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1.02 - Y ME

Fire Die With Me

lundi 3 octobre 2005, par Stratego

Comment ça va ? Bien ? Non en fait ça m’interesse pas vraiment. Lui par contre il va mal, et ça fait du bien de regarder quelqu’un souffrir comme ça. Noooon, c’est pas parce qu’on est sadique. Enfin c’est pas juste pour ça. C’est aussi parce que voir un personnage se balader dans les coins sombres que tout être humain normalement constitué (donc pas les blondes, ni cette grosse flaque de Cauet) à déjà exploré, dans une moindre mesure.

Souffrir, c’est se rappeler perpétuellement qu’on est humain disait mon père avant de se lever du canapé pour débarrasser la table...

Ronald où est tu ?

Peace Ron !

Non, le vénéré Ronald D. Moore n’est pas l’auteur de cet épisode. Vous avez le droit de croire que c’était une tentative vicieuse de ma part de prendre mes lecteurs en otage lors de la critique du premier épisode pour les forcer à venir lire la seconde, et vous aurez vraiment, vraiment raison.

N’empêche que j’avais oublié aussi, mais ce n’est pas vraiment une excuse, puisque je crois que mon cerveau est tellement développé qu’il se met à faire semblant d’oublier des trucs pour mon bien.

...

Alpha 9 ? Non je ne viens pas de là bas. Moi je préfère Katratzi, c’est plus fleuri. En même temps c’est vrai le trajet est plus long et le vortex secoue un peu, m’enfin on a rien sans rien.

Insomnia

Creegan ne peut pas dormir, dans ses rêves ou plutôt ses cauchemars le passé qu’il ne reconnaît plus le hante. Il attablé avec sa famille dans un champs mais le ciel est menaçant. Et la table s’étire à tel point que sa femme et ses deux filles sont hors de portée. Il tente de s’approcher mais ses filles l’ignorent, ou ne le voient pas. Il hurle mais sa femme ne l’entend pas. Ce songe, dans la continuité de l’intrigue de Cyril qui lui pense que la réalité est un rêve, terrifie Creegan et pour fuir son sommeil il sort courir a toute vitesses dans les ruelles de San Francisco.

De quoi a-t-il peur ? Que sa famille ne fasse plus attention a lui ? Pourtant on a bien vu dans le pilote que ce n’était pas le cas, que son ex-femme s’inquiétait pour lui et ne voyait aucun inconvénient au fait qu’il vienne dormir auprès de ses filles.

Peut être que c’est de ce patient dans sa tenue d’hôpital avec un trou fraichement percé dans le front tel qu’il se voit dans son rêve dont il a peur. Ce ressuscité qu’il est et qui vit dans un corps qui ne lui semble pas être le sien, avec un passé qu’il a l’impression d’avoir volé à quelqu’un d’autre.

Il se défoule donc, ici dans le recherche des limites de son corps, mais plus souvent dans l’exploration de l’esprit des assassins et de leur victimes, pour ne pas avoir à gérer cette honte qu’il a d’avoir l’impression d’être un usurpateur.

Lorsqu’ils se retrouvent sur les lieux du premier meurtre, Branca lui demande pourquoi il était dehors si tard dans la nuit. Creegan utilise l’ironie pour cacher

- Branca : “I called your place...” (J’ai appelé chez toi...)
- Creegan : “Really ?” (Vraiment ?)
- Branca : “... no answer.” (...pas eu de réponse.)
- Creegan : “Remind me to fire my servants.” (Rappelle moi de virer mes serviteurs.)
- Branca : “So where were you ? What are you, moonlighting now ?” (Alors t’étais où ? Tu fais quoi, tu bosses de nuit maintenant ?)
- Creegan : “Yeah, I’m an exotic dancer. G-Man by day, G-String by night !” (Ouais, je suis gogo-dancer. Uniforme le jour, string la nuit !)
- Creegan : “I was jogging Susan, I was jogging...” (Je faisais mon jogging Susan, mon jogging...)
- Branca : “Don’t you ever sleep ?” (Tu ne dors jamais ?)

OSC

Chouette père de famille, non ?

Vous vous souvenez de cette impression froide et ultramoderne que vous aviez eu en découvrant l’OSC ? Dans cet épisode, un téléphone portable sonne au beau milieu d’une réunion. On discute d’une série de meurtres assez ignobles où la victime est droguée avant d’être immolée. Trois cas identiques ont été recensés par Creegan, pourtant les victimes n’ont absolument rien en commun. Seulement Krakauer (Peter Wingfield) apprend que sa femme Judy est sur le point d’accoucher et on voit soudain les personnalités de chacune des personnes autour de la table prendre forme. Creegan lui dit de filer et lui fait remarquer que maintenant il aura une vraie raison de faire la tronche (en un épisode on aura déjà remarqué le coté assez renfermé de Krakauer) et lui fait un cri de guerre assez bizarre qui - si vous le passez en boucle - vous permettra sûrement d’atteindre un fou rire presque aussi long que le mien. Bernal fait une accolade à Krakauer, lui dit de ne pas se démonter et de couper le cordon ombilical si on lui offre la chance. Branca lui saute au cou et lui dit de transmettre ses amitiés à Judy. Enfin tandis que Krakauer déboussolé essaye de réunir ses affaires, Enright, en bon père de famille le rappelle à l’ordre en lui disant de déguerpir.

