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J’ai essayé On a tout essayé
samedi 10 décembre 2005, par
Produit par Catherine Barma et Thierry Ardisson, présenté par Laurent Ruquier, On a tout essayé a (re)lancé avec succès la mode du talk show "discussions de comptoir" à la télévision. Un petit décryptage s’imposait donc...
La construction de l’émission étant toujours rigoureusement la même, cet article ne se base pas sur une seule émission mais sur deux d’entre elles. Celles du jeudi 1er décembre 2005 et celle du mardi 6 décembre 2005.
Ce talk-show annonce tout de suite le ton avec son générique saturé de couleurs primaires sur lesquels apparaissent successivement des caricatures des animateurs sur fond de musique enjouée et carrément désuète.
Avec ces quelques éléments faciles d’accès, on aura donc deviné dès le départ que l’émission s’adresse à un public familial et, notamment, aux seniors qui viennent de s’abreuver de leur séance quotidienne de Question pour un champion et qui, après cette demi-heure d’intense activité intellectuelle, ont besoin de se détendre un peu les méninges avant le retour à la dure « réalité » du 20h00.
Cette volonté de cibler un public très large se retrouve aussi dans le choix des chroniqueurs qui entourent Laurent Ruquier dans l’émission du 6 décembre et qui représentent chacun, grosso-modo, une tranche d’âge : Steevy Boulet (20-30 ans), Christine Bravo (40-50), Jean-Luc Lemoine (30-40), Elsa Fayer (20-30), Pierre Benichou (60 et plus) et Peri Cochin (30-40).
L’émission se compose de 5 parties bien distinctes que nous étudierons plus loin en détail :
une revue de presse
deux sujets people et promo (cinéma, musique, spectacle...)
un sujet de société
le « kikavuki » : un jeu entre animateurs prétexte à une revue de presse « people » qui clôture l’émission
Sous ses airs nonchalants, On a tout essayé utilise toutefois une mécanique quotidienne bien huilée.
En effet, en début d’émission, après que Ruquier ait terminé de présenter tour à tour ses chroniqueurs du jour sous l’applaudissement des téléspectateurs, il interpelle toujours l’un d’eux sur un sujet anecdotique personnel qui ne manquera pas de faire réagir les autres chroniqueurs toujours prêts à sortir une boutade dans ces cas là. C’est donc là l’occasion de familiariser le téléspectateur à qui on donne le sentiment d’être invité à rentrer dans un cercle privé. Celui-ci se sent alors mis en valeur et son attention est donc plus facile à capter.
Cette habituelle entrée en matière effectuée, Ruquier annonce alors la revue de presse du jour qu’il ponctue de calembours dignes de la tradition des chansonniers. On notera également que, juste après chaque calembour, Ruquier attend systématiquement la réaction du public qui est censé rire mais qui, au bout d’une seconde, applaudit poliment sous les directives du chauffeur de salle.
Ruquier annonce ensuite le premier sujet promo du jour en présentant le premier invité. Le 6 décembre, il s’agissait de John Malkovich. Comme tout bon sujet promo, on évoque le thème du film et on lance la bande-annonce pour que le téléspectateur sache de quoi on parle. Les premières interventions des chroniqueurs sont consacrées au film mais, très vite, les suivants n’évoquent même plus le sujet (sans doute parce qu’ils n’ont pas vu, lu, écouté, le film, livre, disque évoqué) et posent des questions à l’invité n’ayant plus aucun rapport avec le film. Ce sont d’ailleurs souvent des questions destinées à mettre en avant la personnalité de chaque chroniqueur.
On notera par exemple une intervention cruciale de Steevy Boulet dans le sujet suivant consacré à l’apprentissage à 14 ans qui nous apprend qu’il a fait un stage chez un coiffeur, ami de sa mère.
Et oui, car, chez Ruquier, un débat de société ne peut pas non plus se passer de sa petite dose d’humour. Il ne faut pas oublier non plus que nous sommes dans une émission « d’access prime-time » ! Ce genre de sujet est d’ailleurs souvent très animé puisque les chroniqueurs ont bien souvent des avis assez divergents et on a souvent l’impression d’assister à un repas de famille dont la discussion aurait dévié sur la politique. On peut donc facilement comparer ce genre de sujet à de la politique de pilier de comptoir.
C’est souvent à la fin du deuxième sujet qu’intervient alors le sketch de Florence Foresti, transfuge de 20 h 10 pétantes, et que, pour faire simple, on peut qualifier de Jamel Debouze du pauvre au féminin.
