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1.07 - The Breaking Point
La Mort
Point de Rupture
lundi 26 juillet 2004, par
La Easy continue sa progression dans les Ardennes en direction de Foy, où les Allemands sont retranchés. Mais la Mort hante le bois Jacques...
Une fois n’est pas coutume, les vétérans nous parlent avant le générique. Pourquoi ce changement ? Aucune idée ; peut-être pour marquer cet épisode époustouflant. Car cette fois, c’est directement de la mort dont il est question et du trouble qui assaille les survivants ; car comme il nous sera dit plus tard, personne ne sort indemne.
Pourtant, France 2 va réussir à nous gâcher cela. Et ce, par l’intermédiaire d’une incroyable connerie. En effet, durant la quasi totalité de la séquence, le bandeau « déconseillé aux moins de 10 ans » va se superposer à la seconde ligne de sous-titres la rendant illisible. Du beau travail vraiment. Alors que les solutions étaient nombreuses : ne pas mettre le bandeau et juste le logo « -10 » ; si ce n’était pas possible, attendre le générique pour mettre le bandeau... Et qu’on ne me sorte pas l’excuse du CSA, car elle serait vraiment mal venue. Toujours est-il que la chaîne a une fois de plus fait montre de son incompétence désormais notoire.
L’action suit l’épisode précédent Bastogne (1.06) puisque nous revenons le 2 janvier 1945, dans le Bois Jacques qu’arpente la Easy. Cette fois-ci, c’est l’Adjudant-chef Carewood Lipton qui va nous accompagner dans l’aventure. Lipton représente la solidarité entre soldats ; cette solidarité qui fait que chacun prend soin de son compagnon et se bat aussi pour lui ; cette solidarité qui est le seul garant de l’unité du 506e et de sa victoire.
Lors d’une reconnaissance, Hoobler tue un Allemand qui passait à cheval et récupère sur lui le fameux Luger qui cherchait tant depuis le Débarquement. Tout heureux qu’il est, il raconte son exploit à tous et en oublie une règle élémentaire de sécurité : ne pas jouer avec une arme chargée. Il se blesse mortellement à la jambe et la Easy perd bêtement l’un de ses soldats ; sans compter le trouble que cela sème au sein de la compagnie.
Car il n’y a personne pour recadrer tout le monde. Le Lieutenant Dike, nouveau commandant de la Easy, est un incompétent de première - eh oui, encore un... - nommé à ce poste parce qu’il est le fils d’un gros bonnet. Absolument pas prêt pour ce poste - il sort tout juste de Yale - il ne prend jamais aucune décision ; car même s’il s’agit d’un incapable, il est suffisamment intelligent pour ne pas se mouiller en prenant de mauvaises décisions. Par contre, c’est un vrai tire-au-flanc, qui cherche toute les occasions possibles pour quitter le terrain d’opération, laissant ses hommes, qui le cherchent partout en vain, livrés à eux-mêmes. Il faut alors tenter de ressentir la même chose que ces soldats abandonnés au froid et aux bombardements par celui qui est sensé les guider.
Lipton prend sur lui et va même jusqu’à le défendre, car il lui faut maintenir coûte que coûte la cohésion des troupes. Surtout que celui qui serait le plus à même de remplacer Dike, le Lt Compton, ne va pas bien. Sa blessure en hollande l’a transformé et son comportement est parfois assez incohérent - comme lorsqu’il va voir chaque soldat pour lui dire de faire attention et de ne pas faire comme Hoobler ; « Pas de bêtise, hein ? ». Winters ne peut, à son grand regret, pas le remplacer.
Mis à part ce trublion, tout semble aller bien finalement. Nixon, qui a normalement un billet de retour pour les USA, choisit de ne pas y aller, préférant rester avec ses hommes. Le Colonel Sink fait filmer les hommes pour montrer qu’ils vont bien au pays. Joe Toye revient de l’antenne médicale ce qui nous donne droit à une revue d’effectifs des blessures de guerre de chacun. Les soldats sont heureux d’être ensemble. Ils forment quasiment une famille. Et c’est ce qui peut les sauver dans les moments difficiles.
