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Damages - Critique de l'épisode 1 de la saison 2

I Lied, Too: Team Ju sucks

Par tomemoria, le 10 janvier 2009
Publié le
10 janvier 2009
Saison 2
Episode 1
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C’est bien les phrases d’accroche qui annoncent la couleur vous ne trouvez pas ? Ceux qui ont suivi la guerre sans merci qui s’est jouée ces derniers jours dans les tranchées du forum le savent (mais ceux qui n’ont pas suivi la guerre sans merci qui s’est jouée ces derniers jours dans les tranchées du forum peuvent continuer de lire) : il y a la Team Ju (composée de râleurs agaçants qui quotent les autres en faisant des sarcasmes) et la Team Tigrou (celle qui détient la vérité). Inutile de préciser de quelle team je fais partie : vous avez déjà du remarquer que j’ai toujours raison et ce avec une bonne longueur d’avance (oui, Tigrou déteint plus qu’on ne croit dans de nombreux domaines). Sauf que moi, j’écris des reviews. Au point de commencer un peu à trop submerger le site. Vivement que Lost se ramène. Qu’est-ce qu’elle est longue cette intro…

Ça ne s’est peut-être pas beaucoup vu à la rentrée, mais je suis incapable de juger objectivement un season premiere. C’est un peu comme un vieux pote qu’on n’a pas vu depuis une éternité. Bien sûr, au quotidien, il avait des défauts. Mais plus le temps a passé, plus on ne se souvient que des bons moments. Lorsqu’on le retrouve enfin, il a peut-être les mêmes défauts, il en a peut-être d’autres, mais que voulez-vous, on est tellement heureux de le revoir après tout ce temps, que l’on passe un excellent moment en sa compagnie.
Malgré ce gros défaut qui est mien, j’affirme que Damages, elle, en est exempt.

Just For A Thrill

Que les choses soient claires, je ne vais pas faire de remarques sur le poids de Rose Byrne ou le soi-disant lifting de Glenn Close. Non que ce genre de potins soient entièrement dénués d’intérêts (oh mais attendez, ils le sont !), c’est juste que ce n’est pas quelque chose qui me marque souvent lorsque je regarde une série.
Quand je m’investis dans une histoire comme je me suis investis dans celle de Damages, l’apparence des personnages m’importe peu. Tout ce qui compte à mes yeux, c’est le jeu des acteurs, s’ils arrivent à transmettre une émotion à l’écran. Avec Rose Byrne et Glenn Close, ce serait plutôt une avalanche d’émotions.

Rose ouvre et ferme magnifiquement ce season premiere. Son charisme, sa voix, son parfum crèvent l’écran tandis que Ray Charles nous file le frisson. Comme s’il en était besoin, après son étonnante performance en saison 1, elle démontre une nouvelle fois toute l’étendue de son talent en restant face caméra dans un monologue inquiétant. Ce plan séquence mise tout sur elle, à juste titre. Aucun effet de montage, de son (celui qui accompagnait les flash-forward l’an dernier et les séquences avec Daniel cette année). Juste Ellen et un petit revolver.
A priori, on peut croire qu’elle s’adresse à Frobisher ou à Patty. Elle pourrait très bien s’adresser à quelqu’un d’autre, peu importe pour le moment. Ce qu’il y a de fascinant dans ce jeu d’actrice, c’est cette incroyable subtilité : Ellen apparaît ici comme froide et calculatrice, presque inhumaine. Et c’est cette perte d’humanité que Rose transcende en faisant passer les blessures de son personnage, la souffrance qu’elle a endurée, bref en la rendant toujours aussi humaine. Ce n’est pas donné à chaque actrice de faire passer autant de peine par des sourires.

La Ellen du présent est moins calme, moins "dark side". Elle est à mi-chemin entre celle du flash-forward et celle que nous avons rencontrée au début de la série. Elle n’est plus cette jeune avocate naïve fraîchement diplômée. C’est une femme brisée, que la vengeance est en train de dévorer à petit feu.
Telle une figure mythologique consciente de son destin, elle est assaillie par des visions qui l’avertissent. Et comme toute figure tragique, elle fait son maximum pour contrecarrer le destin, inconsciente que c’est exactement ainsi qu’elle deviendra ce qu’elle cherche à éviter.

