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1.05 - And not a drop to drink

Retour à la source

Et pas une goutte a boire

lundi 30 janvier 2006, par Bradaviel

01 s’amuse, Charlie retombe sur terre et Reena perd pied.
Et tout cela grace à madame la flotte. Source de tous les maux et de toutes les solutions, mademoiselle H²O se montre ici dans toute sa majesté. Et personne ne va s’en plaindre.

Résumé

01 s’amuse. Avec l’insouciance qui le caractérise, il passe un moment agréable dans sa boite de nuit à piocher parmi les clientes pour son bon plaisir, sans avoir conscience que Charlie le guette à l’extérieur.

01 dans son élément

Et c’est d’ailleurs en l’attendant que ce dernier remarque dans son rétroviseur un homme au complet gris et à l’aura étrange. Mais il interrompt sa poursuite lorsqu’il tombe enfin sur sa cible : 01 vient de sortir en charmante compagnie à l’arrière de la boite.

L’insaisissable homme au complet gris

Mais pendant que celle-ci s’affaire sur son pantalon, 01 part dans un trip étrange : il se verse de l’eau sur la tête et disparaît sous les yeux horrifiés de sa partenaire, et sous ceux éberlués de Charlie. 01 vient de retourner dans l’Alphavers.
Mettant une de ses rares possessions au clou ( une bague ), Charlie est maintenant à la fois plus autonome et plus intégré à l’univers dans lequel il a atterri : il se procure enfin une voiture et un permis de conduire. Il met ensuite Karl au courant de sa découverte de la veille et celui-ci se demande immédiatement si 01 a le pouvoir de voyager à sa guise.
On retrouve d’ailleurs celui-ci dans le Gammavers. Pensif face à la mer, il croise un groupe de délégués gouvernementaux qui réfléchissent sur l’éventuelle construction d’une nouvelle prison dans ce monde.

Et alors que ça ne va toujours pas fort pour nos demoiselles, Reena étant séquestrée et torturée dans un hangar après son enlèvement et Jasmine assistant impuissante a la saisie des biens de Charlie, celui-ci continue son enquête. Après ce qu’il a vu la veille, il décide de retourner dans le désert parler à la fillette qu’il a vu en arrivant dans ce monde. Il apprend d’elle qu’en plus de voir ce qu’elle appelle des « invisibles » et de reconnaître qu’01 est familier du coin, elle et sa mère habitaient précédemment non loin de la, dans une ville du nom de Gillan, fantôme et noyée dans le sable depuis que la qualité de l’eau qui y circulait à été découverte comme étant la cause de nombreuses maladies.

La ville fantôme de Gillan

A l’époque, c’est un certain Erin Bridger qui a été reconnu coupable de la pollution et incarcéré. Mais Karl, bien au courant des faits, est convaincu que la Vexcor est derrière tout cela, l’usine corporatiste étant en amont de la ville.

Dans l’Alphavers, celle-ci continue de faire passer ses messages au Bétavers par l’intermédiaire de 01, gérant les inévitables et "insignifiantes" émeutes à coups de répression policière, car c’est « le prix des affaires ».

Une enquête lourde de sens

Dans le Bétavers, cette tension policière retombe pourtant alors que l’armée et les surveillances policières reprennent un niveau de normalité acceptable. Charlie et Karl, toujours suivis par l’insaisissable homme au complet gris, arrivent à retrouver la trace de Erin Bridger, où du moins le croient-ils : sa femme leur apprend que celui-ci est décédé quelques mois plus tôt peu après sa sortie de prison. Elle survit d’ailleurs en travaillant comme voyante et se refuse à tout commentaire, effrayée dés que Charlie évoque les invisibles ou le procès tronqué de son défunt mari.

Après quelque temps de recherche et de surveillance dans le bar de Paula, Charlie arrive enfin à confronter l’homme au complet gris, mais après l’avoir soulagé de son portefeuille, est à nouveau obligé de le laisser filer sous peine de subir le feu nourri de ses associés. Il apprends néanmoins que celui ci ne semble travailler ni pour la Vexcor, ni pour 01 Boxer, et mieux : il semble se soucier de lui. Mais il n’en apprendra pas plus, le portefeuille subtilisé étant étrangement vide.

