Critique des meilleures nouvelles séries télé (et des autres)
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The Real Jéjé of pErDUSA - Hommage à ces séries qui ne sont pas les meilleures de tous les temps, mais bon...

N°26: C’est pas la série du siècle mais…

Par Jéjé, le 21 février 2016
Par Jéjé
Publié le
21 février 2016
Saison Prise
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En ce moment, les séries que j’ai le plus envie de regarder ne sont pas les séries que j’estime le plus qualitativement. Comme assez souvent, en fait.

J’ai fini par m’habituer à cet état qui fait que j’ai du souvent du mal à regarder de façon spontanée une série une fois que j’ai commencé à penser qu’elle était un peu plus exigeante que les autres, plus éprouvante, plus sophistiquée, vraiment "meilleure"...
C’est dans cette catégorie que je range American Crime [1], The Leftovers, Rectify, Happy Valley [2], et même Louie ou Engrenages [3].
Des séries à qui j’ai/j’aurais mis des A sans aucune hésitation pour les tableaux de fin de semestre et que je cite volontiers quand il arrive que l’on me demande sur ce que j’estime être les meilleures séries du moment.

En revanche, si on me demande quelles sont mes séries préférées du moment, celles sur lesquelles je regarde dès qu’un nouveau épisode est diffusé, la réponse sera toute autre. En fonction du l’humeur et du jour, vous aurez le droit à :
— Cuffs, c’est trop bien. Bon, c’est pas la série du siècle mais…
— J’adore Code Black. Bon, c’est pas Urgences, mais…
— Supergirl. Déjà, c’est pas Jessica Jones, c’est un bon point. Bon, c’est pas super finaud, mais…
— Je suis complètement accro à la saison 6 de Real Housewives of Beverly Hills. Bon, c’est pas vraiment une série, mais...
— Les dernières saisons de Cheers. Bon, c’est pas du niveau du début avec Diane, mais…

Dans cette liste gentiment éclectique, il n’y a pas une seule saison à laquelle je ne mettrai un A.
Pour chacune, il existe dans le genre auquel elles appartiennent de bien plus grandes réussites, pour Cheers, au sein même de la série, il y a de bien meilleures périodes, et pourtant, c’est ce que je préfère regarder en ce moment. C’est ce qui me plaît.
Mais au delà de ça, toutes les cinq confirment comme bien d’autres séries imparfaites que les séries, c’est la forme de fiction qui me convient le mieux.
Celles-ci sont en effet la source de ce plaisir si spécifique du format, celui de retrouver semaine après semaines, épisode après épisode, de très chouettes personnages.

Oui, je sais, c’est un peu béta.
Mais ça explique pourquoi je suis de très (trop) nombreuses séries.

Pour moi, pour faire de chouettes personnages, il ne faut pas grand chose. Quelques caractéristiques sympathiques et le « bon » interprète. Deux ou trois comme ça dans une série, et je lui resterai fidèle pour des saisons et des saisons.
Mo Ryan [4] a éclairé de façon limpide mon rapport aux séries dans ses podcasts par l’utilisation régulière de son expression « characters you enjoy to hang out with », « les personnages avec lesquelles vous aimez traîner ». Je crois que sur la durée (et c’est tout de même un élément essentiel dans une série), je me fiche un peu des intrigues tant qu’elles permettent aux personnages et à leurs interprètes de « faire » leur numéros.
Je ne dis pas que je ne suis pas sensible à des mystères savamment pelotenés, à des jeux narratifs sophistiqués, à l’exploration de thématiques originales, l’idéal est évidemment quand tout fonctionne, mais je serai toujours plus indulgent pour les séries qui soigneront en premier lieu leurs personnages, voire chez lesquelles un interprète donnera une étincelle de vie supplémentaire à l’un d’entre eux, que pour les autres.
C’est sûrement pour cette raison que je n’ai pas été réceptif à la deuxième saison de Fargo. Une fois son histoire de guerre des gangs (apparemment brillante, d’après mes petits camarades) terminée, je ne voyais pas avec quel personnage j’aurais bien aimé traîner quelques saisons supplémentaires alors que j’aurais suivi avec plaisir les enquêtes et la vie domestique de Molly (Allison Tolman) de la première saison.
(Et c’est probablement pourquoi les sitcoms sont l’un de mes genres préférés).

« You wanna be where you can see,
the troubles are all the same.
you wanna be where everybody knows your name…
 »

Petit tour de mes séries (et personnages favoris) de ce début d’année sérielle…

1 Cuffs - Saison 1

On suit le quotidien…
d’un commissariat à Brighton, au sein duquel s’entremêlent les vies professionnelles et personnelles des ilotiers, des enquêteurs et de leurs chefs.

