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Mad Men - Avis sur les deux premiers épisodes de la saison 6

The Doorway: A Song of Cocktails and Fondue

Par Blackie, le 12 avril 2013
Publié le
12 avril 2013
Saison 6
Episode 1
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Voilà, c’est bon, calmez-vous ! Je sais que c’était dur, même avec les petites séries bien plaisantes du week-end de Pâques. Mais arrêtez de vous ronger les ongles jusqu’au sang et de plomber les forums de spéculations, Mad Men est enfin là !

Une heure et demi pour se replonger dans l’univers de Matthew Weiner, ça fait un bien fou ! On pourrait se plaindre que les déhanchement hawaïens de Megan ne valaient pas son fantastique "Zou Bisou Bisou" de l’an dernier, mais ce serait chipoter.

C’était une excellente reprise, et exactement ce à quoi on s’attend pour un season premiere. A savoir une sensation de familier et d’étrange, avec l’impression d’être en plein milieu d’une saison mais d’avoir raté plusieurs épisodes. Il faut s’ajuster, et s’il on passe tout l’épisode à se demander dans quelle direction on compte nous amener, c’est une fois l’écran noir et le cerveau reposé que tout devient évident.

J’ai tendance à perdre cette habitude, et pourtant qu’est-ce que j’aime lorsqu’une série me demande de réfléchir autant ! Ca me permet de ressortir mon diplôme Chocapic en psychanalyse.

Pour se situer...

On est à la veille de 1968. Ce n’est pas l’été, malgré les vacances hawaïennes des Draper, et Don n’a pas non plus d’illusions paradisiaques suite à une crise cardiaque, contrairement à ce que les cris de Megan font penser.
S’il n’y avait pas une vraie substance derrière cette mise en scène, j’aurais trouvé cette tactique de désorientation en guise d’intro bien trop bas de gamme pour Weiner.

SDCP est pourvu d’un escalier scintillant jusqu’à son second étage, et je suis étonnée que l’agence ne soit pas devenue Sterling Cooper Draper Holloway.
Les énormes changements sociaux s’expriment avec la mode et selon la personnalité de chacun. C’est un pur régal visuel.

Harry contrecarre Krishna avec la pire coupe de cheveux du monde, tandis que Cosgrove coiffe à peine une mèche différemment et que Pete compense sa calvitie avec de flamboyantes rouflaquettes. Le seul qui ne changera jamais, c’est Cooper. Et encore, on n’a pas vu ses chaussettes !

Don’t fear the reaper

Sans aller jusqu’à affirmer qu’ils s’appliqueront au reste de la saison (mais si c’est le cas, vous devrez sortir la brosse à reluire), les thèmes de la mort et du renouveau sont du moins au centre de cet épisode. Au sens littéral comme au figuré. Et l’un ne pouvant exister sans l’autre.

Il y a beau n’y avoir aucune allusion à Lane, il semblerait que son horrible départ continue d’affecter les esprits.

Les quatre personnages sur lesquels on se concentre font presque figure d’étapes : Don n’arrive plus à vivre avec lui-même. Roger cherche de l’aide en thérapie. Betty fait seconde peau. Et Peggy est en parfait accord avec elle-même.

Le parcours de Don, justement, est superbement amené. Il a beau retomber dans ses vieux travers lorsqu’on le découvre dans le lit de Sylvia, sa déclaration "il faut que j’arrête de faire ça" ressemble à une admission d’un malheur qui dure depuis trop longtemps et une volonté d’y remédier. Son infidélité incontrôlable n’est qu’un symptôme dont il se rend enfin compte.

Le monde autour n’est plus aussi rigide, il n’y a plus de honte à demander de l’aide (Roger n’est pas ridiculisé pour cela, comme l’était Betty), et Megan le pousse quotidiennement hors de sa zone de confort. Le monde change et Don commence enfin à le suivre. Son énervement contre l’image rétro du couple démontre bien qu’il n’adhère plus à cette fausse image du bonheur.

Dans une optique plus serrée, cette prise de conscience arrive juste après un pitch où il a fallu qu’on lui pointe un sous-entendu suicidaire dans ce qu’il voyait comme un échappatoire. Ces idées lui sont parvenues après une rencontre avec un jeune soldat prêt à partir au combat.

