonce surprenante de la fin de la série fût une bénédiction. Elle me permet en effet d’aborder le programme court de Canal Plus comme une œuvre complète, et d’être en mesure de vous expliquer de façon précise et définitive ce qui va me manquer, à la rentrée, quand le Grand Journal essayera de nous proposer un remplaçant tout pourri, avant de l’annuler au bout de quelques semaines pour le remplacer à son tour par une version plus longue de la météo.

La fin de Bref , ça veut dire que je n’aurais plus la chance de retrouver chaque jour (ou une fois toutes les deux semaines) un programme dont la force repose essentiellement sur son rythme visuel, son rythme d’écriture, sa réalisation, et sur plein d’éléments pas forcément nouveaux mais qui, mis ensemble pour la première fois, ont donné un ton neuf et une vraie originalité à la série.

La fin de Bref, c’est aussi la fin d’une série qu’on pourrait pompeusement qualifié de « générationnelle », dans le sens où elle s’adressait particulièrement aux personnes qui, comme moi, sont devenus incapables de regarder une série sans surfer sur Internet ou envoyer des SMS en même temps, et qui n’arrivent pas à se concentrer plus de deux minutes successives.

C’est la fin d’une série française faite par des mecs qui ont clairement regardé plein de séries américaines, et qui en ont complétement digéré les codes pour nous proposer des épisodes où le traitement des intrigues fil rouge, la gestion des arcs, les clins d’œil, les rebondissements et les cliffhangers ne m’ont pas dépaysé.

C’est la fin d’une série qui nous aura pondu des épisodes que j’ai trouvé très faibles (« J’ai passé un coup de fil », « Je suis né », « J’ai fait un choix »), des épisodes géniaux (« J’ai recroisé cette fille », « Je suis comme tout le monde », « On a enterré Croquette », « J’ai envoyé un texto », « J’étais dans la merde »), et d’autres épisodes étrangement émouvants (« On était des enfants »).

C’est une fin ouverte (dans l’histoire), une fin courageuse (dans l’idée) que j’ai accueillie avec surprise et respect, tout en me disant que ça valait sans doute mieux et que j’avais senti une petite baisse de régime, tout en applaudissant l’ambition supérieure de la « saison 2 », tout en me disant que Bref allait me manquer, tout en étant curieux de voir ce que les créateurs (Bruno Muschio et surtout Kyan Khojandi, un chauve sympathique issu du tout aussi sympathique lycée Clémenceau de Reims) nous réserveront par la suite.

Cette série je l’ai regardée, vous l’avez regardée, elle nous a regardés, mes potes l’ont regardée, mes potes m’ont regardé, mes potes m’ont dit qu’ils avaient pensé à moi en regardant « Bref, je perds mes cheveux ». C’était pas marrant. J’ai pas rigolé.

Car oui, Bref, c’était surtout une série à partager. Une série qui nous a permis de répéter à longueur de journées des répliques qui (même si elles ne remplaceront jamais celles de « La Cité de la Peur ») m’ont tout de même offert le très pratique « Elle était à poil... ». Une série qui nous a permis de nous moquer de la voix ridicule du gamin qui joue Je quand il était petit. Une série qui nous a amené à comparer nos épisodes préférés, nos moments préférés, nos vannes cachées préférées...
Une série qui, pour faire simple, nous a prouvé tout au long de l’année qu’il était possible de raconter plein de choses en moins de deux minutes, quand on a suffisamment de talent et qu’on parle suffisamment vite...

Bref, une très bonne série française.

Ju