IMPRESSIONS – Les Beaux Mecs : Episodes 1 et 2
Tony est tout seul
Par Dominique Montay • 16 mars 2011
Après chaque diffusion, Le Village revient sur les épisodes de la série de France 2 « Les Beaux Mecs », l’évènement européen télévisuel de ce printemps.

Tony Roucas, alias Tony le Dingue, s’est évadé de prison pour se venger, en compagnie d’une petite frappe, Kenz. Alors qu’il essaie de retrouver ses anciennes relations dans le présent, il revit son passé. Décidé à prendre sa revanche d’un milieu qui lui a tout pris, il remonte les pistes. Mais tous ses amis d’alors ne sont pas particulièrement heureux de son retour, et s’empressent de le trahir. Il est donc obligé de se tourner vers Kenz et ses amis de banlieue pour se reconstruire.

On aime :

La symétrie de la fiction, qui s’exprime aussi bien par son déroulement, entre passé et présent, mais aussi dans les situations. Entre le banditisme old school de Tony et celui moderne de Kenz. Entre la difficulté de Tony de s’adapter à une modernité qu’il ne connaît pas et celle des flics à être obligé de fouiller dans des archives papiers alors qu’ils se trimballent avec des ordinateurs portables.
La plus cocasse vient de Kenz. Alors qu’il est en prison pour un an seulement, il s’évade pour retourner dans sa cité de banlieue. Il quitte une cellule dans une prison aux murs de 20 mètres de haut pour retrouver un appartement de fortune dans le sous-sol d’une cité dont les immeubles font quarante mètres de haut. Et jamais Kenz ne se rend compte qu’il quitte une prison pour une autre. Le spectateur, oui.

Le traitement de la banlieue. Loin des clichés, mais pas du tout complaisante, on y voit des gens qui y vivent de façon honnête et les autres, comme Kenz, qui vivent avec la fascination des grands gangsters, et qui veulent devenir des stars.

Les cliffhangers réussis. La série est construite comme un 8x52’ et ne subit pas sa diffusion théorique par 2 épisodes (parce que sur France Télévision, ça peut finir en 3x52’, donc autant ne pas préjuger). De plus, ce sont des cliffhangers qui, si ils mettent les personnages principaux en danger, ne sont jamais factices.

La réussite du casting passé-présent. L’équipe créatrice des « Beaux Mecs » nous a dit ne pas avoir fait de préparation spécifique avec les comédiens, qu’il n’y a pas eu de travail de mimétisme. Et pourtant, le résultat pourrait faire penser le contraire. On retrouve dans le Tony Roucas jeune le même charme et la même sécheresse que dans la composition de Simon Abkarian. Et ce n’est pas le seul exemple.

La reconstitution minimaliste mais réussie des périodes. On joue sur l’ambiance, sur le resserrement des zones. Pas de vues de Paris au sens large, mais des éléments par-ci par-là. On sent l’absence de gros budget (nous ne sommes pas chez « Boardwalk Empire »), mais aussi le gros travail de production, car rien ne jure.

Les rapports entre Tony et sa mère, qui sont le point de départ de la fiction. C’est ce rapport qui le définira par la suite, de son entrée dans le monde du banditisme à sa réputation de dingue. Une relation exclusive et touchante.
Tony le Dingue, justement. On connaît son surnom très tôt, sans qu’on nous explique d’emblée pourquoi. C’est heureux, car cette absence d’explication immédiate nous permet d’avoir un épisode 2 qui raconte le pourquoi de cette appellation dans un mélange de force et de violence qui donne un morceau de bravoure épique qui pose définitivement la série.

La musique, déjà plutôt de bonne facture, gagne en qualité quand elle se thématise. Lorsque Tony fait preuve de violence, ou qu’on sent qu’il dévie d’une attitude normale, la musique se désaccorde, d’abord discrètement, puis plus nettement.

Voir Tony braquer un café avec Kenz et ses pieds-nickelés. Une opération vouée à l’échec dès le départ et qui tourne à la farce, entre le retard des uns, la voiture merdique, des armes en plastique et des bas sur la tête. C’est drôle, mais pas gratuit. Pendant cette expérience, Tony se rend compte de la différence entre son passé de gangster et le monde d’aujourd’hui. Sa progression commence maintenant, car il comprend que ces jeunes avec qui il est condamné à préparer sa vengeance, ont des défauts qu’il ne pourra pas corriger. A lui de trouver leurs qualités.

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Tony et sa nouvelle équipe
Un attelage peu évident

On aime moins :

Et encore, c’est un grand mot, la période où Tony est seul peut donner l’impression d’un faux-rythme. Car le début installe le duo Tony-Kenz pour s’en échapper juste après. C’est cohérent avec le personnage de Tony, qui est un individualiste, nécessaire en terme de narration, car c’est en échouant seul qu’il comprend qu’il a besoin de cette aide, mais c’est vrai que, du coup, ce passage semble raconter une autre histoire.

L’abbonement pris par Doudou Masta au rôle de manitou des cités. C’était le cas dans « La Commune », ça l’est encore aujourd’hui. Est-il capable de jouer autre chose. Le veut-il seulement. Quoi qu’il arrive, on a l’impression que son personnage de la série de Canal+ a juste été transposé, sans travail particulier. Pour autant, il est évidemment parfait dans le rôle, on a juste l’impression de voir l’histoire beggayer.

Deux paragraphes qui cherchent la petite bête, et qui soulignent à quel point le double-épisode de ce soir est réussi.


Pour aller plus loin concernant « Les Beaux Mecs » ne manquez pas notre série documentaire « Les Visages des Beaux Mecs ». Le premier volet est conçu pour accompagner ces deux premiers épisodes et s’intéresse aux personnages de Kenz et de La Gazette.

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Post Scriptum

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