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1.09 - Drinking the Kool-Aid

Who’s Your Daddy ?

L’Héritier Reprogrammé

mardi 18 avril 2006, par Black Widow

Plus ça va, plus mes articles se raccourcissent. Ce n’est pas qu’il n’y a rien à dire, mais il faut avouer que sans l’ombre de Lilly Kane qui plane, il y a moins de faits à décortiquer. Un épisode comme celui-ci est plutôt clair, sans emmêlement dans les histoires de tout le monde pour nous brouiller l’esprit (jeu délicieux auquel la série est très forte). Rien de bien compliqué, mais heureusement toujours aussi frais et bien écrit.

Le test ADN

Nous reprenons exactement là où nous avions laissé Veronica à la fin de Like a Virgin : en larmes dans sa voiture. J’ai déjà dit que j’aimais beaucoup cette scène, et il en est de même pour cette prolongation. Veronica qui s’arrête pour vomir à la pensée qu’elle est sortie avec son frère, c’est cru, organique, réaliste. C’est tout son corps qui ne supporte pas ces informations et les rejettent. Le vomissement n’est pas très répandu à la télévision et pourtant porte une grande force. Au-delà de l’aspect répugnant, c’est une faiblesse de la part du personnage qui nous est montrée, puisque cela vient des tripes (au sens figuré comme littéral) et non d’une crise mentale imagée par les grimaces d’un acteur. Ce passage est très court mais en dit plus que de longues tirades.

Le choc de sa filiation ne rend Veronica que plus déterminée à comprendre comment sa vie a été autant bouleversée. Sa conclusion immédiate est que les photos d’elle ayant servi à menacer sa mère ne peuvent venir que de Jake Kane. Cela parait logique si on remet toutes les pièces recueillies ensemble. L’énergie que met Veronica n’a jamais été aussi forte, la musique est nerveuse, le montage rapide, et l’on se retrouve aussi impatients qu’elle. L’avantage à enquêter sur elle-même est qu’elle a des informations beaucoup plus rapidement que d’habitude. En moins de 5 minutes, elle confirme ses soupçons et retrouve celui qui a pris ces photos : le chef de la sécurité de l’entreprise des Kane. Bingo ! Une fois l’émotion passée, c’est la colère qui anime notre héroïne, bien décidée à se servir de son statut d’héritière pour rendre service à sa famille (celle qu’elle forme avec Keith), parce qu’ils le leur doivent bien. Ce virage est particulièrement bien vu et nous évite une Veronica qui s’apitoierait sur son sort pendant dix épisodes. Elle reprend la situation en main, résout une énigme rapidement et décide de la tourner à son avantage. Le rythme s’accélère pour la série, qui ne laisse plus traîner en longueur et passe aux choses sérieuses. Ça promet des surprises en pagaille.

Ce qu’il y a de légèrement perturbant chez Veronica, c’est sa facilité à mentir. Jouer la comédie face à des étrangers pour obtenir ce qu’elle veut, c’est son boulot. Mais face à Keith et compte tenu de son état émotionnel, elle est tout aussi impassible. Il s’agit tout de même de savoir si celui qui l’a élevée, celui qu’elle aime plus que tout, est bien son père biologique ! Et elle le manipule très facilement pour réaliser son test ADN. Son don pour le mensonge a vraiment quelque chose qui met mal à l’aise et ses méthodes sont de plus en plus proches de la limite. Cela se remarque également lors de l’affaire des hippies.

Les résultats du test arrivent rapidement, nous attendons fébrilement la grande réponse, et...Veronica décide de les ignorer et détruit les documents. Grosse déception. Toute cette histoire n’était-elle qu’un pétard mouillé ? Il y a de quoi en vouloir aux scénaristes sur ce coup, à faire enfin monter la sauce, pour finalement tout laisser tomber en moins de deux. Il faut donc prendre un peu de recul et se rappeler de la façon de fonctionner de la série. Non, on ne va pas en rester et on aura notre réponse. Mais on ne nous donnera pas ce qu’on veut quand on le veut, il faut l’accepter. L’évolution des personnages face aux évènements priment avant tout. Veronica laisse de côté sa recherche éperdue de la vérité et laisse parler son cœur. Son constant besoin de réponses vient de son incapacité à maîtriser les évènements. Pour la première fois, son ignorance n’est pas subie mais résulte de son propre choix. Elle peut enfin contrôler quelque chose et décide consciemment de ne pas chambouler sa vie au profit d’une vérité, dont elle peut se passer. Non seulement cela prouve que le personnage a acquit une grande force, mais cela laisse aussi la fameuse réponse en suspend. Si Veronica laisse tomber, il faudra bien que ce soit quelqu’un d’autre qui ramène la question sur le tapis. L’intérêt est de savoir qui le fera et ce que cela entraînera. Une brèche a été ouverte, il est dorénavant impossible de la refermer. Reste à voir comment elle sera traitée. Comme nous le prouve cet épisode, la voie empruntée ne sera pas celle à laquelle on s’attend. Tant mieux, car comme on dit : ce n’est pas l’arrivée qui est le plus intéressant, mais le chemin parcouru pour y parvenir.