Arrive enfin le deuxième sujet people de l’émission que l’on peut s’amuser à appeler le « kikifélapromoduniversal ».
Ce mardi 6 décembre 2005, l’invité est Amel Bent qu’on nous présente comme la nouvelle idole du public (comme beaucoup d’autres qui ont disparu dans la nature d’ailleurs) et dont on apprend qu’elle a participé à l’émission de la Nouvelle Star sur M6. Ce genre de sujet est d’ailleurs symptomatique de la politique de France 2 qui ne veut surtout pas diffuser d’émission de télé-réalité mais qui invite à tour de bras dans ses émissions des personnes qui en sont issues. C’est là aussi l’occasion de constater l’ahurissante hypocrisie des chroniqueurs qui doivent forcément toucher des cachets de la part de BMG ou Freemantle pour être aussi lèche-botte. Après Elsa Fayer, qui avoue être complètement fan (personne n’est parfait), Pierre Benichou dit poliment et gentiment « j’aime beaucoup mais avec moins d’enthousiasme parce que c’est pas exactement mon catalogue » que tout le monde aura traduit par « c’est de la soupe mais on va pas se fâcher pour si peu quand même ».
L’un des seules interventions honnêtes est celle de Christophe Alévêque qui met en avant la niaiserie des paroles avec un certain second degré qu’Amel Bent défend tout aussi naïvement avec les arguments suivants : « Avec toute la misère qu’il y a dans le monde, ce que je fais, c’est un super beau métier. De quoi je vais me plaindre ? Moi, j’ai envie de chanter l’Amour et de donner un peu de bonheur aux gens ». En leur vendant des tubes prêts à être exploités en sonneries pour téléphone portable ?
Comme chaque mardi, arrive alors le moment de la rubrique cinéma dont le principe ahurissant est de critiquer l’affiche de chaque film plutôt que le film en lui-même ! Bon, soyons honnête, ceux-ci sont quand même critiqué de manière plus sérieuse par Isabelle Motrot, la « spécialiste » ciné de l’émission.
Pour terminer dans la bonne humeur, Ruquier lance le « kikavuki » dont le principe est de trouver à qui ou quoi correspond une photo tirée de la presse. C’est un peu le principe du schmilblik revu et corrigé. Décidément, que de références avant-gardistes !
Une fois le jeu terminé, Ruquier revend la soupe..., euh, pardon, reparle brièvement du FORMIDABLE album de son dernier invité et je crie un « ouf » de soulagement puisque le générique de fin est enfin lancé.
La construction de l’émission étant toujours rigoureusement la même, cet article ne se base pas sur une seule émission mais sur deux d’entre elles. Celles du jeudi 1er décembre 2005 et celle du mardi 6 décembre 2005.
Ce talk-show annonce tout de suite le ton avec son générique saturé de couleurs primaires sur lesquels apparaissent successivement des caricatures des animateurs sur fond de musique enjouée et carrément désuète.
Avec ces quelques éléments faciles d’accès, on aura donc deviné dès le départ que l’émission s’adresse à un public familial et, notamment, aux seniors qui viennent de s’abreuver de leur séance quotidienne de Question pour un champion et qui, après cette demi-heure d’intense activité intellectuelle, ont besoin de se détendre un peu les méninges avant le retour à la dure « réalité » du 20h00.
Cette volonté de cibler un public très large se retrouve aussi dans le choix des chroniqueurs qui entourent Laurent Ruquier dans l’émission du 6 décembre et qui représentent chacun, grosso-modo, une tranche d’âge : Steevy Boulet (20-30 ans), Christine Bravo (40-50), Jean-Luc Lemoine (30-40), Elsa Fayer (20-30), Pierre Benichou (60 et plus) et Peri Cochin (30-40).
L’émission se compose de 5 parties bien distinctes que nous étudierons plus loin en détail :




Sous ses airs nonchalants, On a tout essayé utilise toutefois une mécanique quotidienne bien huilée.
En effet, en début d’émission, après que Ruquier ait terminé de présenter tour à tour ses chroniqueurs du jour sous l’applaudissement des téléspectateurs, il interpelle toujours l’un d’eux sur un sujet anecdotique personnel qui ne manquera pas de faire réagir les autres chroniqueurs toujours prêts à sortir une boutade dans ces cas là. C’est donc là l’occasion de familiariser le téléspectateur à qui on donne le sentiment d’être invité à rentrer dans un cercle privé. Celui-ci se sent alors mis en valeur et son attention est donc plus facile à capter.