Humanité

La série s’annonçait comme une exploration de l’humanité des tueurs, des victimes et des enquêteurs plus qu’une série reposant sur une intrigue « ckikilatué » dominante. Et cette semaine on a droit à deux beaux exemples.

D’un coté le petit ami de la première femme immolée, qui selon Creegan à autant d’humanité qu’un cadran de téléphone justement. Une tête à claque qui malheureusement n’est que ça mais on prend un malin plaisir à voir Creegan jouer avec lui. Et un petit coup de poutre métallique ne fait pas de mal non plus.

Ce qui est intéressant dans l’épisode c’est que l’équipe de l’OSC suppose immédiatement que ces immolations sont des actes de dominations vis-à-vis des victimes. D’autant plus qu’on retrouve « Y ME » (Pourquoi moi ?) gravé sur leurs bras, ce qui naturellement leur fait penser que l’assassin aime penser que ses victimes le supplient. C’est ainsi que des suspects masculins sont favorisés par l’équipe, le premier que je viens d’évoquer, puis un incendiaire récemment sorti de prison après une peine de 6 ans pour incendie volontaire. Les scènes de ce suspect ci sont particulièrement fascinantes parce qu’elles nous font rentrer dans l’esprit d’un incendiaire. Je ne sais pas si vous avez jamais été fasciné par un feu ou une flamme mais c’était mon cas quand j’étais plus jeune et j’ai retrouvé exactement ce qui m’intriguait dans les yeux de ce personnage. Une profondeur qui est franchement rare chez des personnages aussi secondaires que lui.

Pourquoi moi ?

"Pourquoi ils ont mis un E après le M ? C’est C et A qu’il faut mettre après ..."

Le retournement de l’épisode, même si l’identité de l’assassin n’est toujours pas le point central de l’intrigue est intéressant justement parce qu’il ne s’agit pas d’un homme, mais d’une femme. Et d’une femme enceinte qui plus est. Elle est en phase finale de Leucémie et l’inscription « Y ME » sur les membres des victimes correspond en réalité à un cri de désespoir de cette femme, qui au lieu de dominer ses victimes, se contente de les punir pour ne pas avoir profité de leur vies, de celle de leurs enfants ou de ne pas avoir profité de la sienne (comme son mari absent). Elle ne les drogue pas pour les dominer, mais parce que son état ne lui permet pas de les dominer physiquement.

Est-ce que je serais encore là quand tu te réveilleras ?

"Cyril, arrête de jouer à Pong avec tes yeux pendant les cours bon sang !"

On retrouve Cyril, pour ma part avec grande joie parce que c’est un personnage qui agit comme un révélateur, un catalyseur. Sa présence est complémentaire à celle de Creegan. Il a trouvé du travail en tant que professeur de cours du soir, pourtant on sent que ses problèmes ne sont pas encore résolus. Il blague en expliquant à Creegan qui ses médicaments passent mal avec la nourriture casher. Et plus tard dans l’épisode, tandis qu’il passe la nuit dans la chambre de motel de Creegan, et que ce dernier essaye de se battre contre son insomnie, Cyril craque. Il pense qu’il ne va mieux seulement parce que David ne dort plus, et que si ça se trouve, il n’existe que dans un rêve éveillé de David. Un peu comme le rêve éveillé qu’il pensait avoir lorsque David l’a rencontré dans le pilote.

Ce personnage me fascine, j’aurais finalement beaucoup de mal a expliquer pourquoi. Peut être parce que sa soit disante folie est si proche, si compréhensible. Que ses peurs et ses angoisses ne sont que l’exacerbation de l’anxiété que chacun de nous peut connaître au long de sa vie. Cyril n’est pas traité comme un handicapé mental, parce qu’avant un handicap il y a la condition. Cyril est un homme perdu, comme Creegan. Seulement ce que Creegan a perdu il sait très bien qu’il ne pourra plus jamais le retrouver. Or Cyril lui, s’accroche a sa raison parce qu’en tant qu’homme de logique, de mathématicien, sa raison est la seule chose qu’il possède. Son seul pouvoir.

Brûle moi !

"Toubidoubidou... like a candle in the wind !"

