REPORTERS – Épisodes 2.07 & 2.08
Une nouvelle direction et trois nouveaux chapitres du roman Augé...
Par Sullivan Le Postec • 12 juin 2009
Passé le point culminant des deux précédents épisodes, la série rebondit dans une nouvelle direction. A force de remonter la piste de l’attentat de Riyad, Alexandre se trouve aux premières loges d’une des bataille d’une guerre d’un genre nouveau.

Maintenant qu’on a compris la raison de l’attentat de Riyad, et que la saison a surpris avec l’assassinat du personnage de Janssen, la série doit rebondir, c’est ce à quoi s’emploient ces deux épisodes.

Pour mémoire, le débriefing complet de ces deux épisodes par Olivier Kohn et Jean-Marc Brondolo est accessible ici.

Épisode 7

Écrit par Jean-Luc Estèbe. Réalisé par Jean-Marc Brondolo.
A Matignon, on prépare le communiqué qui annonce que Christian Janssen s’est suicidé chez lui pendant la nuit. L’attaché de presse de Matignon n’est pas au courant de la vérité, mais découvre en surprenant des bribes de conversation qu’on lui ment et que Janssen a, en réalité, été assassiné. Elle a du mal à supporter cette pression et quitte l’enterrement alors que Barlier fait un discours très fort sur la manière dont les journalistes ont provoqué la mort de Janssen en faisant fi de la présomption d’innocence. Ce départ qui ne lui ressemble pas alerte Florence qui, pourtant, n’avait pas voulu prêter attention à la paranoïa de Thomas qui, après une enquête de voisinage qui a fait apparaître que personne n’a entendu de coup de feu dans l’immeuble de Janssen, a décidé que le conseiller de Barlier avait été assassiné. Elle parvient à faire parler Nathalie qui lui confirme ses soupçons.
Au lendemain de la diffusion de son reportage au 20H sur le retard de l’AS400, Alexandre reçoit la visite d’un certain Régis Meyer. Alexandre découvre que cet homme travaillait très fréquemment avec son père, et que lui aussi a des doutes sur sa mort. Meyer dirige Grapa, une cellule secrète d’intelligence économique : ils luttent contre l’espionnage et le sabotage industriel. Meyer explique à Alexandre que c’est de cela qu’il est question : le retard de l’AS 400 n’a rien d’un accident, c’est le résultat d’une attaque. Avec le père d’Alexandre, ils étaient sur la trace de la taupe qui, cachée au sein d’Airsup, sabotait l’avancée des travaux sur ce nouvel avion révolutionnaire, futur avion le plus léger au monde. Justement, Grapa tombe sur une piste sérieuse. Régis Meyer et Alexandre mettent cap vers Bern, espérant y démasquer ce saboteur, Salomon – qui pourrait aussi être l’assassin du général Marchand...
Michel Cayatte met finalement Thierry Augé dehors. Mais celui n’est pas décidé à le laisser tranquille et continue d’envoyer des SMS à Elsa. Michel est en train de commencer avec Armelle une véritable relation. Mais Augé s’introduit chez lui, et la tue. Peu après, il s’en prend à Elsa...

Épisode 8

Écrit par Sorj Chalandon. Réalisé par Jean-Marc Brondolo.
Michel se précipite chez Elsa. Il est arrêté en chemin par la police pour ses excès de vitesse dans Paris. Il parvient à les convaincre qu’Elsa est en danger. En appelant Michel, Augé apprend que la police est avec lui, il laisse donc Elsa sans avoir eu le temps de lui faire du mal. Mais, après le chapitre Armelle et le chapitre Elsa, Augé est déterminé à faire de Michel lui-même le prochain chapitre du livre...
A Bern, Alexandre et Meyer rencontrent Rüdiger Büchler, physicien travaillant pour Aisup qu’ils soupçonnent d’être Salomon. Il s’avère en réalité que s’il a bien ralenti volontairement l’avancée de l’AS400, c’est parce qu’il a été victime de chantages : on a menacé d’éjecter sa fille de l’unité de soin spécialisée qui l’accueille dans le Maryland, aux États-Unis, et qui peut lui permettre de survivre encore deux ou trois ans à la maladie rare qui l’affecte, la Progéria. Büchler a bien saboté l’avancée de l’AS400, mais il n’est pas Salomon et ne connaît pas l’identité de ses maitres-chanteurs...
Florence force Marie Clément à la voir et à lui révéler que Janssen a été assassinée chez elle par des hommes du Moyen-Orient qui lui ont demandé de passer un message : ’’dans notre pays, on paye ses dettes’’. Sous les ordres de la Direction de la communication de Matignon, Dewilder pour le groupe Adagio fait une conférence de presse dans laquelle il met carte sur table, espérant noyer les journalistes sous les infos. Aisup va mettre en place un plan pour affronter la crise. 10 000 emplois vont être supprimés.
Thomas a publié tout ce qu’il sait – croit savoir – sur Barlier dans une revue qui accumule les procès et les publications judiciaires, et est très portée sur le conspirationisme. Elle se base en partie sur une pièce donné par le paparazzi qui s’avère fausse. Thomas est viré de TV2F et discrédité. Cela ne l’empêche pas de perturber la conférence de presse de Dewilder en tant que journaliste indépendant. Florence se demande ce qu’il sait exactement pour être si convaincu que Janssen ne s’est pas suicidé. Thomas lui parle de sa virée en Suisse avec Marchand.
Florence contacte donc Alexandre, et ensemble il rassemblent les pièces du puzzle : comme l’attentat de Riyad, l’assassinat de Janssen est un acte de représailles des hommes du Colonel Al-Hazri. Florence et Alexandre décident de garder l’information sous le coude le temps de rassembler plus d’éléments.
Catherine a promis a Nadia que 20 journalistes employés depuis longtemps à TV2F en CDD pourraient être engagé en CDI. Mais Leroy le lui refuse pour protéger les comptes du groupe à quelques jours de son audition par le CSA. Leroy est en pleine manœuvres et promet tout et son contraire à qui promet de l’aider à conserver son fauteuil. Excédée, Nadia révèle en plein conférence de rédaction que Catherine a une relation avec Mériadec, le Président du CSA. Massart saute aussitôt sur cette occasion pour essayer de déstabiliser Catherine et de récupérer son fauteuil...

