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The Practice
Saison 1 à 5
The Practice
jeudi 1er novembre 2001, par
1. Présentation générale de la série
The practice comme son nom anglophone l’indique est une série américaine créée en 1997 par David E. Kelley le créateur et producteur de nombreuses autres séries : Ally McBeal, Pickets Fences (High secret city), Snoops ou encore Chicago Hope et tout récemment Boston Public.
The Practice est une série judiciaire qui met en scène un cabinet d’avocats qui à ses débuts est loin d’être reconnu, apprécié et aisé. Au contraire, Bobby Donnell et ses associés (qui ne le sont pas vraiment au début de la série) sont plutôt perçus comme les parias de la profession défendant n’importe qui pour n’importe quoi, se concentrant sur les affaires criminelles plus horribles les unes que les autres et travaillant dans un cabinet à la limite de l’insalubrité. Mais tout va évoluer rapidement pour ce cabinet de Boston, en effet les avocats qui le constituent sont très compétents et ont la rage de vaincre, il est propulsé rapidement au sommet et devient la référence à Boston dans le domaine des procès à caractère criminel.
2. Présentation et analyse des personnages
L’équipe du cabinet Donnell est composée de 4 avocats, puis rapidement 5 et aujourd’hui 6.
Robert G. "Bobby" Donnell (interprété par Dylan McDermott) en est le créateur et directeur. Complexé en tant que fils d’un homme employé comme "homme de ménage" dans un très grand cabinet d’avocat, il s’est juré lorsqu’il était petit de réussir sans jamais ressembler à ses congénères friqués, l’évolution de son entreprise est donc un problème cornélien pour lui : comment être reconnu, apprécié, comment conquérir le marché sans dénaturer l’esprit du début, sans devenir un clone des cabinets qu’ils méprisent plus que tout ? Dans les affaires, ses associés lui reprochent parfois de vouloir tenter la défense la plus risquée, osée et biscornue, toujours dans sa quête de la reconnaissance professionnelle.
Coté amour son cœur balance entre Helen et Lindsay, après une liaison avec la première, il retournera vers son amour de toujours, ce qui ne va pas sans poser de problèmes dans les deux cas. En effet, les relations entre avocat et procureur sont difficiles, surtout lorsque leurs affaires se croisent parfois, il leur est alors interdit d’en parler et sont donc obligés de refouler leurs sentiments sur le comportement de l’autre. La relation avec Lindsay elle pose problème vis à vis des autres avocats, en effet par moment le doute s’installe sur les avantages qu’elle pourrait en tirer.
Lindsay Dole (Kelli Williams) jeune avocate spécialisée dans le droit constitutionnel, n’apprécie guère les affaires criminelles, elle essaye vainement d’attirer le cabinet vers une autre voie. Elle est également complexée par son travail, elle fera tout pour conquérir l’approbation de son ancien professeur très déçu par la tournure de sa carrière, en se jetant corps et âme dans un procès contre un fabricant de cigarettes défendu par son professeur (Anderson Pearson) pour lui monter sa supériorité et sa réussite, puis comme défenseur de celui-ci accusé de meurtre, elle travaillera jusqu’au surmenage pour le sortir de cette situation.
Elle est également confrontée à sa propre morale, lorsqu’elle décide de défendre des dealers avec succès, entre argent et conviction personnelle elle devra faire le choix.
Des problèmes surviennent également coté cœur puisque sa relation avec Bobby n’est pas des plus simple mais également parce que Helen est sa meilleure amie d’où quelques tensions bien légitimes.
Eugène Young (Steve Harris) le bras droit de Bobby spécialisé dans les affaires criminelles, il est très doué pour convaincre un jury et n’a pas son pareil pour déstabiliser un témoin. Lui aussi doit faire face à des problèmes d’éthique et de moralité (sur lesquels je reviendrais plus tard) ainsi qu’au regard de son fils sur ses activités : "des gens commettent des crimes et mon père essaye de trouver n’importe quelles astuces pour les tirer d’affaire", mais il n’est pas moins fier de son père pour autant, ce qui chagrine au plus au point Eugène. En tant qu’Afro-américain, sa vie n’est pas toujours rose surtout lorsqu’il doit choisir la défense la plus appropriée pour sortir d’affaire un client lui aussi Afro-américain accusé d’avoir déclenché une émeute, c’est à dire une théorie selon laquelle les personnes d’origine africaine ont une tendance à ne plus se contrôler dans ce genre de situation, ce qui le dégoûtera au plus au point ou bien lorsqu’il est confronté à des clients racistes.
