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1.11 - Move On

C’est beau, un showrunner qui rame

Nous Sommes Deux Soeurs Cruelles

mardi 25 octobre 2005, par Sullivan

Oublié l’épisode précédent ! Voici un épisode où Desperate Housewives revient à un excellent niveau. Personnages truculents, situations cocasses : le plaisir est forcément au rendez-vous ! D’ailleurs... il y a eu un épisode précédent ?
Ah, mais... il n’aurait peut-être pas fallu pousser l’oubli jusque là !

Précédemment dans Desperate Housewives, Bree découvrait que Rex couchait avec Maisy Gibbons après qu’il ait fait une crise cardiaque chez elle, mais ne savait pas encore que c’était pour assouvir ses penchants Sado-Masos. Arrêté pour avoir importé des biens fabriqués par des esclaves, Carlos demandait à Gabrielle de détruire des preuves, et de ramener le passeport qui lui permettrait de sortir de prison. Susan filait le parfait amour avec Mike. Et Lynette se félicitait d’avoir engagé une nounou efficace.


« Edie Britt n’avait jamais pu comprendre pourquoi elle n’avait pas de copine. Bien sûr, elle essayait tout le temps de dire aux gens qu’elle n’en avait pas besoin, mais la vérité c’était que ça gênait Edie de voir que les autres femmes semblaient ne pas l’aimer. Même après avoir emménagé à Wisteria Lane, Edie ne pouvait pas comprendre pourquoi ses voisines gardaient leurs distances.
« C’est alors qu’elle rencontra Martha Hubert. Dans les cinq minutes, Mrs Hubert parvint à critiquer ce que portait Edie. En fait, à chaque fois qu’elles se retrouvaient ensemble, Mrs Hubert l’insultait. Elle se moquait de tout depuis son maquillage jusqu’à ses goûts en matière d’hommes. Oui, Martha Hubert pouvait être cruelle, offensante et franchement méchante.
« Edie s’en moquait car c’était la première amie qu’elle ait jamais eue.
« Mais maintenant, Martha avait disparu sans laisser de traces et Edie n’était pas embarrassé d’admettre qu’elle avait besoin de la voir revenir.
 »
Un taxi vient se garer à Wisteria Lane non loin d’Edie qui l’attendait. Une femme en descend qui se présente : Felicia Tillman, la sœur de Martha. Edie, qui ne l’avait jamais rencontrée, est surprise car Martha lui avait toujours indiquée qu’elle ressemblait beaucoup à sa sœur, mais c’est loin d’être évident au premier coup d’œil. Felicia lui indique que cette ressemblance s’impose après.
Edie remet à Felicia les nouvelles clefs de la maison après que la police ait forcé la porte. ‘‘Je ne peux qu’imaginer à quel point vous devez être inquiète,’’ avance Edie.
‘‘Je ne suis pas inquiète, Edie. Martha et moi avons une connexion très intense. (...) Il y a quelques jours, j’ai ressenti une sensation étrange, (...) et quand elle n’est pas arrivée chez moi, comme prévu, j’ai su qu’elle était morte.’’ Mais Felicia ajoute qu’elle est déterminée à découvrir ce qui lui est arrivé.
‘‘Felicia,’’ commence Edie, se voulant rassurante, ‘‘c’est naturel de s’inquiéter quand un être cher disparaît...’’
‘‘Un être cher ? Oh, Edie, laissez-moi être clair à propos d’une chose : je détestais Martha. C’était une vieille pie et le jour où elle est morte ce monde est devenu un endroit meilleur...’’
Et, avec un grand sourire, Felicia rentre chez Martha.
« C’est à cet instant qu’Edie a finalement vu l’air de famille... »

Disparue

Edie a organisé une réunion entre tout le quartier et un agent de police qui recommande aux habitant de distribuer le plus largement possible un flyer comportant un portrait de Martha Hubert et demandant à quiconque aurait des informations de se manifester. Edie en profite pour faire un discours ‘‘ému’’ au cours duquel elle craque en public. Nos housewives s’exclament sur la capacité d’Edie à ramener la couverture à elle en pareille circonstance. De son coté, Paul, venu se renseigner sur ce que la police sait de la disparition de Martha, prend sur lui de venir offrir un mot de réconfort à Felicia : ‘‘je voulais que vous sachiez que chacun à Wisteria Lane prie pour que Martha revienne saine et sauve.’’
‘‘Oh, j’en doute sérieusement !’’ répond Felicia d’un ton méprisant, motivé par une telle évidente démonstration d’hypocrisie.
Plus tard, la voiture de Martha est retrouvée abandonnée à la lisière d’une forêt. Tout le quartier se retrouve donc pour participer à une opération de recherche qui se révèlera infructueuse.
De son coté, Paul comprend que la police va inévitablement finir par se mettre sur les traces du meurtrier de Martha. Il décide donc de leur donner de quoi les divertir : il déterre le corps, prend ses bijoux et va les cacher chez Mike Delfino...

