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2.14 - The Pest House
L’Emprise du Mal
Les Aliénés du Diable
vendredi 5 décembre 2003, par
Un meurtre d’adolescent mène Peter et Frank sur la piste d’un tueur dont ce dernier reconnaît la signature. Seulement, il est enfermé depuis maintenant plusieurs années dans un asile d’aliénés...
Tout commence comme un slasher en bonne et due forme : deux jeunes qui se bégottent dans une voiture, le garçon qui raconte une légende locale et qui se fait trucider par ladite légende. Ça ne fait pas très MillenniuM...
Ce qui crée plus d’intérêt, c’est le fait que dès la fin du générique, Peter apporte le dossier de l’affaire à Frank et qu’ils vont travailler ensemble. Comme au bon vieux temps, pourrait-on dire.
D’après la signature du crime, le meurtrier est tout trouvé : il s’agit d’un certain Woodcock. Problème : il est dans un asile depuis des années. Lors de la rencontre, Woodcock apparaît comme un personnage ambigu. Sa façon de parler peut faire penser à un dément - d’où son enfermement dans l’asile - mais le contenu est plutôt clair et troublant : il n’a pas tué les jeunes gens, mais c’est son crime.
Survient un deuxième double meurtre. Cette fois-ci, la signature désigne un tueur désorganisé ; tout le contraire de Woodcock. Or, nos deux enquêteurs s’aperçoivent de l’assassin présumé, Bear, était dehors au moment des faits. Néanmoins, cet élément de parvient pas à troubler le spectateur qui, pour peu qu’il ait suivi la série, sait que l’affaire ne peut être aussi simple. MillenniuM est avant tout une série psychologique, et lorsqu’elle traite des criminels violents, ce n’est pas pour s’attarder sur les horreurs qu’ils perpètrent, mais plutôt sur leurs troubles intérieurs. Dès lors, il est évident que quelqu’un reproduit les crimes, à la manière d’un copycat ; sauf qu’il manque une motivation, le pourquoi des crimes. Le fiat que la série soit proche de la réalité, et que dans la réalité les copycat n’existent pas, indique au spectateur qu’il fait fausse route. Mais encore faut-il s’en rendre compte...
Car la mise en scène de cette histoire est tout de même très conventionnelle. On suit les meurtres, on suit l’enquête... Même la confession de Perdue au Dr. Stroller ne parvient pas à nous hisser au-dessus de l’intrigue. Lorsqu’il dit que « Edward est le Diable et qu’il vole [leurs] rêves » on pense à quelque chose de terre à terre. La faute à cette réalisation qui ne décolle pas, sans doutes.
Le reste est donc classique et suit son cheminement... Jusqu’à la dernière minute.
C’est à ce moment que l’épisode prend tout son sens. En une minute, tout est dit et bien plus en encore. Edward est le meurtrier. Mais il n’est pas le Diable, ni même un être dérangé ou malfaisant. Bien au contraire, il s’agit d’un homme bon, infiniment bon. Un homme qui, après avoir assister à l’agression d’une infirmière par Woodcock, a compris qu’il ne pouvait pas soigner ses patients. Il a donc choisi de « prendre » leur souffrance ou leur mal - suivant les cas. D’ailleurs, ils sont en partie guéris puisqu’ils sont pleinement conscients qu’on leur a volé quelque chose.
Ce qu’a fait Edward relève-t-il de la psychiatrie ou bien du mystique ? On ne peut en être sûr, car dans MillenniuM, la notion de Mal est trouble. Et cela n’a pas grande importance ici ; c’est le fond qui compte.
Le quasi-monologue de fin, dit par Frank, est éloquent. Extraits :
« Celui qui touche au diable prend le risque d’être lui-même touché »
« [Ed] voulait délivrer ces hommes mais il s’est emprisonné »
En fait, je pense que cet scène - et peut-être même l’épisode dans son entier - sert de miroir à Frank. Et le spectateur peut s’apercevoir que les paroles seraient tout aussi justes si c’était Frank qui était mort - et que les discours venait de Peter par exemple. Notre héros réalise que le sort de Edward est tout simplement ce qu’il pourrait lui arriver. Car Ed n’a-t-il pas, à sa manière, tenté de combattre Legion ?
Résumons : Ed soigne des criminels particulièrement violent et son don d’empathie l’a amené à littéralement absorber le mal contenu dans ses patients ; il s’est alors mis à tuer et la seule chose qui pouvait dès lors le stopper était la mort.
Maintenant, voyons le cas de Frank : il est en ce moment au milieu du voyage car il a déjà tué mais son odyssée en Alaska - qui se situe juste avant si l’on regarde la chronologie - lui a ouvert les yeux. Il peut encore choisir la route qu’il veut prendre.
Cette histoire est donc un écho parfait aux 2.01 - Le Début et la Fin et 2.07 - La Malédiction de Frank Black , voire même au 2.12 - L’Eveil, et contribue à renforcer leur effet, même si l’épisode en lui-même n’a rien de particulier.
Encore une fois, ce bon épisode policier tient difficilement la comparaison avec l’ensemble de l’oeuvre, notamment parce qu’il est assez prévisible.
Mais sa fin, qui empêche de le cataloguer comme un réel loner, le relève en traitant d’un des thèmes-clef de la série - et qui m’est cher.
LTE || La Ligue des Téléspectateurs Extraordinaires