Mensonge sincère

S’il n’était pas à proprement parler résolutoire, l’épisode 6 faisait tout de même atteindre un point culminant, ou au moins un tournant majeur, à beaucoup des intrigues de cette seconde saison. Le septième épisode consiste donc en un relancement de la machine. C’est particulièrement évident pour ce qui concerne l’intrigue principale, qui part dans une autre direction avec l’arrivée du personnage de Régis Meyer. L’attentat que l’on croyait islamiste dans le tout premier épisode a permis à Alexandre de remonter un fil particulièrement sinueux qui l’amène à plonger dans le domaine de l’espionnage industriel. Le retard de l’AS400 est un sabotage qui constitue la cause originelle, quoiqu’indirecte, de l’attentat. Meyer est tout à la fois un personnage et une énigme. C’est clairement un défi pour la fiction d’aborder un caractère si complexe et dont le parcours peut au premier abord, donner une impression d’incohérence. Mais c’est là le type de choses que « Reporters » fait très bien, les deux prochains épisodes achèveront de le confirmer. Si le personnage en lui-même est intéressant, en partie par le charisme de son interprète, l’interrogatoire de Büchler est rapide, pas forcément très convainquant, et ses aveux sont du coup un peu facilement obtenus. Avec cet intrigue, « Reporters » s’approche un peu trop de ces séries procédurales qui trustent le haut des audiences, ou les enquêteurs volent d’un interrogatoire de témoin riche en révélation à l’autre, quitte à être un peu superficiel pour ne pas ennuyer le public et maintenir un niveau élevé de twist dans l’intrigue.
Par ailleurs, l’épisode 7 traite aussi des conséquences d’autres événements majeurs de l’épisode précédent. D’abord la perte de contrôle de Thierry Augé, dont on réalise qu’il a pour de bon basculé dans la folie meurtrière. L’escalade de cette intrigue apporte à ces deux épisodes la majorité de leur action et construit une tension efficace, qui débouche malheureusement sur une tentative très maladroite et pour tout dire ratée en guise de cliffhanger de l’épisode 8.
Et puis il y a la mort de Janssen. Affecté profondément par la mort de son conseiller et ami, Barlier fait à l’enterrement un discours mémorable, inspiré de celui de Mitterrand fustigeant “les chiens” qui avaient poussé Bérégovoy au suicide. La scène est particulièrement réussie en cela qu’elle nous montre un mensonge sincère. Car si la mort de Janssen n’est pas un suicide, Barlier est toutefois réellement révolté contre le traitement infligé à Janssen les jours précédents sa mort.

Le facteur humain

Si l’épisode 7 donne parfois un tout petit peu l’impression de se traîner, il forme un duo intéressant avec l’épisode 8 parce que nombre d’intrigues sont reliées par une certaine continuité thématique. Après leur rencontre avec Büchler, Meyer explique à Alexandre que la difficulté contre laquelle leur action butte est celle du facteur fumain. Büchler n’a rien de mauvais, aucun réel motif de saboter, mais les ennemis d’Airsup ont exploité son intimité, sa vie personnelle, à savoir la maladie de sa fille, pour le retourner. Repérer le maillon faible, déterminer la nature exacte de sa faiblesse, et l’exploiter, c’est aussi ce que fait Florence pour faire avancer son enquête sur la mort de Janssen. C’est le même facteur humain qui fait qu’on lui révèle le secret d’État qui se cache derrière le suicide de Janssen. C’est en jouant sur les liens et les relations qu’elle a ou a eu avec Thomas et avec Marie qu’elle leur fait révéler ce qu’ils savent. Et le facteur humain joue a plein à TV2F où chacun ignore le secret de l’autre, et ou les relations intimes sont des menaces sur certaines carrières. Furieuse contre Catherine, Nadia exploite la faille de son adversaire et rebat une fois de plus les cartes alors que la chaîne voit les alliances se nouer et se dénouer si vite qu’il devient impossible de prévoir la place qu’occuperont les joueurs quand viendra le moment de la décision du CSA.

Ce qui est très intéressant dans cette notion de facteur humain, c’est aussi que c’est en fin de compte ce qui sépare « Reporters » d’une série dont le discours pourrait être un peu limite, sur le mode “on nous cache tout, on nous dit rien”. Si elle n’y prenait pas garde, « Reporters » pourrait facilement alimenter un discours simpliste et poujadiste sur les élites acoquinées qui cachent la vérité au peuple, et alimenter des visions conspirationnistes du monde pas très subtiles.
Mais elle a l’intelligence de mettre en scène un monde infiniment plus complexe, où une part non négligeable des secrets finissent par remonter à la surface. La vérité est déformée, brouillée par les fumigènes et contre-feux allumés dans l’espoir de la cacher. Mais la vérité émerge. Et chacun peut la trouver s’il veut bien s’en donner la peine. Si elle reste inconnue, c’est bien moins parce que l’information est manipulée, ou parce que les gouvernements seraient tous puissants que par la faute d’une certaine indifférence citoyenne...

Dernière mise à jour
le 9 mars 2010 à 10h35