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3.13 - Army Of One

"Comment sauver cet enfant ?"

Une armée à moi seul

jeudi 1er mai 2003, par LordOfNoyze

Un season finale, en général, clot les intrigues de la saison et la relance dans une nouvelle direction. Cependant, beaucoup d’arcs avaient trouvé leur conclusion dans l’épisode précédent, alors qu’en est-il de la s3 des Soprano ?

Ce final des "Soprano" est à l’image de la série : assez imprévisible dans son déroulement, mais d’une extrême cohérence quant à l’évolution de ses personnages si particuliers. Et, refusant de n’en faire que l’épisode de la mort programmée et prévisible de Jackie Junior, David Chase scelle le destin des gosses Soprano... et remet en question la famille dans tous les sens du terme.

Mais revenons à l’évènement relativement majeur, car relativement attendu (ou plutôt redouté) par toute la famille mafieuse : celui de la mort du fils indigne, du dealer foireux, du bourreau de Meadow, j’ai nommé Jackie Junior. Le dilemne énoncé par Tony à la fin du dernier épisode, est résolu comme toujours de manière assez dégueulasse par Ralphie : pour éviter de se salir les mains, il le fera suivre puis tuer par un de ses hommes de main. Auparavant, Jackie aura cherché un vain soutien de la part de Tony, et se sera réfugié chez un dealer black père d’une petite fille qui aime jouer aux échecs. Une fois de plus, la partie d’échecs prend une signification métaphorique : Jackie a voulu jouer au "mafioso" sans connaître les règles, beau parleur mais piètre joueur. Cette scène, tendre et amusante à la vision, se révèlera être tragique, vu que c’est la dernière chose que Jackie aura fait avant de se faire abattre : il aura perdu une partie d’échecs. Il est enterré dans l’épisode, devant une Rosalie inconsolable (mention spéciale à la scène de l’enterrement où elle hurle à la mort, référence directe au début du "Parrain") et un Ralphie stoïque, incapable d’avoir de la compassion et plus occupé à consolider sa place auprès de Tony.

Ce qui nous amène à la dernière affaire de mafieux : l’esplanade étant une affaire conclue et concluante pour Tony, esplanade dont les frais de reconstruction ont été détournés par la Famille, Tony doit régler une affaire de 50000 dollars concernant un casse de banque organisé par des hommes de Paulie, mais réglé conjointement avec des hommes de Ralphie. Tony règlera la question en ne donnant que 13000 à Paulie. Paulie est furieux de voir que Tony le laisse tomber en faveur de Ralphie, qui lui a quand même manqué de respect et a tardé à lui présenter des excuses (cf. 3.08). Une affaire à suivre dans la 4e saison, vu qu’on nous présente un nouveau venu du nom de Johhny Sack. Autre affaire un peu laissée en plan pour cause de ridicule et nous ramenant un peu à la réalité morale, c’est-à-dire que Tony est avant tout un criminel notoire : on est de retour dans les locaux du FBI, qui n’arrive toujours pas à choper pour de bons motifs la bande à Tony. Alors quoi de mieux que de placer une indic pour qu’elle devienne l’amie de cette gamine d’Adrianna ??? C’est chose faite, et on assiste à la présentation commune dans le même épisode. Vont-ils réussir à arrêter Tony Soprano ?? Rien n’est moins sûr, après la pose asez mouvementée d’une lampe dans la maison des Soprano dans... le premier épisode de cette saison.

Mais comme je l’ai dit, cet épisode marque le destin des deux Soprano Junior, à savoir Anthony Junior et Meadow. L’épisode est plus centré sur Anthony, qui se fait renvoyer de son école après avoir triché à des examens de géométrie en faisant une opération "commando" avec un pote pour aller chercher les corrigés. Le proviseur lui fera croire qu’on l’a confondu grâce... à l’ADN retrouvé dans son urine !! Tony fait le projet de l’envoyer dans une école militaire, où le général-directeur, sévère et philosophe (un second rôle historique et hilarant !!), l’entretient sur la nécéssité de devenir "une armée à lui seul", d’apprendre la discipline. Mais tout bascule lorsqu’il fait une crise d’angoisse, au grand désespoir de Tony qui découvre ainsi chez son fils "le gène qui pourrit la vie des Soprano depuis plusieurs générations". La thérapie de Melfi avance ainsi à grands pas, par la même occasion : on découvre un Tony plus concerné par la vie de ses enfants qu’il n’en a l’air, lui qui est assez effacé et mène une vie de famille pour le moins décousue. Quant à Meadow, elle finit de prendre son recul en perturbant le récital de Junior en chantant Britney Spears (gasp !!!) ; dégoûtée par la vie de son père et par la mort de son ex, elle prend ses distances pour de bon.


Un "season finale" aussi tragique que burlesque, à l’image du ton de la série. On peut mêler dans la même scène rires et larmes : ainsi, le cri de douleur de Rosalie s’accompagne d’une apparition furtive de Junior qui prend la fuite style "Pieds Nickelés" avec Bobby Baccala lorsqu’il voit les fédéraux arrêter Silvio. On a aussi un Gandolfini en pleine forme, au bord des larmes, à bout de nerfs (il s’acharne à vouloir claquer la porte lorsqu’elle se rouvre après une dispute avec Carmela !!) et un scénario plus que jamais aussi cohérent qu’hétéroclite, rassemblant des passions et des destins antagonistes autour de la mort d’un proche. D’un côté ça rappelle un peu l’autre série-phare de HBO, à savoir "Six Feet Under", quant aux choix que doivent assumer les personnages. Et puis, autre surprise, au final la seule capable de s’affirmer en tant qu’armée à elle seule c’est Meadow, en s’éloignant de son père et en vivant une vie d’étudiante brillante, à mille lieues des combines foireuses de son père et de la lassitude placide et éternelle de sa mère. Une dernière chose, pour signaler un des finaux les plus décalés que j’ai vu dans une série télé : le récital de Junior se modifiant et changeant de musqiue comme on change de station radio.