Le chapitre à propos des influences de la télévision sur le décisionnel, et sur le système politique a montré à quel point il ne faut pas négliger l'importance et la puissance d'un tel média. Il est donc judicieux de s'intéresser par la même occasion, aux idées et aux valeurs qui sont véhiculées ici. Ignorer le rôle du plus puissant des médias dans notre république, c'est prendre trop à la légère le pouvoir que constitue le petit écran.
On reviendra ici sur des notions abordées précédemment afin de montrer la réalité d'une télévision justicière, d'une télé propagande et manipulatrice, en complément au chapitre
Les conséquences de la TV sur les décisions et le système politique.
La télé au service des citoyens ?
L'un des fléaux de cette télé « réalité » -dans le sens ou elle se dit proche de la réalité, du quotidien, et au service du citoyen et de l'état- c'est, pour commencer, l'utilisation abusive des certains termes aux valeurs fortes pour la république. Combien de fois a t'on vu un journaliste parler d'un pays « démocratique et libre » alors que celui-ci n'avait pas de presse libre, on l'a même utilisé pour parler d'un pays avec un partis unique ! Dans d'autres cas, il suffit qu'un pays ait abolis la peine de mort pour le voir qualifié de démocratique.
Comment peut-on véhiculer une notion de démocratie en l'assimilant à tout et n'importe quoi ? Comment la télé (et les médias) est capable de déformer un mot aussi fort dans un pays dit démocratique ? La démocratie -ou puissance du peuple, désignant un gouvernement où la souveraineté non seulement dérive en principe du peuple, mais encore est réellement exercée par lui (Le Quillet)- est une définition aujourd'hui revue et corrigée, qui sert de faire valoir à des démocraties de façade.
Mais, si ce mot est un exemple des valeurs bafouées véhiculées par la télé, il n'est pas choisi au hasard, car le terme démocratique est bien trop souvent appliqué à une télévision qui se contente (encore une fois) de ne se soucier que d'elle.
Combien de fois une émission ou une chaîne a prétendue incarner la France ? Là ou la démocratie se sert des chiffre pour se justifier, la télé se contente de son libre arbitre pour véhiculer les idées qu'elle estime majoritaire, et donc, démocratique. La meilleure façon de se donner un rôle « démocratique », c'est bien évidement de faire intervenir le public, garant et représentatif du peuple, nous le savons tous ...
Les émissions de société sont l'endroit idéal pour ce genre de démocratie. Les débats organisés, le public au fond, les interactions entre animateurs et les individus prétendent, même si ils ne se l'avouent pas, représenter la masse ou l'opinion publique, mais se contentent de véhiculer un conformisme préfabriqué par un rédacteur en chef. Et pourtant, on se sait pas qui sont ces gens, on ne sait pas comment ils sont sélectionnés, et l'enregistrement et le montage sont-ils censeurs ? Existe-il un débat public en direct ? Ces soit disant représentants du peuple, nous ne connaissons ni leurs motivations, ni leurs origines.
La « démocratie » a envahie la TV, puisqu'il en est de même aujourd'hui avec les messages SMS, les appels téléphoniques ou bien les micros trottoirs. La stratégie est simple ; sous un semblant de démocratie directe et spontanée, on va dans la rue interroger les passants. Tous les passants ? Avec les SMS, on publie les réactions ou les questions à l'émission ; toutes les réactions et toutes les questions ? Sûrement pas. De la même façon que l'animateur est bridé par sa rédaction, les réactions du public sont soigneusement contrôlées.
Et pourtant, ces bribes de commentaires ou de témoignages sont habilement camouflées en déclaration citoyenne. Même si ce genre d'acharné qui écrit aux animateurs est une minorité, on le confond avec la totalité des téléspectateurs. Même si cette même personne n'écrit que SON opinion et ne représente qu'elle-même, il est, une fois publié, assimilé « aux gens », « les gens nous disent que ... » sont les termes employés. Tout ceci participe -à tort- à l'idée de proximité, d'intimité entre le téléspectateur, garant des valeurs du peuple et de la majorité, et l'animateur.
