Il y a toujours du soleil à Saint Tropez • HISTOIRE(S)
Par Sullivan Le Postec • 7 septembre 2008
Le samedi après-midi à 17h45 sur TF1, le cauchemar a déjà commencé.

Une histoire horrifique.

Prenez une après-midi de rentrée automnale, pluvieuse, désagréable. Le genre d’après-midi où vous vous dite que le mieux serait encore de rester sous la couette, entre l’ordi et la télé, qui offrent des plaisirs un peu sadiques, comme découvrir « Gossip Girl » en version française.
C’est là, dans la torpeur d’un moment si anodin, que la pire des horreurs peut surgir sans préavis. A savoir le début de la nouvelle — et, aux dernières nouvelles, dernière — saison de « Sous le soleil ». C’est l’épisode 465 (!) titré « La nuit du crime ». Le supplice devrait s’arrêter à l’épisode 480.

Tout commence par le générique. Il est possible que cette évocation ramène en vous l’air guimauve de la chanson, et la voix douce de l’acteur qui l’interprétait. Sauf que pas du tout !
Bon, cela fait une éternité que je n’ai pas vu un épisode de « Sous le soleil ». C’est que la série dure quand même depuis douze ans. Il vient un moment où il ne reste plus que du guilty, et pas du tout de pleasure. La dernière fois que j’en ai vu une image, l’ex-danseuse, ex-princesse, ex-animatrice de radio devenue maire de St Tropez Jessica se bâtait au conseil municipal avec Bernard Menez. Traumatisant. Donc, je ne sais pas exactement depuis quand, mais il y a un nouveau générique.
C’est maintenant une fille qui chante une nouvelle version de la chanson remixée dance, avec en fond un tempo de boite à rythme qui aurait déjà sonné passablement démodé en 1996, au lancement de la série, c’est dire l’ampleur du massacre du générique déjà pas glorieux d’Obispo. Visiblement, ce, heu, truc date au moins de la saison précédente puisque Adeline Blondieau est créditée dans ce générique. Or elle ne joue pas dans cette saison, mais ça j’y reviens. Ca veut dire donc aussi qu’à la production, on n’a pas changé utile de modifier un tant soit peu le générique pour la dernière saison, malgré le départ d’une actrice principale...

Après cette minute terrifiante, vient le traditionnel résumé des épisodes précédents, raconté en voix-off par le personnage central de l’épisode à venir. Parce qu’il y a longtemps de ça, « Sous le soleil » a instauré le principe du personnage principal tournant parmi les trois héroïnes – voire parfois des personnages secondaires. Ca ne fonctionne pas du tout, mais je suppose que ça permet à Marathon d’économiser sur les cachets. La situation a été amenée à un tel niveau de ridicule que l’événement de je ne sais plus quel épisode anniversaire a chiffre rond, il y a quelques années, a été de faire tourner les trois héroïnes dans le même épisode et se parler entre elles, ce qui n’était plus arrivé depuis des dizaines d’épisodes !...
Bon, par ailleurs, le résumé de cette semaine ne doit son existence qu’à l’habitude puisque le peu qu’on y apprend — Jessica est chez elle aux Etats-Unis pour se remettre d’une maladie et Caroline est également ‘‘aux States’’ maintenant qu’elle travaille dans un des plus grands cabinets d’avocats de New York — est réexpliqué dans des dialogues honteusement explicatifs DIX SECONDES plus tard. Déjà, à la base, le ton est donné : on nous prend vraiment pour des idiots. En même temps, sachant qu’il y a quelques saisons de cela, la grande avocate internationale était une star de la chanson, ce n’est pas un scoop.

Donc, Adeline Blondieau, alias Caroline, l’ex chanteuse devenue avocate, a décidé de quitter la série. Elle n’était pas satisfaite de la qualité des scénarios. Mieux vaut s’en rendre compte à l’épisode 464 que jamais, hein ! Du coup, la production a décidé de tuer Caroline. Bon je suppose que les fans ne seront pas traumatisés non plus : les deux fois précédentes, à ma connaissance, où un personnage a été tué, il est revenu ensuite. Dans le premier cas, un sosie doté de la même personnalité est apparu, dans le second on a appris que le personnage mort en mer avait simplement passé des années dans une prison d’Amérique du Sud.

Laure reçoit un appel de Caroline qui, évidemment, n’a pas la voix de Caroline, et qui lui donne rendez-vous, paniquée, dans l’endroit le plus coupe-gorge auquel elle soit parvenu à penser. Sur place, Laure trouve une arme part terre qu’elle ramasse, entend Caroline crier, et se fait assommer, ce qui déclenche un coup de feu. Quand elle se réveille, Laura reste silencieuse malgré le fait qu’elle vive maintenant avec un policier, et attend que celui-ci finisse par retrouver le cadavre de Caroline. Là, elle s’accuse du meurtre. Hein ?
Son absence de mobile et ses aveux abracadabrantesques n’embêtent pas trop les policiers, visiblement aussi crédules que le public visé. Ils mettent Laure en prison. Elle est très malheureuse, car elle ne va pas pouvoir aller à l’enterrement de sa meilleure amie (celle qu’elle a croisé 20 fois en 465 épisodes). Qu’elle ne déprime pas trop, et les téléspectateurs non plus, la prod a déjà annoncé qu’il y aurait quatre mariages dans le 480e et dernier épisode.

C’est pas comme si « Sous le soleil » avait jamais volé très haut, mais au fil d’un développement qui a fait constamment la supposition que le téléspectateur avait autant de mémoire que Doris, c’est vraiment devenu un grand n’importe quoi, qui plus est larmoyant et insupportable. C’est bien simple, tous les clichés y passent (dans cet épisode, la scène où il faut convaincre la fille de Laure de ne pas suicider en se jetant d’un toit).

La suite/relaunch/spin-off (rayez les mentions inutiles) du sympathique et réussi « La vie devant nous », qui doit prendre le relai à partir de janvier, n’aura pas de mal à faire mieux. Même s’il n’y aura plus ni Gianni Giardinalli, ni Samuel Perche. J’aurais pas aimé avoir à recaster ces deux rôles-là.