Il est alors tant de se mettre en mouvement pour gagner Foy. Seule une partie de la Easy est détachée, l’autre restant avec la Dogue du désormais célèbre Lt Ronald Speirs. Car les histoires à son sujet courent toujours, poussant les soldats à refuser ses cigarettes - voir les chapitres précédents.
La E-Compagny retrouve ses anciennes positions, laissées en piteux état par le bataillon passé après elle. Les Allemands se terrent dans Foy. Alors que Dike met les voiles, la Easy s’installe dans les différents trous anti-obus. Mais n’a pas le temps de terminer que les Allemands débutent le pilonnage de la zone. D’un coup, c’est un orage de feu et une pluie de terre qui s’abat sur les hommes. Lipton lui, étrangement, rigole ; parce qu’il repense à son enfance-t-il. Et cela est pour le moins incongru ; on peut sans doute penser que ce sont les nerfs qui ont lâché, causant ce fou rire inapproprié. Car non loin de là, Toye vient de se faire arracher la jambe et hurle à l’aide ; il est bon pour retourner définitive à l’infirmerie. Durant l’accalmie, on tente d’évacuer les blessés le plus vite possible : il ne faut pas que les autres soldats voient les blessures et entendent les cris trop longtemps. Car la guerre est aussi psychologique : si les soldats perdent le moral, ils perdent la guerre. Cela nous est sans cesse rappelé au cours de l’épisode, dans tous les faits et gestes de chacun.
Et lorsque le pilonnage reprend, Lipton ne rit plus. Surtout quand Dike surgit pour lui annoncer qu’il va chercher des renforts ; il laisse tomber tout le monde pour aller se planquer. La Easy perd aussi sur ce coup plusieurs de ses meilleurs hommes. Garnere tout d’abord, dont la jambe est déchiqueté par un éclat d’obus alors qu’il portait secours à Toye. Compton aussi, qui vit mal la perte de ces deux amis - les deux précédents - et se retire du front ; on le sens brisé et absolument plus en état de mener sa section, alors qu’il a été décoré lors du Débarquement pour la prise des canons. Comme un château de carte, la Easy se commence à se désagréger. Car Malarkey avait pour meilleurs amis les trois précédents ; alors forcement, lui aussi va mal. Et cerise sûr le gâteau, avec le départ de Compton, il ne reste plus que Dike pour commander... C’est donc Lipton qui va au charbon et tente de souder les rangs. Et ils en ont besoin.
Car les Allemands pilonnent une troisième. Il n’y aura pas de répit tant que Foy sera occupée. Précédemment, on avait décrit Luz comme une type au « cul bordé de nouilles » : l’expression n’a jamais été aussi vrai qu’à cet instant. Coup sur coup, il est échappe à la mort pour n’avoir pas rampé assez vite jusqu’à un abris - où Muck et Pankela prennent un obus de plein fouet - puis voit un obus atterrir dans l’abris où il se trouve avec Lipton, mais sans exploser. Pourtant, cela n’a pas l’air de l’émouvoir plus que cela.
Lipton est au four et au moulin, faisant évacué un soldat qui tentait de creuse un trou avec ses mains dans le sol gelé ; les bombardements l’ont rendu fou mais, encore une fois, il ne faut pas que sa folie contamine les autres. En tant que spectateur, on se demande comment ces hommes ont pu résister à tout cela sans chercher à prendre la poudre d’escampette. A chaque rafale adverse, des soldats hurlent sous la douleur de leurs membres déchiquetés, alors que d’autres deviennent fous. Lipton décrit cette période comme la pire qu’ait connu la Easy durant la guerre.
Si ce n’est pas l’enfer, ça y ressemble.
La seule issue est donc de prendre Foy d’assaut. Mais malgré toute la bonne volonté dont il fait preuve, Lipton craint que tout le monde n’y reste et va voir Winters pour lui demander de remplacer Dike. Ce qu’il fait est dangereux, car il risque la cour martiale pour insubordination. Mais Winters le renvoie, signifiant par-là même son impuissance.
