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Cet article n’a pas de commentaire audio
Par Dominique Montay • 27 novembre 2007
La sortie du DVD de la troisième saison du « Doctor Who » aux USA génère une petite polémique concernant ses commentaires audio. Et c’est la faute au Capitaine Jack.

Quelque chose s’est produit. Entre la futilité et la gravité. Difficile de se situer par rapport à une annonce semblant si anodine mais qui va dans le sens d’un polissage et d’un appauvrissement de substance.

Le coffret de la troisième saison du « Doctor Who » sort aux Etats Unis. Rien de choquant jusque là, la série y jouissant d’une belle réputation. Comme la plupart des éditions DVD non bâclées (l’autre fléau des sorties DVD avec les séries vendues en demi-saisons), elle regorge de bonus et autres featurettes. Entre autres, les bien-aimés commentaires audios.

Via ces moments de confidences, les auteurs, acteurs de votre série préférée vont parfois vous apprendre quel était leur traiteur favori, que untel avait travaillé pour le « Saturday Night Live » ou sortait d’Havard, que c’était magnifique de travailler avec cet acteur, que oui, dans les années 90, on portait des chemises hideuses et que tel acteur n’avait plus jamais connu tel moment de gloire.
Pleins d’infos utiles, futiles, amusantes ou ennuyeuses, parfois de l’auto-satisfaction à peine masquée ou, au pire, les commentateurs qui passent leur temps à rire sans rien vous dire de plus (dans le cas présent, il serait plus judicieux de noter "regarder l’épisode comme si vous étiez avec _______" que commentaire audio). Quoi qu’il arrive, cet exercice un peu obsur et réservé au fan (ou au maniaque du détail) vient de connaître un de ces moments charnières qui pose les base d’une nouvelle considération sur la chose.

Et tout ça à cause de John Barrowman.

John interprête dans « Doctor Who » le Capitaine Jack Harkness, rôle principal de la série dérivée « Torchwood », comme tous les habitués du site le savent bien.

John a commenté, accompagné de David Tennant et Freema Agyeman, respectivement Dr Qui et son assistante l’ultime épisode de la saison « Last of the Timelords ». Du moins, c’est le cas dans la version UK du DVD. Et c’est ce que le sommaire du disque atteste aux Etats-Unis. Mais que néni. En réalité, la piste a été remplacée par un podcast réalisé avec les auteurs au moment de la diffusion de l’épisode.

Pourquoi ? Tout simplement parce que le commentaire des trois acteurs a été jugé pas adapté aux Etats-Unis. Censuré. Rien que ça.

Alors qu’a fait John Barrowman ? A-t-il insulté George Bush ? A-t-il fait la promotion du terrorisme ? A-t-il insinué que les nazis étaient finalement pas si monstrueux qua ça ? Et bien non.

Il a chanté.

Ca fait froid dans le dos, je sais. C’est pire quand on imagine qu’en plus, il l’a fait plusieurs fois. Impardonnable.

De nos jours, il est devenu impossible de citer une marque (à moins qu’elle soit sponsor, dans quel cas elle n’est plus citée mais matraquée), de fredonner un morceau connu, à moins d’avoir l’interprète de cette chanson dans sa fiction ou de payer une somme bien grasse. Autant sur une forme scriptée, la retenue est possible, autant sur un exercice qu’on imagine spontané, on sait bien que c’est inimaginable.

Ces commentateurs témoins d’une oeuvre seront bientôt enchaînés à un cahier des charges avec d’un côté "ok", et un autre "sujet sensible à l’étranger". Ou alors on entendra continuellement des BIP, ou des "j’ai le droit de le dire, ça ?". La mention qui précèdait pas mal de commentaires "les propos des intervenants n’impliquent en rien la responsabilité de la maison d’édition" semblait suffisante, et dénotait déjà un ton procédurier assez agaçant.

Va-t-on vers des bonus aussi enrichissants et informatifs que : "On allait tous les midis manger chez -----. C’était assez suprenant de l’entendre continuellement chanter -----. Il avait travaillé avec ----- sur -----, mais ----- ne le diffusait pas dans l’ordre. Je suis ---- merci d’avoir écouté ce commentaire." ?

Entre les commentaires aseptisés et mornes vers lesquels on se dirige tout doucement, des clips de 45 secondes qui vous matraquent qu’il ne faut pas télécharger sur internet alors que vous avez acheté le DVD qui vous le matraque, des bonus qui sont souvent des auto-promos de 25 minutes avec des acteurs qui disent que “c’est génial d’avoir bossé là-dessus”... après, convaincre les gens qu’acheter les DVD c’est mieux que de télécharger, parce que ça fait du mal aux auteurs qui touchent quand même un pourcentage ridicule sur leur vente (ridicule, ça reste mieux que rien)... voilà un beau challenge.