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1.06 - Return of the Kane
Le seigneur des clodos
Le Règne de Kane
lundi 27 mars 2006, par
Une élection pour les gouverner tous. Une élection à truquer. Une élection pour tous les faire voter et régner sur le lycée.
Cela fait plusieurs années que les doublages français ne sont plus de qualité et il en va de même concernant les titres. A l’époque où Code Quantum en était à sa première diffusion, les jeux de mots sur des films des titres d’épisodes faisaient cours à la fois dans la langue de Shakespeare comme dans celle de Molière. Dawson, qui est plus récent et appliquait la même méthode, était également bien traduit. Veronica Mars applique un jeu similaire qui s’étend au-delà du cinéma, mais malheureusement perd absolument toute référence populaire une fois passées nos frontières. Cette culture pop étant assez présente dans les scénarios même, cet oubli dans les titres est plutôt déplorable. Heureusement, les références drôles et bien amenées sur la pop culture ne sont pas aux abonnés absents du doublage. Cela apporte non seulement du charme mais rend le spectateur plus proche de cet univers fictif car les personnages semblent évoluer dans le même monde que le nôtre. Ils sortent les même blagues (parfois nulles), regardent les mêmes films (parfois nuls)... ils ne sont pas si éloignés de nous en somme, et c’est l’un des éléments que j’apprécie le plus.
La Communauté du Lycée
L’intrigue de la semaine concerne les élections du président des élèves du lycée. Cette fois-ci, c’est en tant que journaliste pour la gazette du lycée que notre hobbit préférée se mêle de ce qui ne la reg...du problème immédiat. En effet, les élèves riches ne sont pas majoritaires à Neptune High et l’élection de Duncan est suspicieuse. Elle ne tarde pas à trouver où il y a eu faille et qui est la responsable : Madison Sinclair, blonde décolorée, cheerleader, riche, et biatch en puissance. Admirez bien ce beau visage que l’on a envie d’écraser sous un rouleau compresseur, parce qu’on en entendra reparler. Une élève pimbêche qui triche pour continuer d’avoir le pouvoir, cela n’a rien d’exceptionnel. En revanche, le soutien du corps enseignant pour préserver leurs intérêts l’est plus. Les personnes de pouvoir à Neptune ne sont décidément pas fiables. Entre le shérif d’une intégrité très relative et la prof menaçant une collègue qui ne respecte pas les règles du jeu, il est difficile de faire confiance à qui que ce soit. Mais c’est bien là le seul point réellement intéressant.
Bien que tout ce qui concerne Neptune High le soit en général, cette histoire-là manque un peu le coche. Peut-être parce que les deux protagonistes, Wanda et Duncan, ne sont absolument pas charismatiques. Wanda Warner est la belle et rebelle du lycée, ex-cheerleader reconvertie en bad girl de service. Avec son attitude aussi provocatrice que Britney Spears dans sa phase post-virginité, miss clichés a de quoi faire doucement rigoler. Bien sûr, c’est une rebelle avec un minimum de conscience politique, prête à s’impliquer pour faire bouger les choses car c’est bien beau d’en avoir marre de l’injustice mais se contenter d’écraser les pizzas des vilaines cheerleaders décolorées n’y changera rien. Cela aurait pu apporter du relief au personnage ainsi qu’une jolie réflexion sur la responsabilité des étudiants dans la façon de gérer leur vie scolaire, pourtant je trouve qu’ils sont passés à côté et Wanda est si risible qu’on ferait mieux de l’oublier vite fait.
Duncan n’est pas non plus très vivace. Que ce soit son élection, le forcing de son père, le comportement des élèves...Duncan reste passif, l’enfant modèle à l’opposé de sa sœur aînée qui n’en faisait qu’à sa tête. Si la mort de Lilly a réveillé Veronica et l’a faite sortir de sa coquille, elle a emmuré encore plus profondément Duncan. C’est pourquoi Vero est la seule et la mieux placée pour venir lui reprocher cette attitude. Enfermé d’abord malgré lui dans ce rôle, il a continué à se façonner cette image trop lisse pour ne pas cacher quelque chose. En témoignent ses anti-dépresseurs qui ne font qu’aggraver son état végétatif, ce dont il est parfaitement conscient puisqu’il les prend en sachant parfaitement ce que cela lui fait. Mais Duncan a beau être effacé, son élection s’avère largement méritée car c’est un garçon droit et prêt à faire ce qui est juste...si on le pousse un peu. Etre un chouette typer, c’est bien, mais vivement qu’il s’affirme un peu et soit moins soporifique. Au moins quand il perd la tête, il prend tout de suite plus de relief. Ce serait aussi à appliquer au cas de Wallace, dont on apprend uniquement ici qu’il est orphelin de père. Décidément, lui et Veronica se complètent parfaitement et étaient faits pour se trouver, l’une souffrant du manque de la mère et l’autre du père.
