Accueil > Critiques > Archives > Star Trek : La Nouvelle Génération > Prophète en son pays
4.21 - The Drumhead
Prophète en son pays
Chasse aux Sorcières
mercredi 22 octobre 2003, par
Les ennemis de la Fédération sont de plus en plus menaçants. A nom de la sécurité de cette formidable institution, certains, comme l’Amiral Satie, sont prêts à bafouer sans vergogne les libertés du citoyens. Picard s’oppose à ces méthodes d’un autre âge.
Mission de L’Enterprise : Enquête sur un présumé sabotage en salle des moteurs.
Aléas de mission : l’officier d’échange klingon à bord de l’Enterprise se révèle être un espion pour le compte des Romulans. L’Amiral Satie arrive sur l’Enterprise pour enquêter sur une éventuelle conspiration à bord du vaisseau.
La grande force de Star Trek, et plus particulièrement dans TNG, c’est cette capacité à offrir des scénarii d’une grande pertinence et maturité sur notre société toute contemporaine. "Chasse aux Sorcières/The Drumhead" en est un exemple brillant.
Tout commence quand un espion klingon travaillant pour les Romulans est démasqué à bord de l’Enterprise. L’Amiral Satie, rappelée de sa retraite pour cette affaire jugée très sensible par Starfleet Command, suspecte une conspiration bien plus large à bord de l’Enterprise soupçonnant une aide venant du personelle même du vaisseau.
Dans un premier temps le Capitaine Picard travaille main dans la main avec l’amiral. Mais quand l’homme de bord, Simon Tarses, est soupçonné de trahison uniquement parce qu’il a menti sur ses origines lors de sa signature à Starfleet, Picard s’oppose aux méthodes de Satie qu’il juge non éthique et ammorale.
En effet Tarses a un grand père Romulan alors qu’il a toujours prétendu qu’il avait des origines Vulcaines. A cause de ce mensonge et de ses origines le jeune homme est jeté sur le banc des accusés.
Pour contrer l’opposition de Picard envers ses méthodes, l’Amiral Satie décide de s’en prendre au capitaine de l’Enterprise, de mettre en doute sa loyauté envers la Fédération. Lors de l’audience, Picard cite les paroles pleines de sagesse qu’un grand homme de la Fédération avait énoncé en guise d’avertissement à propos de la fragilité de la démocratie. Cet homme n’est autre que le père décédé de l’Amiral Satie. Celle-ci outrée sort de ses gonds. Picard a atteint le but recherché : discréditer l’amiral, révéler au grand jour son vrai visage d’inquisiteur. La chasse aux sorcière est tuée dans l’oeuf.
Cette histoire est bien entendu une allégorie sur les formes d’Inquisition que notre Histoire a subit (le McCartysme, Salem etc...). Le scénario est remarquablement écrit. Il montre avec un sens certain de l’à propos, de quelles façons ces méthodes puantes peuvent de nouveau facilement se retrouver au gout du jour et être habillement acceptées par la communauté au nom de la préservation des institutions en place
Plus fort encore, les mises en garde de Picard ont aujourd’hui une résonnance prophétique qui fait réfléchir. Posez vous la question : quelle est la politique extérieure du gouvernement américain en ce moment sur certains sujets sensibles ? Qui sont emprisonnés à Guantanamo en ce moment ? Des terroristes ? Certainement. Des innocents aussi ? Sans aucun doute. Les méthodes n’ont vraiment rien de différentes de celles qu’emploie l’Amiral Satie au nom de la sécurité de la Fédération des Planètes Unies.
Quelques exemples de répliques qui illustrent la force du propos de cet épisode remarquablement dialogué :
Worf : "Capitaine, la Fédération a des enemies. Nous devons les débusquer."
Picard :"Oh oui. C’est ainsi que cela commence. Mais le chemin entre la suspicion légitime et la paranoia rampante et bien plus courte qu’on ne le croit."
Picard : "Sommes nous devenus si...craintifs, si lâches, que nous devons briser un homme parce que dans ses veines coule le sang d’un ennemi. Ne condamnons par Simon Tarses, ou qui que ce soit d’autre, à cause de leur origine, ou n’enquêtons pas sur les gens à cause de leur innocentes relations."
Picard citant Aaron Satie : "Avec le premier mallon, la chaine est forgée. La première parole censurée, le première pensée interdite, la première liberté refusée nous enchaîne irrévocablement."
Picard à Worf : "Mr Worf, les méchants qui frisent leur moustache sont faciles à repérer. Ceux qui se drappent de bonnes intentions sont bien camouflés"
Picard : "Mais elle ou d’autres comme elles [Amiral Satie], seront toujours avec nous, attendant le bon climat pour fleurir, propageant la peur au nom de la justice"
Notons aussi la qualité de l’interprétation de Patrick Stewart et de Jean Simmons (Satie) une grande actrice britanique double nominée aux Oscars. Leur deux performances renforcent, comme si elle en avait besoin, la puissance de cette histoire.
Cette histoire s’attache aussi à tenir compte de la continuité de l’univers ST et de ses personnages. En particulier, l’histoire de Worf et de son père s’insère très bien dans la trame de l’histoire. L’Amiral Satie utilise à charge contre Picard plusieurs événements clef vus dans de précédents épisodes.
TNG n’est pas une série feuilletonnante mais ça ne l’empêche pas, petites touches après petites touches, de construire un univers très cohérent, très référencé.
Je ne vais pas faire dans la demi-mesure : cet épisode est une tuerie ! C’est tout ce que j’adore dans TNG : un scénario adulte, sans faille sur un sujet universel appuyé d’un commentaire social juste, profond et servi par des acteurs remarquables. Une leçon d’humanisme.
Si je vous dis que cet épisode reste pour moi l’un des joyaux de Star Trek, vous êtes surpris ?
LTE || La Ligue des Téléspectateurs Extraordinaires