FICTION FRANÇAISE — Prix Procirep du Producteur 2011 : les lauréats
Cinq producteurs sont en lice dans la catégorie fiction
Par Sullivan Le Postec • 5 décembre 2011
C’est une tradition annuelle : la Société des Producteurs de Cinéma et de Télévision remet en décembre ses prix du Producteur de Télévision, dans trois catégories qui correspondent aux trois principaux genres télévisuels, documentaire, animation et fiction.

Ce lundi 5 décembre, la Procirep organise sa 18e remise du Prix du Producteur Français de Télévision, attribué par un Jury présidé par la journaliste Rebecca Manzoni (productrice de l’émission « Eclectik » à France Inter et rédactrice en chef de l’émission « Metropolis » sur Arte).


Mise à jour : Les lauréats figurent en fin d’article.


Le jury est composé de : Dominique Barneaud – producteur Bellota films et Président de la Commission Télévision Procirep, Hélène Médigue – comédienne, Mosco Lévi Boucault – auteur réalisateur documentaire, Sophie Decroisette – auteur réalisateur animation, Didier Lacoste – auteur réalisateur fiction, Patrick Eveno – Festival et marché d’Annecy, Valérie Abita – Association Science et Télévision, Frédéric Lavigne – Festival Série Mania, Voyelle Acker – France Télévisions unité animation, Christine Cauquelin – Canal+ unité documentaire, Anne Holmes – France Télévisions unité fiction, Corinne Kouper – productrice Team To Animation, lauréat animation 2010, Bénédicte Lesage – productrice Mascaret films, lauréat fiction 2010, Tancrède Ramonet - producteur Temps Noir, lauréat documentaire 2010.

Dans la catégorie Documentaire, les nominés sont :

  • 13 PRODUCTION / Paul Saadoun
  • CAMERA LUCIDA / François Bertrand, Sylvie Gautier, Antoine Bamas, Jean-Stéphane Michaux, Chloé Jarry
  • LADYBIRDS FILMS / Hélène Badinter
  • LES FILMS DU PRÉSENT / Patrice Nezan, Laurent Versini
  • LES FILMS DU TAMBOUR DE SOIE / Muriel Sorbo, Alexandre Cornu
  • ZEUGMA FILMS / Michel David

Dans la catégorie Animations, les nominés sont :

  • PLANET NEMO / Frédéric Puech
  • TAT PRODUCTIONS / Jean-François Tosti
  • VIVEMENT LUNDI / Jean-François Le Corre, Valérie Malavieille, Mathieu Courtois
  • XILAM / Marc du Pontavice
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L’ensemble des nominés réunis pour la photo
Copyright Cécile Maurel / Procirep

Catégorie Fiction

Cinq sociétés de production se disputent le Prix 2011 dans cette catégorie.

  • ASTHARTÉ & Cie / Sophie Deloche

Astharté & C ie est une jeune société de production créée en 2007 par Sophie Deloche, et dont les premières fictions arrivent actuellement en diffusion.
Il s’agit d’abord du programme court « Vestiaires », diffusé en journée sur France 2 depuis le 14 novembre, et qui a bénéficié d’un buzz très positif – en partie parce que, s’intéressant aux handicapés, le programme a été programmé au moment idéal, en pleine vague « Intouchable ». Un coup de chance pour ce programme qui a connu plus de trois ans de développement. A l’origine de « Vestiaires », deux nouveaux auteurs, Adda Abdelli et Fabrice Chanut (eux-mêmes handicapés) dont c’est la première œuvre de télévision. Surtout, au moment où le projet a été proposé à France 2, il n’y avait ni case de diffusion, ni ligne de financement pour des programmes courts de fiction. « Vestiaires » a été un succès médiatique et sur Internet — l’occasion de découvrir que plus il y avait de visionnages sur le Net, meilleures étaient les audiences. Cela ne règle pas la question du modèle économique à trouver pour la fiction en ligne, mais cela tort quand même le coup à certaines idées reçues qui ont encore court, notamment du côté des diffuseurs.

Début 2012, également sur France 2, on devrait découvrir le téléfilm polar « Hiver Rouge », réalisé par Xavier Durringer. Notons aussi l’unitaire « Libre comme l’Aire », une comédie musicale réalisée par Vincent Burgevin et Franck Lebon, à venir sur Arte.

