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Grey’s Anatomy - Critique de l'épisode 9 de la saison 3

From a Whisper to a Scream: Yang’s Anatomy

Par Blackie, le 11 janvier 2007
Publié le
11 janvier 2007
Saison 3
Episode 9
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Dans l’idée, laisser la très dispensable voix off au nouveau Boulet en Chef laisserait présager un épisode aussi passionnant que la fois où Christina Ricci est restée debout pendant deux heures sans bouger une paupière, conduisant Kyle Chandler à se faire sauter le caisson pour ne plus endurer cette souffrance. Dans l’idée, j’aurais envie de courir en pleurant et renier avoir jamais aimé cette série.
Sauf que nous vivons une saison télévisuelle où rien ne semble impossible, où Rory peut être adorable, Ryan super drôle et Starbuck une abrutie finie. Cette saison, un épisode centré sur Cristina Yang peut devenir le plus palpitant depuis le final de la saison 2 et être digne de passer après le Superbowl.

Cristina sort de la salle d’opération, sa tenue pleine de sang et le regard désemparé, le son d’un encéphalogramme plat hurlant derrière. La caméra s’arrête, les images se rembobinent et nous voilà repartis quelques heures en arrière.

Ce procédé de mise en bouche est certes facile. Mais hors contexte, la scène a très peu d’intérêt. Il faut donc faire appel à notre mémoire (et au récapitulatif précédent) pour comprendre l’enjeu évoqué et savourer le message. Cette introduction illustre simplement la question qui brûle nos lèvres et nous informe que la réponse va nous être enfin apportée : Burke et Yang vont-ils être responsables de la mort du père de George ?

Après la confrontation particulièrement intense entre George et Cristina dans Staring at the Sun, on ne pouvait que se concentrer sur les doutes de cette dernière, coincée entre son ami et son amant, la fidélité à l’un impliquant forcément la trahison de l’autre. Le choix s’avère si dur qu’elle change plusieurs fois d’avis sur la meilleure solution à adopter.

On sent bien que les scénaristes essaient d’équilibrer la balance entre Cristina et Burke, en témoigne cette remarquable scène de dispute où les reproches et les responsabilités sont jetés violemment à la figure de l’un et de l’autre. Dans un couple, il y a toujours des torts des deux côtés. Pourtant, grâce à ses interventions off, c’est le point de vue de Cristina qui prédomine durant tout l’épisode et nous amène invariablement à prendre son parti (en plus de la raison évidente que Burke est un con).

Voulant régler le problème en ce qui le concerne, George a la brillante idée de faire appel au Dr Hahn (aperçue lors du cas Duquette), éloignant ainsi Burke de son père sans pour autant dénoncer un supérieur sans preuve tangible. Bien que le résultat ne soit pas celui espéré et qu’il ne fasse qu’éveiller la curiosité de sa famille et ses confrères, la tentative plutôt bien calculée mérite le respect. Le geste est courageux et l’interne sans aucune confiance en lui est loin derrière.

Parallèlement, un accident de voiture impliquant plusieurs personnes vient faire résonance à notre affaire. Alors oui, c’est toujours un peu gros la façon dont, comme par hasard, les patients du SGH ont exactement les mêmes dilemmes au même moment que leurs médecins. Mais quand les liens sont si bien amenés, pourquoi chercher la petite bête ?

Je dois dire que cet épisode jongle assez remarquablement entre la comédie et le drame. Une minute on tremble en compagnie des deux menteurs, celle d’après on rit devant la famille O’Malley, avant de se demander si l’on doit rire ou pleurer face à la jeune asiatique accidentée. Et tout cela sans jamais avoir de sentiment de cassure de ton, l’épisode étant d’une incroyable fluidité.

La tension monte de plusieurs crans lors d’une double opération pour le moins agitée. La pensée au double épisode post-superbowl de l’an dernier est inévitable. Les va-et-vients entre les deux salles, une mort imminente se faisant ressentir...et pourtant, la différence majeure est que ce schéma fonctionne cette fois-ci à merveille. Une bombe et deux patients dont on se fiche complètement apportent une tension trop artificielle. Lorsque ce sont les sentiments de chaque personnage qui semblent sur le point d’exploser, après de longues semaines à se contenir, et que la survie des patients déterminera à coup sûr le destin de leurs médecins, les enjeux restent ancrés à un niveau bien plus humain que sensationnaliste.
Résultat, nos émotions sont directement touchées par les évènements et le suspense est à son comble.

