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Unbreakable Kimmy Schmidt - Présentation et critique de la première saison de la comédie de Netflix

Unbreakable Kimmy Schmidt: Strong As Hell !

Par Conundrum, le 10 mars 2015
Publié le
10 mars 2015
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Les nouvelles séries qu’on attend avec impatience se font de plus en plus rares. Je me rappelle que je ne pensais qu’à Murder In The First à la fin du printemps et, dès les premières minutes du pilote, je savais que j’aurais totalement oublié son existence à la fin de l’été.

Les séries qui nous rendent impatient et surtout qui ne déçoivent pas, c’est une denrée rare.

J’espérais fortement que Unbreakable Kimmy Schmidt serait de cette dernière catégorie.
Et me voici amplement rassuré.

C’est quoi ?

A la fin de 30 Rock, Tina Fey avait annoncé qu’elle comptait revenir rapidement à la télévision. C’est chose faite avec Unbreakable Kimmy Schmidt,
co-créée avec Robert Carlock.

La série, commandée par NBC, a été transférée sur Netflix avant même la diffusion de son pilote. Netflix en a commandé deux saisons de 13 épisodes.

C’est avec qui ?

Ellie Kemper de The Office et Bridesmaids incarne le rôle titre, Tituss Burgess, D’Fwon de 30 Rock est son colocataire, Carol Kane est leur propriétaire et Jane Krakowski d’Ally McBeal et 30 Rock est son employeur.

Derrière la caméra, aucune trace de Lorne Michaels dans la liste des producteurs exécutifs. En revanche, Jack Burditt, ancien producteur de 30 Rock, revient aux côté de Fey et Carlock après un détour chez The Mindy Project. David Miner (Parks and Recreation et 30 Rock), Jeff Richmond (30 Rock) complètent la liste des producteurs exécutifs.

Parmi les scénaristes, on retrouve des anciens de 30 Rock (Sam Means, Azie Dungey, Lauren Gurganous), du Colbert Report (Allison Silverman et Meredith Scardino) et d’Happy Endings (Dan Rubin et Lon Zimmet), un groupe de personnes biens cool, en somme.

Ca parle de quoi ?

Kimmy, et trois autres femmes, ont passé les quinze dernières années de leur vie dans un bunker sous-terrain. Libérée, elle décide de s’installer à New York.

Et, sans spoilers, après trois épisodes, c’est bien ?

A ce stade, c’est aussi bien que ce que j’attendais de la série.
A savoir, des premiers épisodes réussis, avec une identité forte mais avec des éléments qui peuvent être améliorés.

Mais la plus grosse surprise est que la plus grande réussite de Unbreakable Kimmy Schmidt n’est pas dans ces dialogues réussis et percutants, mais dans son message.

30 Rock était une bécane bien huilée qui faisait rarement dans le bon sentiment. Tout le message de Kimmy se résume avec le super générique de la série. Alors qu’on parle de femmes enfermées contre leur gré pendant quinze ans, au lieu de se concentrer sur l’horreur qu’elles ont vécus, la générique chante les louanges de ces quatre femmes avec une musique rythmée et enjouée. Le tout avec une grosse louche d’ironie puisqu’il s’agit d’un témoignage autotuné d’un voisin du bunker où elles étaient retenues captives. Comme Kimmy l’explique dans les cinq premières minutes du pilote, elle refuse l’étiquette de victime qu’on lui donne. Oui, elle l’a été, mais elle ne sera pas réduite à cela.

En voyant la bande-annonce et le premier épisode, j’ai eu un peu peur de voir une série sur une version féminine de Kenneth de 30 Rock dont l’entourage profite d’elle mais garde le sourire. Heureusement, la série se révèle être bien plus que cela.
Unbreakable Kimmy Schmidt est une série sur des personnages qui ne se laissent pas définir par leur apparence ou leur passé. Toute la série joue sur l’image que l’on projette ou que les autres perçoivent. Ce n’est pas que Kimmy et son statut de « Femme Taupe », les trois autres personnages de la série s’affirment tout autant que Kimmy. Et parce qu’on parle de personnages qui affrontent et confrontent l’image qu’on leur donne, il n’y a pas d’homme blanc aisé dans la distribution. Kimmy a le béguin pour un mec blanc, mais il est tellement générique que je ne me rappelle plus s’il est joué par un acteur ou un dentifrice.

