CA TOURNE ! — Des canards et des Reporters
Ou La reproduction des Canards en Belgique du Nord
Par Dominique Montay • 22 novembre 2008
Place à l’investigation, la vraie. Le Village est parti sur le tournage de la seconde saison de « Reporters », invité par Canal+, pour tenter de lever le voile sur les mystères de cette suite très attendue. Récit.

Rendez-vous aux locaux de CANAL+. On se croirait au ministère des finances tant l’édifice de verre et de pierre dont une partie est sur pilotis semble venir de l’esprit du même architecte. Contrairement à TF1, qui siège quelques pâtés de maison plus loin, pas évident de repérer que l’immeuble, c’est CANAL. Le CANAL+. Celui qui diffuse du foot, des films et du porno. Celui dont on disait, dans les années 90, qu’on pouvait le voir décodé en agitant une passoire devant ses yeux. Si vous êtes un nostalgique invétéré comme moi, vous regrettez le fameux "bon vieux temps" de CANAL+, celui de De Caunes et des Nuls, celui de l’ellipse, celui de Michel Jonasz qui chante juste avant le film, celui où (paraît-il) ça reniflait de la coke à tout bout de champ... Evidemment, ça serait passer sous silence toutes les émissions de « NPA » digne d’un somnifère, les gags pas toujours drôles de ces mêmes Nuls et de ce même De Caunes, et que le foot était commenté par Charles Biétry.

Pas très loin de TF1, donc. Est-ce que ça justifie la facilité avec laquelle les animateurs changent de chaîne ?
’’Ca vous dirait de venir bosser chez nous à 20h ?
- Ah non, désolé, ça me rajoute une heure sur mon trajet. J’ai acheté une maison et je me vois mal la revendre en pleine crise...’’

Le Village a été invité sur le tournage de la saison 2 de « Reporters », comme d’autres journalistes bloggeurs-internautes. On est venu en force, plus nombreux que les autres sites réunis. Deux enseignements à tirer de ce genre d’expérience : un, on était très motivés. Deux, on n’avait pas de boulot ce jour-là (non, on n’a pas séché avec un mot de maman du type "mon fils a mal au ventre"). Arrivée aux locaux de CANAL, légère panique : à quoi ressemblent les deux personnes, hormis Sullivan, qui sont avec nous sous la bannière A-Suivre.org. Pas de panneau. Pas d’avertisseur. Mission : trouver des gens, la trentaine, armés de matos vidéo professionnel, et qui semblent un peu perdus ou dans l’attente de quelque chose. Coup de bol, on se trouve du premier coup. Donc pas de grand moment de solitude. Ouf.

Le boss arrivé armé de papiers et autres documents (on reste dans l’esprit "mission"), nous entrons. Alexia, l’attachée de presse de CANAL, semble nous reconnaître d’entrée de jeu. Soit ils se connaissent tous chez CANAL, soit on a des têtes d’internautes... (comment le prendre ?...). Elle nous présente Camille, attachée de presse de chez CAPA, qui se joindra à nous, nous annonce qu’on doit attendre les autres... il est 11h30. Et pour bien faire, il faudrait être sur le tournage à 12h à Bezons (viamichelin ou mappy pour ceux qui veulent savoir combien ça fait Boulogne-Bezons, sachant que la norme parisienne peut osciller entre le simple et le triple du temps prévu).

11h40, Alexia trépigne un peu, nous continuons de discuter. Deux membres d’un site arrivent, on se dit que c’est bon, mais non... on attend une dernière personne.
11h45, Bruno Gaccio entre, Alexia part taper la discute avec l’ancien chef des Guignols. On attend toujours.
11h50, Vincent Lindon arrive. Barbe de trois jours, le pas vif, je suis content de l’avoir reconnu. Enfin, surtout content de l’avoir gardé pour moi quand Alexia nous le présente comme s’appelant Fabrice de la Patelière. Donc pas de grand moment de solitude non plus. Re-ouf.
11h52, Fabrice de la Patelière va griller une clope, suivi par les gens de l’autre site qui fument. Note à Sullivan : forcer au moins la moitié de la rédaction à fumer pour avoir un justificatif pour suivre le directeur de la fiction de Canal en pause cigarette. Juste une proposition, parce que là, 4, pas un fumeur... jeunesse foutue...
11h55, On y va, la personne que nous attendions étant en fait là depuis 10 bonnes minutes.

Le trajet se fait sans heurt, à part peut-être pour Camille, qui se retrouve assise à une place qu’on a commune d’appeler dans d’autres voitures "un coffre". Pas inconfortable (ça reste un siège), mais ça donne un peu la sensation d’être à l’écart. On filoche, périph’ les doigts dans le nez, Neuilly itou. Arrivé dans Bezons, avec assurance, le taxi se fend d’un "le taxi devant nous il sait où c’est, 25 ans d’expérience, quand même"... et dans la même seconde, ce même taxi de devant fait demi-tour, s’étant trompé de sortie. Bref, on arrive enfin ! A nous, « Reporters ».

