DOCTOR WHO - SP.04 : The End of Time, part 1
Des questions à la tonne
Par Sullivan Le Postec • 26 décembre 2009
C’est le début de la fin : la dernière histoire du Docteur de David Tennant, la dernière histoire écrite par Russel T Davies. Une histoire dans laquelle un retour peut en cacher un autre...

Il y a une chose qu’on peut difficilement enlever au « Doctor Who » de Russel T Davies, c’est sa capacité à prendre des risques, à tenter d’aller jusqu’au bout des limites du programme sans jamais les franchir. Cet épisode est l’histoire de folies qui s’entrechoquent, jusqu’au chaos.

The End of Time
La Prophétie de Noël
part 1

Scénario : Russel T Davies ; réalisation : Euros Lyn.
Non sans avoir fait un détour, le Docteur répond à la convocation de Ood Sigma. Les Ood font tous un cauchemard, que partagent tous les habitants de la Terre, sans s’en souvenir à l’exception de Wilf, le grand-père de Donna. Dans ce cauchemar, le visage d’un maître hilare, sa femme Lucy Saxon, Wilf, et un père et sa fille inconnus du Docteur. Celui-ci comprend donc que le Maître avait un plan pour organiser son retour. Il est effectivement ramené à la vie lors d’une cérémonie conduite par un groupe de disciples. Lucy Saxon tente de l’empêcher, sans succès.
Wilf reçoit des messages d’une mystérieuse femme en blanc qui l’avertit qu’il pourra sauver le Docteur s’il sait prendre les armes. Il s’emploie à retrouver le Docteur, et y arrive facilement, ce qui conduit le Docteur à s’interroger sur la nature de leur connexion. Le Docteur retrouve le Maître et lors de leur confrontation, ce dernier lui fait écouter les tambours qu’il entend dans sa tête. Et il les entend vraiment, ils ne sont pas le produit de sa folie. Alors, qui sont les tambours ? Le Docteur n’a guère le temps de se pencher sur la question. Le Maître est enlevé sous ses yeux.
Donna a offert à Wilf pour Noël un livre de Joshua Naismith, l’homme que les Ood ont montré au Docteur. C’est lui qui a enlevé le Maitre pour réparer une machine extraterrestre conçue pour soigner mais qu’il entend transformer en Porte d’Immortalité. Le Docteur et Wilf arrivent sur place, mais trop tard pour empêcher le Maître de retourner la situation à son avantage. Il a reprogrammé la machine pour lui faire appliquer un traitement très particulier à la race humaine toute entière : la transformer en lui-même ! Donna est l’une des rares à ne pas être affectée, mais voir sa mère et son nouveau fiancé subir la transformation réveille ses souvenirs du Docteur...
C’est, semble-t-il, la fin de l’Humanité. Mais le Maître lui-même ignore la portée entière de ce qu’il vient de faire : Gallifrey est de retour. Les Seigneurs du Temps ont été ramenés à la vie...

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Une longue histoire

C’est la première fois dans l’histoire du « Who » moderne que les épisodes d’une histoire en deux parties n’ont pas deux titres différents. Même s’il semble que cela soit en partie un accident (cet épisode devait à l’origine s’appeler « The Final Days of Planet Earth », mais Russel T Davies le fit changer en voyant le titre à l’écran, considérant que ça ne ’’collait pas’’), cela est assez révélateur du fait que « The End of Time » est en fait une longue histoire de deux heures vingt, un peu arbitrairement coupée au milieu. Cela implique une structure narrative différente et qui semble étrange parce qu’on n’y est pas habitué. Ainsi, les vingt premières minutes servent essentiellement à de l’exposition et à de la mise en place. Comme c’est la durée de la moitié d’un épisode habituel, nous sommes habitués à ce que cela soit réglé en quelques scènes très efficaces, assez souvent avant même le générique. Cela donne le sentiment que le début d’épisode se traîne un peu, mais cela s’explique surtout par le fait que l’histoire est bien plus compliquée qu’à l’habitude. D’ailleurs, toute cette première partie est une montée en puissance progressive, les différents fils ne se rassemblant réellement que dans les 10 ou 15 dernières minutes, prélude à une seconde partie qui s’annonce épique.

Chaos

« The End of Time, part 1 » introduit des éléments éparts qui lui confèrent un aspect un peu chaotique. Beaucoup de personnages animés d’objectifs propres sont montrés en action :

  • Le Maître, dont le plan pour sa résurrection aboutit grâce à une sorte de secte de disciples.
  • Lucy Saxon, instrument de ce plan contre sa volonté, mais déterminée à l’empêcher. Elle échoue cependant, même si la résurrection du Maître est imparfaite du fait de son intervention.
  • Wilf, perturbé par les cauchemar dont lui seul se souvient et qui voudrait que le Docteur puisse rendre la mémoire à Donna.
  • La femme en blanc, qui a vraisemblablement ses raisons pour manipuler Wilf.
  • Joshua Naismith qui veut utiliser le Maître pour offrir l’immortalité à sa fille.
  • Les extraterrestres chargés de récupérer la machine.
  • Et enfin les Time Lords, dont le Président est le narrateur de cette histoire et qui s’apprêtent à faire un retour remarqué.

