LE QUINZO — 3.19 : Cher Thierry
Toutes les deux semaines, l’humeur de la rédac’ du Village.
Par Dominique Montay & Nicolas Robert • 11 juin 2012
Le Quinzo, saison 3, épisode 19. Nicolas prend sa plume pour écrire une lettre ouverte à Thierry Sorel, directeur de la fiction de France 2. Quant à Dominique, il parle de sport en général, et de foot en particulier. Un sommaire éclectique, donc.

« Cher Thierry Sorel,… »

Par Nicolas Robert.

Alors que la saison 2011/2012 s’achève, j’ai décidé de prendre mon clavier pour essayer de sauver un bon soldat de la fiction de France 2.

« Cher Thierry Sorel,

Alors que l’été approche à grands pas, je pense à vous. Et je me dis que ce ne doit pas être tous les jours facile d’être directeur de la fiction de France 2. Sans aucune ironie.

J’imagine qu’accompagner des projets de séries et d’unitaires made in France est tout sauf reposant. Parce qu’entre le moment où on trouve une bonne idée et celui où elle arrive à l’écran, il peut se passer beaucoup de temps [1]. Parce que le contexte n’est pas évident : le service public peine à trouver des projets capables de s’inscrire dans la durée. Parce que les téléspectateurs paraissent plus durs à fidéliser qu’hier.

Non, ce ne doit pas être facile. Cette année, on a vu passer une bonne idée qui a bien marché (« Les Hommes de l’Ombre »), de bonnes idées qui ont flop (« La nouvelle Blanche Neige », « Antigone 34 »), des projets mal ficelés qui n’ont pas fait mieux (« Rani », « Trafics »), et des projets qui n’étaient pas dépourvu d’idées mais qui ont péché dans leur exécution (« Des soucis et des hommes »)…

Cette liste n’est pas exhaustive mais le constat est là : ce n’est pas franchement la joie.

Au milieu de tout ça, il y a quand même un cas particulier. « Clash », de Baya Kasmi et Pierre Linhart, produit par Joey Faré et Marco Cherqui. Une série, un projet qui ont été salués par la critique à de multiples reprises (y compris par Le Village). Une création qui n’a, comme le dit la triste formule consacrée, “pas trouvé son public”.
J’ai cependant lu avec attention vos propos parus la semaine dernière sur Toutelatélé.com. Vous affirmiez au sujet de l’arrêt de la série que “la décision n’est pas prise”, mais que l’avenir de cette fiction est clairement compromis.
Là, je me sens une âme de VRP coinçant le pied dans la porte de madame Dupont au moment de lui vendre mon aspire-tout 2000. Je tente le coup et je vous le dis : “Vous ne devriez pas arrêter « Clash », pas maintenant”.

Que le pari de réunir plusieurs générations devant une série française en prime-time eut été casse-gueule, je veux bien le croire. Peut-être était-ce une erreur à une époque où la multiplication des chaînes (et des propositions émanant du web) morcelle de plus en plus l’audience. Et c’est sans doute encore plus vrai quand on fait le choix d’une série évoquant deux générations distinctes.

Mais il y a, sur le fond, quelque chose de fort. Dans le choix des thématiques, dans l’interprétation des acteurs, dans la mise en perspective de l’ensemble. Avec « Clash », vous êtes dans le vrai. Alors ne lâchez pas l’affaire. Un peu comme la chaîne n’a pas lâché « Fais pas ci, fais pas ça », quelques années plus tôt. Le contexte est certes différent mais il y a des aussi des constantes.

Qu’il faille ici aussi revoir la copie, trouver des ajustements, c’est sûr. Écouter ce que dit le public et savoir défendre ses convictions profondes, c’est tout sauf simple. C’est trouver son équilibre sur un fil fragile. Mais c’est possible. Pour cela, il faudrait sans doute que France Télévisions, dans son ensemble, assume le fait que pour exister, la fiction française doit tester, se planter mais s’accrocher [2]. Ne pas lâcher.

Mais on ne baisse pas les bras quand on a une production capable de tirer l’ensemble dans le bon sens.

Non, votre boulot n’est pas simple. Il est même sans doute ingrat. Mais vous avez une singulière opportunité de poursuivre la mission du service public.

Ne la manquez pas. »

C’est sur quelle chaîne le match, ce soir ?

Par Dominique Montay.

