VITE VU - Édition de décembre 2009
On a vu. On a aimé. Ou pas. On vous dit tout. En bref !
Par Sullivan Le Postec • 16 décembre 2009
Sont abordés dans ce numéro : « Dreamland », épisode animé de « Doctor Who », « Mes Amis, Mes Amours, Mes Emmerdes »et « Les filles du désert », le dernier prime de « Plus belle la vie ».

Rêve à deux euros

L’équipe de « Doctor Who » nous propose un nouvel épisode animé, deux ans après « The Infinite Quest ». Mais l’épisode, écrit par Phil Ford (co-scénariste de « The Waters of Mars ») et réalisé par Gary Russel offre le genre de rêve qui donne plutôt envie d’exiger au tour operator le remboursement du voyage...

Contrairement au précédent qui était réalisé de façon traditionnelle, le choix a été fait pour « Dreamland » (un surnom de la base 51, au Nevada, ou l’épisode se passe à la fin des années 50) de recourir à l’animation 3D. Sauf que l’équipe disposait visiblement d’un budget total de 4 Livres et demie. Le résultat est donc un mixe stylistique qui reprend les pires aspects de la 2D et de la 3D. Et, sur un plan dynamique, ça ressemble furieusement à une cinématique des vieux « Tom Raider » d’il y a dix ans. L’animation limitée rend très rares les interactions des personnages entre eux ou avec l’environnement. Du coup, le tournevis sonique du Docteur est utilisé à peu près toutes les 5 minutes pour faire tout et n’importe quoi, ce qui devient vite insupportable. Le scénario ne semble d’ailleurs tenir aucun compte des avantages qu’il pourrait y avoir tirer d’être en animation 3D. Une course-poursuite entre deux avions et un OVNI piloté par le Docteur est ’’filmée’’ en gros plans sur les visages des personnages, comme si on était dans du tournage live. Idem pour la séquence du train de la mine, réglée en trois plan.

A coté de cela, l’histoire en elle-même est particulièrement anecdotique et le traitement des personnages schématique au possible. Difficile de trouver quelque chose à défendre là-dedans : même la voix de David Tennant semble comme éteinte par l’animation ultra-rigide et dénuée d’expression des personnages. Bref, à part tuer une heure en attendant Noël, il ne faut pas demander grand-chose à cette aventure animée...

Boulevard de campagne

Diffusée cet automne sur TF1, « Mes Amis, Mes Amours, Mes Emmerdes » a bien fonctionnée. Mieux vaut des séries qui marchent que des bides, mais enfin ce n’est pas avec cette série que TF1 va renouveler son offre.

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"Mes amis, mes amours, mes emmerdes"
Anne Charrier, Bruno Madinier, Bernard Yerles, Florence Pernel, Serge Hazanavicius et Elise Tielrooy

Le pire avec « mAmAmE », c’est sans doute qu’il faut lui concéder qu’elle est originale sur la Une, au moins dans son format. Une comédie de mœurs en 6x52’, c’est courant chez les anglais, mais rare chez nous. Sur le fond, la série fait penser à « Une Famille Formidable » si ce n’est qu’elle ne développe pas pareille vision de la famille-tribu pléthorique, mais s’intéresse à trois couples d’amis quarantenaires plus ou moins ados attardés. C’est à peu près la seule concession de la série a son époque. Pour le reste, on ne voit rien qui n’aurait pas pu être produit à l’identique il y quinze ans. Même le générique fait tellement 90’s que c’est presque dur à croire.
Il y a donc un couple stable qui voit surgir un fils issu d’une liaison du mari douze ans plus tôt, un couple récent composé d’un ancien coureur qui a de grosses dettes de jeu, et un couple transparent, dont la femme est avocate. Ce petit monde se retrouve régulièrement dans une maison de campagne commune.