C’est auprès lors d’un nouvel entretient avec la femme d’Erin Bridger, Andréa, qu’avancera alors son chemin : dans l‘affaire de la ville de Gillan, celle-ci a perdu son mari injustement accusé, sa fille, probablement morte des suites de l’eau contaminée et a été approchée puis taguée par la Vexcor par un procédé que Charlie connaît bien : la puce sous-cutanée. La seule chose qui lui reste ce sont ces visions d’un monde déchu, pollué et surpeuplé. Charlie réalise que comme lui, elle arrive a percevoir l’Alphavers.

Un coup de cutter pour la liberté

Il décide alors de l’expatrier en Patagonie pour lui permettre de retrouver une vie plus sereine, cette terre étant restée vide dans l’Alphavers, n’étant d’aucun intérêt pour la Vexcor. De plus, l’extraction de cette puce du poignet de Andréa va permettre à Charlie de faire venir à lui ceux qui s’occupent de la surveillance dans le Bétavers. Et ça ne rate pas. A peine la puce extraite et Andréa partie, un agent de la Vexcor débarque. Mais l’affrontement est trop rude pour Charlie qui s’en sort à peine, sans pouvoir soutirer aucun renseignement.

De son coté, 01 surveille Julius et réalise en scannant les messages qu’il transporte d’un univers a l’autre qu’il ne lui reste que 3 semaines avant l’établissement d’une liaison temporaire avec l’Alphavers. Apparemment il doit accélérer son agenda.

Celui du groupe armé qui a enlevé Reena semble par contre réglé comme une horloge : Ils brisent peu a peu ses barrières psychiques et émotionnelles. Apres le doute, la souffrance, les regrets et les remords, celle-ci consent finalement à se laisser abattre d’un balle dans la tête. Mais ils semble que le groupe ai d’autres projets pour elle.

Jasmine, enfin, à force d’attente, reçoit le testament holographique de Charlie. Et alors qu’elle se décide enfin à accepter sa disparition et se résout à le regarder, celui-ci part dans le désert, et dans un élan d’espoir, mimique le transfert de 01 en se versant de l’eau contaminée sur le visage.
Malheureusement ce geste n’a aucun effet.

De la solution naît le problème... et inversement

On le sait dés le pilote de la série, la Vexcor à créé un pont interdimentionnel pour pouvoir s’alimenter en ressources dans le Gammavers, en particulier en eau. Cet épisode nous montre qu’avant de procéder à ce transfert des expériences ont déjà été faites dans le Bétavers il y a plus d’une dizaine d’années. Mais en comptant avec l’attitude sans scrupules des dirigeants de cette firme, on n’est pas étonnés de voir que ce qui en a résulté est catastrophique, tant au niveau social qu’humain. Affaire étouffée de manière burlesque tellement les faits dont on accusa le bouc émissaire sont ridicules, ville désertée, maladies et morts causées par la pollution insouciante, altérations sensorielles, vies détruites ou bouleversées a jamais... Le Bétavers a de toute évidence été le théâtre d’expériences sans nom. Mais difficile pour le moment de bien réaliser ce qui s’est réellement passé. Les pierres que la fillette trouve ça et la ne représentent que de maigres indices, et la capacité de voir ces « invisibles » ne semble guère aider personne. Sauf Charlie, qui lui arrive a interpréter cela. Pour lui, c’est la preuve presque palpable du lien entre ce monde et celui d’où il vient.

On se calme, j’ai mon permis !

Quelque part, Charlie retombe enfin sur une terre de suppositions stables. La description qu’Andréa lui fait du monde qu’elle perçoit dans ses visions le rassure dans le sens ou non seulement il n’est plus le seul à avoir des visons, mais de plus, il sait désormais que qu’il n’est pas le seul à percevoir son monde. Les descriptions qu’Andréa fait de ses propres visons correspondent en effet à une description parfaite de l’Alphavers, et non à une vision personalisée issue de souvenirs ou de divagations propres à chacun. Charlie retrouve donc une amarre dans la réalité et n’a plus l’impression de chasser des fantômes.

Une vision de l’Alphavers

A partir de la, les actes instinctifs qu’il a entreprit jusqu’à présent, filatures, recoupements, suivit de pistes sans négligence, sont devenus des armes auxquelles il est maintenant capable de donner une direction. Et l’extraction de la puce de Andréa pour attirer l’agent de la Vexcor et lui soutirer des informations ciblées vont dans ce sens. Maintenant Charlie semble savoir ce qu’il cherche et surtout comment s’y prendre pour trouver les moyens d’y accéder. Si ce n’est qu’il lui manque encore quelques détails, dont la manière de vraiment rentrer chez lui, il parvient enfin presque a une certaine stabilité d’esprit qui va lui permettre de souffler et d’avoir au moins certains vrais repères sur ce qui se passe réellement.

