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3.09 - Omerta
Mafia Blues
Omerta
vendredi 9 avril 2004, par
Les enfants, je vais vous raconter un conte de Noël. C’est sur un méchant tueur à gages et des fées elfiques. Pour les passages sur l’ancienne vie du méchant tueur vous avez le droit de vous boucher les oreilles ou d’aller faire pipi.
Ding dong ! C’est Noël pour Frank Black, et comme c’est la fête familiale par excellence, l’occasion de se rappeler à quel point Megan manque dans sa vie. De ce fait, il faut rappeler combien, malgré ses nombreux défauts, la saison 3 de "MillenniuM" aura aussi bien décrit la reconstruction d’une famille après la perte d’un être cher, plus à mon goût que dans certaines séries comme "Everwood" ou "Providence". Et dans cet épisode c’est à partir de petits riens, comme la carte et l’achat de deux flacons de vernis à ongles de Jordan, ou encore le discours final poignant de Frank, que l’on se rend compte des véritables motivations de Frank dans son nouveau combat contre ses anciens associés au Groupe. Il ne peut pas supporter l’idée que son travail ait empiété sur sa famille, au point de la détruire ; c’est ainsi qu’on l’avait retrouvé en ermite paisible au début de la saison 3, et qu’on le voit s’éloigner dans une bourgade reculée des Etats-Unis dans cet épisode pour être seul avec sa fille.
"Omerta" est aussi le deuxième épisode spécial depuis le début de la saison 3, et je me demande si les scénaristes ont à ce point perdu l’inspiration pour aller se vautrer dans des thématiques contraignantes, car sujettes à cliché comme celles d’Halloween ("13 ans plus tard") ou de Noël. Si avec Halloween, le résultat était plaisant, ici rien ne nous est épargné, et la présentation est ad hoc, des clochettes remplaçant les oppressantes percussions débutant traditionnellement chaque acte aux dates des évènements prenant place sur un fond de carte postale enneigée, du style des horribles cartes postales qu’on nous force à envoyer à Grand-Tante chaque année, un peu avant que le Père Noël ne vienne se crâmer dans la cheminée ("no pasaràn" qu’ils disaient...). Alors, mauvais goût destiné à rassurer le téléspectateur lambda qui ne veut pas être emmerdé avec des histoires de meurtres en séries, ou second degré assuré ? L’intrigue nous fait plutôt pencher pour la première option.
Le 23 décembre 1989, après quelques chants de Noël, et des témoignages de complicité, trois mafieux éxécutent l’un des leurs en pleine forêt, Eddie Scarpeta, un des hommes de main du parrain du New Jersey Santo (référence à Santa Claus, le Père Noël américain ?). C’est brutal et froid...mais l’éxécution est observée par une fille des forêts qui vient chercher le cadavre à la nuit tombée. 9 ans plus tard, un vagabond vêtu du manteau de Scarpeta refait irruption, et raconte avoir été attaqué par un loup et ressuscité par des créatures féminines. Le shérif du coin est incrédule, mais Frank est assez intrigué pour se déplacer sur les lieux et tomber sur...Scarpeta en chair et en os, méconnaissable et barbu !
Le hic, c’est que Scarpeta est le prototype du mafieux froid tel que les fictions de seconde zone se sont attachées à nous le décrire, à travers des historiettes sanglantes grasses du bide. Et là rien ne nous est épargné, des 50 meurtres de sang-froid à la sempiternelle loyauté dans la tentative de Scarpeta d’assassiner un des hommes de main plus loin dans l’épisode. Pire, la ressemblance physique avec Tony Soprano, dont les tribulations venaient de commencer sur HBO, achève de plonger le portrait dans le mauvais goût.
Mais quel est le secret de cette résurrection ? Deux fées des forêts nommées Essa et Rose, sachant à peine s’exprimer et ayant pris sous son aile Scarpeta pendant 9 ans. Là encore, on insiste sur l’innocence des jeunes filles, qui se rapprochent très vite de Jordan, celle-ci leur apprend d’ailleurs à faire de la balançoire. Frank détermine très vite qu’Eddie veut protéger les deux fillettes des griffes de Santo, et c’est parti avec la filiation avec les "Soprano", le thème de la rédemption, un coeur dur qui retrouve son âme d’enfant aux mains de deux fillettes. A ce point-là de l’épisode, en voyant le mafieux faire de la balançoire, on a vite compris qu’on est en présence d’une fable de Noël à la Frank Capra, mais tout ça est aussi ridicule et téléphoné qu’un Tony Montana au Pays des Merveilles.
Le dernier acte, qui fait suite au tir par balles sur l’une des deux salvatrices, est un peu mieux écrit, et cela a le courage de se terminer mal puisque Santo fait envoyer une ambulance piégée pour chercher la fillette, et lors de l’explosion une espèce de lumière monte au ciel. C’est beau comme du boudin. Donc en résumé, on veut nous faire avaler que les deux fées au pouvoir divin ont pris un assassin sous leur aile, et que celui-ci vient de gagner le droit à l’immortalité avec ses deux copines, Joyeux Noël les enfants ?
Mince, j’aime bien les contes pour enfants, mais là ça dépasse l’entendement. Frank dans tout ça est quasiment inexistant, plutôt mou dans cette guimauve de fin d’année, et Hollis fait un cameo, histoire de nous faire comprendre que Klea Scott sera payée pour cet épisode.
Cet épisode est le parfait exemple de ceux qui veulent se payer notre pomme à la forestière. Malgré un teaser intriguant, tout ça reste trop convenu et bon enfant pour vraiment convaincre.
LTE || La Ligue des Téléspectateurs Extraordinaires