Bon…
On n’échappe à la découverte de la brigade par les yeux du newbie, aux enquêtes qui font échos aux problèmes personnels des policiers, à la glorification de l’abnégation des forces de police, aux méchants très très méchants (particulièrement dans le pilote)…

Mais…
Qu’est-ce qu’ils sont chouettes les policiers de Brighton [5], tous ultra ouverts et divers. Rien que chez les brigadiers, on trouve le newbie gay, le mentor noir, la collègue est lesbienne, celle qui porte le niqab et un gros. Et pour ne rien gâcher, ils se soutiennent tous les uns les autres. Si leurs interprètes avaient été choisis par la CW, il est peu probable qu’aucun de ces personnages n’aurait pu dépasser le stade de « cliché progressiste générique ». Incarnés par ces Anglais, chacun d’entre eux semble unique, leur camaraderie existe à l’écran au bout de dix minutes. Ajouté à ça que c’est Amanda Abington (Mme Watson) qui joue l’enquêtrice célibataire un poil désespérée, je n’avais envie que d’une chose : traîner avec eux pendant la prochaine décennie tous les automnes.
Las, la série a été annulée après huit petits épisodes.
Mais que cela ne vous empêche pas de faire connaissance avec PC Draper, PC Vickers et DS Moffat.
Ca vous fera patienter en attendant DC Fleming (Line of Duty) et DSI Gibson (The Fall) [6]

2 Code Black, saison 1

On suit le quotidien…
des Urgences d’un très gros hôpital de Los Angeles, qui a la caractéristique d’être très rapidement surchargé et en manque de tout, de matériel, de salles, de personnels. Quand c’est le gros gros bordel, y’a une petite ampoule qui s’allume sur le signe « code black ».

Bon…
Cette histoire de « code black », on sent bien que c’est un truc marketing des créateurs de la série pour faire « original » quand ils ont pitché leur série médicale tout ce qu’il y a de plus basique : des super médecins qui sauvent des vies toutes les trois secondes aux Urgences parce qu’ils sont vraiment super. Super et traumatisés. C’est l’autre argument « original ». Chacun d’entre eux a avec lui un gros trauma personnel que sauver des vies permet de supporter, d’oublier, de dépasser. A côté, la vie de Meredith Grey, c’est la Fête à la Maison.

Mais…
Tous ces artifices (faussement vendeurs) s’estompent assez rapidement. Ce qui est assez heureux puisqu’ils n’aident pas vraiment à alléger les dialogues. A partir de la mi-saison, la saison assume son classicisme et nous laisse profiter de notre temps avec ces chouettes médecins, presqu’aussi ouverts et divers que les policiers de Brighton. Mes préférences vont pour le chirurgien anglo-indien bienvieillant (et pas uniquement parce que c’est Zaf de Spooks), l’interne lesbienne débordée et la chef interimaire latina intransigeante du service.
Et je ne boude pas mon plaisir à voir Jeffrey Geiger incarnée par Marcia Gay Harden et Carol Hattaway par Luis Guzmán.

3 Supergirl - Saison 1

On suit le quotidien de…
Kara El-Zor, exilée, comme son cousin Superman, de Krypton sur Terre, qui, aidée de sa soeur adoptive et de ses petits camarades de son travail de jour, lutte sous le nom de Supergirl contre les différentes menaces qui s’abattent chaque jour sur National City.

Bon…
Les incursions féministes des débuts avaient l’allure d’un Girl Power un peu naïf, pas très convaincant et en décalage maladroit avec la célébration récurrente des bienfaits des organisations paramilitaires pour la paix dans le monde.
Et franchement, si quelqu’un chez DC pouvait faire un effort avec les noms des villes, ce serait gentil. Entre National City, Star City, Central City, j’ai un peu de mal à m’y retrouver et à les prendre au sérieux…

Mais…
Les aspects artificiels du contexte de la série, les méchants de la semaine pas toujours inspirés, les discours obligés sur l’héroïsme, la fadeur de la distribution masculine, tout passe grâce au trio central d’actrices. Melissa Supergirl Benoit et Chyler Leigh, dans le rôle (un brin ingrat sur le papier) de la soeur normale, ont une telle alchimie que leur duo est devenu la voute qui soutient le reste. On y retourne chaque semaine pour passer un peu de temps avec elles et on y reste, tremblant de voir leur relation (inhabituellement peu conflictuelle pour deux soeurs dans une série) mise à mal par les événements extraordinaires de leur quotidien.
Quant à Calista Flockhart, en magnat de presse / mentor féministe, elle semble ne s’être jamais autant amusée dans un rôle et constitue avec Benoist un couple comique très attachant.
Ces trois là sont vraiment ma super-clique favorite !

4 The Real Housewives of Beverly Hills - Season 6

On suit le quotidien de…
riches mondaines qui mettent en scène leurs petits désaccords, les exagèrent pour la caméra, finissent par y croire et se déchirent sincèrement mettant en péril leurs relations pré-existantes.

