ACTU - Pin Pon fait la fiction de France Télévisions...
"Placard de compet’" une fiction France Télévisions. Un drame drôle ou une comédie désespérante, c’est selon.
Par Sullivan Le Postec • 26 mars 2010
La fiction de France Télévisions tourne en rond. Du coup, nous aussi non ?

Que retiendra-t-on des cinq ans de présidence de France Télévision par Patrick de Carolis dans le domaine qui nous concerne, c’est à dire la fiction ? "C’est tout simplement le pire bilan de l’histoire de la fiction de Service Public", écrivions-nous en décembre dernier. Aujourd’hui, on ajoutera que cela ne va pas s’arranger au finish.

Vincent Meslet (photo ci-contre), qui dirige la fiction de tout le groupe depuis la fusion en une entreprise unique vient de lancer un appel à projet pour trois types de séries. Du policier produit en flux continu de 12 épisodes par an, de la comédie de 26 minutes, de la série jeunesse en 20x40 minutes.

On vous laisse découvrir le détail de l’appel à projet sur le site de l’UGS et les justifications de Meslet en interview pour Scénaristes.biz.

Il est facile de comprendre le besoin de séries policières, puisque France 2 n’a toujours pas remplacé « P.J. » et « Avocats & Associés » qui ont pris fin il y a un moment. On se demande comment cela a pu prendre autant de temps à la direction de la chaîne pour se dire qu’il y avait peut-être un manque de série installée et fédératrice et que ce manque constitue sans doute un handicap pour développer des choses plus risquées mais qui pourraient aussi rencontrer le succès (comme des « Clara Sheller » ou « David Nolande » souvenir des temps bénis où France 2 avait une Direction de la fiction compétente qui savait dans quelle direction elle avançait).
Mais, là où « P.J. » et « Avocats & Associés », à leur lancement il y a dix ou douze ans, étaient innovantes et s’étaient, à leur niveau, projetées dans l’avenir de la fiction, on voit mal comment innover à partir de cet appel à projet tiédasse dont on jurerait qu’il a été écrit il y cinq ans...

Ça se gâte encore plus avec les comédies en 26’. Arlésienne du moment, France 2 en développe depuis des mois, mais on apprenait en janvier que, la programmation trouvant cela “difficile à programmer” (sic), c’était compromis.
Malgré cela, rebelote aujourd’hui, et donc avalanche pathétiques de signaux contradictoires. Soit tout ce qu’il ne faut pas faire pour mettre en confiance des partenaires qui ne peuvent, à force, qu’avoir l’impression de travailler dans le vent et d’être pris pour des gogos.

Le dossier de la fiction jeunesse donne le même sentiment. On arrête des projets pour reprendre aussitôt du développement. On se montre inutilement rigide dans la recherche de formats, sans chercher avant tout de bonnes séries et dans un deuxième temps le meilleur format pour raconter ces histoires. Franchement, quelle importance que l’épisode fasse 26’ ou 40’ alors qu’on parle 1/ Service Public et 2/ daytime, et sachant que 3/ le format 26’ sur de la fiction jeunesse est plutôt dans la norme à l’international.

On pourrait aussi ajouter que Vincent Meslet joue le bisounours de service. Les projets à rendre dans trois mois doivent contenir outre le dossier de présentation un scénario complet de pilote, et c’est le CNC qui va payer les scénaristes pour ce développement (non mais vraiment, pourquoi se sentent-ils pris pour des gogos ? Vraiment, on voit pas).

On pourrait se moquer des promesses de Meslet selon lesquels le prochain changement de direction n’affectera pas ces projets.
Rappelez-vous, il y a trois, quatre ans, en décembre, France 2 promettait juré craché qu’elle allait produire une série longue de 20 épisodes par an pour son prime-time dans l’année à suivre. Six mois plus tard, la nouvelle direction de la fiction assurait : “la série longue, c’est pas la panacée” pour enterrer l’idée. Et cela c’était sous la même Direction générale de Carolis - Duhamel, hein !

On pourrait rigoler encore une fois de cette collection ridiculement absurde d’unitaires de seconde partie de soirée de 60’, pensée pour innover — mais dans une conception de l’innovation qui doit dater des années 70 au moins. D’ailleurs, les premiers ça fait pas un an qu’ils sont tournés ? Remarquez, pour une fois je comprends les gens de la prog à France 2. A leur place, sur ce dossier là, moi aussi je ferais le mort en attendant le changement de direction, pour voir si je ne peux pas programmer cette catastrophe industrielle incognito en semaine à 3 heures du mat’.

On pourrait s’attarder sur ces appels à projets de France Télévisions. Certes, ils ont donné de belles réussites. « Plus Belle la Vie », « Un Village Français », « Les Oubliées », « Onde de Choc », en sont issus nous apprend Scénaristes.biz. Belles réussites. Ou terrible révélateur de l’incapacité totale de France Télévisions à s’ouvrir à des idées venues de l’extérieur, et en conséquence élément d’explication majeur de l’apathie de la fiction de France Télévisions.

Ouais, on pourrait faire tout ça, mais Spin-off.fr a déjà rédigé un bon article qui pointe l’état de délabrement dans lequel se trouve la fiction de France Télé, groupe qui avec trois chaînes et demi produit grosso modo trente heures de fiction digne d’intérêt par an. Pourquoi la fiction de France Télévisions est impuissante, que ça s’appelle. On vous y envoie, donc.

Du coup, nous, on se contente d’écrire un papier bref et pas très fouillé, mi-ironique, mi-lassé. Ça nous fait des vacances et ça évite que la discipline dans laquelle la fiction de France Télé est passée championne Olympique, c’est à dire le tournage en rond dans un placard noir de 2m², ne devienne trop contagieuse.
On réfléchit à des propositions pour les papiers de réaction aux prochaines initiatives de France Télé dans le domaine de la fiction. On pense par exemple à re-publier notre papier de décembre, en remplaçant chaque mot par un synonyme. Un concept original comme un appel à projet de France 2...

Post Scriptum :

Gilles Bannier tourne actuellement pour France 2 « Les Beaux Mecs », écrits par Virginie ’j’ai sauvé « Engrenages »’ Brac. Et Hervé Hadmar s’envole dans trois mois tourner « Signatures », écrite avec son comparse Marc Herpoux. Comme quoi même dans la pire des tragédies, on peut trouver une lueur d’espoir.