The Passage: Jane Espenson aime la bouffe
J’ai le choix. D’un côté je pourrais avouer que l’épisode est raté, et que c’est entièrement la faute de sa scénariste. Que malgré toute l’affection que j’ai pour elle, et bien que ça ne retire en rien à la qualité de son travail antérieur (seul le serpent en image de synthèse peut retirer à la qualité de Band Candy), l’épisode est un échec et qu’elle est la seule responsable. Je pourrais dire ça.
Ou alors, je pourrais faire porter le chapeau à JJ Abrams. Ca va être difficile, mais c’est jouable. Allez, je crois que je vais plutôt faire ça. Mais pas avant un petit résumé de l’épisode.
Kat : sa vie, son œuvre, sa longue, longue agonie
Apparemment, toute la flotte est à court de nourriture. Tout le monde a très, très faim. Les pilotes se partagent des petits beurres. La seule solution, pour la SURVIE DE LA RACE HUMAINE est d’atteindre la planète McDo, un petit rocher rempli de bouffe pas terrible mais ô combien pratique, de l’autre côté d’un Nuage Super Radioactif de la Mort qui Tue Très Très Lentement. Et puisque le temps presse, vous savez, pour la SURVIE DE LA RACE HUMAINE TOUTE ENTIERE, le Galactica n’a pas d’autre choix que d’organiser plusieurs traversées à travers le Nuage Mortellement Toxique Qui Fait Tomber les Cheveux Et Les Dents.
Kat, personnage antipathique et très peu développée possède des cheveux et des dents, mais aussi, apparemment, un très sombre passé. Merci beaucoup, JJ Abrams. Heureusement, ce sombre passé ne nous est pas révélé à grands coups de flash-backs (tout le budget flash-back a été utilisé la semaine dernière), mais plutôt grâce à l’arrivée impromptue, comme par hasard, d’un mec qu’elle connaissait avant. Trop cool. Et Kat meure. Genre très très lentement. Mais pas sans avoir levé ses deux tous petits bras en signe de victoire (Steve Holt !) avant de s’écrouler dans une scène au ralenti qui aurait pu être dramatique si je n’avais pas été trop occupé à me cacher les yeux de honte. Oh, et Adama se rend à son chevet, et lui dit qu’il la considère comme sa fille, même si techniquement ils n’ont jamais partagé de scènes auparavant. Bref, elle meure, la SURVIE DE LA RACE HUMAINE TOUTE ENTIERE ET SON HERITAGE POUR LES GENERATIONS FUTURES sont assurés, et tout le monde est très très triste pour une raison qui m’échappe.
Entre temps, Tigh revient au CiC et se rapproche d’Adama dans deux excellentes scènes signées Jane Espeson. Et Baltar et D’Anna font des trucs formidables, mais malheureusement incompréhensibles au premier visionnage, sur le Basestar Cylon.
Blame it on JJ
« The Passage », c’est un peu la suite, dans l’esprit, des géniaux « 33 », « Water » et « Celui où ils n’ont plus de carburant ». Une suite qui est victime de tellement de mauvaises décisions, et qui tourne tellement mal, qu’on se retrouve au final avec « Scar 2, le Retour de l’Episode Très Bancal avec des Pilotes Dedans ».
A l’écoute du podcast de Ron Moore de la semaine, il est évident que le scénario de Jaaaane était formidable. Ce sont les décisions prises a posteriori au niveau de la production (des scientologues, sans doute), qui ont transformé un très bon scénario en un beau ratage. Comme beaucoup d’épisodes de la série avant lui, « The Passage » était beaucoup trop long, et il a fallu couper de nombreuses scènes et intrigues. Et puisqu’il faut obéir à la Règle d’Abrams qui dit qu’avant de tuer un personnage il faut passer tout l’épisode à apprendre à le connaître (et donc perdre du temps sur quelqu’un qu’on ne reverra plus), il fallait absolument garder toute l’histoire de Kat, son passé extraordinaire de voleuse d’identité et trafiquante de drogue qui, par ses actions, aurait pu ou non aider les Cylons à détruire l’humanité toute entière (Shut the Frak up, Starbuck) pour pouvoir nous émouvoir pendant ses 15 minutes d’agonie, beaucoup de scènes potentiellement très intéressantes ont disparu. Plus intéressantes que les mésaventures de Kat, j’en suis certain.