Tout le monde est conscient que la Easy court à sa perte, mais personne ne peut rien faire. C’est tout bonnement hallucinant. La vie de dizaines de soldats va se jouer avec des dés pipés par des gros bonnets de l’état-major. C’est écœurant. Et cela renforce l’admiration, mais aussi l’affection, que le spectateur porte à ces soldats.
D’autant plus que l’assaut se révèle périlleux : 250m de champs à traverser, totalement à découvert. Winters donne des consignes précises à Dike qui ne semble absolument pas les enregistrer. Cela s’annonce très mal.
Mais nous n’avons pas le temps de tergiverser que nous nus retrouvons au cœur de l’offensive. Les Allemands tirent avec tout ce qu’ils ont ; les Alliés tombent de toutes part. C’est la confusion, d’autant que Lipton donne des ordres contraires à Dike. Winters, resté en lisière de forêt pour diriger la manœuvre est surexcité : on le sent qui veut aller prêter main forte, mais il ne le peut pas. Il ne peut qu’assister au triste spectacle de ses hommes à découvert qui dérouillent et n’arrivent pas à progresser. Mais le Colonel Sink lui interdit de bouger ; et nous avons vu que celui-ci n’était pas un mauvais commandant et on peut penser qu’il agit au mieux du bataillon. Winters abat alors sa dernière carte : il convoque Speirs et l’envoie relever Dike.
Zorro revêt alors le costume de Ronald Speirs et s’élance dans la mêlée. Tel un super héros, il débarque près des soldats en fendant la fumée d’un obus qui vient d’exploser devant lui. L’entrée peut sembler théâtrale, et certainement que le réalisateur David Frankel en a rajouté. Pourtant, ce qui suit est encore plus hallucinant et pourtant véridique - du moins d’après ce qu’en ont raconté les soldats, et comme toute légende, elle a pu être légèrement déformée.
Toujours est-il que Speirs prend directement en mains les opérations et ces ordres clairs et précis redonnent de la volonté aux troupes : un chef est de nouveau à leur tête pour les motiver et les mener à la victoire. La Easy prend en tenaille les troupes allemandes mais il faut transmettre les ordres d’un camp à l’autre. C’est ce moment que choisit le Lt Speirs pour réaliser son coup d’éclat.
Bondissant de derrière le mur qui le protégeait, il profite de la fumée et de la réorganisation pour traverser les lignes ennemies et aller établir le contact avec l’autre section. Les Allemands en sont tellement abasourdis qu’ils ne tirent même pas. Mais le plus dément est qu’il refait le chemin le chemin inverse, cette fois sous les tirs des Allemands, mais sans être touché. Les ordres sont donnés : Foy est prise.
Malheureusement la fête est gâchée ; car dans leur empressement, les soldats de la Easy ont oublié un sniper qui abat plusieurs d’entre eux.
Sans doute inspiré par le miracle réussi par Speirs quelques minutes avant, Lipton court à découvert pour ouvrir une fenêtre de tir à Shifty Powers.
Cette fois, c’est réellement terminé.
Pour la première fois depuis longtemps, la Easy dort au chaud dans un couvent, ce qui permet aux hommes de trouver un peu de sérénité. Mais l’ambiance est morne car sur les 145 hommes que comptait la compagnie avant cette opération, il n’en reste plus que 65, soit moins de la moitié (45%) - parmi les morts, environ la moitié étaient dues aux conséquences du froid.
Une dernière discussion entre Lipton et Speirs nous apprend que toute la E-Compagny est ressoudée car elle est heureuse d’avoir un commandant de l’envergure de Speirs ; celui-ci, qui en entretenant son mythe, inspire le respect à ses hommes.
Pour ses faits d’armes dans les Ardennes, Lipton est nommé Lieutenant.
Il est désormais temps de gagner Haguenau, pour, l’espèrent-ils, leur dernière mission...
Peut-être bien le meilleur épisode de la série...
LTE || La Ligue des Téléspectateurs Extraordinaires