Eleanor Frutt (Camryn Manheim) plus spécialisée dans les affaires de discrimination en tout genre, sans aucun doute à cause de la propre discrimination dont elle fait l’objet à cause de son obésité. Cette même obésité est une véritable muraille affective : elle ne plaît pas et elle a peur de plaire. Les seules fois où elle fréquente des hommes soit elle trouve, le premier rencontré par petite annonce, trop laid, ce qui la dérange au plus profond d’elle-même se trouvant face à face avec la réalité, cette même réalité qu’elle essaye de combattre jour après jour. Ou bien l’homme dont elle tombe éperdument amoureuse se trouve être au centre d’une affaire d’escroquerie à l’assurance que le cabinet du procureur essaye de résoudre avec l’aide de Jimmy et Rébecca.
Jimmy Berlutti (Michael Badalucco) au début de la série ne travaille pas pour le cabinet, il est l’ami et banquier de Bobby, mais suite à un prêt plus que douteux qu’il lui accorde lorsque les affaires du cabinet sont au bord du désastre, il se fait licencier. Bobby se sentant redevable à juste titre, il décide de l’engager. Ces débuts sont très difficiles, car les affaires ne se bousculent pas à sa porte et il fait preuve d’une certaine timidité. Prenant son courage à deux mains, il décide donc de faire une pub télé en se présentant comme "Jimmy le rien" défenseur des pauvres, ce genre de publicité étant très mal vu dans la profession il est totalement discrédité vis à vis de ses congénères mais aussi vis à vis de ses collègues, étant conscient de son erreur il s’efforcera de reconquérir talentueusement une confiance et une réputation perdue. Ce qui ne l’empêche pas d’être constamment taquiné par ses collègues au sujet de sa tête plus grosse que la normale.
Rebecca Washington (Lisa Gray Hamilton) amie et secrétaire de Bobby depuis ses débuts, elle a un très fort caractère, ne se laissant jamais marcher sur les pieds même lorsqu’elle devient le témoin d’un meurtre, menacée, elle ira tout de même déposer au tribunal contre lui. Munie d’une volonté à toute épreuve, elle prépare pendant 5 ans son accession au barreau en suivant des cours du soir dans le plus grand des secrets. Dès son admission et la nouvelle annoncée, elle est promue avocate au même titre que les autres. Dès sa première affaire une banale histoire de vol de bicyclette elle se jette à corps perdu dans la bataille pour montrer à tous son potentiel.
Helen Gamble (Lara Flynn Boyle) substitut du procureur est très proche du cabinet de Bobby, ce qui complique parfois les choses. Elle a choisi cette carrière en tout premier lieu pour une question de finance et de sécurité. Elle est très combative et impitoyable lorsqu’il s’agit de faire enfermer un criminel, mais reste particulièrement humaine et sensible lorsqu’il s’agit de préserver un petit garçon de 4 ans témoin du meurtre de sa nurse en ne sollicitant pas sa déposition à la barre mais qui aura pour effet la libération du coupable et l’incompréhension totale de la famille de la victime, et la plongera dans un profond désarroi.
Lucy Hatcher (Marla Sokoloff) la nouvelle secrétaire au début de la saison 3 en remplacement de Rébecca promue au titre d’avocate. Très sûre d’elle comme sa prédécesseur, très franche mais exaspérante, des fois à la limite du supportable, on a l’impression qu’elle se complaît dans les embrouilles.
3. Analyse du concept et des sujets abordés
Le concept de la série judiciaire n’est pas nouveau et les séries sur ce thème ne manquent pas, mais elles ne sont évidemment pas toutes du même calibre, prenons par exemple le groupe AB qui adore, à notre plus grand malheur, produire des séries de ce genre : "Cas de divorce", "Affaires familiales"... j’en passe des pires et des plus mauvaises. Ces produits n’ont rien à voir avec des séries de la trempe de The Practice, les personnages n’ayant aucune profondeur et ne sachant pas jouer par dessus le marché, les histoires n’ayant aucun intérêt visuel, ni moral.
Alors parlons plutôt de la vraie série judiciaire et plus précisément de l’œuvre de David E. Kelley qui nul doute à l’air de se complaire dans ce sujet (rien d’étonnant lorsqu’on sait qu’il est avocat d’origine), puisque son premier essai en tant que producteur exécutif et scénariste se fit dans "L.A law" (La loi de Los Angeles) de Steven Bochco, puis il créa la magnifique série Picket Fences (High Secret City) à fort caractère judiciaire puisque la plupart des épisodes se finissent au tribunal. Viendra ensuite Ally McBeal et The Practice dans un ton totalement différent de cette dernière, passant d’une comédie délurée à un Drama beaucoup plus sombre.