On a vu que la TV, a force de bourrage de crâne arrivait à dénaturer un mot, mais elle est aussi capable d'altérer une discipline majeure d'un pays : La politique.
Par son traitement des questions politiques, par son poujadisme trop souvent présent, elle a participée à donner une mauvaise image de la politique. Etrangement on a l'impression que télévision et politique sont destinés à se haïr, mais à vivre ensemble car dépendants l'un de l'autre. La télé veut aujourd'hui placer de la politique dans la majorité de ces émission, elle veut exhiber des hommes politique, mais elle reste maître du temps d'antenne, et généralement -hors émissions dites « politiques »- le temps de parole est ridiculement faible, et il n'en ressort rien d'intelligible. Car, pour l'information comme pour la politique, la télé veut aller vite. La France n'est pas un cas à part, ses journaux télévision, ses chroniqueurs d'actualité, dans leur manière de travailler participent à un traitement trop rapide de l'info, et dans nos sociétés, ce conditionnement de l'info est une erreur. Quand J-F Revel n'écrit pas un ramassis de conneries, il arrive à écrire quelques lignes de vrai dans son bouquin « La connaissance inutile ». Il démontre que l'homme ne VEUT et ne PEUT pas utiliser les informations et les connaissances proposées par les médias, car elles sont trop nombreuses, trop vite traitées et oubliées. Et aucun désir de réflexion n'émane, ni du téléspectateur-récepteur, ni du journaliste-émetteur. On se retrouve dans une société construite pour fonctionner grâce aux informations et aux connaissances, mais où les citoyens ne veulent et ne peuvent comprendre et utiliser la masse d'informations qu'on leur jette à la figure à longueur de temps. La télévision noie le téléspectateur citoyen sous un flot d'informations sans prendre le temps de les juger. Parfois avantageux pour la politique, souvent désavantageux pour le peuple.
La tendance actuelle tend à nuancer un certain langage afin de changer l'impact du message. En pratique, cela donne un discours sur le racisme qui en 20 ans a radicalement changé. Aujourd'hui plus un mot sur le racisme des français, on préfère s'attarder sur les problèmes d'intégrations. On décide ainsi de déculpabiliser le français, et d'accuser l'immigré de ne pas s'intégrer suffisamment. Paradoxalement des lois sont obligées d'être créées afin d'éviter les discriminations raciales ou sexistes. Mauvais coupable, on le sait, mais pour les médias il est bien plus bénéfique de ne pas froisser le français, et de s'attarder sur l'intégration.
Bien sur, face à ces critiques sur une information pré-macheé et prête à être consommées passivement, certains rétorqueront que la TV se contente d'offrir aux gens ce qu'ils veulent. Erreur, la télé se contente de transmettre les informations qu'elle reçoit, souvent sans aucun contrôle d'authenticité. Et cela fait longtemps qu'elle ne ce soucie plus des souhait du téléspectateur, sauf bien sur quand il s'agit de divertissement. Ce qui, au fil du temps l'a amenée à pratiquer une désinformation quotidienne, ne se préoccupant pas de savoir si elle avait raison ou tord, puisque « Tout mensonge répété suffisamment, prend valeur de vérité ». Dans un état démocratique ou le peuple choisis certains de ces dirigeants, le média le plus influent se refuse à jouer son rôle de 4eme pouvoir -indépendant- et se contente d'alimenter ses téléspectateurs en divertissements. La télévision est aujourd'hui un outil anti-citoyen.
La télé au service de l'état et de ces institutions ?
Comme cela peut être le cas dans des états totalitaires, la télévision peut se faire le relais des gouvernants, devenant l'outil de propagande par excellence. Mais dans un pays dit démocratique, elle peut -sans pour autant devenir un instrument de propagande politique- se mettre au service de l'état des ces institutions et de ses hommes.