« mAmAmE », créée par Jean-Marc Auclair, Thierry Lassalle, Marie-Luce David et réalisée par Sylvie Aimé, bénéficie sans doute du format 52’ qui lui confère suffisamment de rythme pour que ce ne soit pas déplaisant à regarder, et les deux premiers épisodes s’avèrent capables de nous décrocher un sourire à l’occasion. Mais l’ensemble, très inscrit dans la tradition du Boulevard, est tellement franchouillard au sens péjoratif du terme que c’en est quasi-excluant pour n’importe qui de moins de quarante ans. D’autant que l’intérêt de la chose reste forcément très superficiel du fait qu’il n’est guère possible de vraiment s’attacher aux personnages, tant ceux-ci se limitent à des archétypes jamais ni utilisés comme tels, ni développés pour en faire autre chose. Sur ce point, la comparaison avec les productions anglaises de ce registre est très cruelle.
Le genre auquel appartient de la série n’a d’intérêt que s’il sert à parler de la société qui lui sert de contexte. On peine à trouver quoi que ce soit en ce domaine. Le positionnement social de la série (pour la millième fois, on est dans la riche bourgeoisie de province) est probablement révélateur. Il n’y a pas de faute majeure dans la construction des scénarios, le rythme est là, techniquement c’est donc sans grosse lacune, même si c’est aussi sans génie. Mais sur le fond, les scénaristes de la série ont-ils quelque chose à dire ? Si c’est le cas, ça ne se voit pas...

Vous aimez le désert vous ?

Cela fait des mois que je n’ai pas regardé « Plus belle la vie ». Je ne suis pas fâché avec la série, c’est simplement la conjonction d’un emploi du temps qui ne me permet plus qu’exceptionnellement d’être chez moi à 20h, et du fait qu’en réalité, je suis arrivé au bout d’un processus entamé il y a quelque chose comme une dizaine d’années. Je ne regarde plus la télé. Il y a une belle télé, dans le salon, mais elle sert à lire des DVD. Le flux de la télé en direct, je le regarde sur l’ordi. Et « PBLV » n’est pas disponible en catch-up...

Le prime de ce mardi était donc l’occasion de renouer avec le feuilleton avec un événement aussi censé être fait un peu fait pour ça. Après Lyon l’année dernière, l’équipe a cette fois mis cap sur le Maroc pour accentuer l’effet dépaysement. Quatre personnages de la série y sont embarqués, un quatuor féminin composé de Mirta, Blanche, Mélanie et de Céline qui s’est incrustée aux vacances des autres pour enquêter sur les magouilles que son ex, Hicham (que drague maintenant Mélanie) mènerait avec Vincent. Cet ensemble, surtout avec l’apport de l’élément extérieur Céline, bénéficie d’interactions assez intéressantes qui ont largement alimentées ce prime intitulé « Les filles du désert ». Même si les scénaristes y sont allés vraiment très fort avec le coté boulet de Mélanie (j’aurais du écrire gourde, c’était de circonstance) pour accentuer le conflit.

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Plus belle la vie
Les filles du désert

En fait, cette soirée reposait essentiellement sur ces interactions de personnages, à contrario de la structure habituelle de « PBLV », cas quasi unique de soap story-driven et non pas character-driven. Du coté de l’histoire, pas grand-chose à se mettre sous la dent. En fait, l’intrigue supposée principale est si mince qu’il faut faire intervenir une seconde intrigue parallèle, par le truchement d’un retour d’un ancien guest, pour tenir les quatre épisodes, au prix d’aller si loin dans l’improbable que cela en devient assez ridicule. Presque aussi ridicule que Mirta et Blanche transformées en alpinistes de choc capables de descendre une falaise à pic de roches brûlées par le soleil...
Force est de constater qu’au delà du cadre, de certains éléments qui témoignent d’un budget plus confortable qu’au quotidien (dont le du coup très dispensable plan d’effet des deux femmes au milieu de la descente de falaise), l’ambition narrative est redescendue de pas mal de crans par rapport au prime de l’année dernière. Au terme de trois années d’une sorte de recherche de la prise de distance idéale, celui ci avait presque réussi à s’émanciper de la série quotidienne (tout en y étant évidemment relié) à l’exception notable de la réalisation en vidéo qui le desservait tout comme elle dessert ce prime-ci. A la signature du renouvellement du contrat de la série pour trois ans, il y a quelques semaines, la Direction de France 3 indiquait que le prochain chantier de la série était sa réalisation. Elle devrait joindre l’action à la parole et allouer des moyens permettant à ces primes de monter en gamme visuellement.
Pour en revenir au scénario, celui-ci retombe dans les travers des deux premiers prime en restant trop proche des épisodes quotidiens. Jusqu’à imposer une sorte d’histoire C autour de Frank, d’autant plus irritante qu’elle n’est pas résolue et qu’elle n’est donc vraiment là que pour le feuilleton quotidien. Si on ajoute une construction parfois étrange, multipliant des ellipses curieuses, on se demande si c’est un accident, ou si le rythme de deux primes par an n’est pas tout simplement intenable...