  • ELEPHANT STORY / Guillaume Renouil

Elephant Story, filiale fiction du groupe Elephant (Emmanuel Chain, Thierry Bizot) créée en aout 2006 par Guillaume Renouil, est évidemment connue avant tout pour « Fais pas ci, Fais pas ça », dont la quatrième saison est actuellement en cours de diffusion sur France 2 : ‘‘un succès critique et public, notamment sur des cibles que la fiction française a de plus en plus de mal à conquérir’’. Cette année, un site internet comportant des vidéos originales, « La Méthode Denis Bouley », a été lancé pour accompagner la diffusion. La cinquième saison de la série est déjà en développement, de même qu’une déclinaison cinématographique supervisée par sa créatrice, Anne Giafferi, qui a laissé la direction de la série à d’autres depuis deux ans.
La société a aussi produit deux pilotes de « Injustice » pour TF1, une série dans laquelle une juge d’instruction incarnée par Michèle Mercier ré-ouvre des dossiers classés. Parmi les développements, une série policière située en Corse pour France 2, et deux projets de coproductions internationales.

A noter, la création d’une filiale, Gazelle et Cie, dirigée depuis 2008 par Gaëlle Cholet. Celle-ci a produit « La Nouvelle Blanche Neige », comédie musicale pour France 2 diffusée ce mois-ci pour les Fêtes, ainsi que la comédie annoncée comme mordante « Working Girls » (12x13’) à venir sur Canal+.

  • EUROPACORP TELEVISION / Edouard de Vesinne, Thomas Anargyros

Créée en 2002 par Edouard de Vesinne et Thomas Anargyros sous le nom de Cipango, cette société est devenue Europa Corp Télévision. La raison de ce changement ? ‘‘Cipango était devenue trop grosse pour tenir les années de vaches maigres, mais elle était encore trop petite pour monter de très gros projets’’, ont expliqué les deux producteurs. D’où la nécessité de s’adosser à un partenaire puissant tel que la société de Luc Besson. La Coproduction internationale représente un risque financier pris en charge par les producteurs, et pas par les chaînes. Le développement d’une saison 2 de « XIII » dont l’écriture est reprise par Roger Avary est lancé. Mais il n’y a pas d’engagement ferme de Canal+ de lancer la production — et on peut noter que cet été a prouvé que la chaîne cryptée pouvait tout arrêter à trois mois d’un tournage, comme cela a été le cas pour « Pigalle la nuit »

EuropaCorp TV a récolté dans l’année passée des succès dans des genres très différents : le remarqué unitaire « Fracture », réalisé par Alain Tasma ou encore « Les Mauvais Jours » réalisé par Pascale Bailly (respectivement 15,4% et 14,2% du public sur France 2), mais aussi la série « XIII » pour Canal+, dont 13 épisodes ont été diffusés cette année, faisant suite à la mini-série de 2008. Avec « XIII », EuropaCorp TV ont acquis un temps d’avance sur la coproduction internationale, très en vogue ces temps-ci. Ils tournent actuellement en Afrique du Sud un autre projet de ce type, la mini-série « Le Vol des Cigognes », réalisée par Jan Kounen qui adapte le roman de Grangé.

Edouard de Vesinne et Thomas Anargyros font un constat inquiet de la situation actuelle. ‘‘La multiplicité des écrans a entraîné incertitude et fébrilité chez les diffuseurs. Je ne pense pas qu’on pourrait signer Fracture aujourd’hui. Désormais, un bon sujet avec un bon auteur, ça ne suffit pas,’’ expliquent-ils, pointant la recherche d’événementiel et de comédie chez les diffuseurs.

  • SCARLETT PRODUCTION / Joey Faré, Florence Dormoy

A douze ans d’âge, Scarlett ne peut plus tout à fait se définir comme une « jeune » société de production. Mais elle n’a pas pour autant renoncée à faire souffler un vent de fraîcheur sur la télévision française.

Parmi les productions les plus connues de la société de Joey Faré et Florence Dormoy, on compte les deux saisons de « Clara Sheller » la série de Nicolas Mercier, la mini-série « Les Prédateurs » réalisée par Lucas Belvaux, le téléfilm « La Belle Personne » de Christophe Honoré pour Arte, ou encore la fiction jeunesse « Cœur Océan ». « Dans la peau d’une grande », comédie unitaire diffusée le 27 octobre sur M6, a réuni 4,3 millions de téléspectateurs.
Cette année, Scarlett a tourné « Clash » pour France 2, une série en six épisodes sur les conflits entre des ados et leurs parents dont nous vous avons déjà parlé ici (et qu’on a vue et beaucoup aimé entre temps), mais aussi « Kaboul Kitchen », comédie ‘‘à la « Mash » sur une bulle occidentale dans la poudrière Afghane’’, en 12x30’ attendue au premier semestre sur Canal+. Toujours pour Canal+, le tournage de la série « Les Anonymes » sera lancé en janvier 2012.

