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6.14 - Monday

Comme un lundi...

Monday

2004, par Guiguilegentil

« Monday », épisode assez particulier même pour une saison 6 sans complexe...

Je dis « sans complexe », car elle a osé utiliser des histoires trop fantastiques pour « l’esprit XF » (se rapprochant le plus souvent du merveilleux) sans pour autant décrédibiliser les épisodes qui en bénéficiait, comme « Triangle » ou même « Dreamland »... « Monday » est donc de ceux là. Le thème de la journée qui recommence à l’infini a été souvent exploité au cinéma et dans les séries TV, mais là X-Files réussit le tour de force d’être original tout en étant passionnant. Ceci pour différentes raisons, le rythme de l’histoire et surtout son enjeu : la vie même des 2 héros.

Mais avant de s’y attarder, petit résumé du début de l’épisode : Le directeur adjoint Walter Skinner arrive sur les lieux de ce qui semble être un hold-up ayant tourné à la prise d’otage. Il s’approche d’un des policiers qui encerclent la banque, prêts à attaquer, il se renseigne : il est possible que 2 de ses agents soient dans la banque. A ce moment une jeune femme hystérique s’avance vers lui, l’appelant par son nom et somme Skinner de « les empêcher de faire ça !...  » Skinner qui ne connaît pas la jeune femme ne comprend pas. A l’intérieur de la banque, on voit Mulder allongé blessé grièvement à la poitrine, qui saigne abondamment. Scully est prêt de lui. Le bandit tenant tout le monde en respect avec son revolver est truffé de bombes, et malheureusement la police attaque et l’homme fait exploser la banque...

Un lundi matin, Mulder se réveille, il est tout mouillé : son matelas à eau (cf « Dreamland ») a une fuite et sa chambre est inondée. Son réveil électrique et son téléphone cellulaire sont foutus, ce qui fait qu’il s’est réveillé trop tard, et donc qu’il est en retard pour aller au bureau. Il reçoit un appel de son propriétaire qui habite l’appartement du dessous et celui ci lui demande de payer les frais de son inondation. Mulder compte donc se rendre à sa banque...Et ça va être le début du délire...

Au-delà des frontières du réel :

Vince Gilligan, accompagné ici de John Shiban, a toujours eut l’habitude d’écrire des histoires, parfois trop fantastiques pour la réalité de la série. Mais cette fois, cela passe sans mal, puisque finalement cette réalité qui tourne en boucle, aucun de nous ne pourrait vérifier si cela se passe ou non réellement, tout comme l’agent Mulder dans l’épisode qui ne sait pas que le temps tourne en rond, et donc cette histoire s’avère être en fait plutôt crédible. Car si ça se trouve, dans notre réalité cela se peut que cela nous arrive (mais oui c’est possible), que le temps soit constitué de cette façon, qu’en fait il y ait de multiples univers se différenciant d’un seul détail (un peu comme dans la série « Sliders » mais surtout l’épisode « Parallels » de la saison 7 de STAR TREK : the next generation), où voyagerait d’univers en univers une personne qui se rendrait compte de tout ceci. Comme la fiancée de Bernard dans l’épisode, et pour qui la journée semblerait être la même à chaque fois, sauf sur certains points (peut être a-t-elle mal analysé la situation et suivrait les traces du lieutenant Worf).

Ça va ?! Je suis clair là ?! Non mais dites moi, car je peux m’arrêter là à divaguer à essayer d’expliquer les évènements de cet épisode, ce qui s’avère aussi compliqué pour Bill Murray de boucler son reportage sur le Jour de la Marmotte dans le film « Un jour sans fin ».

A moins qu’il n’y qu’un seul univers et que cela soit réellement le temps qui revient sur lui-même à chaque fois (c’est plus simple comme explication je pense), car quelque chose se serait pour ainsi dire mal passé. Dans « Monday », avec le nombre de références aux épisodes « Dreamland » 1 et 2 avec le matelas à eau, et d’ailleurs il est clairement dit qu’il y a eut une sorte de faille du temps. Il serait donc possible que les évènements survenus dans ce double épisode soient la cause directe de ce qui se passe dans « Monday ». Mulder le dit presque clairement lui-même : je n’aurais pas eut de matelas à eau, je n’aurais pas eut besoin d’aller à la banque. Comme dans « Dreamland », le temps était aussi revenu sur lui-même, ce qui arrive dans « Monday » doit être le réajustement du temps, un peu comme un pli qui se déplacerait et qui s’évanouirait dans une nappe que l’on repasserait, les évènements de « Monday » étant alors le fer à repasser.



