bubu a écrit :Mais ayant quitté l'enseignement général depuis pas mal de temps (et je ne suis pas le seul ici), j'aimerais que tu donnes des exemples précis de ce que tu voudrais voir fait en classe de primaire, collège ou lycée.
Cela permettrait sans doutes de mieux cerner le problème pour ceux qui ne sont pas concernés en premier lieu (par eux-même ou leurs enfants par exemple).![]()
Je vais faire quelque chose que je vous demanderai de ne pas prendre pour de la prétention, mais je vais prendre comme exemples des choses que j'ai faites en cours. Ce n'est pas idéal ni parfait, mais ça donne des idées de ce qu'il est faisable de faire si on est motivé. Les exemples pris ne concerneront donc que l'enseignement du français :
- en 6ème, la lecture des grands textes antiques est au programme. J'ai donc travaillé le problème de l'adaptation en étudiant conjointement l'épisode du cyclope dans l'Odyssée et dans Ulysse 31. C'était succint, vu que c'était en 6ème, mais on a travaillé sur la structure du récit, la "traduction" en images des épithètes homériques et, bien sûr, le problème du passage à la SF.
- cette année, pour la Semaine de la Presse, j'ai fait avec une classe de 4ème un travail sur le traitement de l'information : on a lu les quotidiens d'un même jour, écouté le journald e 19 heures de France Inter et le JT de France 2. A partir de là, on a vu les spécificités de chaque média, ses contraintes... et on a comparé une information dans les différents médias.
- en 4ème, le programme comprend la philosophie des Lumières. J'a choisi l'axe de la critique sociale. Nous allons donc étudier des textes, voir quels sont les moyens littéraires de la critique sociale. Pour conclure, j'ai prévu l'analyse d'un extrait de Playtime de Tati, pour voir comment la critique sociale peut se faire cinématographiquement.
- une de mes 4èmes a un projet particulier, transdiciplinaire, sur la Grande-Bretagne des années 60 (notamment, les Beatles). J'ai prévu une analyse des Rutles d'Eric Idle : ils auront étudiés en anglais et en musique des clips et des documents d'époque, j'étudierai le principe de la parodie en comparant le film d'E. Idle et les documents d'origine.
- en 5ème, pour l'étude des romans de chevalerie, je pense qu'il est tout à fait possible d'étudier Sacré Graal. Je pense même que cela peut être même productif que l'étude des textes pour leur faire comprendre ce qu'est l'éxagération épique.
- un de mes collègues, en lycée professionnel, a étudié l'autobiographie uniquement à travers les films de Spielberg : il a vu tous les problèmes théoriques que pose l'écriture autobiographique, non en étudiant des textes, mais des films.
- pour étudier l'argumentation, certains profs partent du télé-achat : une séquence de télé-achat permet souvent de balayer les différents types d'arguments, la différence entre argument et exemple...
Ce ne sont que des exemples, mais ils ont l'avantage de venir du terrain, pas d'un bureau du ministère
En effet, mais ne dit-on pas que l'on explique bien que ce l'on comprend bien ? On explique d'autant mieux que l'on comprend parfaitement soi-même.
On dirait que tu présupposes qu'un prof, a priori, ne peut parler de cinéma ou de télé. Ce n'est pas parce qu'on est un spécialiste de sciences ou de lettrs qu'on ne peut pas maîtriser l'analyse de l'image ou des médias.
Alors on en revient un peu au problème que j'expose plus haut, à savoir quel est le degré de connaissance et de compétence que l'on demanderait aux professeurs.
Cela resterait encore à définir. Mais, de même qu'il ne m'est pas nécessaire, pour expliquer un poème de Rimbaud, d'avoir moi-même écrit et d'avoir le talent de Rimbaud, je ne vois pas pourquoi le fait de ne jamais avoir tourné un film m'empêcherait de pouvoir analyser en classe une séquence cinématographique.
Et il n'est pas ici question de condition d'enseignement (classes surchargés, élèves peu motivés, etc...) mais bien de façon d'enseigner. Cette personne maîtrise complètement son sujet et n'a aucun mal à se faire comprendre. Et je suis persuadé qu'en suivant une vingtaine d'heures de cours avec cette personne, j'en saurais plus que quand j'ai passé mon bac et que je bouffais 4h de physique par semaine...
Justement, la proposition que je faisais visait à avoir des profs plus compétents. Je rappelle que j'avais dit au Premium TV, concernant les universitaires, qu'il serait bon qu'ils aillent faire un tour sur des tournages. Rien ne l'interdit si on part sur la principe d'une certification complémentaire.
D'autre part, la personne dont tu parles, si elle a été en faculté, a été prof. C'est un peu différent de ce dont on parlait auparavant, à savoir des intervenants extérieurs. Et il y a un facteur personnel : tu es plus ou moins pédagogue (et ça ne s'apprend pas). Il y a des profs mauvais pédagogues, il y a des non-profs bons pédagogues.
Mais si c'est pour les former de la même façon qu'on forme ceux qui enseignent les maths par exemple (cf. 4e paragraphe en partant de la fin de l'article), je considère que cela a peu d'intérêt.
Justement, si tu parles du paragraphe où je parle de la certification compélémentaire, c'est totalement différent de la formation et du recrutement des profs "traditionnels" (qui enseignent une matière précise). Tout le monde ne passe pas son année de préparation au concours à l'IUFM (par exemple, j'ai préparé le concours en candidat libre, sans avoir suivi les cours de l'IUFM).
Ensuite, il y a des gens (surtout dans les matières littéraires) qui font prof parce qu'il y a peu d'autres débouchés. Dans le cadre de la certification complémentaire, ce sont des profs déjà en poste qui postuleraient. Or, si tu t'emmerdes dans ton boulot, tu ne vas pas postuler pour ce type de formation, qui te demande beaucoup plus de temps et d'investissement que ton boulot normal.

