Accueil > Critiques > Archives > Le Miroir de l’Eau > Enfin...
1.04 - Episode 4
Enfin...
Episode 4
lundi 30 août 2004, par
Ne manquez pas "Nos meilleurs années", sur Canal +, en septembre !!! Ca c’est de la saga réussie !
Mettons les choses au clair dès le début... « Le miroir de l’eau » est une saga. La saga est un genre, codé et particulier, que certains peuvent ne pas apprécier...
C’est possible. Il y a des genres que l’on aime plus ou moins que les autres. En ce qui me concerne, les histoires de mafia sont un genre qui m’ennui au plus haut degré. C’est ainsi que « Les Soprano » me plongent dans la plus profonde torpeur, que je n’ai pu regarder « Le Parrain » seulement mu par le plaisir de voir jouer Diane Keaton, que je préfère Joe Pesci dans « Maman, j’ai raté l’avion » que dans « Les affranchis »...
En revanche, les sagas me plaisent. Françaises, américaines, italiennes, au cinéma, à la télévision, en littérature, elles sont pour moi la promesse d’un bon, d’un excellent moment...
Je vous conseille de ne pas rater « Nos meilleures années », sortie en salle en France en deux parties de 3 heures chacune (à l’origine, produite pour la télévision italienne), et diffusée sur Canal + en septembre... 40 ans de l’Italie à travers le spectre d’une famille romaine... C’est somptueux, tragique, émouvant, surprenant...
Fort de ce préambule, je me permets d’affirmer que ce dernier épisode du « Miroir de l’eau » est lamentable...
A ce stade de médiocrité, je pense que l’on a dépassé le « je n’ai pas aimé ». C’est à proprement parler pitoyable...
Le scénario délaye les intrigues dont les aboutissement ont déjà été imaginés par les spectateurs dès le deuxième épisode... Réali et Yerlès finissent ensemble, l’instit’ et le flic également, la gamine de Réali file le parfait amour avec son repris de justice d’opérette, l’instit’ est la fille d’Isaure, le frère de Célarié est effectivement le coupable des meurtres d’Isaure et d’Anaïs...
A ce propos, au cours de l’épisode, intervient une grande révélation : Isaure Castella aurait été assassinée... Je tenais ce fait pour acquis, dès la mention de sa mort dans le premier épisode, au contraire des différents personnages dont les têtes effarées à cette annonce m’ont plongé dans une profonde consternation...
Mais, à la limite, ces problèmes de scénario sont secondaires. Sans rythme, mal foutu, mal dialogué, le scénario seul aurait fait de ce « Miroir » une simple saga ratée... Pas si grave...
Mais la mise en image est absolument désastreuse. La photographie est d’une laideur sans nom, la direction d’acteurs honteuse : je reviens à la petite Alice... Avoir engagé cette jeune « actrice » était une belle erreur, la diriger aussi mal pendant 400 minutes montre quand même l’incompétence du réalisateur de ce point de vue... Mais ce n’est pas le seul problème... Les acteurs donnent l’impression de jouer dans des registres tous un peu différents les uns des autres, on a l’impression que leurs partenaires n’influent pas sur leur jeu. Et le fait que les ¾ des séquences soient des alternances de champ/contre champ sur des visages en gros plan augmente la sensation d’isolement des acteurs. J’avais vraiment l’impression à certains moments que chaque acteur avait enregistré seul dans un studio son rôle...
Enfin, et c’est le plus grave à mon avis, par sa médiocrité, la mise en scène rend incohérentes et improbables les scènes de certaines séquences...
Prenons l’exemple du passage où le tueur, pas encore identifié, fait cours à la classe d’Alice. (Le tueur, directeur de l’école, vient de prendre le remplacement de notre amie l’instit’... Il est bien connu que les directeurs d’école n’ont pas de classe en charge à eux, m’enfin, passons...) La petite fait un dessin reliant les deux meurtres. Le tueur s’en saisit et se met à lui hurler dessus. Elle quitte la salle de classe. Le tueur la poursuit dans toute l’école, la kidnappe et l’emmène au bord du lac...
Euh oui... Et la classe restée en plan ? Les gamins sont restés 5 heures tous seuls et sont gentiment rentrés chez eux ?
Quelques heures plus tard, Alice est signalée disparue par sa mère. Le flic et l’instit’ (absolument pas au courant des agissements du tueur et de ce qui s’est passé dans la classe le matin même) se précipitent à l’école et commencent à chercher dans tout le bâtiment... Euh, oui ? Pourquoi ? Ils n’ont interrogé personne, n’ont envisagé aucune hypothèse, ils se mettent simplement à courir dans tous les sens pour tomber sur la pièce secrète du directeur, qui forcément, regorge d’éléments incriminant... On enfile comme ça scène sur scène, sans que la précédente n’ait aucune conséquence sur la suivante... Une scène avec l’instit’ qui voit des traces de pas ensanglantés dans l’école en pleine nuit... Dans la suivante, elle va se coucher comme si de rien n’était...
Bref, on nage dans la plus grande incohérence à partir du moment où le réalisateur décide de suggérer l’identité du coupable. Pour information, le spectateur, à qui il est déjà arrivé de regarder la télévision, l’a démasqué la semaine précédente. Et puis, on se débarasse en quelques instants de l’élément fantastique, qui n’aura été qu’un prétexte publicitaire. Il n’aura eu au final quasiment aucune influence sur le déroulement des intrigues... Navrant !
Dans ce salmigondis d’images, le deuil, thème central et lourdement avoué de la saga, est traité de façon grossière et déplacée. La palme du ridicule revient à la scène finale d’adieux aux morts où tout le monde, dans la joie et l’allégresse, se réunit autour du lac et envoie en son milieu un petit bateau en bois portant des messages pour les disparus... Clémentine Célarié s’est faite butée quelques temps auparavant, mais apparemment, elle ne comptait pour personne. Sauf Réali, qui balance un « Tiens, Josepha, me manque ! » qui ressemble beaucoup à un « Merde, et Célarié, elle est morte, non ? »...
La réalité des contraintes économiques sur les fictions françaises est une chose. La médiocrité et l’incompétence en sont deux autres. Il est tout de même terrible que la productrice n’ait pas réalisé que le scénario était à peine suffisant pour deux épisodes de 100 minutes...
Ce « miroir » de l’eau est l’exemple flagrant de la production française qui possède les moyens financiers mais qui ne se donne pas les moyens artistiques et techniques pour réussir son pari... L’idée n’était pas mauvaise... Il fallait simplement un scénario avec un milieu et une fin (celui du « Miroir » s’arrête à la fin du premier épisode), un bon réalisateur, un directeur photo, un directeur de casting qui sache choisir des enfants avec des talents de comédie et un producteur compétent pour chapeauter l’ensemble...
Un beau gâchis...
Une saga qui aura fait illusion pendant le premier épisode... Le reste fut une déception, et le fond est atteint avec ce final, pitoyable et lamentable ! On ne ressent même pas la volonté de bien faire...
LTE || La Ligue des Téléspectateurs Extraordinaires