Les personnages de la séries sont souvent roublards et/ou narcissiques sans avoir un mauvais fond. La différence entre eux et Kimmy est qu’ils ont un extérieur endurci par la vie à New York. Ils sont bien plus que ce qu’il n’y parait de prime abord, ils surprennent et surtout s’entraident.
Lorsque Kimmy annonce qu’elle s’installe à New York, une de ses amies du bunker lui donne de l’argent. Et ça, c’est une constante dans la série. Non seulement, les personnages de Unbreakable Kimmy Schmidt s’affirment, mais ils se donnent des coups de main lorsque le besoin s’en fait sentir. Par exemple, le troisième épisode de la série, Kimmy Goes on a Date !, montrent Lilian et Jacqueline venir en aide à Titus et Kimmy alors que ces derniers leur mentent (respectivement sur leur situation financière et sur leur identité). Unbreakable Kimmy Schmidt est une série dont l’extrême optimisme (même les titres d’épisodes finissent par des points d’exclamation) est contrebalancé par une noirceur à laquelle je ne m’attendais pas dans une série par les créateurs de 30 Rock.

Le message est frais, bien véhiculé et avec un thème plus fort et plus puissant que celui de 30 Rock, la série peut se permettre de moins se reposer sur une cadence enjouée de vannes à la seconde. Unbreakable Kimmy Schmidt est une série qui met la pêche mais qui est difficilement comparable aux belles heures de 30 Rock. En revanche, les premiers épisodes de la série sont bien plus réussis que les premiers de l’autre grande série de Tina Fey. Et quand on sait à quel point Tina et son équipe se sont améliorés sur 30 Rock, Unbreakable Kimmy Schmidt nous rend très confiant pour la suite.

Et à la fin, avec spoilers, c’est toujours bien ?

Les visionnages gloutons de séries inédites me posent problème. J’ai du mal à enchainer plusieurs inédits d’une même série à la suite. En revanche, je n’ai aucun problème à revoir une dizaine d’épisodes de 30 Rock d’affilée.

Enchainer les treize épisodes de Unbreakable Kimmy Schmidt a ses avantages et ses inconvénients.

D’un côté, on voit rapidement la progression qualitative de la série, de l’autre la saison une devient un tout, plus formé de moments que d’épisodes. Ma solution pour parer à ce problème a été très simple, pour rester dans la bonne humeur et garder la pêche que Unbreakable Kimmy Schmidt procure, j’ai incorporé des épisodes de Happy Endings et 30 Rock à mon intégrale. Ainsi, j’ai pu enchainé les épisodes rapidement (moins d’une semaine) tout en faisant des pauses bien méritées à des moments clés de la série.

Au final, l’impression que les trois premiers épisodes de la série m’ont donné s’est confirmée une fois que le générique de fin du treizième épisode arrivé : Unebreakable Kimmy Schmidt est un excellent début d’une sitcom perfectible.

Le pire
1.07 - Kimmy Goes to a Party !

Le premier épisode vraiment décevant de la série est étrangement écrit par Robert Carlock, le co-créateur de la série. C’est un épisode qui repose fortement sur Jane Krakowski où Jacqueline et Kimmy découvrent la liaison de Julian. C’est un passage obligé de la série qui renforce la relation entre les deux femmes et qui amène à la révélation de l’identité de Kimmy à son employeur. Sauf que Jacqueline est le personnage le plus problématique de la série.

Si Krakowski, qui encore une fois hérite d’un rôle originellement joué par une autre actrice, a mis du temps à trouver ses marques dans 30 Rock, elle était son meilleur élément en fin de série. On se retrouve dans une situation assez similaire où les scénaristes n’ont pas encore trouvé un angle pour exploiter les talents de l’actrice sans la traiter comme une version légèrement plus réaliste de Jenna. La voir être jalouse d’un robot et essayer de l’enterrer était l’unique moment de la série où les scénaristes m’ont perdu. C’est en faire beaucoup trop avec peu de bon matériel.

Ce n’est rien de bien dramatique, c’est symptomatique du gros problème de la saison : Krakowski n’est pas encore à son aise dans la série et la voir lutter contre un robot ne l’aide en rien. Mais bon, l’avantage de cet épisode dans une intégrale est qu’après celui ci, on peut faire une pause dans la série et reprendre un peu plus tard.

Le meilleur
1.10 - Kimmy’s in a Love Triangle !

Surtout que le meilleur épisode de la série ne tarde pas. Oui, plus tard on aura Tina Fey et Jon Hamm, mais le dixième épisode est le plus réussi pour moi car il repose sur la distribution de la série sans faire appel des guests prestigieux. [1]

L’épisode est particulièrement bien écrit. Comment ne pas aimer un épisode qui commence avec un dauphin agonisant (il le mérite, le dauphin est le tyran sociopathe de l’univers marin, et le Monde doit enfin le réaliser !) et s’achève sur des blagues sur Entourage ? Et indépendamment de cela, "Kimmy’s in a Love Triangle !" est la première fois où Kimmy m’a surpris. Peu importe, son triangle amoureux (les prétendants de Kimmy sont un des problèmes de la série !), dans cet épisode, Xanthippe’ demande son aide pour ne pas aller vivre chez sa mère après le divorce de Jacqueline et Julian. Après avoir accepté de l’aider, Kimmy finit par la trahir pour éviter qu’elle ne subissent la mauvaise influence de ses amis.