On avait évidemment pu être témoin de la capacité d’empathie de Creegan dans le pilote lorsque terrorisé comme si les victimes étaient ses filles, il se rendait dans la maison de Ronald Hinks avec la ferme intention de l’exécuter, avant de découvrir qu’il s’était lui-même donné la mort. Ici on voit pour la première fois Creegan agir en négociateur. Lynn Knoll/Melanie Pritchard, condamnée à mourir avant d’avoir accouché du bébé qu’elle a passé sa vie à tenter d’avoir, s’en prend dans sa folie à une dernière victime qui elle n’a aucun lien avec sa misère. Il s’agit simplement d’une vieille dame qui s’assoit à coté d’elle dans un parc. Au plus profond de sa démence, Lynn/Melanie imagine que la vieille femme est sa mère, et décide de lui faire payer à elle aussi. Seulement Creegan et Branca la retrouvent alors qu’elle est sur le point de lancer une allumette sur le corps aspergé d’essence de cette femme.

Le jeu de Jeffrey Donovan dans cette scène est confondant. Dans une scène de ce genre on voit souvent des policiers, des détectives ou des agents du FBI faire preuve d’une pseudo sincérité ou même de réelle sincérité. Mais jamais je n’ai vu une telle humanité dans les yeux d’un personnage. Tandis que Creegan tend la main et jure à Lynn qu’il veut l’écouter, elle lui renvoie au visage sa propre malédiction.

- Lynn Knoll/Melanie Pritchard : « Why would I believe you ? You walked away from your own children !” (Pourquoi je vous croirais ? Vous avez abandonné vos propres enfants !)

On sent Creegan profondément blessé par cette phrase, il se mord les lèvres et tente de reprendre le contrôle. Il admet une faute qui n’est pas la sienne. Puis voyant qu’il a perdu sa confiance pour de bon, il se met à mimiquer sa démence. Il lui demande des pilules de Rohypnol pour être dans le même état que la vieille femme. Il lui propose de le faire payer l’abandon de ses enfants à lui plutôt qu’a elle. C’est un gain de temps, et il profite de cette surprise pour tenter de la raisonner, mais le Rohypnol fait rapidement son effet (il a littéralement pris une poignée de cachets). Et alors qu’il a enfin réussi à contrôler Lynn/Melanie, à la forcer à se justifier, il est pris de vertige, s’effondre sur une chaise. Il continue pourtant à discuter avec elle, et son discours n’est pas un baratin de négociateur. Mais elle lui échappe à nouveau et son dernier recours et de s’arroser d’essence lui-même. Il là provoque :
- Creegan : « Love is risk, and you’d rather burn everything up ! » (Aimer c’est un risque, et tu préfères tout brûler que de le prendre !)
- Lynn/Melanie : « I’m just so afraid... I’m going to die. » (J’ai tellement peur... je vais mourir.)
- Creegan : « We’re all gonna die... » (On va tous mourir...)

Creegan s’évanouit alors, Lynn s’effondre de douleur alors qu’elle perd sûrement les eaux et laisser tomber l’allumette. Mais l’essence avec lequel s’est arrosé Creegan s’est répandue et ses jambes à lui se mettent à s’enflammer. Jusqu’à ce que Branca n’intervienne.

Toujours debout ?

L’épisode se conclut une nouvelle fois avec Cyril et Creegan, dans sa chambre de Motel. Cyril s’est calmé et explique à Creegan qu’il n’a plus peur de ne plus être là quand une fois que Creegan aura dormi. Pour l’aider à l’endormir, il lui chante une berceuse. Cyril vient d’annoncer à Creegan qu’il allait mieux, or il explique que sa mère Terrienne lui chantait cette chanson sur Alpha 9.

Cette berceuse que Pruitt Taylor Vince chante timidement pourrait être parfaitement ridicule dans un contexte normal. Mais l’absence totale de réaction de la part de Creegan quand Cyril lui explique l’origine de la chanson nous montre bien qu’il s’agit de tout, sauf d’un contexte normal. Comme dans Six Feet Under la mort est un révélateur, seulement ici c’est de l’avoir frôlée de si prêt qui permet à Creegan de réaliser que ce qu’on définit comme normal, eh bien c’est franchement surestimé.


Un second épisode avec un intrigue principal pas forcemment passionante mais qui reussit a surprendre, avec de l’humour parfaitement contrebalancé par une profondeur encore plus saisissante que dans le Pilote. Et Ô surprise, le fabuleux personnage de Cyril (from Outter Space) n’as pas été keyllerisé. Bien au contraire il fait partie integrante de l’intrigue et sa vision vient s’ajouter à celle déjà très particulière de Creegan.

Dans le prochain épisode, c’est bien Ron Moore (from Outter Space aussi) qui régale, promis juré et vous avez surement compris pourquoi on l’aime tant si vous avez déjà vu l’épisode.

PPS : Mes sincères excuses aux blondes et aux flaques, elle ne meritent pas tant de haine aveugle et sourde, et ... vilaine !