Joey Faré a déploré ‘‘qu’en France, la série ne soit pas plus longue, et ne puisse pas fidéliser. On ne peut plus se contenter de seulement six épisodes’’. Terminée depuis deux mois et en attente de diffusion, la série « Clash » ne s’est toujours pas vue commandée une écriture de saison 2 par France 2. Pourtant ‘‘on ne peut pas installer une série avec juste une saison’’.

  • TETRA MEDIA FICTION / Emmanuel Daucé, Jean-François Boyer

Filiale du Tetra Media Studio de Jean-François Boyer, Tetra Media Fiction, dirigée par Emmanuel Daucé, a produit ou co-produit trois séries diffusées depuis 2005 : « La Commune », diffusée en 2007 sur Canal+, « La Commanderie », diffusée en 2010 sur France 3, et bien sûr « Un Village Français », dont la quatrième saison est attendue en mars 2012 sur France 3.

Cette année, Tetra Media Fiction a coproduit avec Macondo la série politique « Les Hommes de l’Ombre », dont la diffusion est attendue pour début 2012 sur France 2. Nous serons plongés dans les coulisses du campagne Présidentielle sous haute tension (nous nous sommes rendu sur le tournage).
L’ambition de Tetra Media Fiction est de proposer des séries longues, livrant de nouveaux épisodes chaque année, mais avec proposant de vrais point de vue d’auteur. ‘‘C’est une réponse à la multiplication des écrans,’’ a expliqué Emmanuel Daucé. ‘‘Il faut tendre vers 12 épisodes par an, ce qui suppose la mise en place d’une organisation spécifique.’’ Les auteurs sont associés à la production, pour défendre leur point de vue de l’écriure au montage, comme c’est le cas du scénariste Frédéric Krivine et du réalisateur Philippe Triboit sur « Un Village Français ».
Mais il faut faire face aux particularismes français : ‘‘un oligopole dans lequel personne ne fait concurrence à personne’’, un monde ou ‘‘la peur des audiences et du lendemain’’ tend à figer les décisionnaires sur place. Penchant du côté de l’optimisme, Jean-François Boyer a pointé que la multiplication des écrans pourrait justement constituer l’électrochoc permettant aux diffuseur de prendre des risques et d’innover, de faire enfin preuve d’audace.

Emmanuel Daucé pointe aussi l’évolution de l’économie du producteur de télé. Il s’agit pour lui de créer une valeur de catalogue, et plus de se rémunérer à la marge. Dans cette optique, une société de distribution vient d’être créée en association avec Mathieu Viala (Making Prod) : 100% Distrib. Elle vient de conclure la vente à TV Globo, au Brésil, du « Village (finalement pas si) Français ».

Crise et espoir

Lors de la discussion qui a suivi la présentation des nominés lors d’une conférence de Presse au Théâtre du Rond-Point le 16 novembre, les producteurs ont pointé le rôle joué aujourd’hui par la télévision. Il faut tourner la page du complexe vis-à-vis du cinéma, encore prégnant chez certains en France : aujourd’hui, l’imaginaire collectif se construit à la télévision, et pas au cinéma. Joey Faré, de Scarlett, a illustré cette problématique par l’exemple : « La Belle Personne » de Christophe Honoré, téléfilm d’Arte sorti au cinéma, ‘‘c’est 50 000 téléspectateurs en salles, et 800 000 à la télévision. Il n’y a pas photo’’. Pour les nominés, la qualité est aujourd’hui la clef de l’indépendance des producteurs de télévision.

La question du marketing est aussi très sensible. Canal+ a prouvé qu’une stratégie marketing agressive est très payante : ses séries très bien promues sont des succès d’audience, quel que soit leur niveau de qualité. Mais cette leçon peine à être intégrée par les autres diffuseurs, à l’heure où la TNT constitue un poids mort qui capte les audiences sans contribuer à la création (1/4 de part d’audience, mais même pas 1% de l’argent investi dans la fiction, par exemple).

La coproduction internationale en Anglais, nouveau Graal prôné par les diffuseurs, n’est pas sans limites : l’indépendance éditoriale par rapport aux chaînes est très relative, et le risque financier est beaucoup plus important. ‘‘On n’a jamais commencé une préparation en étant totalement couvert,’’ a expliqué Thomas Anargyros.
Ces projets sont lourds à monter et Joey Faré a aussi pointé la question des sujets : ‘‘il faut trouver des sujets à valeur universelle. C’est forcément plus rare’’.

