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3.09 - Cycle Of Violence

School Hard

dimanche 20 mars 2005, par Sygbab

Le lycée, c’est déjà pas marrant en temps normal, alors quand en plus un climat hostile s’instaure, c’est franchement pas terrible.

Comme je le disais dans ma précédente review, la saison paraît parfois transitoire en ce sens qu’elle boucle les storylines entamées dès le pilote, ce qui est une bonne chose pour aller de l’avant. Or, et Elrix (maintenant tu vas devoir me payer la somme convenue pour que je te cite) le remarquait justement dans son commentaire de cette même review, ça l’est tout à fait moins au niveau de l’évolution de Johnny. Elle s’est amorcée depuis le final de la saison 2 et c’est le fil rouge de cette saison. Si avant personne ne croyait réellement à ses visions et que cela faisait de lui un exclu, c’était aussi plus facile à vivre d’une certaine manière, car maintenant que la population a accepté cet état de fait et le considère comme un héros local en quelque sorte, ça complique les choses. Non seulement il s’expose à la vindicte de ses détracteurs (tel Jéricho, pour le citer une fois de plus en exemple) dont certains se posent de sérieuses questions sur l’atteinte à la vie privée et la présomption d’innocence dans certains cas, mais aussi il doit faire face à de nouvelles responsabilités : ceux qui croient en lui font une confiance aveugle à ses visions. Hors, si celles-ci ne sont jamais fausses, il faut toujours que Johnny les interprète. Par conséquent, comme son jugement intervient, il peut commettre des erreurs, et c’est le cas dans cet épisode.

Après une représentation de la chorale à laquelle appartient Junior (c’est bien, au moins il a des activités extra-scolaires, sauf que ça sort un peu de nulle part, ça fait un petit peu prétexte mais on va dire que ce n’est pas très important), Johnny a une vision dans laquelle un jeune lycéen (de dos et avec une capuche) se promène avec un flingue dans les couloirs et fait mumuse avec. Johnny se précipite donc chez le principal pour lui faire part de son inquiétude, sauf qu’à ce moment-là il ne mesure pas encore les conséquences qu’auront sa précipitation. En effet, n’ayant pas vu le visage de l’adolescent(e), ils prennent la décision (lui, le principal et Rebecca, qui est à mon avis surtout là pour faire le lien avec l’épisode d’avant et montrer que Johnny a tiré une croix sur Sara, et aussi pour nous rappeler que Dana a été complètement kelleyrisée de la série - oui, il fallait que je le dise à un moment ou un autre, c’est fait) d’établir une liste de suspects potentiels. La méthode est simple : fermer l’école et fouiller les casiers des élèves. Ce passage fait froid dans le dos car comme le dit Johnny, n’importe qui pourrait être suspect : l’adolescence est un âge où l’on est généralement en colère, et la moindre petite action sortant du cadre “normal” peut être mal interprétée (comme la jeune fille qui brûle les photos de ses ex). Et la présomption d’innocence (encore elle) là-dedans ?

La deuxième étape porte encore plus atteinte à cette notion puisque les élèves qui sont sur la liste qui a été établie sont interrogés un à un pour que Johnny ait une vision d’eux. On a là un panel gratiné : celui qui fait joujou au tir, celui qui fait des courses de voiture, la gothique à la manque qui a la haine contre la société, celui qui lit des bouquins sur les serial killers ; bref, que des adolescents qui pourraient très bien mal tourner, mais comme tout adolescent qui n’est pas soutenu comme il le faut. La décision suivante est de renforcer le système de sécurité à l’entrée de l’école, et là ça commence à partir en sucette, car dès que le premier incident survient avec Derek - le jeune adolescent qui va servir de bouc émissaire en cristallisant toutes les craintes -, la prévention fait place à la répression, qui va se faire de plus en plus forte au cours de l’épisode. A partir d’une vision, la situation s’est complètement dégradée, et Johnny ne peut que constater les dégâts : alors qu’il ne sait même pas encore s’il y a eu des victimes dans sa vision, il a pourri le présent. Et la question qui est posée est judicieuse : la répression ferme est-elle une bonne solution pour des adolescents, à une époque de leur vie ou un rien peut les faire exploser et les faire basculer du mauvais côté de la barrière ? Selon Johnny, plus celle-ci sera forte moins cela aura d’effets sur les élèves qui se révolteront contre cette injustice de plus belle, et il n’a pas tort.

