Ben oui, c’est sûrement la meilleure nouvelle série de la rentrée. Et je le dis, malgré mon attachement irrationnel à Ringer (je vois que c’est moche, je sais que c’est cheezy, pas crédible une seule seconde, mais j’accroche vraiment beaucoup. Les plans sur la Tour Eiffel et Sarah Michele Gellar s’essayant au français y sont sûrement pour beaucoup).
Et Prime Suspect montre qu’une adaptation réussie d’une série étrangère est encore possible !
Qu’est-ce que c’est ?
Prime Suspect est la série qui pour les dirigeants de NBC avait le plus de chance de reprendre le flambeau de Hill Street Blues, LA Law et Urgences dans la case mythique du jeudi soir à 22h00.
Manifestement, c’est raté !
C’est aussi l’adaptation de la série anglaise homonyme qui a fait passer Helen Mirren à 46 ans du rang d’actrice exigeante de films intellos à celui de star anglaise populaire.
C’est avec qui ?
C’est Maria Bello, la proprio du Coyote Ugly, qui assure la relève.
Autour d’elle, on retrouve des petits gars d’HBO : Kirk Acavedo (Oz), Peter Gerety (The Wire) et Brian F. O’Byrne (Mildred Pierce).
Et Aidan Quinn pour la catégorie obligée du ‘il a failli être une star du cinéma, mais, maintenant c’est trop tard et le voici commissaire de police à la télé’. C’est l’équivalent féminin de ‘elle a failli être une star du cinéma, mais maintenant c’est trop tard et la voici mère de famille d’une ado à la télé’ (voir cette rentrée Madeleine Stowe dans Revenge et la Mutante dans Secret Circle).
De quoi ça parle ?
De la dure vie d’arrêter de fumer, de continuer à porter un chapeau et des lunettes de soleil en plein hiver et de rester crédible comme flic dans une brigade d’Irlandais mal dégrossis à New York.
Et c’est bien ?
Je ne m’y attendais vraiment pas. Avec un matériel original d’une telle réputation, considéré par beaucoup (dont moi) comme l’une des meilleures séries policières tous pays confondus… [1] Mais, c’est vraiment bien.
Contrairement à The Killing (ou bien Free Agents), l’épisode pilote n’est pas un décalque de l’original. C’aurait été de toute façon compliqué puisque le premier épisode de Prime Suspect UK dure 3 heures et demie.
Mais tout en utilisant une enquête policière complètement différente, il conserve l’esprit général de la série et la trame de présentation des personnages. Les deux femmes de la brigade sont isolées et passent à côté des enquêtes les plus intéressantes, le flic charismatique qui donnait le ton de l’ambiance machiste du commissariat meurt d’une crise cardiaque, des irrégularités dans son enquête pointées par la femme-flic conduisent à libérer le principal suspect.
Le sexisme ambiant englue toutes les péripéties autour de l’enquête. Dans le pilote, il est tellement marqué qu’on pourrait prendre ça pour de la caricature. Ou bien de la paresse dans l’écriture, qui se serait contentée de reprendre une ambiance datée, seulement caractéristique de l’Angleterre au début des années 1990.
J’ai l’impression qu’on n’est surtout jamais habitué à voir des relations aussi délétères entre collègues dans une série policière américaine. L’ambiance de vestiaire, cette fraternité masculine dans ce qu’elle a de plus grégaire me semble encore bien d’actualité. Et j’avais peur que cet aspect – pour moi, le plus intéressant de la série mais peu apprécié par les critiques US – ne s’estompe grandement dans les épisodes suivants. Au contraire, le deuxième épisode creuse ce sillon et maintient des relations hautement conflictuelles entre le personnage de Maria Bello et le partenaire du flic décédé dans le pilote.
Ses qualités d’enquêtrice vont être rapidement reconnues, à n’en pas douter, par d’autres flics, mais les tensions resteront entre les personnages, parce que Jane (ils ont gardé le prénom) n’est pas un personnage sympathique. C’est une vraie tête de mule, portée sur la clope et l’alcool, qui dit ce qu’elle pense.
Dans la version anglaise, elle fume et sombre dans l’alcoolisme. On sent bien ici qu’on est aux Etats-Unis : elle a arrêté de fumer et mâche frénétiquement du chewing-gum, et elle ne boit encore que le soir. De toute façon, il n’y a eu qu’une dizaine d’histoires Prime Suspect en Angleterre. L’objectif désormais est de produire 22 épisodes par an… Si Jane est alcolo dans trois épisodes, ça va être pénible sur le long terme. Et c’est pour ça que cette adaptation me plaît particulièrement : on sent qu’elle a été pensée ! Le choix de Maria Bello pour tenir l’ensemble était déjà un présage positif et après deux épisodes, on peut le dire, elle est vraiment formidable.
L’enquête dans le pilote était relégué au second plan, celle du deuxième épisode, bien plus présente, reprend une tradition de la version anglaise en s’attardant sur l’étude des conséquences pour un individu d’être soupçonné dans une enquête policière. Je ne sais pas s’il sera possible (et une bonne idée) pour la série de le faire à chaque épisode, mais j’espère qu’elle revisitera ce concept régulièrement dans la saison (enfin… avant son annulation.)
Une surprise originale dans la version américaine, c’est la présence d’une dose d’humour dans les scènes personnelles de la vie de Jane, là où la série anglaise virait encore un peu plus vers le glauque et le désespoir. Jane a une passion dans la vie : faire enrager l’ex-femme de son compagnon. Ca dure à chaque fois trente secondes dans les deux épisodes, mais c’est suffisant pour donner l’envie de retourner dans l’ambiance sexiste des enquêtes glauques de Prime Suspect la semaine suivante…
[1] Pour moi, ce sera les USA, l’Angleterre, la France et la Suède depuis peu…