Bree

A l’hôpital, Andrew et Danielle ne comprennent pas que Bree refuse de laisser revenir Rex à la maison après sa convalescence et projette de l’envoyer à l’hôtel. Mais elle refuse de leur révéler la raison pour laquelle elle est si en colère contre lui. Alors elle accepte, finalement qu’il passe sa convalescence chez eux.
Rex est donc de retour dans le canapé lit du salon. Et ses relations avec Bree sont on ne peut plus froides, même s’il croit discerner derrière la glace qu’il reste en elle de l’affection pour elle.
De passage à la pharmacie pour retirer l’ordonnance de Rex, Bree décide soudain d’inviter George, l’aimable pharmacien, à un rendez-vous. Elle l’informe qu’elle est maintenant séparée de Rex. A celui-ci, elle impose donc de la voir se préparer sous les yeux pour sa soirée. Elle va jusqu’à installer George dans la canapé de Rex avant qu’ils ne partent ensemble au restaurant. George est un peu décontenancé de trouver Rex sur place, Bree lui apprend qu’il reste là le temps de sa convalescence.
Après que Bree ait placé les fleurs offertes par George dans un vase, ils s’apprêtent à partir et celui-ci prend congé de Rex : ‘‘un plaisir de vous avoir parlé, Dr. Van de Kamp.’’
‘‘Je vous en prie, vous sortez avec ma femme, appelez moi Rex !’’ répond celui-ci...
Au retour du dîner, Andrew les aperçoit tandis qu’ils échangent un dernier mot dans la voiture garée devant les Van de Kamp. Andrew s’indigne de ce que sa mère ne puisse même pas attendre que Rex ait quitté la maison avant de commencer à sortir. Bree laisse alors échapper que Rex l’a trompée. Mais Andrew ne la croit pas...
Mais tandis que Bree commence à mettre les affaires de Rex dans des cartons, Andrew vient la trouver pour lui dire que Rex lui a avoué la vérité et qu’il sait maintenant qu’elle lui a dit vrai. Andrew se trouve soudain être celui qui revendique que Rex soit jeté hors de chez eux. Poussé dans ses retranchements, Bree craque soudain : il est vrai qu’elle est folle de colère contre Rex, mais il n’empêche qu’il lui a offert les 18 plus belles années de mariage... Et pour cela, il devra le respecter.
Ce qu’elle ignore, c’est que Rex est témoin de la scène...

Gabrielle

Gabrielle parle avec l’avocat de Carlos dans l’espoir que quelque chose puisse être fait pour dégeler les comptes du couple. Mais selon le juriste, le seul moyen serait de rendre le passeport afin que Carlos soit libéré sur parole, et d’argumenter auprès du juge une fois ceci fait qu’il a besoin d’un minimum d’argent pour vivre. Pour l’instant, Gabi préfère la vengeance à l’argent et prétend qu’elle recherche toujours ce fameux passeport.
Gabrielle entre donc en contact avec la seule agence de mannequin de la région. Le seul travail qu’il ait à lui proposer est d’assurer la présentation d’une voiture au centre commercial de Fairview. Et Gabi n’a guère d’autre choix que d’accepter.
Mais elle n’est pas vraiment prête à ce que sa déchéance soit trop notoire et c’est soudain panique à bord quand elle aperçoit Tom et Lynette en visite au Centre. Elle tente alors autant que possible de sa cacher, mais accroche sa robe à la plate-forme tournante sur laquelle la Buick est exposée.
Gabi essaie de gérer ses comptes et les dettes. Mais quand on lui coupe l’électricité, elle voie finalement la lumière et appelle l’avocat pour lui apprendre qu’elle a retrouvé le passeport de Carlos...