Cette habituelle entrée en matière effectuée, Ruquier annonce alors la revue de presse du jour qu’il ponctue de calembours dignes de la tradition des chansonniers. On notera également que, juste après chaque calembour, Ruquier attend systématiquement la réaction du public qui est censé rire mais qui, au bout d’une seconde, applaudit poliment sous les directives du chauffeur de salle.
Ruquier annonce ensuite le premier sujet promo du jour en présentant le premier invité. Le 6 décembre, il s’agissait de John Malkovich. Comme tout bon sujet promo, on évoque le thème du film et on lance la bande-annonce pour que le téléspectateur sache de quoi on parle. Les premières interventions des chroniqueurs sont consacrées au film mais, très vite, les suivants n’évoquent même plus le sujet (sans doute parce qu’ils n’ont pas vu, lu, écouté, le film, livre, disque évoqué) et posent des questions à l’invité n’ayant plus aucun rapport avec le film. Ce sont d’ailleurs souvent des questions destinées à mettre en avant la personnalité de chaque chroniqueur.
On notera par exemple une intervention cruciale de Steevy Boulet dans le sujet suivant consacré à l’apprentissage à 14 ans qui nous apprend qu’il a fait un stage chez un coiffeur, ami de sa mère.
Et oui, car, chez Ruquier, un débat de société ne peut pas non plus se passer de sa petite dose d’humour. Il ne faut pas oublier non plus que nous sommes dans une émission « d’access prime-time » ! Ce genre de sujet est d’ailleurs souvent très animé puisque les chroniqueurs ont bien souvent des avis assez divergents et on a souvent l’impression d’assister à un repas de famille dont la discussion aurait dévié sur la politique. On peut donc facilement comparer ce genre de sujet à de la politique de pilier de comptoir.
C’est souvent à la fin du deuxième sujet qu’intervient alors le sketch de Florence Foresti, transfuge de 20 h 10 pétantes, et que, pour faire simple, on peut qualifier de Jamel Debouze du pauvre au féminin.
Arrive enfin le deuxième sujet people de l’émission que l’on peut s’amuser à appeler le « kikifélapromoduniversal ».
Ce mardi 6 décembre 2005, l’invité est Amel Bent qu’on nous présente comme la nouvelle idole du public (comme beaucoup d’autres qui ont disparu dans la nature d’ailleurs) et dont on apprend qu’elle a participé à l’émission de la Nouvelle Star sur M6. Ce genre de sujet est d’ailleurs symptomatique de la politique de France 2 qui ne veut surtout pas diffuser d’émission de télé-réalité mais qui invite à tour de bras dans ses émissions des personnes qui en sont issues. C’est là aussi l’occasion de constater l’ahurissante hypocrisie des chroniqueurs qui doivent forcément toucher des cachets de la part de BMG ou Freemantle pour être aussi lèche-botte. Après Elsa Fayer, qui avoue être complètement fan (personne n’est parfait), Pierre Benichou dit poliment et gentiment « j’aime beaucoup mais avec moins d’enthousiasme parce que c’est pas exactement mon catalogue » que tout le monde aura traduit par « c’est de la soupe mais on va pas se fâcher pour si peu quand même ».
L’un des seules interventions honnêtes est celle de Christophe Alévêque qui met en avant la niaiserie des paroles avec un certain second degré qu’Amel Bent défend tout aussi naïvement avec les arguments suivants : « Avec toute la misère qu’il y a dans le monde, ce que je fais, c’est un super beau métier. De quoi je vais me plaindre ? Moi, j’ai envie de chanter l’Amour et de donner un peu de bonheur aux gens ». En leur vendant des tubes prêts à être exploités en sonneries pour téléphone portable ?
Comme chaque mardi, arrive alors le moment de la rubrique cinéma dont le principe ahurissant est de critiquer l’affiche de chaque film plutôt que le film en lui-même ! Bon, soyons honnête, ceux-ci sont quand même critiqué de manière plus sérieuse par Isabelle Motrot, la « spécialiste » ciné de l’émission.
Pour terminer dans la bonne humeur, Ruquier lance le « kikavuki » dont le principe est de trouver à qui ou quoi correspond une photo tirée de la presse. C’est un peu le principe du schmilblik revu et corrigé. Décidément, que de références avant-gardistes !
Une fois le jeu terminé, Ruquier revend la soupe..., euh, pardon, reparle brièvement du FORMIDABLE album de son dernier invité et je crie un « ouf » de soulagement puisque le générique de fin est enfin lancé.