Je faisais parti de ceux qui n’avaient pas apprécié les rêves en saison une. Mais je dois bien reconnaître que les rêves, c’est rigolo à analyser. Si l’on prend celui d’Ellen, il aurait eu peu d’intérêt si on avait simplement vu Frobisher ramper vers une maison pour finalement se faire tirer dessus. Ici, au milieu du tableau, apparaît une chienne (oui ce n’est pas un chien et ne me demandez pas comment je le sais, j’ai forcément raison). Cette chienne manque de se jeter sur Frobisher mais sa chaîne est malheureusement trop courte. Que représente ce joli toutou aux crocs baveux ? Cette chienne de Patty ? Ou cette justice que Frobisher traite comme un chien ? Toutes deux ont été incapables d’empêcher la mort de David. Malgré leur rage, malgré leur détermination, elles ne l’ont pas arrêté. Pas même une balle n’a pu venir à bout du bougre.

Ellen se voit éliminer Arthur sans sourciller, en pressant la gâchette à maintes reprises ; un geste qu’elle esquissera six mois plus tard (à moins qu’il ne s’agisse d’une technique kiefcool pour faire parler sa victime en tirant tout près de sa tête).
Pourtant, dans le présent, Ellen refuse cette alternative. Venue voir Frobisher sur son lit d’hôpital, elle observe les nombreux moyens qui s’offrent à elle pour ôter à ce sale rat la vie qu’il ne mérite pas. Elle se souvient avec peine les moments heureux passés avec David, puis le cauchemar qu’elle a enduré à cause de sa mort. Et finalement, elle le laisse en paix. Plus tard, elle refusera même l’aide d’un jeune homme de son groupe de thérapie, Wes Krulik (Timothy Olyphant, que j’ai eu peine à reconnaître sans son chapeau et sa moustache) qui lui proposait de contacter quelqu’un pouvant lui fournir une arme. Dans ce présent, Ellen est encore une femme empreinte de justice et d’honneur. Elle croit encore que l’on peut obtenir réparation grâce au système.
Bien qu’elle soit pressée d’en finir à cause de ses rêves et de la peur de devenir un monstre à l’image de Patty Hewes, elle garde la tête froide et continue à jouer son rôle d’infiltrée. Elle soumet une affaire guet-apens à Patty. Croyant sa patronne prête à passer aux aveux, elle porte un micro lors de leur conversation, subtilement réalisée, au restaurant.

(Qu’est-ce qu’il y a vous au fond ? Oui, vous là ! Celui qui dit que c’est une pauvre séquence réalisée comme un soap. Levez-vous pour qu’on vous voit. Laissez-moi vous montrer plusieurs petites choses. Vous voyez le cadrage ? Qu’est-ce qu’il y a derrière Patty ? Un miroir, bravo, vous savez regarder. Quel reflet voit-on dans ce miroir ? Celui d’Ellen, vous êtes décidément un fin observateur. Que croyez-vous que symbolise ce reflet, cette forme indéfinie qui ressemble à Ellen ? Julia Hewes, la fille que Patty n’a jamais eu et qui provoque tous ces états d’âmes. Vous en voyez souvent une réalisation aussi inspirée dans Brothers & Sisters ? Rasseyez-vous et qu’on ne vous entende plus ! Quoi, vous râlez encore à cause des flash-back insérés dans cette séquence ? Mon cher petit, vous apprendrez que le flash back est un moyen dynamique pour rappeler au spectateur les événements qu’il a vu plus d’un an auparavant, sans parler du nouvel arrivant qui souhaiterait suivre cette nouvelle saison sans avoir à connaître la précédente. Cela permet également de ne pas avoir un « La Saison Dernière Dans Damages » de cinq minutes. Parce que, voyez-vous, nous sommes dans un Season Premiere.)

Ellen est tellement choquée dans cette scène qu’elle aurait bien failli griller sa couverture. Elle était tellement sûre que Patty allait avouer, tellement certaine d’être débarrassée de ce fardeau. Il semble que cela prendra plus de temps qu’elle ne l’espérait. Et il semble également qu’au détour de ce long processus, Ellen se perde en route, et dépasse les limites de la morale qu’elle continue encore de se fixer. En six mois, elle va devenir un ange déchu, une femme amère, désespérée et prête à tout pour obtenir ce qu’elle veut.

Start by telling the truth

Patty, de son côté, cherche à financer une fondation contre la faim à New York. Un moyen comme un autre de conserver son image sympathique auprès du commun des mortels. On le voit clairement dans le talk-show du début. Patty est une femme populaire et très aimée. Elle représente une femme forte qui se bat pour les bonnes causes. Une femme dévouée en tant que mère qui parvient pourtant à régler des dossiers aussi difficiles que celui d’Arthur Frobisher. Par dessus le marché, elle semble avoir une relation de confiance et d’amitié avec sa jeune associée, Ellen Parsons.
En plus d’introduire les principaux enjeux de l’épisode de manière efficace, cette séquence met en avant avec humour l’hypocrisie d’un talk show. C’est absolument délicieux de voir une Patty rayonnante et agréable, qui se plait à faire rire le public et à dire combien elle aime Ellen.