Il n’est pas difficile de remarquer que "Picket Fences" et "L.A. law" ont largement inspiré Kelley dans l’élaboration de The Practice (et qui s’en plaindra !?) puisqu’on y retrouve de nombreux sujets similaires mais traités de façon différente : racisme, droit à la différence, éthique du métier d’avocat, erreurs judiciaires, religion, discrimination des personnes hors norme...Kelley va même jusqu’à nous sortir une scène identique : Ellénor qui conseille à son client ivre de boire une bouteille après un accident qu’il a causé comme l’avait fait Douglas Wambaugh dans Picket Fences quelques années auparavant.
Dans The Practice, comme dans toutes ses séries, Kelley n’a pas choisi le concept : un épisode, une histoire. En effet, il mêle habilement les petites affaires introduites, développées et conclues en un épisode et les histoires à long terme qui s’étalent sur une partie de la saison, en forçant davantage cet aspect lors de la troisième dans un souci de retenir le téléspectateur mais aussi dans la perspective d’un développement plus poussé d’un sujet et des personnages s’y rattachant, donnant ainsi plus de relief à la série et la possibilité de rebondissements inattendus.
Parmi les sujets récurrents et d’actualité, un se démarque nettement du lot : l’éthique et la morale de la profession d’avocat. Nos Héros sont, en effet, confrontés à un dilemme :
ce que leur métier leur impose c’est à dire défendre de la meilleure façon qui soit leur client quoiqu’il ait fait, et pour cela ils doivent souvent être offensifs, user de petites astuces judiciaires, des vis de procédure, de coups bas, être impitoyables et féroces aussi bien envers les témoins de la défense (famille, amis de la victime) qu’envers la victime elle-même (lorsqu’elle est encore en vie) pour les déstabiliser, allant même jusqu’à les accuser pour semer le doute chez les jurés.
ce que leur conscience et leur morale leur imposent, et comme c’est le premier de ces choix qui leur est indispensable pour être un bon avocat, ils sortent de la salle d’audience souvent salis, dégoûtés d’eux-mêmes d’avoir invoqué des faits que non seulement ils n’approuvent pas mais qui les répugnent (euh...ce n’est peut-être pas le cas de tous les avocats, il existe des exceptions comme partout).
Deux exemples me viennent à l’esprit : Eugène qui sentant le procès lui échapper en vient à accuser le frère de la victime qui pourtant était venu témoigner pour son client ou encore Jimmy qui avance comme argument pour justifier le licenciement d’une jeune Iranienne, le patriotisme et le racisme soit disant légitime contre ce pays responsable de kidnapping et d’attentats contre les Etats-Unis, Jimmy sortira de cette épreuve particulièrement abattu bien que pourtant cette stratégie soit la meilleure face à un jury d’Américains.
La plupart des personnes se sont posées la question : "Mais comment peut-on défendre avec une telle conviction et une telle rage une personne qui en a tué sauvagement une autre ?". Les avocats sont alors associés à des "pourritures" à mauvais titre. Kelley nous montre la difficulté de ce métier et nous propose de rétablir la balance en montrant le coté pile : le procès fortement médiatisé et le coté face : l’après procès où l’avocat se retrouve seul avec ses sentiments et son jugement personnel.
Un autre sujet fort abordé fut celui de la peine de mort dans un épisode mémorable, sans doute le meilleur de la série : "L’esprit de l’Amérique" où une équipe de télévision suit le cabinet Donnell quelques heures avant l’exécution d’un de leur client. L’équipe va tout tenter pour sauver cet homme qui clame son innocence, en se jetant corps et âme dans la bataille pour obtenir un sursis et une réouverture du dossier. Malheureusement, les éléments apportés ne seront pas suffisants aux yeux du gouverneur.
Cet épisode est particulièrement fort et humain, Kelley nous propose de suivre les dernières heures programmées d’un homme et essaye du mieux que possible de nous faire passer les sentiments des différents protagonistes aussi bien ceux du condamné à mort que ceux des avocats et plus précisément Jimmy qui au début a une opinion toute forgée et qui semble inflexible sur la peine de mort et sur la culpabilité de son client mais les heures passées à ses cotés, l’amènera à remettre profondément en question son opinion sur la culpabilité de l’homme et sur le bien fondé de la peine capitale, terminant complètement tiraillé entre une conviction avec laquelle il vit depuis des années et sa très récente remise en cause. A travers ce personnage, Kelley tente de faire réfléchir la population américaine sur ce sujet crucial, de montrer aux plus fervents partisans de la peine de mort que leur point de vue serait tout à fait révisable s’ils prenaient la peine de se pencher de plus près dessus, et essaye de faire avancer le débat dans le sens qui semble le bon ce qui est loin d’être gagné vue le climat régnant aux USA. En lui seul, le titre veut tout dire.