Au milieu de tout ça, le Docteur lui-même semble un peu emporté par le chaos ambiant et quelque peu passif. Pour le téléspectateur, il y a suffisamment de signes que ces divers éléments sont connectés, mais cette première partie ne livre pratiquement aucune clé quand au comment et au pourquoi. Elle constitue en cela un festival de questions sans réponses qui peut finir par être un peu frustrant. Et le chaos narratif est encore amplifié par la nature des personnages impliqués : le Maître est encore plus enfoncé dans sa folie que la dernière fois que nous l’avons vu, même si une explication à cette folie semble poindre. Les Naismith ne sont pas moins tarés, ne serait-ce qu’au vu de leur objectif. Et, en quelques secondes où il impressionne par son charisme, Timothy Dalton donne le sentiment que les Time Lords ne sont pas de retour au top de leur sagesse.
Il est très difficile de porter un jugement sur « The End of Time, part 1 » en l’état. La manière dont la seconde partie réunira ces parties dans un tout narratif cohérent — ou pas — sera déterminante.

Christmas spirit

Resqte que cet épisode comporte tout de même des défauts évidents que la meilleure seconde partie du monde ne comblera pas tout à fait.
Comparé à la radicalité du ton de « The Waters of Mars », cet épisode semble beaucoup plus s’inquiéter du fait qu’il ne devrait peut-être pas être aussi sombre pour un jour de Noël. Si cela fonctionne bien au début, quand le Docteur réprime son état d’esprit, notamment lors de son arrivée face aux Oods, avant que sa peur et sa détresse ne surgisse tout à coup dans la magnifique scène du café face à Wilf. Mais d’autres éléments destinés à alléger le ton, en amenant de l’humour ou du grand-spectacle, semblent parfois forcés. C’est un peu le cas des compagnons de Wilf du Silver Cloak, même si la Mamie peloteuse est adorable, mais aussi des deux aliens infiltrés et des scènes où le Maître fait usage de ses super-pouvoirs. Ces dernières séquences sont aussi affaiblies par les apparitions assez ratées du squelette du Maitre.
Par rapport au grand-spectacle désormais attendu à Noël, cet épisode reste en dessous des attentes que nous avons développées. Il est assez vite clair que l’équipe économise pour nous en mettre plein les yeux dans la seconde partie. Il faut du coup faire avec quelques effets qui rappellent plus l’ancienne série que ce à quoi le « Doctor Who » moderne nous a habitué. La transformation de l’Humanité en copies du Maître a coup de têtes secouées tournées avec un effet de caméra plutôt qu’un effet numérique, est ainsi loin d’être à la hauteur de l’importance du rebondissement.
Et je ne m’attarderai pas sur “l’apparition” du Président Obama : c’est Noël, soyons charitables.

Il peut vraiment tout faire...

Ceci dit, je ne voudrais pas donner l’impression que l’épisode ne comporte pas aussi son lot de grands moments. C’est, d’abord, un festival de grands acteurs. Russel Davies a eu une idée brillante en décidant de faire de Wilf le principal compagnon de cette aventure, sorte de récompense de ce que le génial Bernard Cribbins a apporté au rôle. Mais c’est une idée risquée et courageuse parce qu’elle signifie un changement de focus qui décale le personnage de Donna au second plan. D’un autre coté, avoir une actrice telle que Catherine Tate dans un rôle secondaire donne une idée du niveau de casting de « The End of Time ».
Quant à John Smith, il était déjà impressionnant dans sa précédente apparition dans la série, mais s’amuse visiblement, et nous avec, de pousser encore plus loin le personnage dans la folie. Et si quelqu’un doutait de ce que ce type peut vraiment tout faire, le voir perché sur des talons hauts et en robe fuschia devrait forcément les persuader du contraire. Blague à part, on imagine le cauchemar que cela a du être à tourner...
A partir du moment où le Maître retourne la situation à son avantage en piratant le plan des Naismith, la fin de l’épisode devient assez grandiose, empilant les cliffhangers avec gourmandise. D’abord le sort de Donna, puis le plan du Maître, qui est une idée aussi baroque que géniale, et arrive à être un climax de grande ampleur qui donne le sentiment d’être nouveau dans la série. Mais il est encore surpassé par le climax final. Les Time Lords sont de retour. Et on a hâte d’être la semaine prochaine pour savoir comment et pour faire quoi...

Mais aussi pour savoir si la seconde partie saura répondre de manière satisfaisante aux dizaines de questions soulevées par la première et se montrer à la hauteur de son importance dans l’histoire de « Doctor Who »...


Notre critique de la seconde partie.