Depuis vendredi dernier, on peut constater sur les écrans français le retour d’une sérié de très grande popularité, qui à chaque saison fait des audiences assez remarquables, même pendant les épisodes dits "faibles". L’Euro 2012. Enfin cette année ça s’appelle 2012. En fait ça change tous les 2 ans. Un coup c’est Mondial 2010, Euro 2008... Oui, vous l’avez compris, je vais parler de football. Et même de sport. Sur Le Village. Il est temps qu’on ferme, je ne vous dis que ça...

JPEG - 299.5 ko
Vive le sport...
...sur toutes les chaînes

En France on sait mettre le sport en avant. On s’aperçoit même, au fil des années que même si ça coûte très cher et que la rentabilité du produit est parfois discutable (ou du moins à étudier en profondeur), tout le monde (hormis ARTE et France 5) en diffuse, en a diffusé ou aimerait bien en diffuser.

Tout le monde veut son exclusivité. Son tournoi. Ses matches. Pour le diffuseur, le sport est une perfection. C’est totalement non-téléchargeable. Ca se regarde en direct ou, avec l’hyper-connectivité des gens, jamais. Personne ne se pointe sur twitter aujourd’hui en disant "me dit pas la fin de France-Allemagne de la Coupe du Monde 82, je ne l’ai toujours pas vu" (Spoiler ! La France a perdu et Harald Schumacher est un salaud).

En plus, ça remplit bien la grille. Chope les droits de Roland Garros, et tu peux charger ton après-midi sans te fatiguer à coups de "pocs-pocs-passing" pendant 7 heures. Pareil pour le Tour de France. Même si je me fais plus de soucis pour le second que pour le deuxième. Autant les retraités qui forment le gros du public du Tour vont, un jour, nous quitter, autant il y aura toujours autant d’étudiants qui révisent en juin et qui cherchent un fond sonore pas trop chargé pour bachoter.

Et les évènements ponctuels : Coupe du Monde et Euro de Foot. La grille qui se remplit un soir sur deux. Le programme facile à plaquer, et qui permet aux commentateurs de TF1 de dire, après chaque match "et tout de suite, un épisode des Experts". Et le championnat de France, bordel ! Toutes les semaines, 38 fois par an pour savoir qui a prit les 3 points, qui s’est fait niquer par cet enculé d’arbitre (vulgarité volontaire qui exprime bien ce que je pense des râleurs compulsifs), ou qui est blessé 8 mois, qui sent "souffler le spectre de la relégation" (si-si je l’entend souvent, celle-là), qui est en crise, qui a des problèmes avec son "axe central" (le "côté latéral" c’est pour quand ?)... Une manne de news sans fin qui alimente les directs, mais aussi les shows d’analyses, tous aussi nombreux que vains pour la plupart.

Toutes les chaînes ont leurs animateurs, du Laurent Luyat qui donne toujours l’impression de découvrir des trucs (et d’avoir 12 ans et demi), du Nelson Monfort et sa glotte polie, du Christian Jean-Pierre (3 prénoms, pas de talent), du Alexandre Delperier qui fait passer Bob l’Eponge pour un neurasthénique posé et cohérent... n’oublions pas les spécialistes : Jean-Michel Larqué et sa propension à répéter 54 fois la même phrase histoire qu’on comprenne bien son propos, Christophe Dugarry et sa volubilité naturelle, Jean-Paul Ollivier avec sa faculté de remplir les creux en parlant de tel chateau ou tel village pendant qu’en bas on pédale sec...

Du sport partout. Du sport tout le temps. Du sport en simultané. Un bonheur pour les suiveurs, une torture pour les autres.

J’aime le sport. Sincèrement. Pas tous. Le Curling, faut pas déconner non plus. Et ne me branchez pas sur le combiné nordique, je ne comprend toujours pas l’utilité. Mais occasionnellement, je vais picorer à droite à gauche, et y trouver mon bonheur. Parfois, par contre, je me dis que le sport est surexposé, au détriment du reste, que nos chaînes ne trouvent que rarement l’alternative. En 1998, pendant la Coupe du Monde en France, M6 se posait comme la chaîne 0% foot. Et je trouvais ça normal. Pas courageux, ni suicidaire ni idiot. Normal. Le choix est la nature même de la télévision. Aujourd’hui, personne ne s’affiche comme tel. Par peur de ne pas pouvoir en diffuser un jour ?

Et alors ?