La première série de scènes qui a dégagé est également la faute de JJ Abrams. En effet, en tant que détenteur du brevet sur les Triangles Amoureux, il est dans son intérêt financier de faire apparaître ce gimmick insupportable dans le plus grand nombre possible de séries. Alors, quand BSG a utilisé la voie du Ménage à Trois entre Baltar, Six et D’Anna pour ne pas avoir à payer de droits d’auteurs, JJ Abrams est rentré dans un colère monstre et s’est arrangé, par l’intermédiaire de ses potes scientologues, pour faire disparaître toutes leurs scènes de l’épisode.
Disparues, donc, les réactions de Six et D’Anna à leur relation bien particulière avec Baltar. Disparues également les réactions des autres Cylons, et les dissensions grandissantes que provoque la présence de Baltar au sein de leur société. Demeurent quelques scènes, très bien foutues mes trop courtes et... incompréhensibles, et un mélange odieux de mythologies grecque et romaine qui a énervé notre chère Geekette en chef. Ce ne sont même pas les quelques pertes mythologiques qui sont embêtantes, puisqu’on y reviendra évidemment par la suite, mais bien le manque de réaction des Cylons, et tout particulièrement celles de Caprica Six. Plus tard, peut-être. En espérant que ça ne soit pas trop tard.
Deuxième storyline disparue pour laisser de la place aux aventures de Kat et de son pote dealer, celle de Laura Roslin. Aucune indication n’est donnée par Ron sur ce point dans son podcast, si ce n’est le fait qu’il réapparaîtra bien plus tard dans la saison.
Mais la perte d’une intrigue de Roslin, c’est toujours une très mauvaise idée. Sauf quand elle se prend pour la Grande Prêtresse destinée par des textes anciens à sauver l’Humanité, bien entendu.
Enfin, les dernières scènes coupées étaient entre Lee et Starbuck. Des scènes qui, à mon avis, aurait aidé à rendre l’épisode un peu moins isolé du reste de la saison. Là, pour le coup, on n’a le droit à aucune suite à leur match de boxe de la semaine dernière. Où en est leur relation exactement ? Globalement, et même si on se soucis peu des personnages, on y perd beaucoup en cohérence, et l’épisode semble encore plus déconnecté du reste. Et il n’avait vraiment pas besoin de ça.
Pseudo Loner / Pseudo Mauvais
Le gros problème de l’épisode, en dehors de ce manque de continuité, est que les enjeux sont très mal exposés. Là où « 33 » excellait dans la tension et le suspens, « The Passage » s’écroule. Ici aussi, on est mis directement dans l’action, mais à aucun moment on ne se sent concerné par ce qui leur arrive, à aucun moment on n’a peur de les voir échouer, puisque le sens de danger immédiat est complètement absent. On nous dit que toute leur nourriture est contaminée, on nous dit qu’ils risquent la famine, et... c’est tout.
Cette mise en place brusque donne un caractère « mission de la semaine » à l’épisode, quelque chose qu’on ne veut vraiment pas voir dans Battlestar. Le pire, c’est qu’il leur était très facile de relier ça au départ précipité de New Caprica, ils auraient pu introduire de façon subtile ce manque de nourriture dans les épisodes précédents. Ca aurait sûrement aidé à créer un sentiment d’urgence complètement absent ici. Le plus triste, c’est que l’épisode est relié au reste, il est important pour la suite. Malheureusement, si les enjeux ne sont pas assez bien établis, les conséquences ne le sont pas vraiment non plus. A aucun moment on n’insiste sur le fait qu’ils sont là pour un moment, pour récupérer de la nourriture. Je n’y avais pas pensé, tellement j’étais bloqué sur la mort de l’insupportable Kat, et rien n’est fait pour insister là-dessus... ou sur le fait que les Cylons se dirigent vers la même planète, maintenant que Baltar a touché l’Hybride. Un point de scénario hyper important qui m’était complètement passé au dessus de la tête. Voilà un sens de danger immédiat... mais malheureusement, ça ne sera que pour la semaine prochaine.
Quelle chanceuse, cette Feyrtys !