Une des premières constations du rapport TV/politique, est que les média, et particulièrement la Tv est devenu « incontrôlable » et peut parfois se montrer trop envahissante. Elle a acquis une place bien trop importante qui met en péril les forces de la républiques, censées être représentées par les pouvoirs exécutifs, législatifs ou judiciaires. La télévision possède une influence, un impact bien plus important que ces derniers, elle seul peut rendre une institution haïssable ou faible. Elle est un danger, dans le sens où elle est devenue trop puissante et trop dure à contrôler comme le souhaiterais certains dirigeants.
Autre écart, mais qui coule de source, celui du rôle éducatif qu'aurait du connaître la TV dite républicaine. Il est évident que de nos jours, cet aspect ci de la télévision est quasiment oublié. Les dirigeants de chaînes ont trop vite remarqués que le divertissement engendrait beaucoup plus de profits et qu'il était beaucoup plus facile et intéressant (pour eux) de suivre le chemin de l'abrutissement plutôt que celui de la connaissance et de l'information ou d'autres valeurs dites Républicaines. En soi -et au niveau des foyers- la TV constitue une sorte d'entrave à l'éducation. C'est en insistant sur l'aspect violent et sensationnel des images que la plupart des programmes TV influencent le téléspectateur, bien trop passif et inapte à juger de lui-même certaines scènes. En refusant d'instruire et d'informer correctement le citoyen, la télévision lutte CONTRE les valeurs de la démocratie. Karl Popper l'illustre parfaitement.
"Au cours d'une discussion avec le responsable d'une chaîne, il me tint des propos effarants qui lui paraissaient naturellement indiscutables. "Nous devons offrir aux gens ce qu'ils attendent", disait-il par exemple. Sa position lui semblait conforme aux principes de la démocratie. Or, rien dans la démocratie ne justifie la thèse de ce directeur de chaîne, pour qui le fait de présenter des émissions de plus en plus médiocres correspond aux principes de la démocratie, "parce que c'est ce que les gens attendent". La démocratie n'est rien d'autre qu'un système de protection contre la dictature et rien à l'intérieur de la démocratie n'interdit aux personnes les plus instruites de communiquer leur savoir à celles qui le sont moins. Bien au contraire, la démocratie a toujours cherché à élever le niveau d'éducation : c'est là son aspiration authentique" (
La télévision, un danger pour la démocratie, Karl Popper, John Condry. Anatolia éditions. 1995).
De la même façon, une de ces autres réflexions sur la télévision nous démontrait à quel point cette dernière peut empêcher une démocratie de subsister durablement, si la TV n'est pas contrôlée ou bien si son rôle et son pouvoir ne sont pas clairement limités.
L'Association pour la politique à l'Ecole Normale supérieur a publié sur son site un résumé sur le sujet, et plus particulièrement sur les propos de Karl Popper :
Une loi pour la télévision.
Ainsi, pour expliquer ce paragraphe, il suffit d'une citation :
« La démocratie consiste à soumettre le pouvoir politique à un contrôle. C'est là sa caractéristique essentielle. Il ne devrait exister dans une démocratie aucun pouvoir politique incontrôlé. Or la télévision est devenue aujourd'hui un pouvoir colossal ; on peut même dire qu'elle est potentiellement le plus important de tous, comme sil elle avait remplacé la voix de Dieu. Et il en sera ainsi tant que nous continuerons à supporter ses abus. La télévision a acquis un pouvoir trop étendu au sein de la démocratie. Nulle démocratie ne peut survivre si l'on ne met pas fin à cette toute puissance ».
Un autre de ces coups bas envers l'état, fut lorsqu'elle décida de ringardiser la politique, et on peut considérer que cela a encore aggravé la vison qu'avaient les français de la politique. Mais tout cela à changé, aujourd'hui les deux milieux vivent en symbiose et chacun se retrouve gagnant. L'un à trouvé des personnalité connues pour remplir ses plateaux à la moindre occasion, l'autre à trouvé une tribune ou, à défaut de parler de politique, il peut se montrer afin qu'on ne l'oubli pas et qu'il prouve que lui aussi pratique la SSSS attitude (sympathique, simple, spontané, sincère). La télé bénéficie d'un stock de personnalités à exhiber, souvent connues et toujours d'accord pour une séance de promo politique entourée de peoples, le tout dans une ambiance « plus consensuel tu meurs ».