Dans le même ordre d’idée, le personnage de Derek est intéressant, car en l’espace de quelques jours, il est passé du statut d’élève brillant à personne recherchée ; la faute à un site internet où il ne pratique pas la langue de bois et critique sans vergogne le système éducatif et à une ambiance paranoïaque combinés. Du coup, il se retrouve à faire des choses stupides comme de balancer une bouteille à la tête d’un vigile qui pêche par excès de zèle, un canular avec une soi-disante bombe, et est considéré comme dangereux par le principal qui le renvoie... C’est bien là le problème dans cet épisode, c’est qu’il montre que l’accumulation de décisions qui paraissent logiques sur le court terme peuvent s’avérer néfastes sur le long terme ; et surtout que l’éducation des adolescents est quelque chose de compliqué : il n’y a pas de solution toute faite, il faut sans cesse remettre en cause ses décisions car certaines trop arbitraires empirent les choses plutôt que de les résoudre. En gros, c’est un petit peu comme Johnny avec ses visions... Comme quoi, réfléchir aux conséquences plutôt que de se laisser emporter par ses émotions (ici la crainte) ne peut pas faire de mal.

Mais un twist vient bouleverser la donne : Johnny se rend compte que sa vision se déroule dans une aile du bâtiment scolaire qui n’est encore qu’en projet de construction, donc dans un futur assez lointain. Cela a double fonction : il va premièrement identifier le jeune de sa vision : c’est en fait un camarade de Johnny à la chorale, qui sera victime d’abus sexuels du professeur, pédophile confirmé dans un autre Etat. Gros retournement de situation qui surprend car le problème ne venait finalement pas des élèves mais du corps enseignant même, qui n’a pas pris la peine de vérifier en profondeur les antécédents d’un homme qui a changé de nom grâce au système fédéral... On laisse nos enfants entre les mains de n’importe qui, c’est dingue ça ! L’autre fonction est de montrer que Johnny a parlé de sa vision bien trop vite - avant d’avoir tous les éléments en main - et il est trop tard pour enrayer le processus de sécurité qui a été mis en route. De ce fait, lorsque Derek retourne au lycée après avoir été réintégré, il se fait tirer dessus en mettant la main à la poche, car l’un des deux vigiles croit qu’il va sortir le flingue puisqu’il est le suspect numéro un. Encore un autre effet pervers de la vision de Johnny.

L’épisode se termine abruptement, sans que l’on sache si Derek survivra ou non, histoire de bien mettre en valeur le nouvel échec de Johnny. Tout ce qui est arrivé est parti d’un mauvais choix de sa part : parler de sa vision. Maintenant, il va sans doute s’y reprendre à deux fois avant d’aider les gens, vu son taux de réussite en ce moment...


Un épisode qui fourmille d’idées, malheureusement certaines ne sont qu’effleurées par manque de temps (le twist se place très tard dans l’épisode), et cela donne l’impression d’un manque de maîtrise. Ceci dit, le thème principal (la terreur amenant à la répression et ainsi de suite, d’ailleurs le titre est éloquent) - métaphore à peine voilée des Etats-Unis avec la peur du terrorisme - est assez bien traité. Le gros défaut cependant, c’est un manque de rythme flagrant dû à trop de parlotte. C’est bien simple, ils ne font que discuter à longueur d’épisode. Et ça c’est très lourd, parce qu’au bout d’un moment ça plombe l’ambiance.