J’espère que vous avez compris là avec ma belle image de la nappe, car je ne saurais pas trop vous l’expliquer autrement...

Le thème déjà fort intéressant mais éculé (surtout dans les séries) devient original par rapport au génial film d’Harold Ramis et aux autres histoires de ce type par le changement du personnage référent. En effet, dans « Monday » on suit, non pas le personnage qui se rend compte des effets de la boucle du temps, mais un qui ignore qu’il est le jouet du destin et de cette répétition continuelle, en l’occurrence l’agent Mulder. Gilligan et Shiban ont donc volontairement évités tous les gags déjà utilisés sur ce genre de thème par d’autres scénaristes avant eux et c’est tant mieux. La mise en scène de Kim Manners, de son côté, est vraiment efficace : elle retranscrit bien l’émotion et l’angoisse de la fatalité qui se répète inexorablement et que l’on voudrait pourtant voir disparaître. Car assister ainsi impuissant à la mort de Mulder et Scully fait subir une vraie pression au téléspectateur et apporte donc un peu plus d’intérêt à l’épisode.

Des symboles insistants :

Sinon niveau symbolique on peut souligner que l’emplacement de la banque n’est pas anodin : la 8ème rue. Le 8 représente universellement le nombre de l’équilibre cosmique. C’est le nombre des directions cardinales, auquel s’ajoute celui des directions intermédiaires. Ce qui signifie toutes les directions possibles d’un destin résultant de ses choix. Et pour l’explication du « déjà-vu » cela peut s’expliquer de diverses manières. J’opte pour celle de Clément Rosset avec « Le réel et son double » (oui je me la pète un peu là) : « Rien n’est plus fragile que la faculté humaine d’admettre la réalité, d’accepter sans réserves l’impérieuse prérogative du réel. Cette faculté se trouve si souvent prise en défaut qu’il semble raisonnable d’imaginer qu’elle n’implique pas la reconnaissance d’un droit imprescriptible, celui du réel à être perçu, mais figure plutôt une sorte de tolérance, conditionnelle et provisoire. Le réel n’est généralement admis que sous certaines conditions et seulement jusqu’à un certain point : s’il abuse et se montre déplaisant, la tolérance est suspendue. Un arrêt de perception met alors la conscience à l’abris de tout spectacle indésirable... » Donc dès qu’une contrariété apparaît (qu’elle soit moindre ou pas), on cherche à ne pas la percevoir et à « créer » sa réalité et concevoir un double de celle-ci. C’est de ce dédoublement que naît le sentiment de « déjà-vu », car sur un moment on anticipera ce qui arrivera et on décidera ou non de l’accepter, ce qui forme 2 « réalités » proche que l’on aurait l’impression de vivre. C’est aussi ce qui fait que certaines personnes n’arrivent pas à se comprendre, l’une voulant ignorer ce que l’autre lui dit, ce qui arrive souvent sur les forums lorsque Amrith casse du fan de Charmed par exemple.

A noter que le trio fait référence à cet épisode dans celui de la saison 6 de BUFFY où ceux-ci font subir à cette dernière, via un sort, le coup de « la journée qui recommence indéfiniment »...


Mais bref, pour en revenir à l’épisode même, c’est un bon segment avec un scénario intelligent, même s’il n’est pas exceptionnel a tout de même le mérite de nous montrer Mulder et Scully dans leurs quotidiens sans oublier pour autant de nous captiver. Ce genre d’épisode n’étant pas spécialement répandu dans la série, il est tout à fait tolérable de le considérer parmi les meilleurs épisodes de cette saison 6. C’est en quelque sorte le 2ème opus d’une trilogie thématique sur le temps amorcé avec « Synchrony » dans la saison 4 (sur le futur), « Monday » sur le présent et « Redrum » dans la saison 8 sur le passé... De là à dire que toutélié, il n’y a qu’un pas...