4. Diffusion en France et aux USA
Comme il est de plus en plus courant, on peut scinder la diffusion des séries en France en deux : d’un coté sur le hertzien où c’est rarement fait d’une manière convenable et d’un autre coté sur les chaînes thématiques (câble et satellites) où la qualité est nettement supérieure.
The Practice n’échappe pas à cette règle, d’un coté elle est diffusée d’une manière plus que correcte sur Série Club à un rythme hebdomadaire et en VOST et d’un autre coté elle est programmée d’une façon assez pitoyable sur sa grande sœur M6.
Cela commença plutôt bien un mercredi 12 janvier 2000 avec une programmation en prime time, malgré trois épisodes balancés à la suite, on peut dire qu’M6 introduisait bien sa nouvelle série. Mais dès la semaine qui suivie, notre équipe d’avocat se retrouvait déjà propulsé en deuxième partie de soirée et cela jusqu’à la fin de la première saison (13 épisodes) au rythme de 2 épisodes par soirée c’est à dire demander aux téléspectateurs, qui venaient juste de découvrir cette série une semaine auparavant et qui n’avaient pas eu le temps de se familiariser avec elle, de rester veiller jusqu’aux alentours de 00H15 un mercredi soir !
Mais les sévices infligés par la chaîne sont loin d’être terminées puisque les 700 000 personnes qui avaient réussi à se familiariser avec la série devaient maintenant la suivre en troisième partie de soirée le vendredi soir. La chaîne expliquait ce changement de case horaire par le fait que la série n’atteignait pas les niveaux d’audiences espérés, la faute à qui ? Et c’est tout bonnement en la plaçant à 00H30 qu’elle espérait faire remonter la courbe de l’audimat ? Je dis 00H30 mais ce serait plutôt une moyenne puisque d’une semaine à l’autre l’horaire pouvait passer de 00H15 à plus d’une heure du matin. On se dit alors : vive les programmes télé et les magnétoscopes, mais ce n’est pas si simple car la plupart du temps M6 décalait au dernier moment la diffusion jusqu’à une demi-heure, il fallait donc mieux prévoir une grande cassette et une marge d’une demi-heure avant et après.
Nan, nan, nan, ce n’est pas encore fini puisque M6 décide en plein milieu de la seconde saison de stopper la diffusion de The Practice, je me demande encore qui cela pouvait gêner à cette heure, l’audimat ne rentrant plus vraiment en jeu.
Fin 2000, une bonne nouvelle nous parvient le retour tant attendu de The Practice, dans des conditions certes meilleures (comment faire pire ?) mais tout de même précaires : 4 épisodes par semaine : les lundis, mardis, jeudis et vendredis à 15H20 et là encore suivant la durée du téléfilm précédent la série, la marge est de 5 à 20 minutes. Bon c’est tout de même une bonne nouvelle pour les rares personnes devant leur téléviseur à cette heure ou pour celles possédant un magnétoscope, puisque la série est programmée dans sa chronologie. Tout se passe bien jusqu’au 26 janvier 2001, où M6 décide une nouvelle fois de stopper la diffusion en cours de saison (la troisième cette fois) sans évidemment nous donner d’explications et de précisions quant à son hypothétique retour.
Le plus malheureux dans cette histoire c’est que les programmateurs d’M6 n’ont sans aucun doute toujours pas compris le pourquoi de la sous performance niveau audimat de cette série dans laquelle ils plaçaient beaucoup d’espoir.
Passons de l’autre coté de l’Atlantique, où contrairement à la France, la série connaît un grand succès depuis sa création le 04 mars 1997 sur ABC. L’année passée (saison 1999-2000), diffusée le dimanche à 22H00, elle a fini à la quatrième position des séries les plus regardées aux USA derrière Urgences, Friends et Frasier avec une moyenne de 12 millions de postes de télévision branchés sur ce programme (attention pas de téléspectateurs !) et une moyenne de 19,31 de part de marché, c’est vrai comme me dirait Alain Carrazé : The Practice est placée dans la grille des programmes juste après "Who wants to be a millionaire" qui dopait toutes les émissions qui la suivait, mais The Practice réussissait plutôt bien à retenir les téléspectateurs de ce Reality Show, et puis si cette série ne les intéressait pas ils auraient sans aucun doute zappé rapidement.
Cette année (saison 2000-2001), The Practice se porte plutôt bien avec une légère baisse d’audience d’autant plus qu’elle doit supporter l’effondrement du jeu du Millionnaire, autre bon point elle réussit à conserver plus de 95% des téléspectateurs du célèbre jeu.
The Practice à donc encore de beaux jours devant elle !
LTE || La Ligue des Téléspectateurs Extraordinaires