C'est justement pour éviter ces dérives que l'idée est venue de créer une télévision publique. Une télévision qui, initialement, se doit de traiter l'information de manière objective, qui ne doit pas se montrer partisane. Une télévision « libre » qui ne vit pas pour engraisser ses actionnaires. Dommage que cette idée soit restée à la porte de France 2 et France 3, sans parler d'émissions à caractère culturel, relayées au fin fond des grilles de programmes. Et pour espérer trouver une télévision dite publique, il ne reste que France 5 et ARTE, dont les motivations n'ont rien à voir avec n'importe quelle chaîne du Hertzien.
- « La mission d'ARTE est définie par l'Article 2 de son Contrat de Formation: Le Groupement a pour objectif de concevoir, réaliser et diffuser, ou faire diffuser, par satellite ou par tout autre moyen, des émissions de télévision ayant un caractère culturel et international au sens large, et propres à favoriser la compréhension et le rapprochement des peuples en Europe »
- « France 5, qui fut créée sous le nom de La Cinquième le 13 décembre 1994, occupe en effet une place originale dans le paysage audiovisuel français puisque son cahier des charges lui assigne pour mission de se consacrer à la diffusion et au partage des connaissances.
Véritable télévision de contenu, France 5 a pour vocation d'être utile, de donner de l'information et des clés pour aider à décrypter le monde qui nous entoure (et surtout pour se prémunir de ses consœurs France 2 et France 3). »
Alors que pendant ce temps là, d'autres directions oscillent entre divertissements débiles et tapis rouges pour personnalités politiques, pas toujours invitées de manière équitable. Combien de fois on a vu France 2 ou France 3, après la canicule de 2003, ouvrir ses portes à Madame Chirac la laissant ainsi faire preuve d'un numéro de communication époustouflant pour son mari ou pour le gouvernement ? Combien de fois Drucker a-t-il invité la famille Sarkozy ou bien Madame Chirac (encore elle), transformant son dimanche après-midi en véritable émission de charity business.
En se mettant de cette façon au service des politiques, le service public manque à ses engagements auprès du téléspectateur.
Alors non, la télévision, même publique, n'est pas au service des institutions de l'état, par contre elle est clairement au service des personnalités politiques, de la classe dirigeante.
On va se répéter, mais la télévision n'est au service de personne, et elle se montrera conciliante seulement si elle peut en tirer parti. A quelques exceptions près, elle n'œuvre ni pour le citoyen, ni pour la défense des valeurs dites républicaines (éducation, culture etc..).
Par contre elle est devenue un outils de manipulation parfait, et nul doute que Machiavel, si il avait écrit l'incontournable « Le Prince » de nos jours, aurait inclus la télévision parmis les techniques bonnes pour maintenir son emprise sur les citoyens. Mais l'utilisation de la télévision à des fin de pouvoir est tellement délicate qu'il aurait sans doute du écrire un second livre entier sur le sujet. Avec ce premier livre sur les sciences politiques, Machiavel à décris les mécanismes du pouvoir. Et tout comme cet ouvrage aurait du être déstiné aux peuples afin que grâce à la connaissance ils se protègent de leurs rois, on devrait mettre à la disposition des citoyens une base de connaissance afin d'apprendre le fonctionnement des médias.
Aujourd'hui chacun de doit de savoir décrypter la TV, d'apprend à s'en méfier afin de résister à l'influence constante qu'elle a sur la société.
« Gouverner, c'est mettre vos sujets hors d'état de vous nuire et même d'y penser »
Nicolas Machiavel
Extrait de
Le prince
Klem pour le FLT - Janvier 2005