Bon…
ce n’est pas vraiment, complètement, totalement une série télé.
Et surtout les premières saisons de Beverly Hills ne m’ont jamais vraiment convaincu. J’ai rapidement abandonné ces Real Housewives au profit des drames familiaux énooormes de New Jersey et de toute la clique de Nene Leakes à Atlanta. Elles étaient beaucoup trop tristes à mon goût, empêtrées dans des problèmes de maltraitance conjugale et de dépendance à l’alcool trop réels pour s’en amuser, et bien trop méchantes les unes avec les autres,

Mais…
Feyrtys m’a convaincu d’y retourner en me vantant chaque jour jusqu’à ce que j’obtempère les mérites Lisa Rina, ex-Melrose Place, actuelle femme de Harry Hamlin. Avec l’autre nouvelle recrue de la saison 5, Ashley Abott des Feux de l’Amour, elle a modifié l’esprit de l’émission. Ces deux là sont là pour s’amuser et savourer leur mode de vie un brin superficiel. La pédale douce a été mise sur les engueulades et les mesquineries en tout genre. Désormais, on se régale des sorties humoristiques des deux nouvelles et de l’autodérision hilarante de Lisa Rinna.
Pour faire la cuisine ou pour corriger un paquet d’interrogation, y’a pas mieux que la compagnie des Real Housewives of Beverly Hills (90)2.0 !

5 Cheers [7] - saison 8

On suit le quotidien…
des habitués et du personnel d’un bar de Boston qui semble tout ce qu’il y a de plus traditionnel dans l’une des sitcoms les plus populaires de son temps et des plus reconnues, encore à l’heure actuelle, par la critique américaine et par les créateurs contemporains de séries.

Bon…
La période phare des débuts (dite des « années Diane ») est révolue depuis longtemps. Cheers n’est plus la screwball comedy qui tirait sa saveur particulière de son couple central (Sam et Diane) et du contraste entre les inspirations intello-snob de Diane Chambers et du milieu populaire dans lequel elle était forcée d’évoluer. Ce personnage ne fait plus partie de la série depuis la fin de la saison 5.
Un personnage qui représente pour moi la symbiose la plus parfaite que j’ai vue en matière de comédie entre une interprète et un rôle. Sur le papier, Diane Chambers avait tout pour devenir rapidement exaspérante et le cliché de la bourgeoise vaniteuse et superficielle. Pourtant, pendant cinq années, Shelley Long en fait un personnage constamment hilarant, émouvant, fragile.
Sans elle, la série n’a plus rien à voir avec ce qu’elle était.

Mais…
Le charme opère toujours. Devenue plus burlesque, Cheers repose davantage sur les gags, les malentendus et les one-liners que sur l’exploration douce amère des sentiments de ses personnages. Je suis bien moins sensible à cette version, d’autant que le nouveau personnage féminin, Rebecca, si comme Diane, est en décalage avec es réguliers du bar, a des aspirations plus financières qu’intellectuelles (c’est une grande admiratrice de Donald Trump). Pourtant, mon plaisir reste immense à retrouver cette galerie de personnages et d’acteurs d’un talent assez phénoménal, et particulièrement, Ted Danson, que je ne connaissais que par ses rôles dramatiques récents (Damages, Fargo…). Il était assez amusant dans Bored To Death, mais cela n’a rien à voir avec la sorte de génie comique modeste dont il fait preuve depuis le début dans Cheers : il peut dans un épisode briller en personnage principal et dans un autre rester en arrière plan et mettre en valeur ses co-stars en quelques petites apparitions.

Yep, définitivement, les séries favorites sont vraiment celles qui font vivre les paroles du générique de Cheers.

Jéjé
P.S. A cause de Drum, j’ai retrouvé les personnages de Law & Order : SVU avec lesquels je pensais avoir rompu définitivement. C’est ça aussi le bénéfice des séries qui durent. Et il est vraiment très chouette le nouveau ADA !
Notes

[1Suis bloqué après l’épisode 2.06. Je n’arrive pas à construire les conditions idéales pour regarder le 2.07. Je crois que j’ai surtout peur d’avoir le coeur broyé.

[2Pas encore commencée la saison 2 alors que j’ai été happé par la première.

[3Je ne me suis pas encore décidé à me lancer dans la saison 4 ayant pourtant adoré les deux précédentes…

[4Critique série désormais pour Variety et anciennement du Huffington Post

[5Brighton ! La ville de Feyrtys, du Pier brûlé, des filles-mères bourrées dans la rue à huit heures du soir et des policiers qui s’embrassent de Bansky !

[6J’ai une passion un peu étrange pour les sigles des grades de la police anglaise.

[7Cheers a un statut particulier dans cette liste, puisqu’elle sans conteste l’une des meilleures sitcoms - et séries - du siècle dernier !