Le Retour de la Star
Heureusement qu’au milieu de ces élections vient se greffer la famille Echolls, qui met un peu de piment à cet épisode. Et ce n’est rien de le dire. En tant que bon « connard psychotique » attitré de Neptune, Logan organise des combats clandestins en exploitant des sans-abris pour divertir les gosses de riches. Quand on voit ça, on se dit que plus rien ne nous surprend avec Logan. Jusqu’à ce qu’on découvre ses parents et en particulier son père. Aaron Echolls est une star de cinéma à l’ego surdimensionné et d’une grande susceptibilité. Au moindre tort que lui cause son rejeton, il le punit à coups de ceinture. Il est incarné par Harry Hamlin, modèle de droiture de La Loi de Los Angeles qui se retrouve, comme Kyle Secor (ex-flic d’Homicide), du côté peu reluisant de la justice (le premier bat son fils, le second est accusé d’avoir tué sa fille. Quel beau portrait parental...). Aaron est marié à Lynn, une ex-actrice à la carrière miteuse qui vit dans son ombre et a abusé du collagène. Son problème à elle est de laisser faire les agissements de son époux en se réfugiant dans la boisson. Les moqueries de Logan envers Veronica quant à l’alcoolisme de Lianne Mars (cf Pilote) paraissent dorénavant d’autant plus mal placées que leurs mères respectives ont cette faiblesse en commun, ainsi que des prénoms étrangement proches. A noter que l’actrice Lisa Rinna, ancienne vedette de soap opera, est l’épouse d’Hamlin à la vie comme à l’écran. J’ose espérer pour eux que les ressemblances entre leurs couples fictif et réel s’arrêtent là.
Logan pousse également Duncan à se présenter aux éléctions, en faisant participer son père Aaron. Un père qu’il ne doit pas aimer tous les jours mais qu’il n’hésite pas à faire parader devant ses camarades comme un monstre de foire. Cet excès de fierté déballée du rejeton ne servirait-il pas à cacher se haine véritable envers son père ? La psyché des enfants battus ne m’est pas plus connue que n’importe qui, je préfère donc ne pas trop tirer de conclusions. Mais son statut peut expliquer l’agressivité générale de Logan, peut-être parce qu’il ne peut rappliquer face à son bourreau. Mais il continue toujours à le chercher, parfaitement conscient des coups qu’il recevra en retour. Malgré tout, il ne s’arrête pas. Non seulement je ressens dorénavant de la compassion pour ce personnage, mais aussi un certain respect. Logan a beau avoir souvent le comportement d’un insupportable petit con, il mérite un peu d’admiration pour ne jamais se laisser abattre et être prêt à rappliquer, quitte à souffrir des conséquences plus tard. C’est un autre regard que nous pouvons maintenant poser sur l’un des plus intéressants personnages entourant Veronica.
Si le titre ne fait référence qu’à la famille Kane et l’épisode se concentre en grande partie sur Duncan, c’est bien la famille Echolls que l’on garde en mémoire, car en plus de l’arrivée de deux nouveaux personnages, c’est une situation abominable qui régit chez eux. Quand on voit Keith plaisanter sur les services sociaux parce que les Mars ne mangent pas sainement, il y a de quoi rire jaune comparé à ce qui se passe chez leurs voisins. A côté des faiblards Kane, les Echolls forment la seconde famille haute en couleurs de Neptune, qui n’a même pas eu besoin d’un drame majeur pour être totalement névrosée.
Les Deux Chaussures
J’admire toujours la façon dont les scénaristes se moquent des clichés et c’est très souvent Lilly qui vient les faire exploser, avec un sens de l’humour déconcertant. Pour une morte, on ne peut pas dire qu’elle soit ennuyeuse. Nouvel indice sur son affaire : la preuve incriminant Abel Koontz a été placée chez lui a posteriori. Ce qui signifie que Koontz a avoué un meurtre qu’il n’a de toute évidence pas commis. Ayant elle-même créé de quoi identifier les baskets, sans le savoir à l’époque, Veronica trouve facilement cette preuve. L’épisode se termine sur Veronica apprenant cette nouvelle à son père, mais pas dans le but de créer un cliffhanger sur la non-culpabilité de Koontz. Franchement, cela semblait assez évident depuis le Pilote. Sinon pourquoi nous rabâcher les oreilles avec le meurtre de Lilly et l’entêtement de Keith à croire que le mauvais coupable est en prison ? Non, il est clair depuis le début de la série que l’on cherche à découvrir qui est le véritable assassin. Le but de cette révélation ne concerne donc pas Koontz en lui-même mais de ramener Keith sur l’enquête. S’il l’avait poursuivie après l’arrestation de Koontz afin de retrouver son ancienne vie, il a depuis laissé tomber par peur de perdre encore plus. C’est donc Veronica qui l’encourage à poursuivre, effaçant ainsi toute culpabilité que le père pourrait avoir à l’encontre de sa fille. Le suspense se base dorénavant sur les réponses que ce tandem d’une incroyable efficacité va pouvoir nous apporter.
Dans la vie, on ne connaît jamais réellement quelqu’un. Des amis de longues dates, des gens de notre famille, nous surprennent parfois par un geste ou des mots alors que l’on pensait tout savoir d’eux. Les scénaristes de VM en sont conscients et appliquent cet état de fait à leurs personnages. Les énormes révélations sont faciles, toutes les séries le font avec plus ou moins de réussite et VM ne s’en prive pas non plus (la face cachée de Troy était surprenante quoique légèrement mal amenée). Mais elle s’applique surtout à amener quelques petites doses sur chaque personnage, avec subtilité, dans le seul but de les enrichir et de ne jamais les figer dans un schéma. Et c’est ce qui fait sa qualité.
Troy me manque déjà...
LTE || La Ligue des Téléspectateurs Extraordinaires