Mécanismes de la terreur

Au contraire Reena est, elle, tombée dans de bien mauvaises mains. On la croyait sauvée par un groupe qui voulait la soustraire a la justice du Bétavers, mais ce n’est apparemment que pour pouvoir se servir d’elle.

Elle est ainsi séquestrée et soumise à un lavage de cerveau structuré des plus efficace. Dans un premier temps elle est torturée et noyée de questions auxquelles non seulement elle n’a pas de réponses, mais auxquelles de plus elle n’a pas le temps de répondre. Comme si la réponse n’avait pas autant d’importance que le fait de la lui faire oublier, si tant est qu’elle existe. C’est une sorte de remise à zéro de ses sources et de ses objectifs.
Elle est ensuite isolée, dans la peur constante d’un contact agressif. Un vigil passe devant sa fenêtre à intervalles irréguliers, lui faisant croire qu’il vient lui parler, la faire souffrir, et son seul moyen de trouver une stabilité rassurante est de s’enfouir dans des souvenirs réconfortants. Des souvenirs d’enfance qui resurgissent, sans doute aidés par cette musique calme lancinante, presque hypnotique qui rythme son incarcération.

L’enfance de Reena : son for intérieur

L’étape suivante lui permet de retrouver un semblant d’humanité. La bête apeurée qu’elle est devenue en à peine quelques jours parait trouver du réconfort en la personne d’un de ses ravisseurs qui semble vouloir lui venir en aide. Il lui apporte de quoi se réchauffer, et lui procure un contact humain, compréhensif, concerné. Il l’interroge sur ses peurs, sur ses doutes. Mais la raison de ses interrogations se révèle cruelle : elle ne sont finalement qu’un appât pour faire ressortir ses derniers sentiments de Reena et les briser. L’homme la rassure d’abord par des questions morales et éthiques et brise les dernières fondations de celles-ci en retournant contre elle l’esprit des victimes de ses actes. « Tu crois qu’il pleureront sur toi ? » lui répond t’il violement après l’avoir mise mentalement à nu et la laisse soudain dans un état de fragilité presque absolu, seule. Elle perd alors les derniers bastions de raison qui lui restent.

Fausse sympathie, vraie terreur

Ayant d’abord perdu ses repères physiques après son arrivée dans le Bétavers et maintenant ses repères mentaux, il ne reste plus rien qui raccroche Reena à la vie. Elle n’en attends plus rien et se trouve dans une impasse. C’est ainsi que lors de la dernière entrevue avec ses ravisseurs, elle renonce à essayer de se sauver d’une mort certaine et accepte ce destin comme étant sa seule issue. C’était la confirmation que ses ravisseurs attendaient pour pouvoir maintenant la former a leur cause.

Il est intéressant de constater qu’à travers ces événements les auteurs nous font ressentir à quel point la société encadre et étiquette les gens et leur comportements. Ainsi, Reena est au départ une combattante de la liberté, une militante active au service d’une cause, réticente à l’usage de la violence mais embarquée malgré elle dans des événements aux fondements juste mais aux conséquences désastreuses. Et ce sont ces mêmes conséquences qui vont l’amener à être kidnappée et ainsi devenir ce qu’elle a tout fait pour éviter dés le départ : une terroriste froide, un instrument de mort sans âme et sans conscience. La vision extérieure de ses actes ont étés récupérés par la société pour la transformer en ce qu’elle semble être et non en ce qu’elle est, comme une œuvre philosophique utilisée en propagande idéologique aveuglante. Les actes, les implications, les réflexions et les causes sont vidées de leur contenus, oblitérées pour n’en garder que les conséquences immédiates. On dit d’ailleurs à juste titre que ce n’est pas l’arme qui tue, mais l’homme qui l’utilise. Reena va ainsi devenir non plus la personne qui tient l’arme de destruction dans un but précis, mais simplement une arme vide, jetable, prête a être chargée et utilisée.

Animal ou être humain ?