A côté de ça, elle continue de la faire espionner par Pete, l’affreux homme à tout faire du cabinet. Je m’arrête un instant sur Pete pour souligner tout de même que ce crouton est la pire des ordures. Il fait le sale boulot de Patty sans jamais sourciller. Que ce soit l’égorgement du chien de Katie Connor ou le meurtre d’Ellen, Pete est une arme pour Patty. C’est également celui qui sait tout d’elle. Absolument tout. J’espère qu’il ne restera pas impuni cette saison. Qui sait, peut-être est-ce lui qu’Ellen interrogera dans six mois.

Patty est réticente à l’idée de reprendre une affaire. Elle préfère se consacrer à sa fondation, au point de forcer la main d’un de ses amis en révélant l’addiction à la cocaïne de sa fille aux autorités. Ça fait plaisir de voir que, malgré ses efforts, Patty est incapable d’obtenir ce qu’elle veut sans user du chantage et des coups bas. Une Patty assagie et culpabilisée aurait été un peu dommage.
J’aime bien la manière dont ils traitent ses émotions quant à sa tentative de meurtre sur Ellen. La scène où elle voit Ray Fiske gardait une forme de crédibilité puisqu’ils n’ont pas osé montrer Patty en train de papoter avec un fantôme. Elle ne fait qu’imaginer sa voix et fond en larmes dans son bureau. A aucun moment elle ne lui adresse la parole.

De manière générale, la remise en place des personnages et de l’intrigue après un an d’absence est de bonne qualité. La nouvelle intrigue avec Daniel Purcell et la société qui rendrait les gens malades se met doucement en place. Il y a peu de scènes, mais elles fonctionnent toutes. Le cambriolage était effrayant et la tension entre Daniel et Patty intrigante. Pour l’instant, on ignore ce qui les lie ni ce qui pousse Patty à le rejeter à ce point. Mais comme cela faisait bien dix ans qu’ils ne s’étaient pas vus, on peut supposer qu’il a quelque chose à voir avec Julia Hewes. En tous cas, il y a fort à parier que cette affaire, mêlée au meurtre de sa femme, occuperont le devant de la scène par la suite.

L’intérêt de la scène où Michael surprend sa mère en plein cauchemar ne tient pas dans la culpabilité de Patty dont on commence à comprendre la teneur, mais plus du rapport qu’elle entretient avec son fils. Michael est son talon d’achille. C’est le seul qui sait comment la déstabiliser. Et il en sait sûrement plus qu’on ne se l’imagine sur sa mère. J’espère que son apparition surprise l’an dernier, peu de temps avant qu’Ellen ne se fasse attaquer, ne sera pas oubliée cette année. En saison 1, son intrigue donnait de l’épaisseur à Patty. Si cette année, cela pouvait avoir en plus une incidence sur l’affaire qu’elle traite ou un rapport avec Ellen, ce serait d’autant mieux.

Let’s not shave

Quant à Arthur Frobisher, qui se remet doucement de sa balle dans le ventre, il continue de pleurer sur son sort en s’accablant du fait que tout le monde le déteste, et que sa femme l’a quitté, et que la vie est complètement injuste.
De manière très maligne, alors qu’il avait réussi à nous émouvoir et à retrouver, sinon notre sympathie, au moins notre pitié, il suggère à son infirmier de ne pas le raser et de lui remettre des tubes dans le nez histoire d’émouvoir sa femme. Le salopard qui a ruiné ses employés et qui a fait assassiner David n’a pas disparu. Au contraire, il est plus détestable que jamais.
Si j’ai apprécié l’écriture du personnage en saison 1 et l’intelligence des scénaristes pour ne pas en faire un cliché de patron machiavélique, j’espère aussi qu’ils ne vont pas garder Ted Danson juste parce que l’acteur est doué et charismatique. Il va falloir lui donner un peu plus à faire que pleurer. Mais j’imagine que s’ils l’ont fait survivre, ils ont une bonne raison.

tomemoria
P.S. Un retour de près d’une heure. Des acteurs en grande forme. Une réalisation léchée où la stabilité et les tremblements ont une signification. Il n’y a pas à dire, cela fait un bien fou de retrouver de la bonne télévision.