Les réactions de Cristina sont assez remarquables durant cette dernière partie et il est impossible de ne pas trembler pour elle, en même temps que de nourrir une certaine admiration. Burke pousse ses limites et seule Cristina réalise les risques encourus, pour le médecin qui a toutes les chances de briser sa carrière si son incompétence est remarquée et pour le patient qui est un proche. En plus de ces inquiétudes, renforcées par sa mise à l’écart, elle doit gérer une patiente dans un état critique à elle seule. Sa confiance en elle et ses talents de chirurgienne a toujours été sa caractéristique principale. La voir ainsi écrasée sous le poids des responsabilités nous ramène donc à une certaine réalité : Cristina a beau être douée, elle n’est dans cet hôpital que l’équivalent d’un enfant à qui on aurait soudainement demandé de régler les soucis des adultes.

La première victime de ses mensonges lui tombe donc sur les bras et bien qu’il ne s’agisse pas du père O’Malley, la faute tant redoutée a été commise. Et lorsque Burke se décide à parler au Chief... il est trop tard. La culpabilité de la jeune interne l’a fait craquer la première. Il n’en fallait pas plus pour que le couple en crise signe définitivement sa perte.
Si tout l’épisode est une déboulettisation en bonne et due forme de la miss, sa rupture avec McJackass consolide définitivement son nouveau statut. Good for you, girl !

Au final, les dommages collatéraux sont nombreux. Chacun est impliqué d’une manière ou d’une autre et jamais les questions d’ordre professionnel, amical ou amoureux n’ont été aussi confuses. Y’a-t-il toujours un bon et un mauvais choix ? Et sur quels critères les déterminer ?

Les seuls à plus ou moins bien sans sortir, mis à part le fait que leur patiente soit morte (et encore, sous les mains d’un autre), sont Addison, Mark et Alex. Ce dernier a l’occasion de travailler de nouveau avec l’obstétricienne, qui offre des compliments bienvenus à son ancien élève dans une scène où les deux personnages en disent long avec de simples regards. Une sorte d’excuses mutuelles pour les comportements qu’ils ont eu l’un envers l’autres lorsqu’ils travaillaient ensemble, mais qui se sont avérés payants. Addison reconnaît s’être trompée sur Alex tandis que celui-ci s’est découvert le genre de médecin qu’il veut devenir. En voilà une paire gagnante, qui amène un peu de soleil au milieu de cette tragédie grecque.

Une chose à reprocher, parce que bon, cela m’est très difficile de ne faire que des compliments, c’est qu’aucun des personnages ne semble avoir assez de jugeotte pour faire le moindre rapprochement entre les évènements. De la métaphore absolument pas subtile aux remarques assénées par tous sur les comportements étranges de Cristina et George, pas un seul ne cherche à savoir le fond de l’histoire et il faut attendre que cela soit mis sous le nez de Meredith pour que celle-ci comprenne enfin. Je veux bien qu’il faille garder le secret le plus longtemps possible pour les besoins du suspense, mais cela n’aide pas franchement la réputation d’égoïstes que se traîne ce groupe d’individus.

Enfin, je remarque que l’on a beau avoir notre dose de moments flippants en salle d’opération, le plus stupéfiant reste l’attaque de Callie envers Meredith. Car Callie fait franchement peur, cela même sans donner le moindre coup de poing. Il y a quelques mois, j’aurais peut-être exulté à l’idée de voir Meredith être mise à terre. Mais pour le coup, j’avoue avoir eu peur pour sa peau, et que le geste soit immérité n’entre même pas en compte. Je réalise maintenant que le choix de carrière de Callie est peut-être une façon de se racheter d’avoir cassé de nombreux os dans sa jeunesse. Street Callie, j’y crois à fond.
Cette saison 3 est décidément celle des bagarres, devant comme derrière l’écran...

Blackie
P.S. Cristina Yang : ses secrets, ses doutes, ses erreurs, sa culpabilité et ses responsabilités. Ou comment prendre un personnage inintéressant depuis le Pilote et le transformer en point central des drames du Seattle Grace Hospital. Les Sweeps, c’est magique.