Alors que cet épisode commence en nous montrant un 01 comme à son habitude : libre, sauvage, animal, insouciant, c’est aussi dans cet épisode que les premières étincelles d’humanité du personnage nous sont révélés.
Et quel plus bel endroit pour cela que le Gammavers ? Cette scène ne dure à peine que deux minutes mais elle est fondamentale

On y trouve un 01 pensif, loin de son extravagance habituelle. Il a les pieds dans l’eau, comme connecté avec l’environnement. Les cœurs musicaux qui entourent ces images évoquent même une spiritualité élevée, ou tout du moins un éveil psychique. Et alors que le groupe de responsable arrive à son niveau, le discours que tiens le porte parole concernant la construction d’une prison sur une île a portée de vue, une île qui semble de la plage être un paradis terrestre, il est coupé de ce groupe par un travelling circulaire, comme si ne serait-ce que l’évocation de ce projet le projette hors du cercle de discussion, avec des idées déjà arrêtées sur le sujet.
Il a en tête des images de barreaux, de prison vides, froides, modernes, avec cette constante surveillance évoquée par al tour de garde et la teinte de l’image, verte glaciale nous montre que ce n’est pas pour lui une perspective réjouissante.

01 comme vous ne l’avez encore jamais vu

Et alors qu’un rejet de fil barbelé est repoussé par les vague dans une direction opposée a la sienne, c’est comme si ses idées et une symbiose avec cet univers avaient déjà une volonté, une influence sur le futur.
Ici, 01 est concerné. Il est même attentif. Il apporte l’attention nécessaire a chaque élément. Il tourne la tête vers son interlocuteur avant même que celui-ci ne parle. Et ce qui relève du détail pour d’autres personne en est presque choquant pour la conception que nous avons de lui.
Et alors que cet interlocuteur lui demande « quelles lois devons nous contourner pour préserver notre style de vie », 01 répond sans équivoque : « n’en arrivons jamais a cela ». Pas de conditionnel, pas d’éventualité. Pour lui ce monde DOIT être protégé.

Autant 01 joue et s’amuse dans les autres dimensions, que ce soit de la vie, des sentiments ou de l’autorité ( on voit comment il traite Julius dans le Bétavers et comme il se comporte de manière désinvolte avec Essa en la suivant a quatre pattes comme un gentil toutou qui feint l’obéissance ), autant dans le Gammavers, il semble être un personnage mur et réfléchit.

Eau, source de vie

Cet épisode comprenant parmi les passages les plus beaux de la saga ( même si celle-ci en fourmille ) il est bon de noter qu’à l’image du titre de l’épisode, ce « et pas une goutte a boire » regorge d’eau. que ce soit dans ses thèmes ( la pollution de l’eau de Gillan, conséquence directe des agissement de la Vexcor ) mais aussi dans son visuel.

Ainsi, on n’est pas prés d’oublier cette fantastique scène de combat entre Charlie et l’agent de sécurité, qui dés le départ symbolise magnifiquement le combat pour cet élément essentiel. Ce combat, jamais confus malgré sa durée et sa complexité, se déroule au beau milieu de canalisations a forte pression. Nos protagonistes en ont d’ailleurs rapidement jusques aux mollets.

Un petit apercu de cette magnifique scène de combat

L’eau encadre les combattant à tel poins que même l’objectif de la caméra est éclaboussé, donnant des plans du plus bel effet. L’eau est dans cette scène tant un élément symbolique qu’une arme ( Charlie manque de mourir noyé ) ou un élément salvateur ( elle lui fournit a son tour une arme ).

La scène se termine d’ailleurs sur un travelling incroyable, nous montrant d’abord un égout ruisselant évoquant le sang d’une nation qui s’écoule inexorablement. La caméra s’élève alors, nous révèlent un Charlie blessé mais victorieux, les yeux aux ciel avec a ses pieds, cette eau presque rédemptrice, dont il épouse le chemin dans une perspective ouverte d’espoir et de possibilités.

De même concernant 01, l’eau est un élément décisif pour lui. On réalise enfin exactement de quelle manière il voyage de plan en plans, et cela semble aussi simple qu’une bouteille d’eau sur son visage. Et alors que quelque minutes plutôt, la caméra semble le suivre dansant comme un poisson dans un océan de corps, de sensations et de couleurs, c’est presque entièrement immergé dans la mer, un costume mouillé jusqu’à la taille qu’on nous révèle un début d’humanité chez lui.


A la fois source de tous les problèmes de part sa pénurie, sa contamination et son abondance déséquilibrée, l’eau, si cela restait encore a prouver, est un élément central dans la mythologie de Charlie jade. Elle est le vaisseau de communication, l’objet convoité corrupteur, la source de tous les maux et l’élémental purificateur. Et c’est pour cet élément que l’échiquier de nos personnages a une raison d’être.

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