Les Brady sur fond de reggae

Keith est engagé par les parents de Casey, un adolescent tout juste majeur, pour le sortir des griffes d’une secte. Comme il est encore au lycée, c’est évidemment Veronica qui va faire le plus gros du boulot pour papa. Cela peut rapporter gros et les Mars ont bien besoin de cash. Les problèmes d’eau chaude qu’ils subissent viennent rappeler que les motivations de Veronica pour soutirer de l’argent aux Kane ne sont pas dues à un caprice.

Veronica choisit un moyen risqué de sortir Casey de sa secte : l’intégrer aussi. Une méthode dangereuse, prouvée cette année par l’ex-vedette de Dawson (dis non à l’insémination artificielle, Veronica !). Ce mauvais jugement de sa part nous amène une engueulade avec Keith, encore une fois parfaitement interprétée par Bell et Colantoni, qui prouve à quel point Veronica a besoin de lui. Ce qui la conduira à son geste de fin d’épisode.
Veronica ne fait appel qu’à ses clichés et se retrouve déboussolée de découvrir un univers bon et chaleureux. Elle se plaint d’être exclue en permanence, mais quand elle est accueillie à bras ouverts, elle est plus méfiante que jamais et ne peut se résoudre à y croire. Comme quoi son univers a finit par l’enfermer dans un certain schéma et un mode de pensée. En même temps, la perfection de Casey est trop belle pour ne pas cacher quelque chose. On se souvient tous de Troy ! Les sarcasmes de Veronica sur le petit monde merveilleux des hippies nouvelle génération sont en tout cas très drôles, mais soulignent cette carcasse qu’elle s’est construite. Pourtant malmenée dernièrement, elle feint sa détresse émotionnelle alors qu’elle n’aurait pas besoin. La destruction finale des documents du test ADN sera une réaction directe à cela, puisqu’elle choisira de faire primer ses sentiments et le peu de bonheur qui lui reste, laissant ainsi tomber son comportement de Robocop.

Le plus surprenant avec cette enquête, qui n’a pourtant rien de bien palpitante, c’est sa conclusion. Bien que cela ne se finisse jamais tout en rose et que le pessimisme soit toujours présent, si ma mémoire ne me fait pas défaut il s’agit de la première fois où Veronica ne démasque pas de coupable. Simplement parce qu’il n’y en a pas. La secte s’avère ne pas en être une, il s’agirait même plutôt d’un petit groupe d’aide entre personnes malmenées par la vie, qui cherchent simplement à la rendre meilleur et à être plus heureux, sans rien demander en échange. Pas de conditionnement, pas de demande d’argent, pas de sacrifice. Cette vision ultra optimiste paraît bien étrange au milieu de la noirceur de la série, qui finit par gagner la partie lorsque Casey subit un lavage de cerveaux orchestré par sa famille pour le rendre... insupportable d’égoïsme, en bon sale gosse de riche haïssable de chez Neptune. Déprogrammer quand on n’a pas été programmé, c’est dangereux. Casey avait simplement mûri de manière naturelle et ses parents ont joué avec sa personnalité non pas par inconscience, mais à des fins monétaires. Encore et toujours l’argent... c’est ce qui fait fonctionner le monde, n’est-ce pas ? Décidément, peu importe de quelle famille il s’agit, les parents en prennent vraiment pour leur grade à Neptune. Et Keith Mars n’en paraît que plus formidable en comparaison, en particulier s’il n’est pas lié par le sang à sa fille.


Nous avons encore droit à un épisode très correct, dans la lignée de cette première partie de saison. Malgré une petite déception en conclusion, dont les effets ne dureront pas longtemps, il n’y a pour l’instant pas franchement de quoi se plaindre puisque la série se suit tranquillement sans déplaisir. Et une nouvelle fois, c’est le duo Marsien qui tire avec brio son épingle du jeu.