Prix Export

La remise du 8ème Prix Export de TV France International aura lieu à l’occasion de la soirée du 18ème Prix du producteur français de télévision. Les nominés ont été déterminés selon un barème de points qui valorise le travail de commercialisation à travers le nombre et l’importance des ventes réalisées. Les lauréats de chaque catégorie seront désignés par le vote de quelque 12 000 acheteurs internationaux.

Prix Export Documentaire :

  • « LASCAUX, LE CIEL DES PREMIERS HOMMES », distribué par ZED. Production : Bonne Pioche, ARTE France
  • « KADHAFI, NOTRE MEILLEUR ENNEMI », distribué par Illégitime Défense. Production : Illégitime Défense, Les Films du Cabestan pour France Télévisions
  • « LA VOIE DE CARLA : NAISSANCE D’UNE PREMIERE DAME », distribué par Terranoa. Production : Boréales, Magneto Presse, MASS avec France Télévisions et RTBF

Prix Export Animation :

  • « GARFIELD & CIE », distribué par Mediatoon Distribution. Production : Dargaud Media pour France 3
  • « OGGY ET LES CAFARDS », distribué par Xilam Animation. Production : Xilam Animation avec Canal+ et Cofanim (Backup Films)
  • « LE PETIT PRINCE », distribué par PGS Entertainment. Production : Method Animation, Saint Exupéry-d’Agay Estate, LPPTV, Sony Pictures Home Entertainment (France), La Fabrique d’images, DQ Entertainment et ARD pour France Télévisions, WDR, Rai Fiction, TSR et TV5 Monde

Prix Export Fiction :

  • « BRAQUO », distribué par Zodiak Rights. Production : Capa Drama, Marathon Images, BE-Films pour Canal+, RTBF
  • « CARTOUCHE, LE BRIGAND MAGNIFIQUE », distribué par Europe Images International. Production : DEMD Productions, Fontana / RTBF pour France Télévisions
  • « FAIS PAS CI, FAIS PAS CA », distribué par AB International Distribution. Production : Eléphant Story, France 2, AT-Production / RTV TVI

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Les lauréats
Copyright Cécile Célérier / Procirep

Les lauréats

PRIX EXPORT :

  • Pour la catégorie Animation :
    « LE PETIT PRINCE » distribué par PGS Entertainment
  • Pour la catégorie Documentaire :
    « KADHAFI, NOTRE MEILLEUR ENNEMI » distribué par Illégitime Défense
  • Pour la catégorie Fiction :
    « BRAQUO » distribué par Zodiak Rights

Les diffusions déjà réalisées des trois lauréats ont atteint 40 millions de téléspectateurs à travers le monde.

PRIX DU PRODUCTEUR :

Le jury a récompensé au titre du Prix du producteur français de télévision 2011 :

Dans la catégorie ANIMATION, la société VIVEMENT LUNDI ! (Jean-François Le Corre, Valérie Malavieille, Mathieu Courtois), pour soutenir “une politique de développement marquée par des choix artistiques très forts, une grande créativité dans les œuvres produites et une grande diversité dans les techniques d’animation utilisées”, tout en saluant l’intégration plus récente d’une logique de production plus industrielle avec la série « Pok & Mok ». Outre cette série, ont également été remarqués par le jury les œuvres tels que « Cul de bouteille » (coup de cœur du jury) ou « Le petit dragon ».

Dans la catégorie DOCUMENTAIRE, la société CAMERA LUCIDA (François Bertrand, Sylvie Gautier, Antoine Bamas, Jean-Stéphane Michaux, Chloé Jarry) en saluant là aussi “la diversité des genres et des écritures” qui caractérise la ligne éditoriale de cette société, “les efforts de recherche d’écritures nouvelles dans des économies limitées sur les nouveaux médias”, et “la volonté d’instaurer un dialogue entre le public et une grande variété de films”. Ont notamment été remarqués « Le Carnaval des animaux » et sa déclinaison multimédia, ou encore le documentaire « Tchernobyl, une histoire naturelle ».

Dans la catégorie FICTION, la société SCARLETT PRODUCTION (Joëy Fare, Florence Dormoy), en soulignant “la diversité du catalogue de la société en termes de formats, de chaînes de télévision coproductrices et de publics” et, notamment, “sa capacité à produire des séries jeunesse à succès telles que ‘Cœurs Océan’ comme des téléfilms tels que ‘L’affaire Ben Barka’”. On ainsi été remarqués par le jury la série « Clash », mais aussi le téléfilm « Une vie française » ou encore la série « Kaboul Kitchen ».

Post Scriptum

La Page Facebook du Prix du Producteur propose des interviews des nominés.