Susan

Karl vient rendre visite à Susan sous le prétexte de lui faire signer un papier. Il lui confirme que sa relation avec Brandy est terminée : il l’a trouvé au lit avec quelqu’un d’autre. Susan réprime difficilement un sourire, sauf quand Karl se jette soudain dans ses bras pour pleurer sur son épaule. Elle lui propose alors de se joindre à elle pour la fête d’anniversaire de Julie. Pour la remercier, Karl la serre à nouveau contre lui.
Mike et Susan sont ensemble - encore - quand Mike laisse échapper un premier ‘‘je t’aime’’. Il lui dit qu’il comprend bien qu’elle ne soit pas prête à lui rendre la pareille. Une petite phrase qui déclenche un argument. Mike laisse entendre qu’il pense que Susan pourrait avoir encore des sentiments pour Karl... Elle lui propose de venir lui aussi à l’anniversaire de Julie afin qu’il constate lui-même qu’il n’y a plus rien entre elle et son ex.
A la fête, Susan a la surprise de voir débarquer Edie... Invitée par Karl, puisque Susan amenait elle aussi un compagnon. La soirée prend vraiment un tour étrange quand Susan découvre tout-à-coup que Karl avait déjà couché avec Edie... pendant qu’ils étaient encore mariés ! Son tour de chant au karaoké sur ‘New York, New York’ prend alors un tour très... haineux. Qui vient presque comme une conversation des soupçons de Mike...
Le lendemain, Karl vient s’excuser de l’avoir encore blessée. Surtout, il lui propose de relancer leur couple et de revenir s’installer à la maison. Susan est alors ravie de découvrir... qu’elle n’en a aucune envie et qu’elle ne ressent plus rien pour Karl. Elle se précipite alors chez Mike et y va de son ‘‘je t’aime’’.

Lynette

Le soir venu, Lynette essaie de préparer sa journée du lendemain, mais peu difficilement compter sur la collaboration de Tom, épuisé. Mais pourtant, celui-ci doit finalement se relever car il a oublier de préparer la machine à café pour le lendemain. A ce moment précis, Claire est en bas pour faire tourner une machine. Devant celle-ci, elle décide d’y glisser son peignoir et trotte donc entièrement nue jusqu’à l’escalier pour rejoindre sa chambre. C’est alors qu’elle croise Tom dans l’escalier !
Quand celui-ci remonte, la fatigue oubliée, il saute sur sa femme, l’embrasse passionnément et commence des activités nocturnes.
Mais, le lendemain matin, lorsque Claire lui présente ses excuses pour l’incident dont Tom ne lui a pas parlé, Lynette n’est pas ravie d’apprendre que son mari lui a fait l’amour juste après avoir vu leur nounou nue...
En repartant du centre commercial de Fairview, Lynette amène sur la table le sujet de Claire. Mais Tom refuse d’admettre qu’il est attiré par elle. Lynette arrête alors la voiture devant la barrière de sortie du parking, bloquant le passage, attendant qu’il passe aux aveux...
Mais ceux-ci ne règlent pas vraiment les choses puisque dès le lendemain matin, Lynette surprend Tom alors que son regard se perd dans la poitrine généreuse de Claire, penchée vers lui. Devant les regard sombre de Lynette, il prend une décision et annonce à Claire que la famille va maintenant devoir se passer de ses services...

« Nous sommes tous à la recherche de quelqu’un. Cette personne spéciale qui saura nous donner ce qui manque à nos vies. Du compagnonnage, » comme le fait George pour Bree devant un Rex qui cache mal son malaise. « De l’assistance, » comme le faisait Claire pour les Scavo maintenant à la recherche d’une nouvelle nounou ‘‘pas jolie si possible’’. « Ou de la sécurité, » telle que celle, financière, qu’offre Carlos à Gabrielle. « Et parfois, si on cherche vraiment très bien, on peut trouver quelqu’un qui nous offre les trois. » Et c’est là ce que Susan pense de Mike.
« Oui, nous sommes tous à la recherche de quelqu’un. Et si on ne parvient pas à le trouver, on ne peut qu’espérer que lui nous trouve. »
Dans les bois, un jeune homme fait son jogging avec son chien. Et c’est celui-ci qui découvre soudain le corps de Martha Hubert...


Marc Cherry l’a reconnu lui-même : toutes les intrigues formidables qu’il avait prévu d’étaler sur l’intégralité de la saison étaient épuisées vers le dixième épisode. Il avait découvert à quel point une série d’une heure est gourmande et exigeante en rebondissements pour tenir sur la durée. Mais il ne faudrait pas que la franchise de Cherry soit l’arbre qui cache la forêt. Cette révélation est apparue aux yeux de bien des showrunners au moment où ils avaient les deux mains dans le cambouis, et la quasi-totalité des séries sont, pendant la courte pause de l’été, vaguement planifiées jusqu’à la mi-saison laissant une large place à l’inspiration et à l’improvisation. Un art délicat, composante impérative de l’écriture sérielle et qu’on méprise souvent en oubliant qu’aucune série, et surtout pas la mieux planifiée du monde, ne peut faire l’économie de plages de tâtonnement. Demandez à J. Michael Straczynski combien de départs surprise d’acteur l’ont obligé à revoir son arc à la volée. Je n’ai pour ma part pas peur de l’affirmer :

C’est beau un showrunner qui rame !