Nous sommes à mi-tournage. Les extérieurs des cinq premiers épisodes ont déjà été tournés en amont et le réalisateur Gilles Bannier (« Engrenages », « Reporters ») s’apprête à passer la main à Jean-Marc Brondolo (« SCALP »), présent sur le tournage. Tout comme Olivier Kohn, la tête pensante de « Reporters ». Première surprise quant au lieu de tournage : il ne s’agit pas d’un studio mais d’une usine désaffectée réaffectée. On se croirait vraiment dans des bureaux, avec juste les plafonds un peu plus haut que la normale. L’air de rien, ce lieu donne une crédibilité sans faille aux décors. « Reporters » est filmé dans une esthétique à mi-chemin entre le documentaire et la fiction et tourner hors des studios, éclairer en soutenant la lumière naturelle au lieu de la recréer, filmer à deux caméras au lieu d’une, tout sert le propos "réaliste" de la série et son esthétisme.

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Le décors des bureaux de la rédaction de TV2F

La (ou le) chef décorateur doit être monomaniaque. On s’incline devant le souci du détail de chaque portion du décor. Les bureaux sont en bordel, tous les postes ne sont pas équipés du même ordinateur dernier cri de la marque d’un partenaire publicitaire et, si vous avez chez vous un téléviseur Full HD, vous pourrez (même si on en doute) vous délecter des plans qui laissent apparaître les blocs-notes présents sur les bureaux et qui regorgent - appelons un chat un chat - de conneries. Du très développé "Sujet du jour, la migration des canards en Belgique du Nord - parlent-ils flamand ?", au très partial et un peu vrai "qu’est-ce qu’ils sont beaux les claviers MAC", au révélateur "Penser à se réveiller le matin". Faut bien s’amuser de temps en temps quand on bosse dur.

Assis sur le fauteuil du présentateur de JT de TV2F, Sullivan se prend pour PPDA (ou Laurent Delahousse, je le laisse choisir) et interviewe à tour de bras Gilles Bannier et Olivier Kohn. Ce dernier a un peu peur de trop en dire sur la seconde saison. Camille, l’attachée de presse de Capa, écoute avec attention l’échange. Pour surveiller ? Elle m’assure que non. À voir... Olivier Kohn est ravi de parler de son bébé. En France on ne starifie pas le scénariste, il passe souvent en second plan "Avec le nom réduit de moitié au générique de fin pour faire la place à la pub. Même avec la télé HD, ils risquent de diviser encore plus l’écran pour mettre plus de pub, et notre nom sera toujours aussi petit". Olivier est intarissable, toujours en quête d’apprentissage sur son métier : il raconte que le travail de David Milch a eu une influence énorme sur sa manière d’aborder l’écriture. Le bonhomme a du goût.

Et là, attention aux amateurs de sports extrêmes : Sullivan et moi avons réalisé une difficile interview non préparée du responsable de la fiction à Canal, Vinc... Fabrice de la Patellière, dont la présence sur les lieux n’a été annoncée que peu de temps avant la visite. Ca revient, en gros, à faire du canoë en duo, ramer chacun de son côté chacun son tour, ne pas aller droit et risquer de se manger la berge à tout moment. Dit comme ça, ça donne un caractère dramatique à la situation, mais globalement, il ne fallait pas trop se louper afin d’éviter ça :
’’- Allô, bonjour [insérer nom de rédacteur du Village ici] pour le site Le Village, je suis bien chez Canal ? J’aimerais une interview avec [insérer nom de célébrité hors d’atteinte ici].

- Ah, le Village ! on se souvient de la dernière ! 1 minute sans rien dire au début, deux fois la même question posée à trente seconde d’intervalles, une crise de larmes en plein milieu, une tentative de fuite et la question "et sinon, la famille, ça va ?". Non merci.’’

Petit tour sur le tournage. Pas de chance, on filme dans une pièce très réduite et on peut juste voir l’équipe et ce qui est en train d’être filmé au combo. Fabrice de la Patelière nous laisse entendre qu’on peut repasser plus tard pour plus en voir.

Sont accueillants, chez Canal !

Et en plus, ça bouge !

Illustrations en image :

Entretien avec Olivier Kohn à propos de la saison 2 à visionner ici.

Entretien avec Fabrice de la Pattelière à visionner ici.

Reportage par Jeff Gautier, Sullivan Le Postec, Jean-Marie Montangerand, Dominique Montay.
Montage par Loïc Le Roux et Jean-Marie Montangerand.

Post Scriptum

je m’appelle Dominique Montay et j’approuve ce message.

Dernière mise à jour
le 23 décembre 2011 à 13h25