Accueil > Critiques > Critiques en Pause-pipi > Les Soprano > "La famille, c’est tout ce qu’il y a de plus important.."
3.11 - Pine Barrens
"La famille, c’est tout ce qu’il y a de plus important.."
L’enfer glacé
jeudi 17 avril 2003, par
Même si la famille, légitime et illégitime, est importante, elle est plus que jamais source de bien des troubles. Explications dans cette review.
D’emblée, il est bon de noter l’amour de David Chase pour les standards pop des années 50-60, tout ce qui peut passer sur les stations locales de l’Amérique entière. Résultat : Gloria entre en scène au début de l’épisode sur la chanson portant son nom, en fourrure et en cadence, tandis qu’Anthony Junior mate le clip de "TV &Coffee" de Blur pendant que Tony descend pour le dîner famillial. Comme quoi il n’y a pas que du mauvais goût chez les Soprano.
Par contre c’est l’une des premières fois où je sens un épisode des "Soprano" en totale roue libre. Peut-être que je n’ai pas vu le 2.13 où Tony avait une intoxication alimentaire, mais on avait l’impression que les épisodes précédents étaient construits autour de la vie de certains personnages et des rebondissements les concernant, assurant aux intrigues secondaires une relative stabilité, sinon un côté anecdotique. Tandis que là, on guette le moindre retournement de situation à chaque sonnerie de portable de Tony, et on en vient même à palper une de ses crises d’angoisse tant il est malmené.
Cet épisode se passe donc quelques jours après Noël, et Tony doit autant faire face aux problèmes de sa fille, pour lequel lui et Carmela s’inquiètent, à propos de sa relation avec Jackie ; à la thérapie de couple ; à une Gloria qui demande un peu plus d’attention, de temps commun et de partage ; et s’occuper des affaires d’un Russe mauvais payeur.
S’en occuper indirectement, puisqu’il envoie Paulie et Christopher. Et là, ce qui devait être un simple paiement de dette (5000 dollars) dérape avec la mauvaise volonté et le piteux état du Monsieur. Paulie le croyant mort après lui avoir sectionné la trachée, ils projettent de l’enterrer dans la forêt de Pine Barrens. Et là, Steve Buscemi (réalisateur de l’épisode) nous part dans un trip à la "Fargo" : mêmes gangsters minables, même histoire tournant autour du fric, et même désastre à la sortie.
Ainsi, cela s’avère vite un jour "sans" pour toute la famille : après que le Russe, ayant combattu en Tchétchénie et plus malin que la moyenne, leur aie filé entre les doigts, Paulie et Christopher se retrouvent perdus dans la forêt et ne retrouvent plus leur chemin. Les Petits Poucets finissent vite par énerver Tony, qui s’occupe d’aller les chercher avec Bobby Caldalla, alors que le Russe a pris leur voiture. Tony est ainsi empêché de rester un peu plus avec Gloria, alors qu’il s’était ramené avec trois heures de retard à son dîner ; au passage, il faut voir comment Tony s’excuse de ne pas manger chez lui avce la même expression d’innocence qu’un ours qui aurait englouti un troupeau de brebis pour son quatre-heures. Cela lui en coûtera un steak de boeuf dans le dos(mais il s’en remettra) et une Gloria très en colère. Et enfin, Meadow apprend que Jackie le trompe avce la Mère Noël du "Bada Bing !" avec qui il jouait à touche-pipi dans l’épisode précédent. Là, c’est Meadow qui touche le fond, pour reprendre l’expression que Tony lançait à Jackie dans le 3.10, avec une bonne grippe et une grosse déprime. On sent vraiment que là, le glas a sonné pour Jackie : une fois que Tony l’apprendra, Dieu sait dans quel état il peut ressortir.. Cependant, on est loin de plaindre Meadow, bien au contraire : la légère obsession, ainsi que le léger QI de Jackie étaient ressortis au cours de la partie de Scrabble, où il s’avérait incapable de faire des mots de plus de 3 lettres ("poo", merde, "ass", cul...). Enfin, n’oublions pas le glaucome pulmonaire d’un des fidèles des dîners de Tony, Monsieur De Angelis.
Un épisode dans l’ensemble hilarant, très bien mené, avec un subtil dosage des différentes intrigues, sans oublier des dialogies-caviar. Malgré le ridicule de Paulie et Christopher (son sachet de ketchup restera dans les annales), l’épisode est encore bien centré sur Tony, qui s’avère incapable de gérer une relation avec une femme exceptionnelle sous tous rapports, et avec qui l’alchimie fonctionne parfaitement parce qu’il a du respect pour elle et qu’elle a un statut de femme à part entière(en gros, tout le contraire d’Ilana). De plus, ça fait du bien de voir son machisme raser les murs, avec deux vents successifs dans la tronche (Annabella Sciorra est exceptionnelle dans cet épisode et donne un relief formidable à son personnage). Quant à la révélation finale, elle prouve que la thérapie de Melfi n’est pas sans intérêt : elle rapproche la relation avec Tony et les femmes de sa relation avec sa mère. Tony aurait-il le complexe d’Oedipe ??
En attendant, même si la famille, légitime et illégitime, est importante, elle est plus que jamais source de bien des troubles.
LTE || La Ligue des Téléspectateurs Extraordinaires