Le plus gros problème que l’improvisation peut poser, c’est celui de découvrir qu’on s’est précédemment engagé dans une impasse et qu’il va falloir, le plus discrètement possible, faire marche arrière sur la pointe des pieds. Le gros problème de cet épisode est que c’est là ce qui se passe, peu ou prou, dans quatre des intrigues présentées. Alors forcément, même dans les cas ou les remises en cause sont brillamment amenées, cela se voit. Et puis, on en vient à se demander si l’auteur de l’épisode précédent a jamais rencontré David Schulner, l’auteur de celui-ci, tant certaines des contradictions sont violentes.
La plus flagrante et la plus agaçante concerne Gabrielle. A la fin de ‘‘Come back to me’’, ivre de vengeance, elle jetait au feu le passeport de Carlos. Au terme de ‘‘Move on’’, elle restitue le passeport, à peine écorné par les flammes qu’on a vu le dévorer, à son avocat.
La plus incongrue concerne Paul. Après avoir enterré précautionneusement Martha, il décide soudain qu’il a besoin de divertir les soupçons et la déterre pour en retirer des preuves. Et bien sûr, il réalise un travail de sagouin qui fait qu’on retrouve le corps tout de suite après alors qu’il reposait tranquille depuis une semaine. Mais bien sûr !
A force de les accumuler, le spectateur en vient à en être très peu réceptif aux reculades qui n’ont rien à voir avec la panique dans la writing room mais avec des contrats, tel que celui de Marla Sokoloff pour trois épisodes qui conduit naturellement à la mise hors-jeu de son personnage qu’on aurait peut-être, alors, pu se passer d’introduire il y a trois épisodes comme l’élément sans lequel le foyer Scavo ne pourrait pas survivre.
Ou encore à ces reculades qui sont celles de personnages et qui s’intègre dans une véritable caractérisation.
On aurait tord de voir le changement perceptible de Bree par rapport à sa tirade haineuse de la fin de l’épisode précédent comme le résultat d’un manque de maîtrise scénaristique, même si l’ambiance de panique générale à bord n’aide pas. C’est bien une inclination naturelle que de réagir violemment sous l’impulsion de la colère avant que les sentiments ne prennent peu à peu le dessus, quoi qu’il soit pénible de l’admettre par fierté. C’est le trait de génie de cet épisode que de faire sortir cette vérité à Bree en la confrontant à un personnage encore plus jusqu’au-boutiste qu’elle, et qui, lui, a le cœur sec : son fils, Andrew. En se répondant l’un à l’autre, ces deux personnages là se définissent de plus en plus et on ne s’en plaindra pas.

Pour en revenir à la série dans une approche plus globale, il est incontestable que sa gestion de la continuité est parfois des plus chaotique, et cet épisode en restera l’exemple le plus flagrant. Il apparaît clairement que Marc Cherry a progressé d’épisode en épisode dans la gestion globale de l’œuvre, tandis qu’au commencement de la saison, il naviguait plus franchement à vue, épisode après épisode. Mais c’est précisément l’épuisement narratif de la story-line Mary-Alice, qui a quelque peu pris Cherry par surprise, qui lui fit prendre conscience qu’il était nécessaire d’améliorer sa vision d’ensemble. Si bien qu’on a vu les choses s’améliorer progressivement et qu’on ne tardera pas à voir les signes d’une planification plus raisonnée...

Wisteria Lane’s Gossip

- Réaction amusante, intéressante et instructive de George lorsque Bree indique à Andrew qu’elle n’a pas l’intention d’avoir de relations sexuelles avec lui tant qu’elle est mariée. Ce n’était visiblement pas ce sur quoi il comptait...

- Harriet Sansom Harris fait avec cet épisode une arrivée remarquée dans le rôle de Felicia Tillman, la sœur de Martha Hubert. Les lecteurs de la Ligue des Téléspectateurs extraordinaires se souviennent probablement de ses apparitions dans Millennium et surtout dans l’épisode Eve de la première saison de X-Files.
La mort de Martha Hubert, si elle donnait lieu à un excellent épisode, pouvait inquiéter car la série perdait là un de ses personnages les plus truculent. Pourtant, c’était aussi un bon choix car le principal danger de Mrs. Hubert était sans doute de finir par être aussi surfaite que la voisine de Samantha dans Ma Sorcière Bien Aimée. Et puis, surtout, cette disparition aura été donc l’occasion d’amener ce personnage tout aussi brillant.


Au premier visionnage, les problèmes de continuité sont très agaçants. Au deuxième, on pourra plus facilement mettre cela de coté pour apprécier un épisode largement sur le dessus du panier de la première saison. La série déploie tout son potentiel comique. Parmi les idées intéressantes qui ponctuent l’épisode, on notera ce conflit chez les Scavo décidément de plus en plus humains et attachants, et le dérapage (mais qu’est-ce qui ne dérape pas, avec elle ?) incontrôlé qu’un premier je t’aime provoque dans le couple de Susan.