Si on peut questionner sa manière de faire (elle impose quand sa décision à Xanthippe’ au lieu d’essayer de la convaincre qu’aller vivre au Connecticut serait mieux pour elle), on retrouve une autre thématique de la série. Kimmy n’est pas la seule à ne pas avoir pleinement profiter de son adolescence. On peut ne pas être enfermé dans un bunker et être prisonnier d’une situation (ici, l’image que Xanthippe’ veut se donner). Cet épisode est plus efficace que celui avec Kiernan Shipka dans le rôle de sa demie-sœur surprotégée par sa famille. Et surtout, il complexifie de manière pertinente la relation entre Xanthippe’ et Kimmy et permet d’utiliser toute l’intrigue des Voorhies en se passant de Jane Krakowski.

Au passage, Titus a sa meilleure intrigue de la saison dans cet épisode.

Le reste

Unbreakable Kimmy Schmidt est à 30 Rock ce que Bunheads est à Gilmore Girls. Il s’agit de séries similaires mais avec un thème pour sombre et plus mature que les œuvres qui les ont précédés.

Thématiquement, la série rappelle aussi fortement Community où un groupe d’outsiders s’entraide tout en honorant leurs différences. Entre le copain-dentifrice kelleyrisé, le copain anglais, Julian, le révérend ou Tim Blake Nelson, l’homme blanc hétéro en prend pour son grade dans la série, les personnages de Unbreakable Kimmy Schmidt affichent fièrement ce qui les rend différents. Ils refusent d’être catégorisés par leur passé ou ce qu’on attend d’eux et malgré l’adversité, ils gardent leur optimisme.
Mais surtout Carlock et Fey nous dépeignent une héroïne sans qu’on ait de la pitié pour elle. On ne se moque jamais de Kimmy, ses lacunes académiques et sa méconnaissance de la pop culture sont sources de blagues mais jamais de moqueries. Et surtout, elle n’est jamais présentée comme une victime, même au procès du révérend où la situation se retourne habilement contre elle.

Si Unbreakable Kimmy Schmidt partage certaines de ces qualités avec 30 Rock, elle en partage aussi certains de ses défauts. Ce qui s’excuse dans une série parodique sur le monde de la télévision passe un peu moins bien dans une série avec des thèmes plus sérieux.

Sans revenir sur l’épisode du robot, la série quelque fois s’étale un peu trop sur une bonne idée. Jon Hamm en est l’exemple parfait. Son rôle du révérend est une bonne trouvaille mais fatigue un peu vite sur trois épisodes, tout comme le duo Tina Fey - Jerry Minor en avocats incapables ou Tim Blake Nelson qui n’avait pas vraiment besoin de revenir pour passer tout un épisode à essayer de libérer un chat d’un arbre.
Oui, les stars américaines aiment Tina Fey, si leur place dans 30 Rock, satire du monde du show business, étaient un plus bienvenues, on ne regarde par Unbreakable Kimmy Schmidt pour eux.

D’ailleurs, j’étais un peu inquiet de la redite avec 30 Rock lorsqu’on apprend que Titus veut faire carrière dans le show business. Je pensais qu’en sept saisons, Fey et Carlock auraient sorti toutes leurs vannes de leur système, et même si Entourage mérite qu’on se moque autant que possible d’elle, j’avais un peu peur d’un côté 30 Rock light. Au final, les déboires de Titus ne lassent pas, et équilibrent plutôt bien les intrigues de Kimmy.

De plus, la qualité d’écriture des épisodes fait que, même les plus faibles, sont sauvés par de bonnes répliques. La série se crée rapidement ses propres codes et gags récurrents, un visionnage rapide fortement suggéré par le rythme de diffusion des épisodes par Netflix renforce l’idée d’un tout cohérent qui se repose aussi sur une sérialisation assez forte. Les situations de beaucoup de personnages évoluent entre le début et la fin de saison et on se retrouve avec de multiples cliffhangers qui arrivent de manière organique et qui donnent envie de voir la suite. Surtout que la série ouvre tout au long de la saison quelques pistes qu’il serait bon d’explorer lors de prochaines saisons comme la mère de Kimmy ou le retour de Xanthippe’.

Au final, je sais que la série n’était pas développée pour Netflix mais je suis heureux de voir une comédie qui provient de fournisseurs alternatifs qui fait vraiment rire. Parce que les chemise de Jay Duplass étaient le seul moyen de savoir que Transparent était une comédie. C’est ça, l’inconvénient de ne pas avoir un générique autotuné.

Conundrum
Notes

[1Oui, y’a le gars de Breaking Bad, mais pour moi, c’est juste un des Dummies d’Under The Dome.