Bien évidemment, c’est la remarque du jeune Dinkins concernant les chances de survie dues au mariage qui frappent le plus.
L’homme qu’il était, Dick Whitman, n’est jamais vraiment revenu du combat. Le vrai Don Draper, lui, était marié mais n’est jamais revenu. Cette “peau” dont il veut se défaire, c’est bien sûr le costume sous lequel il se cache depuis si longtemps. Et le suicide évoqué dans son pitch, qu’il considère comme une vision réconfortante, est probablement à prendre au sens symbolique.

En bref, mon cerveau surchauffe.

J’avoue que je n’ai pas grand-chose à dire sur les scènes de Roger. Le personnage se retrouve de plus en plus seul (apparemment même Joan l’ignore) et c’était poignant de le voir craquer après un énième coup du destin.

Concernant Betty, j’ai beau ne pas être une grande fan (Tigrou fait partie d’un tout petit club), cette nouvelle vision d’elle m’a agréablement surprise. Son personnage n’a souvent suscité que de la pitié (au mieux) pour ce qu’elle subissait ou du dédain pour ses actions. Elle a eu certes de bons moments ici et là, mais jamais rien de ce niveau.

Betty s’est préoccupée d’un autre être humain et a activement cherché à l’aider.

Betty, la femme qui refusait catégoriquement de suivre l’époque ou de voir au-delà de son monde de carte postale, sort enfin de sa bulle.

Elle s’est sali les pieds, a regardé le résultat des rêves brisés en face, et a ressenti quelque chose. Si elle finit par se teindre les cheveux, c’est qu’elle a été réellement touchée par ces jeunes qui l’ont renvoyée à une image qu’elle s’est fabriquée.

Betty ne rejettera jamais son mode de vie. Mais retrouver sa couleur brune naturelle, c’est peut-être un besoin d’arrêter de vouloir correspondre à ce qu’on a toujours attendu d’elle, à arrêter de faire semblant, et accepter qui elle est. Comme elle arrive à accepter que le monde ne soit pas parfait.
Après tout, elle avait pris conscience que sa prise de poids venait de son mal-être. Un mal-être dont elle ne se rendait pas compte, car sa nouvelle vie semblait parfaite (exactement comme Don). Si elle réussit maintenant à maigrir, c’est qu’elle travaille justement à essayer d’être heureuse.

Évidemment, faut pas trop lui en demander d’un coup. Elle ne va pas aller plus loin ni même prévenir, je sais pas, la famille qu’il doit bien rester à la petite.
C’est aussi le genre de femme qui trouve ça drôle de titiller son mari en suggérant d’aller violer la petite copine de sa fille...
Totalement normal !

La tête d’Henry en réponse mériterait son propre tumblr.

Plus que réellement dangereuse, elle a un juste un cerveau totalement en décalage. C’est tout juste si elle ne dit pas que la petite devrait se sentir flattée. Si seulement une couleur de cheveux était synonyme de neurones...

A part ça, le plus gros reproche de la saison dernière concernait l’omniprésence de Megan. Je ne fais pas du tout partie des gens qui ne l’aiment pas, et j’ai souvent trouvé son arc intéressant, que ce soit par rapport à Don et à l’époque. Mais il est vrai que son temps d’antenne empiétait beaucoup sur celui de personnages plus établis. En particulier lorsqu’il s’agissait de voir ses insupportables parents, alors que Peggy disparaissait dans l’oubli.

C’est donc un soulagement de se concentrer sur la vie de celle-ci chez CCG, où elle est impressionnante dans sa façon de gérer une crise. Elle a l’autorité, la confiance et le talent qui suit. Peggy a trouvé ses marques et s’épanouit, gagnant le respect et l’appréciation de Chaough. Autrefois ridiculisé par Don, Chaough gagne maintenant le titre du plus chouette patron !

Et contre toute attente, sa relation avec Abe tient le coup malgré une vie professionnelle qui prend toute son attention et se reflète sur sa personnalité.
Abe a gagné mon respect, car non seulement il continue de la soutenir, mais il ne s’écrase pas pour autant lorsqu’il est témoin de ses mauvais côtés.

En bref, Peggy est une version améliorée de Don.

En bonus, j’ai trouvé ça très chouette qu’elle soit toujours en contact avec Rizzo, ça la détache moins de SCDP. Et ces deux-la font toujours un bon duo comique.

La conclusion de cet épisode est-elle qu’on entre enfin dans la saison sur l’acceptation de soi ?

En tout cas, cette reprise laisse bien sur sa fin, tant on voudrait retrouver absolument tout le monde. C’est le prix à payer pour avoir de réels développements...

Mais quand même, la maigre apparition de Joan faisait mal. Très mal.

Blackie